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2.4 L ES MODELES D ’ OUVERTURE ET DE PROPAGATION DU GOLFE D ’A DEN

2.4.2 Les modèles de propagation de la dorsale de Carlsberg dans le golfe d’Aden

2.4.2.1 Les modèles de propagation continue

2.4.2.1.1 Modèles d’ouverture « en boutonnière »

Concernant la partie orientale du golfe, les données géophysiques obtenues durant la mission Encens-Sheba en 2000 (Leroy et al., 2004) (données bathymétriques, sismiques, gravimétriques, et magnétiques) ont permis de proposer un scénario d’ouverture du bassin océanique (d'Acremont, 2002).

La configuration de la marge avant accrétion a été reconstituée en corrélant les épaisseurs crustales déduites de la gravimétrie aux lignes isochrones. L’accrétion océanique semble s’être initiée de manière ponctuelle au niveau de centres d’accrétion localisés au niveau de 3 segments formant des fissures en tension (ouverture dite « en boutonnière ») (Bonatti, 1985; d'Acremont et

al., 2006). La segmentation de premier ordre, déterminée par les zones de fracture d’Alula-Fartak

et de Socotra, est restée stable pendant toute la période d’accrétion océanique. Au contraire, la segmentation de second ordre, contrôlée par la segmentation initiale de la marge, a évolué au cours du temps (Figure 2-25). L’axe initial de l’accrétion océanique comporte 3 segments.

CHAPITRE 2

Figure 2-25 : Schéma interprétatif de l’évolution des segments depuis la déchirure continentale et la formation de la TOC jusqu’à la première phase d’accrétion océanique (an 5d-5c-5) à l’Est du golfe

d’Aden. L’activité d’un propagateur avant la période an 5 est proposée. Le propagateur est abandonné à partir de l’anomalie 5, à partir de laquelle une zone transformante apparaît. Encart en

haut à gauche : ouverture en boutonnnière (d’Acremont et al., 2006)

Entre 17.6 et 10.95 Ma (anomalie 5d à 5), l’accrétion océanique du segment 1 se propage vers l’Est au détriment du segment 2 (Figure 2-25). A partir de 10.95 Ma, l’axe d’accrétion ne comporte plus que 2 segments. Cette configuration reste stable jusqu’à l’actuel puisqu’on retrouve dans le décalage des lignes isochrones l’emplacement actuel des failles transformantes (Figure 2-25). La forte asymétrie rencontrée entre les lignes isochrones de l’anomalie 5c et 5d au Nord et au Sud pourrait résulter du fonctionnement de ce propagateur.

2.4.2.1.2 Modèles d’ouverture de type « fente de tension »

La largueur de la croûte océanique ainsi que l’âge des plus vieilles anomalies magnétiques diminuent d’Est en Ouest ce qui a conduit de nombreux auteurs à proposer un modèle de progression de la ride sous forme d’une cassure à l’échelle de la lithosphère entière (« propagating

lithospheric crack ») (Ruegg et al., 1980; Cochran, 1981; Manighetti et al., 1997; Hubert-Ferrari et al., 2003; Huchon et Khanbari, 2003).

En utilisant les premières données géophysiques disponibles dans le golfe d’Aden, Laughton et al. (1970) suivis par Cochran (1981) proposèrent un mécanisme d’ouverture reposant sur une accrétion océanique continue au cours des 10 derniers millions d’années à un taux d’ouverture d’environ 1 cm/an (Laughton et al., 1970; Cochran, 1981). L’extension est alors accommodée par le jeu de failles transformantes parallèles à la direction du mouvement Arabie/Somalie. Celles-ci connectent des segments de rifts orientés N80°E à N100°E (Figure 2-26) (Courtillot et al., 1980; Ruegg et al., 1980).

EVOLUTION GEODYNAMIQUE DU GOLFE D’ADEN

Figure 2-26 : Un des premiers modèles d’ouverture du golfe de Tadjoura (Ruegg et al. ,1980)

De manière générale, les premiers scénarii d’ouverture du golfe d’Aden se sont focalisés sur la partie occidentale de celui-ci, c’est-à-dire dans le golfe de Tadjoura et dans la région de l’Afar puis ont été généralisés à l’ensemble du golfe.

Khanbari (2000) puis Huchon et Khanbari (2003) proposent un mécanisme d’ouverture de type « fente de tension » à l’échelle lithosphérique. La ride se propage vers l’WSW selon une direction d’extension N20°E déterminant ainsi un champ d’extension perpendiculaire à la direction de propagation (N160°E). La phase d’extension N160°E est alors tardi syn-rift et contemporaine de l’ouverture océanique. Selon ce modèle, elle ne résulte pas d’un changement de direction de mouvement de la plaque mais du mécanisme de propagation lui-même. Ce dernier implique également un diachronisme de l’ouverture, de plus en plus tardive vers l’Ouest puisque induite par la propagation de la ride océanique vers l’Ouest (voir également paragraphe 2.3.4.) (Figure 2-27) .

Figure 2-27 : Modèle d’ouverture du golfe d’Aden oriental par propagation oblique d’un rift océanique. A gauche, propagation de la fente à l’échelle lithosphérique. A droite, mise en place de

zones de transfert entre des zones de localisation des contraintes lors de l’océanisation (Huchon et Khanbari, 2003)

C’est en adoptant ce raisonnement qu’Hubert-Ferrari et al. (2003) ont modélisé la propagation de la ride en appliquant les principes de fracturation élastique (généralement utilisés pour des failles ou des fissures à petite échelle) à l’échelle de la lithosphère (Figure 2-28).

CHAPITRE 2

Figure 2-28 : Propagation de la ride d’Aden et formation des structures en échelon. (a) La cassure initiale dans le manteau supérieur suit la trajectoire principale du champ de contraintes déterminée par les conditions aux limites. (b) Une fracture s’est produite, la direction d’ouverture est déterminée par la direction du mouvement de la plaque arabique nouvellement formée. L’ouverture est oblique

par rapport à la fracture initiale et génère des directions de contraintes extensives dans la croûte différentes de celles du manteau supérieur. La propagation de la rupture dans ce champ de contraintes oblique produit des segments de rides et des failles en échellon (Hubert-Ferrari et al.,

2003)

Le modèle prédit bien la propagation d’Est en Ouest de la ride ainsi que sa forme générale. La fracturation initiale se produit le long d’un chemin perpendiculaire à la contrainte extensive maximale (Figure 2-28, a). Au niveau d’une lithosphère continentale, la flottabilité insuffisante du magma ne lui permet pas d’atteindre la surface et la ride océanique ne se forme pas immédiatement. Des failles normales et des grabens accommodent donc la déformation jusqu’à ce que la croûte soit suffisamment amincie pour que le magma atteigne la surface (Figure 2-28, b) (Hubert-Ferrari et al., 2003).

De nombreux autres modèles s’appuient sur le principe de propagation directe mais font intervenir des « pauses » au cours de la propagation de la ride.

2.4.2.2 Les modèles de propagation avec « pauses » le long des discontinuités principales