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Chapitre 1 : Introduction

1.4 Les bioaérosols dans les usines de biométhanisation et de compostage et la

1.4.1 Les microorganismes et les composés d’intérêt

1.4.1.1 Les bactéries

La quantité de bactéries présente dans l’air peut être un indicateur du niveau de contamination de l’environnement étudié. La recherche des bactéries totales par culture et par méthode moléculaire (qPCR) s’avère aujourd’hui indispensable dans la caractérisation des échantillons d’air. Dans les usines de compostage, un nombre total de 105 – 106 bactéries/m3 d’air ont été détectées par qPCR (Bru-Adan et al.,

2009; Moletta et al., 2007; Wheeler et al., 2001). Ce nombre est d’environ 3 X 104

UFC/m3 pour les bactéries cultivables (Bru-Adan et al., 2009). L’étude de Schäfer et al. a quant à elle démontré des concentrations de 3,4 X 104 à 1,6 X 108 bactéries/m3

d’air à l’aide de la coloration au 4',6-diamidino-2-phénylindole (DAPI) et d’un compte

en microscopie, cette variation étant attribuable aux sites échantillonnés (sites de livraison, chargement, zone de tamisage) (Schafer et al., 2013). Des concentrations de 106 à 109 bactéries/m3 d’air ont aussi été trouvées par coloration au DAPI par

Albrecht et al. lors des étapes de retournement du compost, ce qui appuie le fait que certaines activités génèrent plus de bioaérosols (Albrecht et al., 2007). Cette même étude a obtenu des comptes en bactéries cultivables entre 105 et 107 UFC/m3.

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microorganismes selon les opérations et les lieux de compostage, les espèces mésophiles étant présentes en plus grandes quantités (Fischer et al., 2000).

1.4.1.2 Les endotoxines des bactéries à Gram négatif

Les bactéries à Gram négatif produisent des endotoxines, qui sont des lipopolysaccharides (LPS) ancrés dans leur paroi (Thorn, 2001). Lors de la lyse des cellules, ces composés sont libérés et peuvent se retrouver dans les bioaérosols sous forme de particules inhalables. Il est connu que les endotoxines peuvent causer des symptômes respiratoires et des manifestations systémiques, comme une réponse inflammatoire générale démesurée. Les principaux effets causés par l’inhalation d’endotoxines sont l’allergie, la dyspnée, l’asthme, l’obstruction des voies aériennes, l’accélération du déclin de la fonction pulmonaire, l’hyper réactivité bronchique et le syndrome toxique d’exposition aux poussières organiques (STEPO) (Liebers et al., 2008; Rylander, 2002; Smit et al., 2008).

Rylander fait mention de la présence d’endotoxines dans plusieurs milieux de travail contenant de la matière organique favorisant la croissance bactérienne (Rylander, 2002). Les concentrations retrouvées varient entre 10-1 et 106 ng/m3

(Dutkiewicz, 1997; Olenchock et al., 1990). La détection des endotoxines grâce au lysat d’ameobocyte de limule (LAL) s’avère un outil essentiel pour la détermination de milieux de travail à risque, en plus de servir d’indicateur d’activité biologique.

Wouters et al. se sont intéressés aux concentrations d’endotoxines présentes dans les usines de compostage. Ils ont remarqué que les installations traitant des déchets résidentiels et mixtes avaient de plus fortes concentrations d’endotoxines dans l’air que les installations traitant des déchets verts. Ils ont aussi constaté que la quantité et la variabilité sont plus élevées lorsqu’il y a plus de poussière (Wouters

et al., 2000; Wouters et al., 2006). Puisque les usines de biométhanisation visitées

traitent des déchets résidentiels et commerciaux (restes de table, fruits et légumes non vendus, pain, feuilles mortes et branches), il est difficile de prédire si les quantités d’endotoxines seront plus élevées à l’une des deux usines.

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Un seuil limite d’exposition aux endotoxines de 50 unités d’endotoxines/m3

(UE/m3) (4,5 ng/m3) pour une période de huit heures a été proposé par le Comité

d’experts néerlandais sur les normes professionnelles du Conseil National de la Santé des Pays-Bas (Heederik, & Douwes, 1997). En 2010, ce seuil est passé à 90 UE/m3 (DECOS, 2010). Il faut toutefois prendre en note que le seuil limite n’est pas

une norme officielle, mais bien une recommandation. Un autre aspect à considérer est que les mesures effectuées sur le terrain ne sont qu’une « photo » de la situation en usine. Les variations en fonction des heures, des journées ou encore des mois ne sont pas compilées avec les mesures ponctuelles réalisées. À titre d’exemple, certains auteurs ont rapporté des concentrations médianes d’endotoxines de 6,5 X 103 UE/m3 durant l’été et de 2,6 X 104 UE/m3 durant l’hiver dans des porcheries du

Québec (Bonlokke et al., 2009), ce qui représente une différence d’un ordre de grandeur.

1.4.1.4 Saccharopolyspora rectivirgula

Il est connu que Saccharopolyspora rectivirgula, un actinomycète thermophile, est l’une des causes majeures du développement de l’alvéolite allergique extrinsèque chez les travailleurs (Pepys et al., 1990; Reboux et al., 2001; Schafer et al., 2013; Wery, 2014). Cette maladie pulmonaire d’hypersensibilité, lorsqu’elle est causée par l’inhalation d’actinomycètes, est également connue sous le nom de « poumon du fermier » (Douwes et al., 2003; Schafer et al., 2013). Schäfer

et al. ont montré, à l’aide de la qPCR, une forte présence de S. rectivirgula dans l’air

des usines de compostage, allant de 1,24 x 102 à 1,5 x 107 cellules/m3 (Schafer et al., 2013). Les MOP des usines de biométhanisation ne passant pas par une phase

thermophile, les concentrations retrouvées de S. rectivirgula pourraient être plus faibles que dans les usines de compostage.

1.4.1.5 Legionella spp.

Dans plusieurs pays, outre le Canada, des bactéries du genre Legionella ont été retrouvées dans le compost. (O'Connor et al., 2007; Steele et al., 1990; Whiley, & Bentham, 2011). Conza et al. ont réussi à montrer la présence de L. pneumophila dans l’air des usines de compostage (Lisa Conza et al., 2013). Lorsqu’inhalées sous forme de bioaérosols, ces bactéries sont responsables de la légionellose, une

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maladie grave causant des pneumonies, ou de la fièvre de Pontiac, maladie plus bénigne ressemblant à la grippe (C. H. Brown, 2016; Casati et al., 2010; L. Conza

et al., 2013). Deux études font mention de plusieurs cas de maladies pulmonaires

associées aux légionelles dans les usines de compostage ou lors du compostage domestique (Bru-Adan et al., 2009; Le Goff et al., 2010). Legionella est donc un microorganisme à surveiller dans les usines de biométhanisation puisque les matières premières et certaines activités sont semblables à celles des usines de compostage.

1.4.1.6 Les mycobactéries non tuberculeuses

Des mycobactéries non tuberculeuses (MNT) peuvent être retrouvées dans les MOP. Les MNT ne sont pas nécessairement pathogènes, mais l’inhalation de bioaérosols contenant ces microorganismes peut être à l’origine de plusieurs problèmes de santé, dont des infections des os, des poumons (pneumopathies d’hypersensibilité), des articulations, de la lymphe ou de la peau (Prendki et al., 2008). Jusqu’à présent, une seule étude s’est intéressée à la détection de bactéries du genre Mycobacterium dans l’air d’usines de compostage (Bonifait et al., Sous presse). Comme pour les légionelles, les MNT seront potentiellement trouvées dans l’air des usines de biométhanisation.

1.4.1.7 Les moisissures

Des moisissures, qui sont des champignons filamenteux, sont également retrouvées dans l’air des usines de compostage (Bunger et al., 2007). Ces microorganismes sont en partie responsables de la biodégradation des MOP. Il n’est donc pas surprenant de les retrouver en quantités importantes dans la matière en décomposition, dont le compost. La diversité fongique des bioaérosols issus du compost peut varier en fonction de la composition des MOP, des conditions météorologiques, de la saison et du type de traitement utilisé (Fischer et al., 2000). Les Ascomycètes, les Basidiomycètes, les Oomycètes et les Zygomycètes sont présents dans l’air de ces environnements. Toutefois, l’air extérieur peut contribuer à augmenter la diversité des moisissures retrouvées dans les usines de compostage (Bru-Adan et al., 2009) et de biométhanisation. Hryhorczuk et al. ont retrouvé trois genres importants de moisissures, soit Aspergillus, Penicillium et Cladosporium,

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dans l’air des usines de compostage (Hryhorczuk et al., 2001). Les limites d’exposition aux moisissures proposées dans la littérature sont de 1000 UFC/m3.

Néanmoins, des concentrations de 104 UFC/m3 sont généralement retrouvées dans

les usines de compostage (Wheeler et al., 2001).

1.4.1.8 Aspergillus fumigatus

Aspergillus fumigatus est une moisissure de la famille des Ascomycètes qui

est également retrouvée en abondance dans les usines de compostage (Albrecht et

al., 2007; Epstein et al., 2001). Elle peut causer plusieurs problèmes de santé, dont

une variété de maladies inflammatoires, en particulier chez les individus immunosupprimés. (Douwes et al., 2003; Shen et al., 2004; Taha et al., 2006). 80% des aspergilloses humaines sont causées par A. fumigatus. Kiviranta et al. ont conseillé en 1999 l’utilisation d’équipement de protection individuelle pour les travailleurs de sites d’enfouissement et d’usines de manutention des déchets. Millner et al. ont retrouvé entre 3,9 x 101 et 1,39 x 103 spores d'A. fumigatus par m3

d’air (Millner et al., 1980). Puisque les concentrations d’A. fumigatus varient en fonction des saisons, cette moisissure ne peut être utilisée comme indicateur pour d’autres bioaérosols (Fischer et al., 1998; Harrison, 2007; Recer et al., 2001; Sanchez-Monedero, & Stentiford, 2003).

1.4.1.9 Les (1,3) β-D-glucanes

Des réponses immunitaires spécifiques et non spécifiques sont causées quant à elles par des (1,3) β-D-glucanes, des polymères de haut poids moléculaire présents dans les spores de moisissures. (Douwes et al., 2000; Flannigan, & Miller, 1994; Weber et al., 1993). Ces composés sont également retrouvés dans les parois des plantes et d’autres espèces fongiques. Mis à part leur capacité d’induire des modifications dans les lymphocytes et d’enclencher la formation de granulomes, en marqueur caractéristique des pneumopathies d’hypersensibilité, les symptômes chez l’humain ne sont pas bien définis (Rylander, 2002).

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