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LES MESURES ALTERNATIVES A LA DETENTION PROVISOIRE

251. Evolution de la procédure pénale - La sévérité de la procédure pénale était déjà dénoncée largement au XVIIIe siècle par les intellectuels et la Révolution s'est empressée de souhaiter qu'on y mette fin. L'enquête était faire sommairement soit par les juges de paix, soit par des officiers publics. Le jury d'accusation était présidé par un juge, à savoir le "directeur du jury d'accusation". Rapidement, toutefois, ce système est apparu lourd et on a supprimé le jury, pour ne garder que le seul président du jury, devenu juge d'instruction.

Aujourd’hui, le rôle du juge d’instruction est plus qu’essentiel, bien que l’idée de sa suppression ait émergé dans les années deux mille (section 1), notamment avec la création du juge des libertés et de la détention qui a seul pouvoir de se prononcer sur les mesures alternatives à la détention provisoire (section 2).

SECTION 1 – LE ROLE DU JUGE D’INSTRUCTION EN PRESENCE D’UN MINEUR DELINQUANT MALADE

252. La séparation entre autorité de poursuite et autorité de jugement - Jusqu'alors le

"parquet" était surtout là pour donner son avis aux juges, éventuellement pour les inviter à mettre en oeuvre une enquête. Mais le pouvoir d'enquête et de jugement appartenait aux juges seuls. Le code d'instruction criminelle va donner au ministère public le pouvoir de procéder ou de faire procéder aux investigations sommaires, préalables à l'ouverture de l'enquête judiciaire, à savoir l'instruction. Il va également donner au procureur un rôle essentiel, décider des poursuites. Il y a là une séparation entre l'autorité de poursuite et l'autorité de jugement. Le juge d'instruction est donc une conjonction entre notre histoire ancienne et un emprunt à nos voisins. De l'ancien régime, il a gardé le secret, le rôle essentiel du procès verbal, les pouvoirs d'enquête étendus. Son rôle est donc actuellement prééminent (§1) et doit obligatoirement prendre en compte l’état de santé du mineur délinquant malade (§2).

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! @RC!

§1 – Le rôle prééminent du juge d’instruction

253. L’acte de saisine du juge d’instruction - L’acte de saisine est l’acte de procédure par

lequel le procureur de la République ou la personne qui se prétend victime de l’infraction demande qu’il soit instruit sur tels faits déterminés. « A compter de cet acte, qui délimite le

périmètre des investigations qu’aura à conduire le juge d’instruction, l’information est ouverte, la juridiction saisie »800. En d’autres termes, le juge d’instruction est saisi soit par le biais d’un réquisitoire, à fin d’informer, émanant du procureur de la République après enquête préliminaire ou enquête de flagrance, soit par une plainte avec constitution de partie civile de la victime, conformément à l’article 85 du Code de procédure pénale. Il est possible de noter que l’irrégularité de l’acte de saisine, emporte l’effondrement de toute information. Une fois le magistrat instructeur saisi, il sera tenu d’instruire le dossier à charge et à décharge (A), étant précisé que ses pouvoirs sont particulièrement vastes (B). Le magistrat instructeur sera tenu de prendre en considération la personnalité du mineur et particulièrement son état de santé. D’ailleurs, cette obligation s’inscrit pleinement dans la tendance législative et spécialement la loi du 15 août 2014 relative à l’individualisation des peines.

A-Une instruction à charge et à décharge

254. Les caractères de l’instruction - Lorsque les faits sont juridiquement constitués, qu’ils

soient graves ou de moindre importance et qu’ils concernent un mineur « primaire » ou « particulièrement connu », le procureur de la République peut engager des poursuites pénales à son encontre. Quand le parquet décide de saisir une juridiction d’instruction801, il est possible de noter qu’en matière criminelle802 aucune poursuite ne peut être exercée à l’encontre d’un mineur sans qu’une information préalable ait été effectuée, conformément à l’alinéa 1er de l’article 5 de l’Ordonnance du 2 février 1945, relative à l’enfance délinquante803. Si les faits, objet de l’enquête, qualifiés de criminels sont retenus, il est obligatoire qu’un juge d’instruction spécialisé au sein du tribunal de grande instance soit saisi.

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800 F. Desportes et L. Lazerges-Cousquer, Traité de procédure pénale, op. cit., p.1210, §1847.

801

D. Legrand, « Regard critique sur les propositions de réforme de l'instruction », AJ pénal, 15 sept.2006, p. 333.

802

J. Pradel, « Les personnes suspectes ou poursuivies après la loi du 15 juin 2000 : Évolution ou révolution ? », D. n°13, 29 mars 2001, p. 1039-1047.

803 « Aucune poursuite ne pourra être exercée en matière de crime contre les mineurs sans information

! @RP! Cependant, conformément à l’alinéa 2nd du même article804, il faut noter que le juge des enfants peut également être saisi. L’instruction805 est considérée comme étant une partie intégrante au procès pénal au sens étroit. Elle est en effet incomparablement plus sophistiquée que l’enquête806. Il s’agit de l’acte qui est marqué par le réquisitoire introductif807 ou la plainte avec constitution de partie civile808. Il détermine également le début de l’instance et délimite la saisine du juge d’instruction, même si celle-ci peut être étendue en cours d’information. L’instruction peut encore être définie comme étant « une enquête judiciaire, destinée à

préparer le dossier en vue du jugement »809.

255. L’obligation d’une information préalable en présence d’un mineur - Conformément

à l’article 3 de l’ordonnance du 2 février 1945, issue de la loi n°2011-939 du 10 août 2011810, il est mentionné que sont compétents «le tribunal pour enfants, le tribunal correctionnel pour

mineurs ou la cour d’assises des mineur du lieu de l’infraction, de la résidence du mineur ou de ses parents ou de son tuteur, du lieu où le mineur a été trouvé ou du lieu ou il a été placé à titre provisoire ou à titre définitif »811. En présence d’un mineur délinquant, l’objectif de la procédure d’instruction est double. Il s’agit de parvenir à la manifestation de la vérité en recherchant l’auteur d’un délit ou d’un crime, tout en établissant les éléments à charges et à décharges812. Puis, d’entamer dès le début de la procédure un processus éducatif qui se prolongera ultérieurement. Par ailleurs, « les mineurs bénéficient d’une protection particulière

au cours de la phase d’instruction contre certaines mesures pouvant leur être appliquées, compte tenu du fait que, au cours de cette phase, les pouvoirs des autorités publiques sont accrus par rapport à la phase de l’enquête 813». Ce qui en en présence d’un mineur délinquant malade physiquement, est d’autant plus important et nécessite que l’on prenne en compte son état de santé. En effet, il est primordial que le juge d’instruction connaisse !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

804 « En cas de délit, le procureur de la République en saisira, soit le juge d'instruction, soit par voie de requête

le juge des enfants et, à Paris, le président du tribunal pour enfants. Il pourra également saisir le tribunal pour enfants conformément à la procédure de présentation immédiate devant la juridiction pour mineurs prévue par l'article 14-2 ou par la procédure de convocation en justice prévue à l'article 8-3 ».

805 C. Guéry, « La loi du 5 mars 2007 et l'instruction préparatoire », AJ pénal, 17 sept. 2007, p. 105.

806 E. Allain, « Le rapport de la mission Beaume sur l'enquête pénale », AJ pénal, 7 août 2014, p. 332.

807 L. Costes, « Diffamation et nullité de l'assignation introductive d'instance », Rev. Lamy droit de l'immatériel n°83, 1er juin 2012, p. 54.

808 A. Giudicelli, « Domaine de la plainte avec constitution de partie civile », RSC, 15 mars 2000, p. 219.

809

Ph. Bonfils +3!WO!Y2,33+.2%'+X!K-)('!/$1!8(#$+-1X!)*L!<('O!(@DDS!Z!@>CS

810 Loi n° 2011-939 du 10 août 2011 sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et le jugement des mineurs, op. cit.

811 C. Guéry et P. Chambon, Droit et pratique de l’instruction préparatoire, coll. Dalloz Action, éd. Dalloz, 2013-2014, p. 68 § 22.01.

812

C. Mauro, « La suppression du juge d'instruction : éléments de droit comparé », AJ pénal 25 oct. 2010, p. 433.

813

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! @RQ!

parfaitement les conséquences de la pathologie du mineur afin, que l’enchainement éducatif soit compatible à la fois avec les faits qui lui sont reprochés mais également avec son état de santé.

256. Le choix des actes d’investigation - Procéder à une instruction, consiste à effectuer les

actes d’investigations nécessaires à la recherche de la vérité814. Il s’agit de l’étude du contenu de ces actes. Les choix des investigations sont encadrés légalement. Le juge d’instruction815 ou le juge des enfants doit respecter la ligne de conduite générale énoncée à l’alinéa 1er de l’article 81 du Code de procédure pénale816. En effet, cette obligation inhérente au statut du juge n’est qu’ « un aspect du devoir d’impartialité et de loyauté »817. Elle impose au magistrat de prendre en compte à la fois les intérêts ou arguments de l’accusation et ceux de la défense. « Le respect de cette obligation fait appel à des qualités de lucidité et d’honnêteté

intellectuelle qui relèvent avant tout de la déontologie »818. En d’autres termes, le juge d’instruction ou le juge des enfants procède, « conformément à la loi, à tous les actes

d’information819 qu’il juge utile à la manifestation de la vérité »820, ce qui implique qu’il a une obligation d’instruire à charge et à décharge.

257. L’instruction réalisée par le juge d’instruction ou le juge des enfants - Il est

important de souligner que durant le stade de l’instruction le mineur reste présumé innocent, jusqu’au jugement de ce dernier. Le magistrat en charge de l’enquête821 varie en fonction de la nature de l’infraction. En effet, il est possible de noter que l’instruction est comme pour les majeurs, obligatoire en matière criminelle conformément au premier alinéa de l’article 5 de l’ordonnance du 1945. Cependant, contrairement aux majeurs, l’instruction constitue la voie normale en matière correctionnelle, ainsi que pour les contraventions de cinquième classe. « Le caractère quasi obligatoire de l’instruction à l’égard des mineurs a pour objet de

s’assurer que des investigations sur la personnalité et l’environnement social et familial seront réalisées, même si les faits ne nécessitent aucune enquête particulière »822.

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814 F. L. Coste, « L'instruction : à la recherche des fondamentaux », AJ pénal, 2010, p. 422.

815

J. Pradel, « La disparition du juge d'instruction dans l'avant-projet du futur code de procédure pénale, D., 3 juin 2010, p. 1293.

816 « Le juge d'instruction procède, conformément à la loi, à tous les actes d'information qu'il juge utiles à la

manifestation de la vérité. Il instruit à charge et à décharge ». 817

F. Desportes et L. Lazerges-Cousquer, Traité de procédure pénale, op. cit., p. 1211, §1848.!

818 Ibid.

819 J. Pradel, « L'enquête pénale aujourd'hui. Vers une stabilisation dans l'équilibre ? », D., 2014, p.1647.

?CD!C. Guéry et P. Chambon, Droit et pratique de l’instruction préparatoire, op. cit., p. 109 § 31.01.!

821 M. Schwendener, « La direction d'enquête », AJ pénal, 2008, p. 447.

822

! @R>!

258. La procédure d’instruction – Elle doit, dans un premier temps, porter sur les

circonstances exactes dans lesquelles l’infraction a été commise et sur les conditions dans lesquelles les diverses personnes compromises y ont participé. Cette dernière est secrète, en ce sens que le public n’a pas accès, sous réserve du cas où la publicité est admise. En revanche, les parties, à savoir le mis en examen823, le témoin assisté824, ou la partie civile825, ont connaissance du dossier par l’intermédiaire de leur conseil dans la mesure où l’avocat reste obligatoire. L’instruction est écrite826 du fait que tout acte donne lieu à un procès verbal dont la régularité pourra être contestée. Aussi, depuis la loi du 4 janvier 1993827 et du 15 juin 2000828, « l’instruction tend à devenir contradictoire, du fait de la demande d’actes, de la

proposition de demandes à présenter aux experts, des observations sur le réquisitoire définitif lors de la clôture »829, etc. Conformément au premier alinéa de l’article 11 du Code de procédure pénale, « sauf dans le cas où la loi en dispose autrement et sans préjudice des

droits de la défense, la procédure en cours de l’enquête est secrète ». Cette dernière est tout

d’abord secrète830 à « l’égard des parties et notamment de la personne mise en examen, qui

n’est pas tenue au courant de sa marche, auquel elle n’est pas communiquée et qui ignorait tout des opérations faites hors sa présence »831. Pour un certain courant de la doctrine, cela est considéré moins grave depuis que l’avocat à un accès quasi permanent à la procédure.

Dans un second lieu, l’instruction est secrète car elle est faite dans le cabinet du juge d’instruction, hors la présence du public et de toute personne étrangère. « Exception faite de

la présence du greffier et le cas échéant de l’avocat, qui font partie de l’appareil de la justice, les entretiens avec le juge d’instruction ou le juge des enfants ne sont contrôlés par aucun témoin étranger à l’affaire »832. Enfin, il est nécessaire de noter que l’instruction est secrète en ce sens que les informations recueillies ne doivent être ni divulguées, ni publiées833, ni

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823 F. Fourment, Procédure pénale, op. cit. ; Ph. Conte et J. Larguier, Procédure pénale, op. cit. ; F. Debove, F. Falleti et E. Dupic, Précis de droit pénal et de procédure pénale, op. cit. ; A. Bruel et R. Gori, Pratiques et évolutions de la justice des mineurs : aperçus de clinique judiciaire, op. cit. ; C. Blatier, La délinquance du mineur, op. cit.

824 Ibid.

825 Ibid.!

826 V. Sizaire, « Quel modèle pour l'instruction ? », AJ pénal, 2009, p. 388.

827

Loi n° 93-2 du 4 janvier 1993 portant réforme de la procédure pénale, Jo n°0003 p. 215.

828 Loi n° 2000-516 du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes, op. cit.!

829

B. Bouloc et H. Matsopoulou, Droit pénal général et procédure pénale, Manuel Intégral concours, coll. Sirey, 19 éd., 2014, p.405-406, §623.

830

C. Giudicelli, « Le secret de l'instruction appliqué par le juge de l'instruction », AJ pénal, 2004, p.141.

831 C. Guéry et P. Chambon, Droit et pratique de l’instruction préparatoire, op. cit., p. 118 § 31.31.

832 Ibid.

833

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! @RR!

même communiquées aux tiers, par les personnes qui les ont dirigées ou qui y ont participées. C’est surtout cet aspect du secret qu’à visé le législateur dans le second alinéa de l’article 11 du Code procédure pénale834. En présence d’un mineur délinquant malade, il est possible de s’interroger concernant l’état de santé de ce dernier. En effet, il peut s’avérer important et primordial que l’avocat de la partie adverse ainsi que la partie civile ne soit pas informé de cet aspect, afin de respecter le secret médical, ainsi que la vie privée du mis en examen. C’est pendant le cours de l’enquête et de l’instruction, tant qu’elles ne sont pas terminées, que s’applique avec toute son intensité le secret édicté à l’article 11 du Code de procédure pénale. La divulgation de l’instruction835 est interdite pour de multiples raisons, la plus importante étant sans doute, l’intérêt d’une bonne administration de la justice. On admet que « celle-ci ne

peut être efficace que si sa marche, sa direction et ses opérations sont ignorées de tous ceux qui ont intérêt à fuir, à se cacher, à déformer la vérité ou à faire disparaître les indices, les instruments ou le fruit du crime ou du délit »836.

AEHD La réforme concernant le juge des enfants et la séparation des fonctions de

jugement et d’instruction – Concernant les différentes fonctions dont le juge des enfants

dispose, sont énoncées dans une décision du Conseil Constitutionnel837, ce dernier a censuré l’article L.251-3 du Code de l’organisation judiciaire838. De ce fait, depuis le 1er janvier 2013, il lui est impossible d’instruire l’affaire, puis d’être le magistrat de jugement de cette même affaire. Cette décision a été vivement critiquée par la doctrine. En effet, certains ont considéré qu’il « serait fâcheux d’écarter le juge des enfants de la juridiction chargée de choisir la

mesure opportune, alors que l’instruction à laquelle il a procédé et les contacts qu’il a eu avec le mineur et avec sa famille lui ont donné, sur la situation, des lumières que personne ne possède au même degré 839». Pourtant, selon la Haute juridiction, le juge qui mène l’enquête

et donc qui est à l’origine des différentes investigations ne peut plus être le juge qui jugera l’affaire. Face à un mineur délinquant malade physiquement, cela peut poser plus amples difficultés. Les connaissances de certains aspects techniques, sociaux, personnelles dû à la pathologie dont souffre l’enfant ne pourront pas être pris en compte par le magistrat de !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

834

« Toute personne qui concourt à cette procédure est tenue au secret professionnel dans les conditions et sous

les peines des articles 226-13 et 226-14 du code pénal ».

835 N. Le Coz, « L'audition des personnes soupçonnées dans les enquêtes pénales », AJ pénal, 2014, p.320.

836

J. M. Varaut, « Secret et transparence », Gaz. Pal., 13- 14 déc. 2002.

837

Cons. Constit, Déc. n° 2011-147 QPC du 08 juillet 2011 relative à la séparation des fonctions de justice en matière pénale.

838 « Le tribunal pour enfants est composé d'un juge des enfants, président, et de plusieurs assesseurs.

Le juge des enfants qui a renvoyé l'affaire devant le tribunal pour enfants ne peut présider cette juridiction ».!

839

! @RS! jugement du fait qu’il ne sera pas à l’origine des recherches. Cependant, ces informations sont capitales et doivent absolument être prises en compte autant dans l’intérêt de l’enfant que de celui de la société.!

Dans la pratique, plusieurs magistrats regrettent de ne pouvoir suivre correctement l’affaire. En effet, ils leur arrivent de prendre connaissance du dossier qu’ils doivent juger tardivement et donc de ce fait, il ne leur est pas possible de connaître parfaitement tous les éléments du dossier et de la personnalité du jeune. Le fait d’instruire puis de juger l’affaire permettait de connaître parfaitement le mineur, son passé, ainsi que sa famille840 et donc de prendre une décision adaptée à la situation. Actuellement, environ 40% des mineurs délinquants font également l’objet d’une mesure de protection, d’une mesure auprès des services de la sauvegarde de l’enfance841. Le juge des enfants ne s’occupe pas seulement des mineurs délinquants mais également des enfants en danger moral, de l’enfance malheureuse, etc.842. Cela peut en effet, poser plus amples problèmes en présence d’un mineur délinquant malade physiquement. En effet, il est impératif que le magistrat en charge de l’affaire connaisse parfaitement ce dernier ainsi que les diverses difficultés qu’il rencontre en plus de son parcours pénal, pour des questions de sécurité et afin de respecter la volonté du législateur lors de l’élaboration de l’ordonnance du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante.

Jusqu’à la décision du Conseil constitutionnel du 8 septembre 2011843, le primat de l’éducatif permettait de déroger au principe de la séparation des fonctions de juridiction et de jugement. Par cette décision, ce dernier met fin au cumul des fonctions d’instruction et de jugement du juge des enfants en matière correctionnelle. Le Conseil constitutionnel a déclaré l’inconstitutionnalité de ce cumul et a demandé une modification législative applicable le 1er janvier 2013. La loi du 26 décembre 2011844 modifie le Code de l’organisation judiciaire et

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840 Propos recueillis lors de différents entretiens auprès du parquet des mineurs de Valence (26) effectués lors de recherches dans le cadre de recherches universitaires, en février 2011.

841

Propos recueillis lors de différents entretiens auprès du juge des enfants du Tribunal de Grande Instance de Vienne (38), ainsi que le médecin chef de l’Etablissement pour mineurs de Meyzieu (69), dans le cadre de recherches universitaires durant l’année 2014.

842

Ordonnance n°58-1274 du 22 décembre 1958, relative à l’enfance en danger. Celle-ci a confirmé la tendance à centraliser entre les mains du juge des enfants tous les problèmes que pose l’inadaptation de la jeunesse en lui donnant compétence en matière d’assistance éducative.

843 Cons. Constit. Décision n°2011-147, du 8 juillet 2011.

844 Loi n°2011-1940 du 26 décembre 2011, visant à instaurer un service citoyen pour les mineurs délinquants, JO n°0299 du 27 décembre 2011 p. 22275.

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! @R?!

plus précisément l’alinéa 2 de l’article L. 251-3845, ainsi que l’alinéa 2 de l’article 24-1846 de l’ordonnance du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante.

260. Difficulté pour le juge des enfants dans l’application du principe - Dans la pratique,

du fait que le juge de jugement847, et donc celui qui choisit et prononce la peine, ne soit pas celui qui a pu avoir des contacts avec le jeune, peut créer des difficultés dans les choix