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Chapitre 1 : Etat de l’art des technologies de packaging des modules de puissance

1.5 Les performances et limitations

1.5.2 Les interconnexions

Ce sont les premières interfaces à être au contact des puces semi-conductrices. Leurs propriétés électriques et thermiques sont prédominantes pour l’implémentation des nouvelles générations de composants actifs.

1.5.2.1 Les problématiques du câblage

Les faces supérieures des puces semi-conductrices sont interconnectées au substrat par câblage via des fils et/ou rubans. Cette technologie présente des inconvénients majeurs sur les performances et la fiabilité des modules de puissance.

Concernant les performances, la structure du câblage contribue à l’insertion d’une inductance parasite de la boucle qui couplée avec la réduction des temps de transition est à l’origine du ralentissement des commutations et de fortes surtensions à l’ouverture tout en participant à l’augmentation de l’amplitude des oscillations qui suivent générées par les capacités parasites (Vmax=I.√(𝐿 𝐶⁄ )). L’inductance de la boucle peut atteindre jusqu’à 30 nH [110] avec des fils et sensiblement moins pour les rubans [111]. Pour diminuer ces éléments parasites, aussi bien inductifs que résistifs, plusieurs fils et/ou rubans sont associés en parallèle en fonction de la surface disponible sur la puce. Cependant, la multiplication de fils ou rubans créé un couplage électromagnétique entre eux qui provoque un déséquilibre dans la distribution du courant [112].

Ces éléments parasites ont aussi une incidence sur la fiabilité du module de puissance. Le couplage électromagnétique induit est également une source de contrainte mécanique en surface de la puce, notamment au niveau de la métallisation du composant [113]. Bien que la multiplication des fils ou l’utilisation de rubans augmente la surface de contact, les densités de courant restent localisées en quelques points et ne permettent pas une répartition homogène sur l’ensemble des électrodes ce qui renforce les contraintes thermomécaniques locales [114]. En plus des excursions thermiques non homogènes, les différences des coefficients de dilatation entre câblage et puce ainsi qu’entre câblage et substrat s’additionnent aux contraintes d’origine thermomécanique. Des travaux montrent que les encapsulants sont aussi source de contraintes mécaniques sur le câblage [44]. Deux solutions ont été proposées afin d’améliorer la fiabilité de la jonction entre le fils et la métallisation de la puce. La première consiste à encapsuler le pied du fils assemblé à la métallisation et la seconde à ajouter une interface tampon pour atténuer la différence entre les CTEs [63], [115]. Néanmoins le câblage demeure toujours l’un des points les plus sensibles dans le module de puissance. Il reste sujet à la casse par vieillissement et cyclages thermiques répétés. Généralement la rupture se fait par décollement ou fissuration du fils au niveau de son pied, du côté de la puce [116] comme cela est visible sur les photos présentées en Figure 1.25.

Des travaux montrent qu’après 600 cycles de vieillissement (cyclage passif), la résistance à la traction des fils et rubans est similaire. Cependant en fonction des matériaux utilisés, le câblage est plus ou moins résistant : la fissuration du câblage aluminium se fait en dessous de 600 cycles contrairement au cuivre qui se décolle après les 600 cycles [117].

(a) (b) (c) Figure 1.25 – Décollement (a) et fissurations (b) (c) de fils de câblage [115]

1.5.2.2 Les défauts entre la puce et le substrat

La face inférieure est directement interconnectée au substrat. Nous avons pu voir que la technologie initialement utilisée, toujours présente sur le marché, est la brasure. À cette technique d’assemblage s’ajoutent le frittage et la diffusion. Ces alternatives viennent répondre à certaines problématiques liées à la brasure, cependant sont-elles à la hauteur des attentes pour l’assemblage des dernières générations d’interrupteurs de puissance ? Avant de parler de défaillance, la conductivité électrique des brasures est approximativement dix fois plus faible que les pistes et matériaux conducteurs utilisés dans les modules. Il en est de même pour la conductivité thermique qui est quant à elle environ cinq fois plus faible. Les brasures génèrent des pertes par effet Joule et constituent un frein thermique dans la chaine dissipative.

Leurs températures de fusion ou d’assemblage nous obligent à nous intéresser uniquement aux brasures « haute température », au maximum de 350°C, qui sont plus difficiles à mettre en œuvre et plus coûteuses. De plus, les brasures sont sujettes au phénomène de recristallisation en fonction du temps et des cyclages. La recristallisation des brasures se propage généralement du bord jusqu’au centre du joint. Dans cette zone inter-granulaire apparaissent des « vides » favorisant la propagation des fissures dans le joint. Ce phénomène a tendance à s’initier sur les bords de la brasure jusqu’au centre [118] et vient augmenter la résistance électrique et thermique de l’interconnexion jusqu’à la rupture [119]. Des alliages comme le SABI (SnAgBiIn) et SACBSN (SnAgCuBiSbNi) [120] ainsi que l’utilisation de brasures plus épaisses [121] permettent d’augmenter dans une certaine mesure la résistance face aux fissurations, mais au détriment de la conductivité électrique et thermique.

(a) (b) (c)

Quant aux assemblages frittés, ils permettent d’obtenir une meilleure conductivité électrique et thermique que les brasures en supportant les températures de fonctionnement des composants à large bande interdite. Bien que ce type d’assemblage semble plus robuste qu’une brasure, le cyclage d’échantillons démontre que le frittage est sujet aux fissurations, jusqu’à la rupture, induites par les déformations viscoplastiques et la porosité du joint. Cette technologie d’assemblage est sujette aux déformations plastiques ; en somme, plus la température est élevée, plus l’assemblage est sensible aux déformations et sa résistance mécanique est faible. À cela s’ajoute les contraintes inter-granulaires qui avec le temps favorisent la formation de fissures dans la structure [122]. Il est démontré que l’application d’une pression plus importante lors de l’assemblage [123] et l’utilisation de particules d’argent nanométriques, plutôt que micrométriques, diminuent fortement la porosité [124]. Cependant, le volume des pores semble être un facteur mineur dans la résistance mécanique du joint contrairement à leur taille et forme [125].

(a) (b) (c)

Figure 1.27 – Nano (a) et micro (b) particules d’argent [125] et fissuration du joint fritté (c) [122]

L’assemblage par diffusion amène à des caractéristiques similaires à celles obtenues par frittage en termes de résistance mécanique [126]. Cependant, la diffusion du métal d’apport dans celui du substrat et de la puce créée des intermétalliques [127] qui viennent fragiliser la tenue mécanique de l’assemblage ; une couche barrière au niveau de la puce est nécessaire [128].

(a) (b)

Figure 1.28 – Assemblage par diffusion avec procédé optimisé (a) et avec une réaction incomplète de l’étain (b) [126]