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Les gels de Résorcinol/Formaldéhyde (RF) 1.2

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Le rapport entre la distance moyenne parcourue par une molécule entre deux chocs successifs, appelée libre parcours moyen et la taille des pores permet d’évaluer la conductivité thermique induite par la phase gazeuse du matériau. Ainsi, plus les pores seront de petite taille plus la conductivité thermique induite par la phase gazeuse sera faible. Dans le cas des aérogels, la taille des pores est souvent de l’ordre du libre parcours moyen des molécules d’air. Kn est alors supérieur à 1. Ce phénomène, appelé effet Knudsen, limite le mouvement des molécules d’air qui sont piégées dans le matériau. Ainsi, il présente des valeurs de conductivités thermiques inférieures à celle de l’air [13]. Nous pouvons donc conclure que dans le cas spécifique des aérogels, les contributions majoritaires à la conductivité thermique proviennent du mode de transport par phonon issu du réseau solide.

Les gels de Résorcinol/Formaldéhyde (RF)

1.2

Les aérogels de Résorcinol/Formaldéhyde 1.2.1

Aujourd’hui, les aérogels organiques à base de résorcinol formaldéhyde sont les plus courants. Ils sont également les principaux précurseurs utilisés pour l’élaboration d’aérogels de carbone. Ces gels sont obtenus par polycondensation en milieu aqueux du résorcinol (1,3-dihydroxybenzène) en présence de formaldéhyde. Le résorcinol est une molécule difonctionnelle dont les positions réactives (plus forte densité électronique) se situent sur les carbones 2, 4 et 6 du noyau aromatique. Le formaldéhyde est un carbonyle (caractère électrophile du carbone central) qui permet de relier deux noyaux aromatiques entre eux par des ponts méthylènes ou diméthylène-éther. La réaction du résorcinol avec le formaldéhyde s’effectue classiquement avec un rapport molaire 1:2 (1 mole de résorcinol pour 2 moles de formaldéhyde) en présence de catalyseur [2].

Classiquement, on utilise le carbonate de sodium (Na2CO3) en tant que catalyseur basique. Pekala a mis au point un protocole de synthèse qui consiste tout d’abord à faire réagir le précurseur de résorcinol avec le réactif formaldéhyde en présence du catalyseur Na2CO3, dans un solvant (eau ou acétone). La solution est ensuite placée dans une étuve entre 50°C et 70°C pour amorcer la réaction de gélification.

Au cours de cette synthèse, le résorcinol réagit avec le formaldéhyde pour former le résorcinol hydroxyméthylé. Puis, les groupes hydroxyméthyle se condensent entre eux pour former des clusters de taille nanométrique, qui se réticulent ensuite pour former un gel. Les résines phénoliques à base de phénol et de formaldéhyde sont appelées «Résole» ou «Novolaque» selon la présence respective de liaisons de type méthylène éther (–CH2OCH2–) ou de liaisons méthylène (–CH2–) entre les noyaux aromatiques. Ceci dépend essentiellement du rapport molaire entre les réactifs, du pH et du catalyseur utilisé durant la synthèse [2].

Cependant, la réaction du résorcinol et du formaldéhyde conduit principalement à la formation de ponts méthylène reliant deux molécules de résorcinol. Ceci est dû à la forte réactivité du résorcinol. C’est un monomère trifonctionnel pouvant ajouter jusqu'à trois équivalents de formaldéhyde. Ces dérivés de résorcinol substitués se condensent alors avec la formation de nano clusters, qui réticulent ensuite via les groupements de surface. Généralement, en cas de catalyse basique, la réaction est effectuée en milieu aqueux en présence de carbonate de sodium ou de catalyseur basique similaire. La gélification nécessite alors un chauffage à des températures élevées sur de longues durées. En revanche, en catalyse acide, les monomères sont

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mélangés soit en milieu non aqueux, soit en milieu aqueux avec le catalyseur (acide chlorhydrique, acide acétique et acide perchlorique), et la gélification peut avoir lieu même à température ambiante et est généralement plus rapide.

Synthèse en catalyse basique 1.2.2

Dans des conditions basiques, le résorcinol est déprotoné en anion résorcinol. En raison de la résonance, la densité électronique augmente à la position 4 (ou 6) du résorcinol. S’en suit, une hydroxyméthylation due au don d’électrons au carbonyle du formaldéhyde, partiellement positivement chargé (addition du groupement –CH2OH). Le catalyseur basique provoque ensuite la déprotonation du résorcinol hydroxyméthylé, conduisant à un intermédiaire très réactif et instable, l’o-quinone méthide. L’o-quinone méthide réagit à son tour avec une autre molécule de résorcinol pour former une liaison méthylène stable. Les groupements méthyl-o-quinone et la forte densité électronique aux positions 2, 4 et 6 du noyau de résorcinol sont les raisons de la réactivité accrue du résorcinol par rapport au phénol [6]. En fait, il existe une plus grande tendance à la condensation continue tant qu'il y a des sites actifs sur les molécules de résorcinol ou les grappes RF. Par conséquent, les résines RF produites par catalyse basique conduisent majoritairement à des structures de type Résole avec majoritairement des ponts méthylène comme dans les structures de type Novolaque (Figure 7) [2] :

1.2 Les gels de Résorcinol/Formaldéhyde (RF)

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Synthèse en catalyse acide 1.2.3

Contrairement à la synthèse en catalyse basique, la voie de synthèse en catalyse acide repose sur l’accélération de la réaction en augmentant le caractère électrophile du formaldéhyde. La protonation du formaldéhyde est suivie par une réaction d’attaque nucléophile par le système pi du résorcinol conduisant à son hydroxyméthylation. En milieu acide, la protonation des groupes hydroxyméthyle conduit à la formation de groupements -OH2+-, qui sont de bons groupes partants et se scindent de manière unimoléculaire pour former des intermédiaires réactionnels de type o-quinone méthide [16]. L'o-quinone méthide peut ensuite induire la condensation ou bien le système pi d’un autre résorcinol peut attaquer à son tour le résorcinol hydroxyméthylé protoné pour former des liaisons méthylène [2]. Ainsi, ces réactions simultanées d’addition et de condensation conduisent à la structure réticulée de l’aérogel résorcinol-formaldéhyde de type Novolaque (Figure 8) :

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Variables de synthèse 1.2.4

Quelle que soit la voie de synthèse choisie, il a été démontré que toutes les variables de synthèse affectent directement la structure et les propriétés finales de l’aérogel telles que la densité, la surface spécifique, la taille des particules et la distribution de la taille des pores [14]. A commencer par le ratio résorcinol/formaldéhyde qui va déterminer le taux de réticulation du réseau. Le résorcinol ayant trois sites réactifs, plus on augmente la quantité de formaldéhyde par rapport au résorcinol plus la réticulation sera importante et plus le réseau sera dense. Le ratio résorcinol/eau définit la dilution du milieu, plus le milieu sera dilué plus la surface spécifique sera importante avec un réseau poreux et moins l’aérogel sera dense. Ensuite, la nature et la quantité de solvant utilisé ont elles aussi leur importance. Une formulation contenant beaucoup de solvant aura tendance à être très poreuse et aura de bonnes propriétés thermiques mais elle sera fragile alors qu’un gel contenant peu de solvant aura de meilleures propriétés mécaniques mais une capacité d’isolation thermique moins bonne [16]. Le ratio résorcinol/catalyseur est le paramètre qui va majoritairement définir toute la nanostructuration de l’aérogel. Il détermine la cinétique de la réaction. Plus ce ratio est faible, plus la réaction sera rapide et plus les particules seront petites. Le réseau final aura ainsi une meilleure nanostructuration [17]. Enfin, selon le catalyseur utilisé (acide ou basique), la valeur du pH sera différente. Pour des pH plus faibles, la cinétique de réaction sera plus grande que pour des pH élevés. Toutefois, il faut savoir que la surface spécifique sera d’autant plus importante que le pH sera élevé [18]. En effet, au fur et à mesure que le pH augmente, la concentration de résorcinol déprotoné augmente, ce qui améliore également la formation de dérivés d’hydroxyméthyle de résorcinol entraînant la formation de clusters hautement réticulés. Ces structures hautement réticulées conduisent à des particules de polymère plus petites et plus interconnectées. D’autre part, à un pH plus faible, la concentration en anions de résorcinol diminue, ce qui ralentit la formation de dérivés d'hydroxyméthyle. Le système moins ramifié reste plus longtemps dans le régime de nucléation, conduisant à des particules plus grosses [16].

En tenant compte de tous ces paramètres, et selon la voie de synthèse choisie, l’aérogel final pourrait avoir une structure présentant une densité comprise entre 100 kg.m-3 et 200 kg.m-3, une porosité supérieure à 80 %, une surface spécifique comprise entre 200 m2.g-1 et 600 m2.g-1. La taille des pores sera inférieure à 100 nm en catalyse basique et sera de quelques centaines de nanomètres, en catalyse acide [19]. A titre d’exemple, le tableau suivant illustre la variation des propriétés structurales d’un aérogel de RF en fonction des paramètres de synthèse (Tableau 1) [18] : R/Eau (mol) pH Densité du squelette Densité apparente (g.cm-3) Porosité (%) Volume poreux (cm3.g-1) Diamètre de pore moyen (nm) Surface spécifique (m2.g-1) 0.012 0.012 6.5 7 1.49 1.44 0.10 0.12 93.3 91.7 9.3 7.6 171 60 218 507 0.019 0.019 6.5 7 1.52 1.42 0.15 0.18 90.1 87.3 6.0 4.9 66 33 364 589