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1.2 La corrosion du magnésium et de ses alliages

1.2.4 Les facteurs métallurgiques qui inuencent la corrosion

Les phénomènes de corrosion du magnésium et de ses alliages dépendent à la fois de l'environne-ment dans lesquels ils se trouvent mais aussi des facteurs métallurgiques liés à leur élaboration.

La résistance à la corrosion dépend des éléments d'alliages, des impuretés, des phases et des microstructures. Le contrôle des procédés d'élaboration métallurgiques permet d'optimiser la résistance à la corrosion de ces alliages ou au contraire d'augmenter les taux de corrosion.

1.2.4.1 Les impuretés

Les impuretés présentes dans les alliages ont des inuences diérentes sur la corrosion du magnésium. Certaines sont bénéques et améliorent la résistance à la corrosion, d'autres n'ont

pas d'inuence vériée et d'autres enn détériorent la résistance à la corrosion. Hanawalt etal.

[79] ont étudié l'inuence de plusieurs éléments d'impureté sur la tenue des alliages de magnésium dans l'eau salée. Ils ont montré que le fer, le nickel, le cuivre et le cobalt détériorent la résistance à la corrosion à des concentrations faibles (moins de 0,2 % en poids), que l'argent, le calcium et le zinc ont une inuence moins importante pour des concentrations entre 0,5% et 5% en poids et que d'autres éléments comme l'aluminium, l'étain, le cadmium, le manganèse ou le silicium ont une faible inuence sur le taux de corrosion, voire inexistante pour des concentrations au delà de 5% en poids.

D'autres études [51] [57] [82] ont conrmé que la pureté du métal inue grandement sur la résistance à la corrosion. Le taux de corrosion s'accroît rapidement lorsqu'on augmente la concentration en éléments contaminants (Fe, Ni ou Cu) [83]. La présence de ces éléments est aggravante pour la résistance à la corrosion à cause de leur faible solubilité en solution solide qui fait de ces ajouts des zones cathodiques [1] [84]. Pour chaque élément, il existe une limite de tolérance [1] [63] à partir de laquelle le taux de corrosion s'accroît rapidement comme illustré sur la gure 1.10. Dans certains cas, bien que les impuretés présentes soient en-dessous de leur limite de tolérance, le taux de corrosion peut varier plus largement selon le processus d'élaboration de l'alliage [62]. Par exemple, en augmentant la vitesse de solidication, on peut augmenter la limite de tolérance en impuretés en nickel mais pas celles en fer et en cuivre [53].

Figure 1.10 Inuence de la concentration en impuretés sur le taux de corrosion : limites de tolérance

Les mécanismes inuençant les limites de tolérance sont liés à la solubilité des impuretés dans les alliages. Quand ces limites sont dépassées, les impuretés ségrègent et peuvent servir de catalyseur aux attaques électrochimiques [85]. Cependant, Hanawalt et al. [57] n'ont pas réussi à établir de lien entre l'amplitude de la limite de tolérance et la solubilité des impuretés dans le magnésium liquide ou solide. Ils ont observé que la corrosion démarrait en des centres localisés et que les impuretés supposées avoir atteint leurs limites de tolérance étaient dispersées sous forme de nes particules dans les matériaux [62] [79]. Malgré cela, Bushrod [86] a démontré qu'il n'y

avait pas de preuves que les centres de corrosion observés au microscope étaient des particules d'impuretés de nature cathodique. Les alliages de magnésium sont en réalité susamment actifs pour causer le regroupement de particules d'impuretés en surface et générer une corrosion micro-galvanique ecace.

Le contrôle du taux d'impureté dans les alliages de magnésium [57] [87] [88] est un moyen d'améliorer la résistance à la corrosion ou au contraire de le dégrader selon les applications. Le fer, le nickel, le cuivre et le cobalt sont les quatre éléments qui sont capables de dégrader de manière signicative la résistance à la corrosion. Leurs limites de tolérance sont diérentes et les mécanismes de corrosion dans lesquels ils sont impliqués ne sont probablement pas identiques.

1.2.4.2 Les éléments d'alliages

La composition des alliages de magnésium est aussi importante car chaque élément peut per-mettre l'apparition de phases et de précipités spéciques avec des réactivités spéciques (zones anodiques ou cathodiques). Parmi les plus utilisés, on peut citer le zirconium, l'aluminium, le zinc ou encore le calcium. D'autres éléments moins usités comme le silicium, l'yttrium, le lithium, le phosphore ou encore certaines terres rares sont également possibles.

Les alliages contenant du zirconium sont généralement résistants à la corrosion dans des solutions salines et sont relativement insensibles au fer et au nickel. Les impuretés de fer et de nickel précipitent avec le zirconium avant le processus d'élaboration. Ces précipités ne sont pas solubles dans le matériau [62] au cours du processus d'élaboration. Les alliages de magnésium contenant du zirconium (pour son eet de ranement des grains) sont donc généralement très purs car les impuretés (Fe, Ni) ont toutes précipitées avec le zirconium [54] et ont été extraites des alliages.

L'aluminium se présente sous diérentes formes lorsque il est allié au magnésium : en partie en solution solide et en partie sous la forme Mg17Al12le long des joints de grains comme une phase continue ou comme constituant d'une structure lamellaire [89]. Dans certains cas, des particules de Mg2Al3(Mg5Al8) sont également détectées [90]. L'alliage de l'aluminium avec le magnésium augmente généralement la résistance à la corrosion. L'ajout d'aluminium au delà de 4% en poids améliore la résistance à la corrosion jusqu'à des ajouts d'environ 9% en poids (pas de nette amélioration au delà) [63] [70]. Cette amélioration de la résistance à la corrosion est due à la précipitation de la phase secondaire et l'altération de la composition du lm passif d'hydroxyde (qui s'enrichit en aluminium) [56] [63]. Les ajouts d'aluminium peuvent être également nocifs dans la mesure où ils diminuent la limite de tolérance du fer de 170 ppm à environ 20 ppm en poids [62]. Cette tendance est directement proportionnelle à la concentration de l'ajout d'aluminium et semble être due à l'apparition d'une phase passive composée de fer et d'aluminium durant la solidication.

Les ajouts de zinc peuvent augmenter les limites de tolérance et réduire les eets des impuretés lorsque la limite est dépassée (Ni, Mn) dès un ajout de 1% en poids [57] [63].

Les ajouts de zinc jusqu'à 3% en poids permettent de raner les grains des alliages de

magnésium et forment des précipités intermétalliques (en plus de se dissoudre en solution solide dans la matrice de magnésium) qui vont rendre les alliages plus nobles et donc plus résistants à la corrosion [55].

Le calcium est utilisé en combinaison avec le magnésium pour développer des alliages biocompatibles. Le calcium étant encore moins noble que le magnésium (respectivement E0standard.M g = -2,34 V et E0standard.Ca = -2,87 V), il va accélérer les taux de corrosion. Des faibles ajouts vont raner la microstructure de la matrice de magnésium (même au delà de la solubilité du calcium dans le magnésium, c'est à dire 0,8 % en poids) jusqu'à 4% de calcium en poids [91]. Lorsque la concentration en calcium augmente au delà de la limite de solubilité, la concentration en intermétallique Mg2Ca augmente également, menant à la formation d'une grande zone cathodique (phase Mg2Ca) et d'une petite zone anodique (phase Mg). La formation de cette cellule galvanique augmente de taux de corrosion ainsi que les dégagements d'hydrogène [22] [92]. Le ratio entre les phases (c'est à dire la compo-sition de l'alliage) contrôle le taux de corrosion de ces alliages et ainsi l'alcalinisation du milieu corrosif par les cations bivalents Mg2+ et Ca2+. L'hydroxyde de calcium Ca(OH)2

se forme à des pH élevés (plus élevés que l'hydroxyde de magnésium) et ne permet pas de stabiliser le lm passif protecteur dans la mesure où il se dissocie facilement au contact de l'eau. Les faibles ajouts en calcium sont donc ecaces pour diminuer la réactivité de ce type d'alliages alors que des ajouts plus importants (au delà de 4%) augmentent leur taux de corrosion.

1.2.4.3 Le rôle des phases et de la microstructure

Les diérentes phases en présence ont un rôle important sur la corrosion des alliages de magné-sium. Les diérents éléments d'alliages (principalement Al, Mn, Ca, Zn) inuent sur la résistance à la corrosion dès qu'ils ont formé une phase secondaire avec le magnésium.

A des teneurs en aluminium élevées comme c'est le cas dans l'alliage AZ91, la phase secondaire Mg17Al12 est en proportion non négligeable [55]. Cette phase secondaire précipite le long des joints de grains et est cathodique par rapport à la matrice en magnésium [56]. Elle est moins réactive que le magnésium ou l'aluminium seuls et agit comme une barrière à la corrosion dans des environnements salins par rapport à la matrice de magnésium plus sensible [56] [93]. La répartition de cette phase détermine la résistance à la corrosion des alliages Mg-Al car elle est recouverte d'un lm passif protecteur à sa surface [93]. D'autres recherches suggèrent que la présence du composé Mg17Al12 est néfaste [94] pour la résistance à la corrosion car les alliages Mg-Al étant très susceptibles à la corrosion galvanique, ce composé peut stimuler la corrosion micro-galvanique dans ces alliages [54]. Song etal.[71] [72] ont réalisé des courbes de polarisation des phases primaires et secondaires de ces alliages dans une solution d'eau salée à 1 M de NaCl et ont observé que la phase primaire présente un potentiel de piqûre plus proche de son potentiel de corrosion (environ 15 mV) que celui de la phase secondaire (environ 200 mV). Ils ont également

observé que la phase secondaire présente des réactions cathodiques plus actives que la phase primaire mais que son taux de dissolution reste plus faible. Ces observations les ont mené à conclure que la phase secondaire est plus stable en solution bien que la phase en question agit comme une cathode. La phase secondaire se présente à la fois comme une barrière à la corrosion et comme une cathode active capable de stimuler la corrosion galvanique selon le ratio entre les phases primaires et secondaires. Pour de faibles concentrations en phase secondaire le taux de corrosion de la phase primaire va augmenter par corrosion galvanique et si la phase secondaire est très présente, elle agit comme barrière anodique en inhibant les réactions de corrosion.

La formation de précipités peut également avoir un eet néfaste sur la résistance à la corrosion comme les précipités riches en fer (intermétallique FeAl) qui présentent un caractère fortement cathodique [95], ou encore les précipités AlMn et Mg2Pb [56] [70]. D'autres précipités comme Mg2Si ne semblent pas avoir d'inuence [70].

Song etal.[72] suggèrent également que, dans les alliages AZ91, la phase primaire et la phase eutectique ayant des concentrations en aluminium diérentes, leur réactivité électrochimique est diérente. Ils peuvent chacun former des cellules galvaniques avec la phase secondaire. Selon les ratios entre les phases, soit les grains de la phase primaire sont dissous de manière préférentielle ou soit les précipités secondaires sont exposés à cause de la dissolution de l'eutectique primaire.

Les paramètres microstructuraux tels que la taille des grains ou la distribution des phases jouent un rôle déterminant sur le comportement à la corrosion [96]. De récentes études [90] [88]

ont montré que des phases cathodiques, nes et réparties uniformément ont l'eet le plus néfaste sur la résistance à la corrosion des alliages de magnésium. Song etal.[71] [72] ont observé que les techniques d'élaboration (températures, refroidissements, atmosphères) inuent sur la résistance à la corrosion au travers de la microstructure.

La porosité des alliages entre également en compte, car les alliages développent des surfaces actives plus ou moins importantes et plus active. De plus, à l'intérieur des pores et micropores, les processus électrochimiques génèrent des produits de corrosion capables d'obstruer les pores et ainsi de les transformer en cellules de corrosion auto catalytiques. Ces cellules de corrosion produisent de la corrosion localisée et peuvent causer de gros dommages. Également, les pores, dus à des impuretés ou à des défauts, sont souvent sièges de réactions de corrosion privilégiées. Une faible densité de pores ouvertes est donc préférable pour augmenter la résistance à la corrosion.

Les alliages rapidement solidiés [97] [98] permettent d'obtenir des microstructures plus ra-nées avec une microstructure la plus ne proche de la surface de trempe. En eet, la solidication rapide accroît les limites de solubilité [53], permettant aux éléments nocifs de se répartir de ma-nière plus homogène et donc en des endroits moins critiques. Il est aussi possible de réaliser des verres métalliques ou des phases n'étant pas à l'équilibre (cristallines, quasi cristallines ou non cristallines) ou encore de raner également la taille des particules intermétalliques.