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Les différents types de robots sous-marins

1.2

Les différents types de robots sous-marins

Comme nous l’avons vu, les robots sous-marins, de par leur capacité à intervenir là où il est dangereux d’envoyer des plongeurs ou des submersibles habités, ont de grandes perspectives en termes d’applications.

On peut distinguer deux grandes familles de robots sous-marins : les Remotely Operated Vehicles (ROVs) et les Autonomous Underwater Vehicles (AUVs). Nous allons présenter les spécificités de chacun d’entre eux et quelques défis techniques et scientifiques associés à leur mise en œuvre.

1.2.1

Les ROVs

Les ROVs sont reliés physiquement à la surface via un lien ombilical. Ce dernier permet la communication avec l’opérateur de surface et assure le plus souvent l’alimentation du robot en énergie depuis la surface, simplifiant sa conception. Ils sont souvent téléopérés, c’est-à- dire que l’opérateur en surface envoie directement les consignes à appliquer aux actionneurs en fonction du retour des différents capteurs dont est équipé le robot. Ils furent un sujet de recherche très important dans les années 60 et 70 et commencèrent à être régulièrement utilisés dans l’industrie à partir des années 80.

Cette technologie est donc relativement mature et de nombreux ROVs sont déjà en service dans l’industrie. En effet, la très grande majorité des engins qui interviennent lors d’opéra- tions de maintenance d’infrastructures immergées (industrie pétrolière, télécommunications ou barrages) ou pour l’inspection d’épaves sont des ROVs. Ils sont en outre souvent équipés d’un bras manipulateur qui permet d’effectuer une action sur l’environnement du robot. On peut ainsi citer le ROV Spectrum [Oce12] (140cm x 90cm x 85cm, 290kg) ou le SeaEye Cou- gar XT [Tam13] (151cm x 100cm x 79cm, 400kg). De par la nature de leurs missions, qui nécessitent une grande manœuvrabilité et donc des mouvements suivant tous les degrés de liberté sans direction préférentielle, ils sont iso-actionnés. Les degrés de liberté non contrôlés sont naturellement stabilisés par la structure de l’engin. De fait, cette manœuvrabilité facilite leur intervention dans un faible volume d’eau et dans un milieu potentiellement encombré. On peut par exemple citer le ROV Super Achille conçu par la COMEX [COM15] (72cm x 68cm x 60cm ,110kg), le DTX2 conçu par Deep Trekker [Tre15] (63cm x 49cm x 38cm, 26kg), le Phantom T3 conçu par Deep Ocean [Oce15] (91cm x 39cm x 35cm, 36kg), le Pro 4 conçu par VideoRay [Vid14] (37cm x 29cm x 22cm, 6kg) ou le AC-ROV 100 conçu par AC-CESS [AC14] (20cm x 15cm x 14cm, 3kg).

courants), leur pilotage s’avère délicat. Ce phénomène est accentué par la présence du lien ombilical qui génère d’importantes perturbations. C’est pour cela que les pilotes de ROVs doivent souvent avoir suivi de nombreuses heures de formation et de mise en pratique avant d’être autorisés à les piloter lors d’une intervention.

Ainsi les travaux se concentrent essentiellement sur un accroissement de l’autonomie opéra- tionnelle de ces engins afin d’en simplifier le pilotage pour que l’opérateur puisse se concentrer sur la réalisation des tâches qui nécessitent le plus de précision et où l’expertise humaine s’avère indispensable. De plus un pilotage plus simple ouvrirait l’utilisation des ROVs à un public plus varié et notamment les scientifiques qui n’auraient alors plus besoin de recourir à des interve- nants extérieurs pour réaliser leurs campagnes de mesure. De plus en plus d’asservissements sont donc embarqués sur ces robots, que ce soit un maintien de cap, un asservissement en profondeur ou la capacité à maintenir leurs position et orientation spatiales. Mais des travaux orientent les recherches sur ces robots vers encore plus d’autonomie opérationnelle, pour ne laisser à l’opérateur que la prise de décision. Cela inclut par exemple la possibilité de se rendre automatiquement au lieu de mission ou encore d’éviter les obstacles qui se présentent sans né- cessiter l’intervention de l’opérateur. Qui plus est, afin d’accroître leur autonomie et de réduire leur dépendance au lien ombilical, certains ROVs embarquent leur propre réserve d’énergie. Cela permet en outre d’utiliser un câble plus fin pour transmettre les données réduisant son impact sur le comportement du robot. Dans ce cadre, on peut constater que les recherches tendent à rapprocher les ROVs du fonctionnement des AUVs, la principale différence étant le maintien d’une présence forte de l’opérateur dans le processus de commande notamment lorsqu’il s’agit de prendre des décisions sur la conduite de la mission.

Néanmoins l’une des principales limitations des ROVs est l’ombilical. En effet, outre les perturbations qu’il génère et qui pénalisent le comportement de l’engin et doivent donc être compensées, il limite le champ d’action des ROVs puisque le robot ne peut opérer sans contact avec l’opérateur si le câble est endommagé.

1.2.2

Les AUVs

La seconde catégorie, les AUVs (Autonomous Underwater Vehicles) aussi appelés UUVs (Unmanned Underwater Vehicles), regroupe les robots autonomes. Bien que proposant de nouveaux défis scientifiques et technologiques qui demeurent encore, en grande partie, à solu- tionner, ils offrent des perspectives importantes en termes d’applications réalisables. En effet, détachés des contraintes de liaison à la surface, ils peuvent effectuer des missions sur des durées et des distances bien plus importantes tout en pouvant se rendre dans des lieux où la présence d’un ombilical est problématique. Leur développement commença à partir des années 70 et

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au début des années 80. Depuis lors les recherches n’ont cessé afin d’améliorer les AUVs pour qu’ils puissent réaliser des missions de plus en plus complexes avec une robustesse accrue. Les AUVs ont longtemps été majoritairement des robots de taille importante et sous-actionnés (par exemple les torpilles) destinés à évoluer dans les vastes étendues océaniques. On peut ainsi citer le REMUS 600 [Ins10] une torpille de 32cm de diamètre pesant 240kg, le HUGIN 1000 [Kon15] (75cm de diamètre, 450cm de long, 650kg), le Bluefin-9 de Bluefin Robotics [Rob10] (24cm de diamètre, 175cm de long, 60kg), l’AUV Taipan [JAJ05] (25cm de diamètre, 190cm de long, 40kg) ou plus récemment l’AUV MARTA [ABC+14] (18cm de diamètre, 300cm de

long, 70kg).

Néanmoins, les besoins d’exploration d’environnements confinés ou faible fond, dans les- quels l’encombrement du robot doit être très limité et sa manœuvrabilité importante, poussent vers le développement d’AUVs de petite taille et iso-actionnés, d’une structure d’actionnement proche de celle des ROVs. On peut ainsi citer l’AUV ODIN [ACSW01], l’AUV Nessie [MCJP10] (70cm x 70cm x 60cm, 41kg) ou encore un AUV bioinspiré, le U-CAT [ACR+15].

En outre, ce rapprochement comporte également le désir de faire intervenir les AUVs de manière autonome lors d’interventions de réparation (autrefois chasse gardée des ROVs) et a donné naissance à la classe des Intervention AUVs (I-AUVs) [PRP+12]. Ceux-ci sont des AUVs

équipés d’un bras manipulateur. Cela ouvre de nouvelles perspectives en termes d’applications avec la possibilité de réaliser de nouvelles actions telles que le prélèvement d’échantillons, la réparation ou la récupération de capteurs déployés dans l’environnement. Bien que ces missions soient tout à fait complémentaires avec celles de collecte de données dans le cadre de l’étude des milieux aquatiques, nous ne nous focaliserons que sur l’utilisation des robots sous-marins dans le contexte de l’acquisition de données scientifiques.

Cela pose de nouveaux défis scientifiques notamment au niveau de l’autonomie de ces en- gins. De fait, il faut concevoir le contrôle du robot afin que celui-ci puisse accomplir sa mission avec la réserve d’énergie dont il dispose. Par ailleurs, l’absence de lien de communication de qualité sous l’eau, empêchant des échanges de données réguliers et importants avec un opé- rateur, oblige à concevoir le logiciel de contrôle du robot pour qu’il puisse mener à bien une mission de manière entièrement autonome. Cela impose notamment de donner au robot les moyens d’atteindre ses objectifs de mission et implique qu’il puisse embarquer l’expertise de l’opérateur humain tant pour la réalisation des tâches que pour la mise en place des pro- cessus décisionnels. Les problématiques liées à ce fonctionnement autonome et la limitation des possibilités d’intervention d’un opérateur en cas de problème posent de nombreux défis scientifiques :

de l’interaction d’un robot sous-marin avec le milieu aqueux ne peuvent être négligés car ils influent fortement sur le comportement du robot lorsqu’il se déplace même à faible vitesse. Il est donc nécessaire de modéliser les interactions hydrodynamiques entre l’AUV et l’eau [AFY08]. Celles-ci dépendent de la structure du robot (forme, symétries, masse) et peuvent lui donner des directions préférentielles de mouvement. Mais la nature du milieu marin joue également car des paramètres tels que la salinité ou la température modifient également les effets hydrodynamiques. Les actionneurs doivent également être pris en compte. En effet des différences, même faibles, entre les caractéristiques (i.e. la force produite en fonction de la consigne appliquée) des actionneurs sont accentuées par le milieu marin et perturbent le comportement du robot. Il est donc nécessaire de prendre en compte et de corriger ces écarts.

– Navigation : Les ondes électromagnétiques étant fortement atténuées sous l’eau, certains systèmes de localisation comme le GPS deviennent inutilisables. Il est donc nécessaire de mettre en place d’autres solutions afin d’estimer la position et la vitesse du robot. Si cette dernière peut être estimée en utilisant un Loch4 (notamment les Loch Doppler5),

la nécessité d’intégrer ces vitesses entraine une dérive qu’il est nécessaire de réajuster régulièrement. D’autres stratégies doivent donc être mises en place, il peut s’agir de remonter pour réaliser des points GPS lorsque la dérive de position devient trop impor- tante mais cette solution ne peut être utilisée dans environnements confinés comme les conduits karstiques. Il est également possible d’instrumenter le milieu en positionnant par exemple des amers. Néanmoins, cette stratégie est limitée car elle nécessite d’avoir accès au milieu préalablement ce qui est à la fois impossible dans certains environne- ments dont l’accès est dangereux mais aussi contradictoire avec la volonté d’utiliser ces robots avec une logistique aussi légère que possible. Enfin, lorsque des connaissances préalables existent sur l’environnement (une carte par exemple), celles-ci peuvent aider à la localisation du robot.

– Intégration de l’expertise humaine : Puisque l’AUV doit fonctionner de manière totale- ment autonome, il est nécessaire d’intégrer les processus et critères décisionnels qui sont réalisés par l’opérateur. Cela inclut les modèles de l’environnement qui permettent au robot de prendre en compte celui-ci afin de réaliser sa mission au mieux et les critères décisionnels qui permettent de déterminer si les objectifs de mission sont atteints ou

4. Un Loch est un capteur permettant de mesurer la vitesse d’un navire ou d’un sous-marin soit par rapport au fond soit par rapport à la masse d’eau dans laquelle il évolue.

5. Les Loch Doppler mesurent la vitesse en utilisant l’effet Doppler, c’est-à-dire le décalage de fréquence d’une onde, typiquement acoustique, observée lorsque la distance entre émetteur et récepteur varie au cours du temps.