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Chapitre 3. Les traitements plasma

2.3. Les conditions réactives

Les secondes conditions font intervenir des précurseurs gazeux définis comme réactifs par rapport aux matériaux traités. Le diazote (N2) et le dioxygène (O2) seront utilisés de manière indépendante ou en mélange. Associés avec l’Argon, ces deux précurseurs vont aussi représenter d’autres solutions de traitements réactifs. Celles-ci ont été testées par rapport à leur efficacité vis-à-vis des propriétés d’imprimabilité ciblées. En plus du rapport de précurseur utilisé pour générer le plasma, la durée de la décharge, la puissance et la pression appliquées ont été optimisées. Les plasmas « azotés » sont fréquemment utilisés pour améliorer les propriétés d’adhésion, d’imprimabilité et de biocompatibilité de surfaces polymères.

Par commodités, nous avons fait le choix de décrire l’efficacité du précurseur N2 seul et combiné avec une faible quantité d’O2 en détaillant leur décomposition par voie plasma lors de la décharge.

2.3.2. La décomposition du diazote (N2) par voie plasma.

Les plasmas de nature « azotée » induisent principalement deux types de réactions :  le greffage de groupements azotés ;

l’élimination de ces groupements par les espèces/radiations les plus énergétiques contenues dans le plasma par l’intermédiaire du phénomène d’érosion.

2.3.2.1. L’azote atomique et moléculaire.

Les deux premiers états excités dans l’azote atomique sont les états métastables : 2p3 (2D5/2, 3/2) à 2,38 eV et 2p3 (2P1/2,3/2) à 3,58 eV.

Le premier état radiatif est l’état 2p2 (3P) 3s (4P1/2,3/2,5/2) situé à 10,32 eV. Son énergie d’ionisation est 14,53 eV. La Figure 79 reprend le diagramme de Grotrian de l’azote atomique [1]. Il décrit la répartition énergétique des niveaux électroniques (n ≤ 5 et 1 ≤ 3) ainsi que les principales transitions radiatives les reliant.

La Figure 80 reprend ensuite les courbes de potentiel des principaux états électroniques des molécules de N2 et N2+ [2]. L’émission de l’azote moléculaire est essentiellement concentrée dans les systèmes émissifs :

 N2(B3Πg→ A3Σu+), transition du premier système positif de N2 : 1+ (470-2530 nm).  N2(C3ΠU→ B3Πg), transition du deuxième système positif de N2 : 2+ (260-550 nm).  N2(B2Σu+→ X2Σg+), transition du premier système négatif de N2+ : 1- (300-590 nm).

Figure 79. Diagramme de Grotrian de l’azote atomique [1].

2.3.2.2. L’influence de l’azote au niveau de la décharge.

Les processus se produisant dans la zone de décharge sont nombreux et variés. Celle-ci est principalement caractérisée par un ensemble de mécanismes d’ionisation de l’azote [3]. En se limitant à la production des espèces atomiques et en particulier de l’espèce N(4S) (Figure 79), on observe deux mécanismes majeurs faisant intervenir les 46 niveaux vibrationnels stables ( = 0-45) de l’état fondamental de N2 X1Σg+ [4] :

la dissociation par impact électronique (équation (53)).

𝐞+ 𝐍𝟐(𝐗, 𝛎) → 𝐞 + 𝐍( 𝐒𝟒 ) + 𝐍( 𝐒𝟒 ) (53)

le transfert d’énergie vibrationnelle (équation (54)).

𝐍𝟐(𝐗, 𝛎) + 𝐍𝟐(𝐗, 𝛎 = 𝟒𝟓) → 𝐍𝟐(𝐗, 𝛎 − 𝟏) + 𝐍( 𝐒𝟒 ) + 𝐍( 𝐒𝟒 ) (54) Des processus minoritaires sont également décrits dans les équations (55), (56), (57), (58).

𝟐𝐍𝟐(𝐗, 𝟏𝟎 < 𝛎 < 𝟐𝟓) → 𝐍𝟐(𝐗, 𝛎 = 𝟎) + 𝐍( 𝐒𝟒 ) + 𝐍( 𝐒𝟒 ) (55) 𝐍𝟐(𝐀) + 𝐍𝟐(𝐗, 𝟏𝟒 < 𝛎 < 𝟏𝟗) → 𝐍𝟐(𝐗, 𝛎 = 𝟎) + 𝐍( 𝐒𝟒 ) + 𝐍( 𝐒𝟒 ) (56)

𝟐𝐍𝟐(𝐀) → 𝐍𝟐(𝐗) + 𝐍( 𝐒𝟒 ) + 𝐍( 𝐒𝟒 ) (57)

𝐞+ 𝐍𝟐+(𝐗) → 𝐍( 𝐒𝟒 ) + 𝐍( 𝐒𝟒 ) (58)

D’autre part, les pertes en azotes atomiques sont consécutives aux réactions de recombinaisons dans le volume (équation (59)) et sur les parois du tube à décharge (équation (60)).

𝐍( 𝐒𝟒 ) + 𝐍( 𝐒𝟒 ) + 𝐍𝟐→ 𝐍𝟐(𝐁) + 𝐍𝟐(𝐗, 𝛎 = 𝟎) (59)

𝐍 + 𝐩𝐚𝐫𝐨𝐢 → 𝟏 𝟐⁄ 𝐍𝟐+ 𝐩𝐚𝐫𝐨𝐢 (60)

Il est important de noter que l’ensemble de ces mécanismes implique aussi la présence d’impuretés, notamment des groupements NH et CN. Elles peuvent provenir des impuretés présentes dans l’azote utilisé ou du phénomène d’érosion de la surface des polymères induit par la décharge qui va générer la formation de produits secondaires.

2.3.3. La décomposition du diazote (N2) avec un faible taux de dioxygène (O2).

La quantité d’impuretés générées par la décomposition de N2 est largement atténuée lorsque le mélange est dilué avec O2 [5]. Ce mélange fait alors intervenir de nouvelles espèces ; NO, NO et des transitions excimères de type N2O(1S)-N2O(1D) [6-8]. En effet, le degré de dissociation du diazote augmente avec l’introduction de faibles quantités d’oxygène dans la décharge [9].

Pour des faibles débits d’oxygène (0 < x ≤ 10 %), plusieurs processus peuvent expliquer l’augmentation de la concentration d’azote atomique N(4S) :

(i) l’augmentation du champ électrique réduit ; lorsque le pourcentage d’O2 augmente, les concentrations des métastables et les populations vibrationnelles de N2 dans l’état électronique fondamental vont décroitre via des phénomènes de collision de ces espèces avec O, O2 et NO. Le taux d’ionisation associative va donc diminuer [10].

(ii) la présence d’une nouvelle source de N(4S) identifiée dans l’équation (61). (iii) la production additionnelle (équation (63)).

Lorsque les concentrations d’oxygène deviennent plus élevées (x > 10 %), la diminution des processus d’ionisation associative est compensée cette fois par l’ionisation des espèces O, O2 et NO par impact électronique direct. Les potentiels d’ionisation de ces espèces étant plus faibles que celui de l’azote, le champ électrique de maintien de la décharge diminue avec destruction des espèces N(4S) selon les réactions (64) et (65) [11]. Les espèces N(4S) sont la conséquence des mécanismes réactionnels repris dans les équations suivantes. 𝐍𝟐(𝐗, 𝛎 ≥ 𝟏𝟑) + 𝐎 → 𝐍𝐎(𝐗) + 𝐍( 𝐒𝟒 ) (61) 𝐍𝟐(𝐀) + 𝐍𝐎 → 𝐍𝟐(𝐗) + 𝐍 + 𝐎 (62) 𝐍𝟐(𝐚′) + 𝐍𝐎 → 𝐍𝟐(𝐗) + 𝐍 + 𝐎 (63) 𝐍𝐎(𝐗) + 𝐍( 𝐒𝟒 ) → 𝐍𝟐(𝐗, 𝛎 ≃ 𝟑) + 𝐎 (64) 𝐍( 𝐒𝟒 ) + 𝐎𝟐→ 𝐍𝐎 + 𝐎 (65)

Ces mécanismes font intervenir plusieurs espèces présentes dans la décharge comme les états vibrationnels d’azote et d’oxygène, l’azote et l’oxygène atomique, les états électroniques des molécules de diazote et de dioxygène, des radicaux NO, des ions positifs d’azote et d’oxygène mais aussi des ions négatifs de dioxygène.

Par ailleurs, la formation de l’espèce NO est due au dépeuplement des niveaux vibrationnels moléculaires N2(X, ν ≥ 13) comme repris dans les équations (61) et (63).

Le peuplement des espèces NO(X) peut lui être associé à la réaction reprise dans l’équation (66) [11].

𝐍𝟐(𝐀) + 𝐎 → 𝐍( 𝐃𝟐 ) + 𝐍𝐎(𝐗) (66)

La recombinaison des espèces atomiques N et O en surface pour former NO est également un paramètre à prendre en considération. L’état NO(B), caractérisant la bande d’émission NO, est produit par la recombinaison des atomes N et O (équation (67)).

𝐍 + 𝐎 + 𝐍𝟐→ 𝐍𝐎(𝐁) + 𝐍𝟐 (67) Concernant NO(A) (bandes d’émissions NO), l’efficacité du transfert d’excitation est validée lorsque N2(A) est dans son état métastable (équation (68)).

𝐍𝟐(𝐀) + 𝐍𝐎 → 𝐍𝐎(𝐀) + 𝐍𝟐 (68)

L’excimère N2O(1S) est produit à partir de l’état métastable O(1S) de l’oxygène comme repris dans l’équation (69).

𝐎( 𝐒𝟏 ) + 𝐍𝟐+ 𝐍𝟐→ 𝐍𝟐𝐎( 𝐒𝟏 ) + 𝐍𝟐 (69)

2.3.4. Les modifications attendues.

Les conditions réactives complètent le contrôle de la morphologie par une modification de la composition chimique de l’extrême surface traitée après greffage de groupements spécifiques (Figure 81).

Figure 81. Schématisation du mécanisme d’un traitement plasma développé sur un matériau polymère en conditions réactives.

Combinés avec O2, les plasmas réactifs utilisant N2, donnent naissance à la formation de groupements fonctionnels oxygénés type hydroxyle, carbonyle, carboxyle. La fonctionnalisation des surfaces par ces groupements hydrophiles permet d’augmenter la mouillabilité de surface et donc indirectement les propriétés d’imprimabilité et d’adhésion des matériaux polymères traités.

La versatilité des traitements permet d’envisager la modification des caractères hydrophiles, hydrophobes en fonction des propriétés visées. L’ajout de groupements spécifiques à la surface des matériaux est le facteur clé de ces traitements. La maitrise des paramètres ajustables du procédé est aussi un atout dans le contrôle de la composition chimique de surface.