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Chapitre 4 : le rôle de l’éducation au développement et des ONG dans l’engagement

3. L’apport des interventions d’éducation au développement et des ONG

3.2. Les changements d’attitudes et de comportements

des inégalités mondiales. Dès lors, des périodes plus ou moins longues séparent parfois la prise de conscience des changements d’attitudes et de comportements. Ces changements se situent à trois niveaux : le niveau pro- fessionnel, le niveau privé et le niveau de l’engagement.

Commençons par les changements d’ordre professionnel. D’abord, de manière générale, côtoyer un milieu engagé, que ce soit à travers des interventions d’éducation au développement ou à travers son propre enga- gement, permet au citoyen de poser des choix réfléchis concernant le secteur professionnel, et son orientation idéologique, dans lequel le citoyen souhaite s’investir. Ensuite, un témoin nous a parlé d’un changement dans sa manière de chercher un travail, survenu après une formation d’éducation au développement. Il avait décidé de suivre cette formation justement parce qu’il ne se sentait pas en phase avec l’entourage professionnel dans lequel il évoluait et souhaitait se réorienter.

Poursuivons par les changements au sein de la sphère privée. Les expériences au Sud impactent les comporte- ments en amenant le citoyen à être satisfait de ce qu’il possède, en comparaison à ce que d’autres n’ont pas, et à vouloir simplifier son mode d’existence. Par ailleurs, côtoyer une culture qui éduque les enfants selon d’autres méthodes et valeurs a apporté à certains citoyens une vision nouvelle de leurs propres manières d’éduquer leurs enfants. Des changements sont également mentionnés au niveau relationnel. En effet, les citoyens qui participent à diverses interventions d’éducation au développement découvrent un type de communication non violente et ressortent souvent de ces activités avec un sentiment positif qu’ils souhaitent intégrer dans leurs différentes relations.

Venons-en aux changements au sein de la sphère d’engagement. D’abord, le retour en Belgique des nombreux témoins qui ont participé à une expérience au Sud est souvent marqué par le souhait de trouver des réponses aux injustices et de s’engager plus et à plus long terme. L’intérêt pour la région visitée se trouve également renforcé. Par ailleurs, la participation à des formations d’éducation au développement donne des pistes d’enga- gement concrètes en permettant au citoyen de s’informer sur les initiatives existantes, sur les opportunités de bénévolat au sein de certaines ONG, et plus généralement sur les alternatives au modèle dominant.

Parmi les changements au sein de la sphère d’engagement, ce sont les changements de comportements de consommation qui sont les plus fréquents. Cependant, il est difficile de les imputer uniquement à l’éducation au

73 fient très lentement, comme une réponse à un ensemble de facteurs. Nous les présentons donc ici sans attribuer à l’éducation au développement une part de responsabilité prépondérante par rapport aux autres facteurs clés. D’abord, les citoyens décident de consommer moins. Ce choix concerne l’alimentation, l’habillement ou encore le transport. Dans ce sens, les citoyens décident de changer de moyens de déplacement afin de diminuer leur consommation de carburant. Ils privilégieront la marche, le vélo et les transports en commun plutôt que l’utili- sation d’une voiture privée, et ils choisiront leur destination de vacances de manière à ne pas devoir prendre un avion. Dans la décision de consommer moins, une expérience au Sud joue souvent un rôle, car le citoyen s’est trouvé confronté soit à des populations qui possèdent moins, soit à des populations qui cherchent à consommer plus de biens sans pour autant satisfaire leurs besoins vitaux, soit à des populations qui n’ont pas de gestion organisée des déchets, dont la quantité apparaît alors très clairement. Tout en cherchant à consommer moins, les citoyens décident également de consommer de manière plus responsable. Pour cela, ils privilégient l’achat de produits équitables malgré leur coût plus élevé. Pour Brigitte, c’est au contact d’un cercle social engagé, qu’elle avait rencontré lors d’une formation d’éducation au développement et avec qui elle a tissé des liens, que le changement de comportements vers une consommation plus responsable s’est opéré. Elle explique :

« Il y avait la centrale d’importation des Magasins du monde entre mon bled et la ville la plus proche. Et mes amis allaient acheter là le café Nicaragua. Je trouvais qu’il était trop cher pour moi. (...). Mais je suis quand même allée avec eux voir la centrale. Donc, j’ai aussi un peu fait connaissance avec tout ça. Finalement, un jour, j’ai aussi décidé qu’au lieu de boire 4 tasses de café, j’en boirais deux de ce café du Nicaragua ».

Par ailleurs, les citoyens qui s’inscrivent dans l’optique d’un changement de comportements de consommation parlent de leur volonté de mieux comprendre l’économie mondiale et locale. Ils évoquent également quelques- unes des difficultés qui les empêchent de consommer totalement en accord avec leurs valeurs. Ces difficultés sont l’éloignement des lieux de production locaux, le coût des produits équitables, la colocation avec d’autres personnes qui ne sont pas engagées, ou encore la vie en milieu urbain.

3.3. L’empowerment

Nous avons vu à la fin du deuxième chapitre que l’engagement joue sur l’empowerment des citoyens. Qu’en est-il de l’éducation au développement ? Nous allons ici reprendre trois des quatre dimensions du pouvoir déjà présentées dans le rapport. D’abord, au niveau du « pouvoir intérieur », les interventions d’éducation au déve- loppement jouent sur la capacité qu’ont les citoyens d’influencer leur vie, justement en proposant les change- ments de certains types de comportements que nous évoquions au point précédent. Ensuite, « le pouvoir de » se trouve lui aussi renforcé par l’éducation au développement par le fait que cette dernière emploie des méthodes participatives qui amènent le citoyen à développer une certaine créativité qui peut plus tard le rendre apte à résoudre des problèmes. Enfin, l’éducation au développement, en proposant des schémas d’argumentation – nous allons y venir – influence le « pouvoir sur », précisément parce qu’à leur contact, le citoyen se trouve plus à même de guider les autres par sa propre sensibilisation. Dès lors, nous pouvons conclure que l’éducation au développement, tout comme l’engagement, joue de façon positive sur l’empowerment des citoyens.