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Partie 3 : Le psychomotricien au sein du réseau de psychiatrie périnatale

B) Les aspects qualitatifs des perturbations

C’est lorsque la Mère décode de la mauvaise façon les signaux envoyés par son bébé. Cela se traduit alors par une inadéquation des réponses de la Mère par rapport aux demandes du nourrisson. Cela peut aussi être lorsque la Mère ne remarque pas les signaux émis par son bébé pour attirer son attention.

A chaque fois que son nourrisson pleurait, Mme S lui donnait la tétée pour le soulager. Le seul décodage que Mme S faisait des pleurs et des cris de son nourrisson était qu’il avait faim. Avait-il faim à chaque fois qu’il pleurait ? Est-ce que ces signaux d’appels étaient le signe d’autre chose : fatigue, gène, besoin de réconfort, douleur, besoin de changer la couche...etc. ? La perturbation de l’interaction est au niveau de la réciprocité de l’échange si le bébé pleure parce qu’il est fatigué et que la Mère y répond en lui donnant le sein. Le bébé se sentira-t-il compris dans ses désirs et besoins ? Comprendra-t-il le lien de causalité ?

Cette perturbation de la réciprocité peut aussi émaner du nourrisson, lorsqu’il reste insensible aux diverses stimulations de la Mère par exemple ou qu’il se montre activement opposant à celles-ci.

L’observation de la dynamique interactive entre la Mère et son enfant est donc primordiale et la réciprocité des échanges entre ces deux partenaires est un élément riche à prendre en compte. Cette réciprocité se joue au niveau comportemental mais aussi affectif (on parlera de désaccordage affectif).

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Greespan et Liebermann décrivent différents comportements en lien avec cette notion de réciprocité :

 les comportements contingents : Les réponses sont directes et appropriées aux signaux du partenaire, que ce soit la Mère ou le bébé.

 les comportements non contingents : Les réponses sont dénuées de lien avec le comportement du partenaire.

 les comportements anti-contingents : Les réponses sont contraires aux signaux émis par le partenaire.

Dans le cas de la vignette clinique ci-dessus, si le bébé pleure parce qu’il est fatigué, le comportement de la Mère (lui donner le sein) serait non contingent avec le comportement de son bébé. Des comportements anti-contingents seraient que la Mère rigole lorsque son bébé pleure par exemple, ou de le stimuler lorsqu’il est fatigué (ce qui serait aussi de l’hyperstimulation).

2) Perturbation du déroulement temporel

Il paraît également important d’observer le déroulement temporel de l’interaction maman-bébé : est-ce qu’il existe une discontinuité (la Mère ne répond jamais de la même façon) ou des mini-coupures au cours de l’échange (la Mère joue avec son bébé, rigole et tout d’un coup s’en va)? Y a-t-il des petits retards lors de l’émission des réponses (le bébé pleure et la maman met quelques minutes à répondre)?

Le plus important à remarquer c’est si cela cause un problème dans l’harmonisation et la réciprocité de l’interaction. S’il y a des retards, une discontinuité ou des coupures et que la maman et le bébé arrivent à harmoniser leur interaction et à s’ajuster, il n’y a pas de perturbations notables. Cependant, il y a perturbation si cela arrive souvent et que la maman et le bébé n’arrivent pas à s’ajuster.

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Les problématiques du déroulement temporel sont ainsi en lien avec les notions de macro-rythme et de micro-rythme de D. Marcelli :

• Les macro-rythmes concernent les interactions de soins (le change, le repas, le coucher) qui sont des activités relativement stables et répétitives. Le bébé va pouvoir repérer ces situations et les anticiper.

• Les micro-rythmes concernent toutes les interactions impliquant des moments de surprises, d’étonnements, de nouveauté.

Les macro-rythmes sous-tendent les notions de continuité, de stabilité et de répétition alors que les micro-rythmes ont attrait à la rupture, au changement, à la nouveauté, à l’évolution. Le but est de trouver un juste milieu entre tout cela.

Il peut donc y avoir plusieurs problématiques liées à ces macro-rythmes et à ces micro-rythmes :

• une interaction Mère-enfant identique à elle-même dans le déroulement temporel, ne changeant et n’évoluant pas donc n’ayant pas assez de nouveauté (de micro-rythmes),

• une interaction avec trop de micro-ruptures et de nouveautés et dans laquelle le bébé et la Mère ne s’ajustent pas,

• une interaction n’ayant pas assez de rythmes, de continuité et de stabilité. Le bébé ne peut donc pas s’adapter et anticiper et est toujours en hypervigilance, • une interaction ayant une alternance de tout ou rien : des périodes

d’hypostimulations alternant avec des périodes d’hyperstimulations.

Ces perturbations du déroulement temporel sont en rapport avec les notions de fixation et de régression des modalités interactives.

3) La fixation et les régressions des modalités interactives

Ce sont Mazet et Stoleru qui ont développé ces deux termes en démontrant que l’interaction Mère-enfant est un processus évolutif qui subit une maturation. L’interaction doit donc être appréhendée en fonction de l’âge et du développement de l’enfant.

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Parfois, il peut se révéler qu’une Mère et son enfant sont restés (fixation) ou sont revenus (régression) à des modalités interactives relatives à un stade de développement de l’enfant davantage précoce. Inversement, la Mère peut exiger une autonomisation trop précoce de l’enfant alors que celui-ci ne peut pas y répondre.

Par exemple, on peut retrouver une Mère qui demande à son enfant d’être propre à un an alors que son contrôle sphinctérien ne le permet pas ; ou une Mère et son enfant ayant gardé une relation symbiotique à un âge où d’autres modes de communication devraient être instaurés.

Il y a donc plusieurs types de perturbations des interactions Mère-enfant. Ces perturbations sont importantes à déceler car cela peut être la cause de signes de souffrance chez le nourrisson.