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Le principe des capitaux entièrement publics

Dans le document L'évolution des modalités de gestion (Page 52-54)

Section 1 – L'exigence du contrôle analogue

A. Le principe des capitaux entièrement publics

La CJCE a précisé dans son arrêt Carbotermo (point 37) que la détention de la totalité du capital d'une société adjudicataire par un pouvoir adjudicateur, seul ou avec d'autres pouvoirs publics, est un élément nécessaire mais pas suffisant pour l'existence du contrôle analogue au sens de l'arrêt Teckal. Même si la composition du capital est appréciée au moment de la conclusion du contrat, comme il apparaît dans l'arrêt

Stadt Halle, la Cour exerce en outre un contrôle assez strict des montages qui font apparaître un capital

entièrement public au moment de la conclusion du contrat dans le seul but d'éviter l'application des directives : dans son arrêt Commission c. Autriche, elle a en effet censuré une procédure dans laquelle apparaissait qu'il y avait eu passation d'un contrat sans mise en concurrence au motif que l'entité bénéficiait de l'exception Teckal, sauf à ouvrir le capital de la société à un partenaire privé avant le démarrage des activités prévues par le contrat. Dans l'arrêt Parking Brixen, l'ouverture à court terme du capital à des actionnaires privés constitue, entre autres, un indice de l'absence de contrôle analogue. Au contraire, dans l'arrêt Sea srl, l'ouverture du capital à des investisseurs privés n'empêche l'application de l'exception Teckal que si elle s'inscrit dans une perspective concrète et à court terme : au nom de la sécurité juridique, qu'elle avait déjà mis en avant dans l'arrêt Commission c. Italie, la Cour considère qu'il n'est pas possible de remettre en permanence en discussion la passation des contrats avec des quasi-régies du seul fait qu'une ouverture du capital serait envisageable da façon purement théorique.

En ce qui concerne cet aspect, la loi de 2010 semble satisfaisante dans son principe, mais peut ouvrir la voie à une certaine insécurité. En effet, le premier alinéa du nouvel article L. 1531-1 CGCT dispose que le capital est entièrement détenu par une ou plusieurs collectivités territoriales ou leurs groupements. Le partage entre

48 les différents personnes publiques est libre : à la différence de ce qu'il est prévu pour les sociétés publiques locales d'aménagement (art. L. 327-1 al. 2 C. urb.), pour les SPL il n'est pas fait obligation à une collectivité de détenir au moins la majorité des droits de vote. Le législateur a donc voulu exclure les établissements publics, les groupements d'intérêt public et les syndicats mixtes, ainsi que l'État, de l'actionnariat des SPL. Ce dernier élément en particulier devrait permettre de mieux identifier le contrôle analogue sur la société, mais il faut considérer que sur ce point la prudence s'impose : même si dans l'arrêt Asemfo la participation quasi totalitaire de l'État n'a pas empêché à la Cour de justice d'admettre l'existence du contrôle par les communautés autonomes, cette solution dépendait largement des circonstances de l'espèce, qui permettaient d'identifier un strict encadrement de l'entité considérée par des dispositions législatives et réglementaires (v.supra, p. 15).

Nonobstant la prévision de l'article L. 1531-1, les autres règles applicables à la cession des actions sont contenues dans le renvoi aux dispositions relatives aux SEML et aux sociétés commerciales de droit privé85. Deux difficultés peuvent être relevées de ce point de vue : d'abord, il apparaît problématique admettre dans le cas des SPL la possibilité pour les salariés de souscrire des actions de la société, comme il est prévu par l'article L. 225-177 du code de commerce. Cette possibilité semble difficilement conciliable avec la nature des SPL, qui diffèrent des sociétés anonymes en raison de leur soumission aux personnes publiques actionnaires. Ensuite, l'article L. 1522-1 CGCT admet la possibilité pour les collectivités territoriales et étrangères de prendre des participations dans le capital des SEML. Cette hypothèse apparaît de difficile application dans le cadre des SPL, parce qu'elle permettrait difficilement de remplir les deux conditions posées par l'article L. 1531-1, même si elle ne saurait être exclue d'un point de vue textuel : l'article L.1522-1 assimile la participation des collectivités étrangères à la part de capital détenue par les collectivités territoriales françaises. Il s'agit d'une hypothèse limitée à certaines activités dans lesquelles la coopération transfrontalière pourrait intervenir sans préjuger le lien étroit entre la collectivité territoriale et l'entité in

house.

En ce qui concerne les règles applicables aux cessions de capital, l'article L. 1524-1 CGCT dispose que, en cas de modification de la composition du capital, une délibération de l'assemblée d'une collectivité territoriale doit intervenir préalablement à l'accord de son représentant dans les organes de la société, à peine de nullité. Cette forme de contrôle de la part de la collectivité actionnaire pourrait constituer un élément de garantie pour le maintien du capital public, mais des règles supplémentaires devraient être contenues dans les statuts de la société. La prise de participations par des actionnaires privées correspondrait au changement de la forme de la société, qui deviendrait une SEML ou une société anonyme de droit commun et perdrait tout droit aux contrats conclus sans publicité et mise en concurrence, ainsi que le caractère d'opérateur in house. En vertu du parallélisme des compétences, la collectivité territoriale devrait adopter une délibération, comme

85 Dans un avis du 10 novembre 1993, la Section de l'intérieur du Conseil d'État a énoncé que « le transfert de la

propriété d'une entreprise du secteur public au secteur privé ne peut être effectué qu'en vertu d'une loi en posant les règles, conformément aux dispositions de l'article 34 de la Constitution ». Les règles des lois de privatisation de 1986 sont applicables aux SEML comme aux autres entreprises du secteur public, en absence de dispositions contraires.

49 dans le cas de la création de la société, se prononçant sur la forme sociale et les statuts. Dans cette hypothèse, la Cour de justice a précisé que l'ouverture du capital pendant la durée de validité du contrat attribué sans mise en concurrence constitue un changement d'une condition fondamentale du contrat qui nécessiterait une mise en concurrence (arrêt Sea srl, point 53). En outre, toute disposition statutaire laissant ouverte la possibilité concrète d'ouverture du capital conduirait également à écarter l'application de la jurisprudence

Teckal. Il peut en aller autrement si le partenaire privé est choisi selon une procédure concurrentielle.

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