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CHAPITRE 2 : MODÈLE D’ANALYSE ET MÉTHODOLOGIE DE RECHERCHE

2.3. MÉTHODOLOGIE DE LA RECHERCHE

2.3.2 Le plan d’observation

Dans cette section nous présentons dans l’ordre, la structure de la preuve, la population à l’étude, la méthode de collecte des données considérée, l’instrument d’observation et la méthode d’analyse des données de la recherche. Notre méthodologie est ainsi inspirée des travaux de Bronfenbrenner et Luce (2004), du European Foundation for the Improvement of Living and Working Conditions (2006) et de Hickey et Schenk (soumis), travaux qui analysaient également des données secondaires compilées notamment via un repérage médiatique.

A) Structure de la preuve

Notre structure de preuve est basée sur une description et un recensement des évènements de restructuration dans le secteur manufacturier québécois entre 2003 et 2008. Cette stratégie de preuve est appropriée considérant notre question de recherche qui vise à évaluer l’ampleur et la nature des restructurations dans les établissements manufacturiers au Québec entre 2003 et 2008. À partir des multiples évènements étudiés, notre recherche permet de dépeindre l’ensemble de l’objet de la recherche soit la restructuration du secteur manufacturier québécois, en analysant les données recueillies sur une base agrégée.

B) Population à l’étude i) Niveau d’analyse

Alors que la plupart des études portant sur notre sujet avaient adopté le niveau macro-économique comme niveau d’analyse de l’ampleur de la restructuration (par exemple, en termes de variation de l’emploi), nous avons opté de manière novatrice pour l’établissement comme niveau d’analyse. Notre recherche permet d’aller au-delà de l’analyse macro sur la restructuration des entreprises grâce à la richesse de l’information colligée au niveau des établissements.

Pour des fins d'analyse, nous avons fait une distinction entre plusieurs niveaux d’analyse, tel que celui de l’entreprise et celui de l’établissement. Selon Industrie Canada (2008a), l’établissement » est défini « …comme étant l'unité de production la plus homogène pour laquelle l'entreprise tient des livres comptables grâce auxquels il est possible de compiler des données sur les intrants utilisés dans le processus de production (coût des matériaux, des services, de la main-d’œuvre et

du capital) et la valeur brute de la production (ventes, expéditions, revenus et stocks totaux) ». Selon l’OCDE (2006 : 415), “An establishment is a unit that engages, under a single ownership or control, or predominantly one, kind of activity at a single location; for example a workshop or factory”. Ainsi, dans le secteur de la fabrication l'établissement correspond généralement à une usine (Statistique Canada, 2006). D’autre part, l’entreprise comme unité de mesure dans les enquêtes sur les entreprises, se définit « … comme étant l'unité organisationnelle (personne juridique ou morale) d'une entreprise qui dirige et contrôle l'attribution des ressources relatives à ses opérations intérieures et pour lesquelles on tient des comptes et des états financiers consolidés grâce auxquels on peut établir des transactions internationales, une situation d'investissement à l'échelle internationale et une situation financière consolidée » (Statistique Canada, 2006). Notre recherche procède au niveau des évènements des établissements et non au niveau des entreprises.

ii) Unité d’analyse

Notre unité d'analyse est un événement de restructuration impliquant une diminution des effectifs. En revanche, nous n’avons donc pas tenu compte par exemple des évènements d'investissement et de création d'emplois qui ont pu aussi contribuer à la restructuration du secteur comme le fait l’EMCC. Il nous apparaissait plus pertinent d’analyser les évènements impliquant des licenciements collectifs considérant leurs conséquences négatives pour les travailleurs. Par ailleurs, il est préférable de recourir à un évènement de restructuration qu’à l’établissement comme unité d’analyse. La raison principale est qu’un même établissement a pu connaître différents épisodes de restructuration au cours de la période étudiée. Plusieurs vagues de mises à pied successives au cours des années ont pu par exemple précéder une fermeture définitive.

iii) Population

La population à l’étude est l’ensemble des évènements de restructuration dans les établissements du secteur manufacturier québécois survenus entre le 1er janvier 2003 et le 31 décembre 2008 ayant engendré des pertes d’emploi. Plus précisément, les critères d’appartenance à la population sont que l’événement:

1. Soit survenu au sein du secteur manufacturier québécois (Fabrication SCIAN 31-33);

2. Ait comporté un licenciement d’au moins 10 personnes d’une durée d’au moins 6 mois survenu entre le 1er janvier 2003 et le 31 décembre 2008.

C) Sources et collecte des données

Les données ont été obtenues de façon « ouverte », puisque ce sont des données publiques. Plus spécifiquement, dans le cadre de notre recherche nous avons utilisé comme première source de données secondaires, la liste des avis de licenciements collectifs envoyé au Ministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale entre 2003 et 2008. Selon l’article 84.0.4 de la Loi sur les normes du travail (c. 80, a. 49.), « Tout employeur doit, avant de procéder à un licenciement collectif pour des raisons d’ordre technologique ou économique, en donner avis au ministre de l’Emploi et de la Solidarité sociale… ». Par ailleurs, ces avis sont donnés dans le cas de licenciements correspondant à la définition donnée à l’article 84.0.1 de cette même loi : « Constitue un licenciement collectif régi par la présente section une cessation de travail du fait de l’employeur, y compris une mise à pied pour une durée de six mois ou plus, qui touche au moins 10 salariés d’un même établissement au cours d’une période de deux mois consécutifs.» Selon l’article 35.0.2 du Règlement sur les normes du travail, l'employeur doit transmettre l'avis de licenciement collectif avec les renseignements requis par la poste à la Direction

générale des opérations d'Emploi-Québec du ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale et en transmettre une copie à la Commission des normes du travail (CNT) et à l'association accréditée (syndicat).

Une limite de cette source documentaire concerne le manque de conformité des employeurs à la règle qui prescrit la soumission du préavis de licenciement au ministre de l’Emploi et de la Solidarité sociale tel que rapporté par Hickey et Schenk (soumis) pour l’Ontario. Une autre limite est que les évènements de restructuration retenus sont ceux ayant donné lieu à au moins 10 mises à pied d’une durée d’au moins 6 mois. Il y a donc certains évènements qui ne peuvent être pris en considération ici. Cependant, la population constituée est composée des évènements les plus significatifs.

Pour le reste, puisque l’obligation faite aux employeurs par la loi indiquant de donner avis au ministre de l’Emploi et de la Solidarité sociale remonte à 2003 (Commission d’accès à l’information du Québec, 2008), les évènements de licenciements collectifs de 2002 ne figurent pas dans la liste d’avis à laquelle nous avons eu accès.

Notre deuxième source de données secondaires visant à colliger des informations complémentaires sur les évènements de restructuration est le repérage médiatique. Nous avons cherché rétrospectivement de l’information sur les événements de restructuration et procédé ainsi à l’analyse de la presse nationale, régionale et spécialisée. Pour ce faire, nous avons utilisé la base de données EUREKA C.C (=Bibliobranché) à laquelle nous avons accès par l’entremise de l’Université de Montréal. Dans un premier temps, nous avons débuté la recherche à partir de 2003 (début de la décroissance de l’emploi dans le secteur manufacturier) et nous avons retenu les sources francophones nous permettant de

constater l’étendue des restructurations au Québec dans le secteur manufacturier. Les médias que nous avons consulté sont : Acadie Nouvelle ; Affaires Plus; Les Affaires; Commerce ; Le Devoir; Le Droit; Finance et Investissement ; Le Nouvelliste (Trois-Rivières) ; PME ; Presse Affaires ; La Presse canadienne ; La Presse ; Progrès-dimanche ; Le Quotidien ; Le Soleil ; La Tribune (Sherbrooke, QC) ; La Voix de l'Est. Cette liste couvre autant les médias nationaux que régionaux afin de ne pas négliger des évènements survenus en région et qui auraient pu être oubliés par la presse nationale. Comme pour les données de source médiatique recueillies par l’ERM, les données issues de la presse sont de nature publique. Il n’y a donc pas d’implication au niveau de la confidentialité de l’information. En plus d’obtenir les informations complémentaires sur les évènements compilés dans la liste du ministère, le repérage médiatique nous a permis de trouver d’autres évènements de événements de restructuration non rapportés par le ministère.

Dans le but de compléter l’information colligée dans la Liste des avis de licenciements collectifs et dans les médias, pour chacun des évènements de restructuration, nous avons eu recours aux banques de données électroniques (Lexis-Nexis, Mergent Online, Fortune’s Global 500, Financial Post 500, et d’autres classements du même acabit) ainsi qu’aux sites Internet corporatifs. L’analyse du contenu des communiqués de presses et des rapports annuels publiés sur ces sites ont fourni des données supplémentaires sur les évènements de restructuration. Nous avons procédé à la recherche en indiquant des mots-clés tels que restructuration, mise à pied, fermeture, faillite, délocalisation et sous- traitance, licenciement, acquisition et fusion. Les informations sur le marché du travail publiées par le Gouvernement du Québec (ex. Bulletin régional sur le

marché du travail) a constitué une autre source consultée. Nous avons aussi eu

recours au Registre des entreprises (liste structurée d'entreprises produisant des biens ou rendant des services au Canada produite par Statistique Canada

(2008b)), au site Strategis, et à une compilation des usines fermées de

Ressources naturelles et Faune Québec.

D) Instrument d’observation

L’instrument d’observation de notre recherche est une grille d’analyse de données documentaires. Nous nous sommes basés entre autres sur l’European

Restructuring Monitor (ERM) un outil de veille sur les restructurations

d’entreprises,, établi par l’Observatoire européen du changement de l’European Monitoring Centre on Change en 2003 pour élaborer notre outil (Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail, 2004). L’ERM enregistre les évènements de restructuration industrielle tels qu'ils sont rapportés par la presse. L’outil prend en compte les annonces de réductions ou de créations d'au moins 100 emplois ou touchant 10% de la main d’œuvre de sites employant au moins 250 personnes. Les évènements sont repérés par l’entremise de la consultation des quotidiens et de la presse financière des 27 États-membres de l'Union européenne et de la Norvège. C’est un outil statistique de compilation d’informations quantitatives sur les activités de restructuration dans l’Union Européenne (UE). Il présente une vue d’ensemble régulière des activités de restructuration en Europe et analyse les conséquences pour l’emploi annoncées par les sociétés et organisations concernées. Le Tableau 2.8 donne un aperçu de la grille utilisée par l’ERM pour analyser les événements de restructuration.

Announcement date

Country Company Type of

restructuring Sector Planned job creation Planned job reductions

14-03-2009 Slovenia Merkscha Internal restructuring

Manufacturing 112

13-03-2009 United Kingdom

Omron Bankruptcy/Closure Manufacturing 242

13-03-2009 United Kingdom DHL Bankruptcy/Closure Transport / communication 300 13-03-2009 Czech Republic ČZ Strakonice Internal restructuring Manufacturing 232

13-03-2009 World Deceuninck Internal restructuring Manufacturing 330 13-03-2009 United Kingdom Renishaw Internal restructuring Manufacturing 470 12-03-2009 Ireland Principles Retail Ireland Bankruptcy/Closure Retail 216 12-03-2009 Germany Harman Becker Internal restructuring Manufacturing 950 12-03-2009 United Kingdom NCR Internal restructuring Manufacturing 252

12-03-2009 Germany Gea Internal restructuring

Manufacturing 100 - 200

Source :European Restructuring Monitor, Fact Sheet

<http://www.eurofound.europa.eu/emcc/erm/index.php?template=searchfactsheets> site consulté le 28 mars 2009.

Nous basant sur cet outil, nous avons élaboré notre instrument d’observation sous forme d’un chiffrier Excel qui consiste en une grille d’analyse de données documentaires qui renferme des rubriques représentant nos variables. Le Tableau 2.9 donne un aperçu de notre propre grille d’analyse de contenu. Une définition Tableau 2.8 : Aperçu de la grille d’analyse de données – European Restructuring Monitor

pour chaque rubrique est présentée à l’Annexe 4. Les rubriques utilisées dans la codification des évènements de restructuration de notre recherche sont:

- Date de publication de l’annonce - Pays

- Établissement

- Type de restructuration - Année d’établissement

- Impact sur les activités de l’établissement - Secteur

- Intensité de la technologie - Pertes d’emplois planifiés

- Année de constitution de l’entreprise - Année de constitution de l’établissement - Âge de l’établissement

- Raisons de la restructuration - Nom du groupe

- Localisation – Région administrative - Pays concerné par la restructuration - Fonctions concernées

- Autre(s) entreprise(s) concernée(s) - Source

- Date de licenciement

- Année de la restructuration :

- Commentaires de l’analyste (si nécessaires) : - Taille de l'établissement :

- Nombre d’employés du groupe

- Nombre d’employés de l’établissement - Impact sur l’emploi (début) :

- Impact sur l’emploi (fin) : - Liens utiles

E) Méthodes d’analyse des données

La méthode d’analyse des sources de données secondaires retenue est l’analyse de contenu. L’analyse des données est de nature qualitative. Les informations amassées ont servi à déterminer la modalité que devaient prendre les variables pour un événement donné. Par ailleurs, le processus de détermination des modalités pour un cas donné pouvait requérir un jugement qualitatif du chercheur. Par exemple, il aura à déterminer la nature de la restructuration en fonction de la typologie utilisée à partir des données recueillies.

Pour la présentation des résultats, nous avons fait usage des outils de statistique descriptive notamment les mesures de fréquence (Gauthier, 2006). Nous avons aussi ventilé les résultats et fait des croisements appropriés pour l’ampleur (en termes d’événements et d’emplois perdus) et la nature des restructurations en fonction des variables contrôles retenues (voir la section 2.2.3).

Tableau 2.9 : Aperçu de la grille d’analyse de données documentaires des évènements de restructuration

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