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Chapitre I-2. L’estimation des fonctions de dommages

3. Le phénomène des incendies : éclosion et propagation

L'incendie de forêt est un phénomène physico-chimique. Il s'accompagne d'une émission d'énergie calorifique et peut être décomposé en trois phases : évaporation de l'eau contenue dans le combustible, émission de gaz inflammables par pyrolyse et inflammation.

3.1. Eclosion des feux

Pour qu'il y ait inflammation et combustion, il faut que les trois éléments – chaleur, oxygène et combustible – se conjuguent en proportions convenables.

L’inflammabilité des végétaux rend compte de la facilité avec laquelle ils peuvent s'enflammer quand ils sont exposés à une source de chaleur. Le calcul du délai et de la fréquence d'inflammation permet de déterminer une note d'inflammabilité pour chaque espèce. Elle est faible pour l'arbousier et forte pour la bruyère arborescente, le chêne vert, le pin d'Alep.

L’inflammabilité dépend de certains facteurs naturels : teneur en eau et composition chimique des végétaux, mais aussi des paramètres météorologiques. Il existe de nombreuses et complexes interactions entre les facteurs physiques du milieu naturel et les caractéristiques biologiques des combustibles. Il est donc très difficile de faire la part de chaque paramètre dans le déclenchement des incendies.

3.2. Le comportement des incendies

Le comportement du feu, expression qui désigne l’ensemble des activités et des phases (pyrolyse et combustion, pour l’essentiel) d’un feu, s’analyse à partir de la physique et de la chimie de la combustion. Les éléments importants de l’analyse sont alors les caractéristiques physiques, chimiques et thermiques des particules de combustible, les caractéristiques physiques des strates de combustible, la nature du processus de combustion et des mécanismes de l'éclosion.

Cette logique propre est à combiner avec les relations qu’entretient le feu avec les trois composantes de son environnement :

• Le combustible, c’est-à-dire l’ensemble de la végétation vivante ou morte supportée par le sol. • La topographie : altitude et reliefs.

• Les facteurs météorologiques à court et long termes.

3.3. Energie et rayonnement dégagées par le feux

L’énergie dégagée par un feu correspond à la "puissance du front de feu" (Byram G. M., (1959), Tangren C.D., (1976)), elle mesure la quantité de chaleur dégagée par unité de temps et de longueur de front de feu. En effet, comme l’explique Trabaud L., (1979), "il faut un certain laps de temps pour que le combustible soit brûlé, la chaleur dégagée ne sera pas confinée à la partie avant du feu, mais s’étendra sur toute la largeur de la bande qui est en combustion".

Puissance du feu et rayonnement thermique

5 W/cm2 Rayonnement à 5 m d’un feu d’une puissance de 10 000 kW/m*

3-4 W/cm2 Cuisson au barbecue

2 W/cm2 Rayonnement à 15 m d’un feu d’une puissance de 10 000 kW/m*

0,65 W/cm2 Rayonnement mortel (brûlures du second degrés au delà de 90 secondes d’exposition)

0,2 W/cm2 Douleurs aux mains prés d’un feu de cheminée

0,1 W/cm2 Rayonnement solaire au Sahara

* Un feu moyen de la région méditerranéenne développe 50 000 kW/m

D’après Chevrou R.B., (1998)

Ainsi, un front de feux se déplaçant à 0,5 m/s et brûlant 1 kg/m2 de combustible végétal, développe une puissance de prés de 10 000 kW/m. La longueur moyenne des flammes est de 7 mètres et leur température de 1 100 °C (Chevrou R.B., (1998)). Le rayonnement est un puissant facteur de propagation du feu.

3.4. Les mécanismes physiques de propagation

La propagation d'un feu se décompose en quatre étapes (Trabaud L., (1989)) : combustion du matériel végétal avec émission de chaleur, transfert de la chaleur émise vers le combustible en avant du front de flammes, absorption de la chaleur par le végétal en avant du front de flammes, inflammation. Le transport de la chaleur émise par la combustion est assuré par trois processus :

• La conduction, correspondant à la transmission de proche en proche (agitation moléculaire) de l'énergie cinétique ; elle ne contribue que très faiblement au transfert de chaleur.

• Le rayonnement thermique, mode de propagation de l'énergie sous forme d'ondes infrarouges. C'est le mode principal de propagation des incendies de forêt.

• La convection, liée aux mouvements d'air chaud, dont l’importance augmente avec le vent et la pente. Ces mouvements peuvent, en outre, contribuer au transport de particules incandescentes en avant du front de flammes. Ce processus est à l'origine du déclenchement de foyers secondaires (sauts de feu).

Représentation schématique de la propagation d’un feu

U : Non brûlé, F : Flammes, S : combustion lente, X : brulé.

3.5. Principaux types de feux

La typologie des feux de forêt29 repose sur les différents modes de propagation et la position du feu par rapport à la surface. Trois principaux types de feux ont été définis (Davis K.P., (1959), Bernier G.H., (1965), Trabaud L., (1970)) :

• Les feux de surfaces, brûlent la surface du sol (litière, végétation herbacée, broussaille, débris, etc.) sans y pénétrer. Ils dégagent beaucoup de flammes et de chaleur.

• Les feux de cimes, avancent de la cime d’un arbre à la cime d’un autre, plus ou moins indépendamment du feu de surface. Ce sont des incendies typiques des forêts de conifères. Ils brûlent et se propagent rapidement en produisant une très grande énergie. Sous l’effet du vent des sauts de feux peuvent engendrer des incendies à de très grandes distances.

• Les feux de sol, consument la matière organique de la litière et de l’humus. Ils sont caractérisés par un front qui se consume lentement sans flamme en émettant peu de fumée. Ces feux sont difficiles à déceler et sont les plus destructeurs car ils tuent les systèmes souterrains de survie des végétaux. Ils sont aussi les plus difficiles à maîtriser car ils couvent sous la surface (jusqu’à plusieurs décimètres).

Au cours d’un incendie, ces types de feux peuvent se combiner et interagir.

La propagation du feu

Source : Guide technique du forestier méditerranéen français, chapitre 4 (Cemagref, 1989)

3.6. Typologie des méthodes d’estimation des risques de feu

Une fois l’incendie déclaré, le feux se propage. Dupuy J.L., (1997) distingue trois types de modèle d’évaluation de ce risque d’incendie par propagation :

• Les modèles probabilistes se basent uniquement sur les statistiques. Ils utilisent les données collectées pour déterminer les probabilités d’ignition, de départ de la phase de combustion. Pour l’essentiel, ces données sont disponibles par zones administratives dans lesquelles ces informations ont été collectées (régions, Etats, …).

• Les modèles semi-probabilistes utilisent les données historiques où les conclusions d’experts ou d’expérimentations pour ajuster des paramètres agissant sur les risques d’incendie. Ils permettent de prendre en compte des paramètres sans pour autant connaître l’ensemble des processus physiques qui conduisent aux incendies d’une part et de pallier aux manquent d’informations d’autre part.

• Les modèles déterministes reposent sur une formalisation de tous les mécanismes du feu à tous ses états : ignition, propagation, etc. En l’état actuel des connaissances, ce type de modèle ne peut pas encore recouvrir l’ensemble des facteurs de risque d’incendies.

3.7. Les modélisations du comportement du feu en forêt

Les travaux de recherche sur le feu de forêt sont destinés à améliorer les connaissances sur le phénomène du feu de combustibles forestiers et sur son comportement, sur les paramètres qui concourent à la combustion, sur ceux qui président à l'éclosion puis ceux de la propagation du feu. Pour ce faire, la méthodologie la plus commune recourt à des expérimentations menées dans les conditions contrôlées de laboratoire et sur le terrain, dans les divers écosystèmes forestiers. En parallèle, le comportement du feu est modélisé et les résultats des essais sont confrontés aux

prédictions du modèle. Sur la base de ces acquis, des outils et des méthodes sont élaborés pour la prédiction du risque d'incendie. La figure suivante illustre ces démarches.

Méthodologie de recherche

APPROCHE