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2. La Suisse comme laboratoire d'études

2.3 Structure par âge

La structure par âge et sexe des populations nées en Suisse et nées à l'étranger diffère à bien des égards. C'est d'abord le phénomène de vieillissement de la population, observé dans la plupart des pays occidentaux, qui caractérise la pyramide suisse. Ce déséquilibre démographique s'illustre par un bombement des effectifs pour les cohortes plus âgées, avec une part de personnes de plus de 65 ans qui atteint les 20% en 2014. Nous pouvons d'ailleurs y discerner les marques de différents événements historiques et comportements démographiques qui leur sont liés. Le

0% 20% 40% 60% 80% 100%

Océanie Asie Amériques Afrique Europe Ex-Yougoslavie France Portugal Italie Allemagne

2010-2014 2000-2009 1990-1999 1980-1989

1970-1979 1960-1969 < 1960

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bombement des effectifs observés aux âges de 70 ans et autour de 50 ans correspond aux deux inflexions de la fécondité du baby-boom. En effet, la Suisse a connu une augmentation rapide et prolongée de la natalité une première fois entre 1938 et 1946, puis une seconde fois entre 1952 et 1964, avec un nombre record de 112 890 naissances enregistrées en 1964 (Duvoisin 2017, 60). On peut aussi y voir une génération de jeunes adultes plus nombreuse. Ces enfants de baby-boomers sont toutefois largement moins nombreux que leurs parents. L'indice conjoncturel de fécondité, autour de 1.5 enfants par femmes dans les années 1990 (OFS 2018b), n'aura pas suffi au renouvèlement de la cohorte du baby-boom. La crise économique des années septante marque aussi la pyramide, soit par un recul des effectifs des trentenaires. A sa base, les moins de 15 ans comptent pour environ 20% de l'effectif total, soit une part relativement large. Ces effectifs regroupent les enfants d'immigrés nés après l'immigration. On compte en effet 20% de résidents de moins de 15 ans, nés en Suisse, qui ne possèdent pas la nationalité suisse.

Figure 5: Pyramide des âges

Effectif en milliers

Source : STATPOP 2014

La pyramide de la population née à l'étranger, en forme de toupie, est quant à elle beaucoup plus atypique. La structure par âge et sexe de cette population

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s'appréhende, non pas par une succession de cohortes de naissance, mais plutôt en fonction de l'âge à l'arrivée des immigrés. Par ailleurs, en plus du processus de vieillissement, c'est le processus de rétention des immigrés (ou a contrario l'émigration) qui assure principalement l'évolution verticale des effectifs. On ne sera pas étonné de voir une population composée majoritairement d'individus en âge d'activité, soit une part de 86% d'individus âgés entre 15 et 65 ans, souvent venus en Suisse pour occuper un emploi. Ces effectifs se réduisent toutefois considérablement dès 60 ans. Deux phénomènes expliquent cette situation. Le premier est qu'un nombre important d'immigrés effectuent une migration de retour dans le pays d'origine au moment de la retraite. Le second est que ces flux d'émigration ne sont que très peu compensés par de nouvelles arrivées de personnes âgées.

La Figure 6 documente l'âge à l'arrivée des immigrés la même année et fait écho à la forme de la pyramide de droite. On peut en effet y voir un maximum d'entrées sur le territoire helvétique entre 24 et 29 ans, avec un âge modal à 26 ans. Après 30 ans, le nombre d'immigrés réduit progressivement et se marginalise aux âges avancés. On y observe également les effectifs de jeunes enfants accompagnant leurs parents et que l'on retrouve au bas de la pyramide.

Figure 6 : Age à l'arrivée en Suisse

Source : STATPOP 2014

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29 2.4 Structure du ménage

La structure du ménage revêt une importance capitale pour qui veut comprendre les dynamiques résidentielles et professionnelles d'une population. Alors que la mise en couple et l'arrivée d'enfants sont associées à une plus forte mobilité résidentielle, la présence d'enfants dans le ménage tend à la réduire. L'accès à la propriété ou encore la taille des logements disponibles diffèrent quant à eux selon le milieu de vie (p. ex., zones périurbaines, milieux ruraux ou urbains) qui lui-même attire différents types de ménages. Quant aux dynamiques professionnelles, elles sont bien entendu sujettes à des stratégies familiales et donc intimement liées à la présence d'enfants dans le ménage, mais aussi, au succès professionnel du conjoint, le cas échéant.

Les formes de vies familiales sont en outre le reflet de certaines normes culturelles. Elles s'observent en particulier par la prévalence de la cohabitation (prémaritale), du mariage et de la parentalité dans ces deux formes d'union. La typologie des ménages présentée au Tableau 1 démontre une surreprésentation des couples (mariés ou non) avec enfant(s), soit 35 % de l'ensemble des ménages. Chez les non-Européens, cette part atteint les 46 %. Il est à noter que parmi les couples avec enfant(s), les couples non-mariés ne sont que marginalement représentés. Des variations s'observent toutefois entre groupes de nativité, avec des Suisses qui optent plus fréquemment pour cette configuration que les immigrés : 27 % des couples suisses avec au moins un enfant dans le ménage ne sont pas mariés, contre 17 % pour les Européens et 11 % chez les non-Européens.

Les couples sans enfant représentent un autre quart des effectifs de l’ensemble des ménages. Les non-Européens sont légèrement sous-représentés dans cette configuration et lorsqu'ils y sont, une large majorité d'entre eux sont mariés. Hormis les préférences culturelles, nous expliquons la prépondérance du mariage chez les non-Européens par certains droits qui lui sont attachés, notamment celui du regroupement familial, ou dans d'autres cas, une certaine garantie de prolongation de l'autorisation de séjour.

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Tableau 1 : Structure du ménage selon le pays de naissance du répondant, 20-65 ans, Suisse

Suisse UE28/

Hors-UE Tous AELE

Couple avec enfant(s) 33,3 32,1 46,3 34,9

marié 24,4 26,7 41,3 27,3

non-marié 8,9 5,3 5 7,6

Couple sans enfant 25,1 23,3 18,3 23,8

marié 15,4 14,4 15 15,1

non-marié 9,7 8,9 3,3 8,7

Ménage d'une personne 32,2 35,7 22,6 31,5

Ménage monoparental 6,7 4,9 7,3 6,4

Ménages multifamiliaux 0,3 0,5 3,6 0,8

Ménages non-familiaux avec plusieurs personnes 2,5 3,6 1,9 2,6

Total 100% 100% 100% 100%

Source : Relevé structurel 2014, valeurs pondérées

Près du tiers des ménages ne compte qu’un seul résident. Les migrants non-Européens échappent quelque peu à cette tendance avec une part de ménages d'une personne ne dépassant pas le quart des effectifs (23 %). Cette prévalence des ménages d'une seule personne est représentative d'une tendance historique, où depuis les années septante, le nombre de ménages de ce type a été multiplié par trois (OFS 2019a). En comparaison, les ménages constitués de couples sans enfant ont doublé alors que ceux de couples avec enfant(s) sont demeurés stables. En parallèle, le nombre d'habitants par logement est passé de 2,2 en moyenne en 2014 (2,1 pour les Européens et 2,8 pour les résidents nés à l'extérieur de l'UE) (Relevé structurel 2014) contre 2,9 en 1970 (OFS 2019b), une dynamique contribuant à la diminution des logements disponibles sur le territoire. Enfin, quelques différences s'observent chez les ménages multifamiliaux où l'on observe une surreprésentation d'immigrés non-Européens et chez les ménages non-familiaux (notamment des individus en colocation) qui comptent davantage d'immigrés européens.

2.5 Origine du partenaire

La mixité des couples, indiquée par une différence d’origine nationale entre partenaires, est souvent considérée comme un indicateur d'acculturation, en particulier chez les secondes générations. Nous nous garderons toutefois de lui donner un sens trop pointu dans le contexte de cette étude. Hormis le problème d'endogénéité que

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cette mesure suscite, il n'est pas possible de déterminer si la mise en couple survient avant ou après l'arrivée en Suisse. Chez les primo-migrants, il est en effet fréquent que la mise en couple précède la migration vers la Suisse : elle ne peut donc pas être interprétée comme marqueur d’acculturation.

Figure 7 : Origine géographique du partenaire selon le pays de naissance du répondant, 20-65 ans, Suisse

Note : Uniquement pour les couples cohabitant au sein d’un même ménage Source : Relevé structurel 2014, valeurs pondérées

La figure 7 montre qu'environ 50% des couples européens et non-européens cohabitant au sein d'un même ménage ont un partenaire de la même origine géographique. En revanche, nous constatons une plus forte proportion d'immigrés européens en couple avec un partenaire d’origine suisse, soit 32% d’entre eux, contre 26% chez les répondants nés hors de l'UE. Les Suisses, quant à eux, se mettent en couple avec un partenaire né en suisse dans 85% des cas.

2.6 Statut d'activité

La Suisse se caractérise par un fort taux d'activité — le deuxième parmi les pays de l'OCDE (OCDE 2019) — tant chez les hommes que chez les femmes, et a contrario, par un faible niveau de chômage. Hommes et femmes se distinguent toutefois par le

0% 20% 40% 60% 80% 100%

Hors UE28/AELE UE28/AELE Suisse

Partenaire né en Suisse Partenaire de la même origine Partenaire d'une autre origine

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temps en activité rémunérée et la part d'inactifs et d'inactives dans la population. Pour cette raison, nous présentons cette statistique séparément pour les deux groupes. Une fois de plus, le statut migratoire se pose comme variable déterminante du statut d'activité chez les 20 à 65 ans.

Plus des trois quarts des hommes, toutes origines confondues, occupent un emploi à temps complet, alors que moins d'un homme sur dix occupe un emploi à temps partiel. Les chômeurs sont quant à eux peu nombreux — autour de 4% — avec toutefois une surreprésentation d'immigrés nés hors UE/AELE (8,5%). Les différences entre groupes de nativité chez les hommes s'observent principalement entre actifs à temps complet, où les Suisses et les immigrés européens sont surreprésentés, et les inactifs, qui comptent une plus forte proportion d’immigrés nés hors de l'Union Européenne.

Figure 8 : Statut d'activité selon le sexe et la région de naissance du répondant, 20-65 ans, Suisse

Source : Relevé structurel 2014, valeurs pondérées

Chez les femmes, c'est la part d'actives à temps partiel qui ressort comme modalité prédominante, rassemblant 40% de l'ensemble des femmes. Ce sont toutefois les Suissesses qui sont le plus représentées dans cette modalité. En revanche, les Européennes sont plus nombreuses à travailler à temps complet, soit

0% 20% 40% 60% 80% 100%

Hors-UE UE28/AELE Suisse Hors-UE UE28/AELE Suisse

FemmesHommes

Actifs temps complet Actifs temps partiel Chômeurs Inactifs

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42% d’entre elles, contre 33% des femmes nées en Suisse et 30% de celles nées hors de l'UE. Enfin, tout comme leurs homologues masculins, les non-Européennes sont plus souvent touchées par le chômage (7%) et sont plus souvent inactifs (33%).

2.7 Secteurs d'activité

Les flux migratoires vers et depuis la Suisse sont fortement conditionnés par les transformations de l'économie locale et conséquemment, par l'évolution des besoins de main d'œuvre dans des secteurs plus ou moins qualifiés de l'économie.

En analysant les caractéristiques professionnelles des immigrants et des émigrants, Wanner, Zufferey et Fioretta (2019) documentent pour les années 2011 à 2014, un solde migratoire positif, tant chez les travailleurs qualifiés que chez les travailleurs non-qualifiés. Alors que l’on observe un certain phénomène de substitution de la main d’œuvre moins qualifiée (principalement due à des départs à la retraite de cohortes moins éduquées) par des travailleurs venus de l’extérieur, l’arrivée de migrants hautement qualifiés contribue à l’accroissement d’une force de travail locale de plus en plus qualifiée.

Le tableau 2 offre un portrait des secteurs d'activité selon l'origine en 2014, grâce aux données du relevé structurel. Alors que les Suisses marquent une plus forte présence relative dans les professions intermédiaires et de type administratif, les immigrés européens sont légèrement surreprésentés chez les dirigeants et cadres supérieurs et chez les ouvriers et employés non qualifiés. Cette distribution montre bien la contribution des flux migratoires aux deux extrémités de la hiérarchie des professions. Néanmoins, tout comme les Suisses, les immigrés européens comptent le plus fort de leurs effectifs de travailleurs dans les professions de types intellectuelles et scientifiques (environ 20% des effectifs).

Chez les non-Européens, on observe une surreprésentation de travailleurs dans certains secteurs moins prestigieux de l'économie, en particulier parmi le personnel de service et de vente et chez les ouvriers et les employés non qualifiés. Comme bien des pays occidentaux, la Suisse se tourne aujourd'hui vers une main-d’œuvre étrangère (européenne et non-européenne) pour desservir plusieurs secteurs d'activité, souvent délaissés et déconsidérés par la population locale, mais indispensable à l'économie (Sassen 1988). A ce compte, certains secteurs d’activité

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dépendent essentiellement d’une main d’œuvre étrangère. C’est le cas parmi le personnel domestique et de nettoyage, chez les opérateurs de machines ou encore chez les cuisiniers qui comptent une part de travailleurs immigrés frôlant les 60% à 70% (OFS : relevé structurel 2011-2014).

Tableau 2 : Secteurs d'activité selon la région de naissance du répondant, 20-65 ans, Suisse

Suisse UE28/

AELE Hors-UE Tous

Forces armées 0,2 0,0 0,0 0,1

Dirigeants, cadres supérieurs 11,2 13,0 8,4 11,2

Professions intellectuelles et scientifiques 22,9 22,7 14,8 21,9

Professions intermédiaires 22,1 16,2 12,8 19,8

Employés de type administratif 10,3 6,3 6,2 9,0

Personnel des services et vente 14,1 15,1 21,9 15,3

Agriculteurs 2,9 0,9 0,7 2,2

Artisans et ouvriers des métiers de type artisanal 10,2 12,4 13,6 11,1 Conducteurs de machines et assembleurs 3,3 5,1 7,6 4,2 Ouvriers et employés non qualifiés 3,0 8,4 14,0 5,4

Total 100% 100% 100% 100%

Source : Relevé structurel 2014, valeurs pondérées

2.8 Répartition spatiale et marché du logement

La Figure 8 fait état d'une répartition géographique inégale de cette population sur le territoire. Les opportunités d'emploi et la présence de réseaux dans un quartier ou une municipalité sont des déterminants clés dans le choix du lieu d'établissement (Huissoud et al. 1999). Ainsi, il n'est pas étonnant de voir une surreprésentation des immigrés dans les grandes villes et agglomérations. On constate en effet une forte présence immigrante (en pourcentage de la population) dans les régions de Zurich, de Bâle, de Lugano et dans tout l'arc lémanique.

Au total, on compte 27 communes (sur 2222) dont plus de 50% de la population est née à l'étranger. Dans la majorité des cas, il s'agit de grandes villes ou alors de plus petites communes adjacentes à ces dernières. On y retrouve par exemple les communes de Pregny-Chambésy ou du Grand-Saconnex, adjacente à Genève et connues pour abriter les sièges sociaux de plusieurs organisations internationales.

Dans de plus rares cas, il s'agit de communes touristiques, comme Leysin, une petite commune située dans les Alpes et dont la population est composée à près de 65%

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d'immigrés. En contrepartie, la Suisse centrale, très rurale, se caractérise par une faible présence de population immigrée.

La concentration des immigrés dans les principales agglomérations de la Suisse a des répercussions sur les conditions de logement et la mobilité résidentielle de cette population. On compte en effet des taux de logements vacants plus faibles dans ces régions et de fait, une plus forte compétition pour accéder à des logements attractifs.

Au niveau national, le taux de logement vacants était de 1,45% en 2018. En comparaison, cet indicateur se chiffrait à 9,6% en France (INSEE 2015). Cette moyenne cache bien évidemment d'importantes disparités régionales, avec des taux inférieurs dans les principales villes du pays (0,21 à Zurich ; 0,57% à Genève ; 0,38%

à Lausanne ; 0,47% à Bâle et 1,25% à Lugano).

Figure 8 : Répartition géographique des résidents permanents nés à l'étranger

Source : Office fédéral de topographie swisstopo (2018) - swissBOUNDARIES / OFS – Portrait régionaux

La compétition dans l'accès au logement s'est accentuée dans les dernières années, nous l'avons vu, des suites d'une diminution de la taille des ménages et d'une croissance démographique soutenue, en particulier dans les agglomérations où le solde migratoire international demeure positif. Cette situation contribue en outre à

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l'augmentation des prix du logement et à une raréfaction des logements plus abordables.

De même, l'accès à la propriété demeure limité, en particulier dans les grandes villes. Au niveau national, le taux de propriétaire est de 45% chez les natifs et de 14%

chez les ménages composés uniquement de non-nationaux (SFSO 2016). Il s'agit du plus faible taux de propriétaires parmi les pays de l'OCDE (OECD/EU 2018). Ainsi, l'accès à la propriété peut, dans certain cas, être contingente à une migration en direction de communes suburbaines ou périurbaines, là où les opportunités d'achats sont plus importantes. C'est ce que suggère une étude produite par Van den Hende (2015) et qui montre une logique de mobilité depuis les espaces urbains en direction des régions périphériques, expliquée en partie par un désir d'accéder à la propriété.

Les migrations vers les périphéries sont toutefois sélectives en termes socioéconomiques et concernent principalement les Suisses (Da Cunha et Roth 2004, tels que cités par Lerch 2012).

Dans une étude des flux migratoires à l'intérieur de la Suisse, Wanner (2019) documente des déplacements progressifs des personnes bénéficiant d'un revenu plus élevé vers des communes plus riches (notamment vers des communes périphériques des agglomérations) et inversement, des personnes à faible revenu en direction des communes plus pauvres. L'analyse de la mobilité résidentielle des personnes à plus faible revenu révèle par ailleurs une immobilité relative pour ces personnes. Lorsque ces personnes déménagent, elles tendent toutefois à se relocaliser au sein de la même commune (Wanner 2019).

Néanmoins, la ségrégation résidentielle demeure relativement faible en Suisse, qu'elle soit mesurée selon le niveau de revenu ou encore de l'origine nationale. Dans une étude récente, Zufferey (2019) analyse la ségrégation résidentielle des étrangers à différents niveaux géographiques pour la Suisse. Ce dernier conclut notamment à une plus forte dynamique ségrégative au niveau des régions qu'au niveau des quartiers, avec toutefois certaine spécificité selon la nationalité. En effet, certains groupes comme les Français, les Portugais et les Nord-Américains se concentrent principalement au niveau régional, alors que certains groupes associés à un plus faible niveau de qualifications professionnelles (Turcs, Portugais, Asiatiques, Africains) se concentrent davantage au niveau des quartiers (Zufferey 2019). Cette situation tient notamment à un Etat fédéral décentralisé aux frontières culturelles et linguistiques bien

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marquées et qui justifie un certain cloisonnement national dans l'une ou l'autre des régions. En contrepartie, la mixité sociale qui caractérise les quartiers et les communes de la Suisse (Wanner 2019) contribue certainement à la faible ségrégation au niveau local.

2.9 Synthèse

En retraçant les contours historiques et politiques de la Suisse, ce chapitre offre un aperçu du contexte d'arrivée de différentes cohortes d'immigration depuis les années 1950. La composition de la population immigrée en 2014, illustrée par différents indicateurs démographiques et socio-économiques, reflète en particulier une sélection selon des critères d’employabilité et d’origine géographique à l’immigration, mais aussi, une propension variable pour ces individus à s'établir en Suisse de façon durable ou permanente.

Les caractéristiques démographiques et socio-économiques présentées dans ce chapitre sont des déterminants importants de l'insertion en emploi, de la mobilité résidentielle et des comportements familiaux. Il nous semblait donc essentiel de dresser un portrait de cette population et de cerner les attributs qui les caractérisent afin de mieux appréhender la complexité de certains parcours.

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38 2.10 Références

Becker, Leonhard, Thomas Liebig, et Alfonso Sousa-Poza. 2008. « Migration policy and industrial structure: the case of Switzerland ». International Migration 46 (2):

81–107.

Borjas George et Bernt Bratsberg. (1994). Who Leaves? The Outmigration of the Foreign-Born, The Review of Economics and Statistics, 78 (1): 165-176

Da Cunha, Antonio, Suisse Office fédéral de la statistique, et Jean-François Both.

Metropolisierung, Städte und Agglomerationen: soziodemografische Struktur und Dynamik von urbanen Räumen. Office fédéral de la statistique, 2004.

Duvoisin, Aline. 2017. « Les origines du baby-boom en Suisse: une approche biographique des cohortes féminines (1910-1941) ». Thèse de doctorat, Université de Genève.

Fioretta, Juliette, et Philippe Wanner. (2017). Rester ou partir ? Les déterminants des flux d’émigration récents depuis la Suisse. Revue européenne des migrations internationales, 33(1): 111-31. https://doi.org/10.4000/remi.8532.

Institut national de la statistique et des études économiques (2018), Les logements vacants progressent plus vite que l'ensemble du parc, https://www.insee.fr/fr/statistiques/3572856, (Consulté le 19 août 2019).

Lerch, Mathias. « La mobilité des étrangers sur le territoire suisse ». In La démographie des étrangers en Suisse, édité par Philippe Wanner. zurich:

Seismo, 2012.

Mahnig, Hans, et Etienne Piguet. 2003. « La politique suisse d’immigration de 1948 à

Mahnig, Hans, et Etienne Piguet. 2003. « La politique suisse d’immigration de 1948 à