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Le modèle cellulaire IGR-N-91

Chapitre II : Les neuroblastomes

E. Le modèle cellulaire IGR-N-91

La lignée IGR-N-91 (Ferrandis et al., 1994), est une lignée de type N, établie in vitro dans le laboratoire du Dr Bénard (IGR, Villejuif), à partir de métastases médullaires d’un patient atteint de stade 4 dont l'évolution de la maladie a été fatale. L’inoculation sous-cutanée de cette lignée chez des souris immunodéficientes, a engendré des tumeurs primaires extrêmement hémorragiques, invasives et disséminantes. En effet, des métastases macroscopiques, issues de ce tissu hémorragique (Cappellen and Benard, 1997) ont été retrouvées dans le sang, les surrénales, le myocarde et la moelle osseuse de ces souris. Ces tumeurs secondaires ont ensuite été extraites de l’animal et établies in vitro (Ferrandis et al., 1994).

La lignée IGR-N-91 et ses sous lignées métastatiques, constituent un excellent modèle, mimant le neuroblastome métastatique chez le patient. Ce modèle IGR-N-91 constitue donc un outil de choix pour comprendre les événements géniques et les altérations fonctionnelles impliqués dans l’agressivité tumorale et la dissémination métastatique des neuroblastes malins.

Au niveau génétique, la lignée IGR-N-91 présente un contenu génomique relativement constant de 60 copies de N-Myc par génome haploïde. En revanche, les sous lignées métastatiques dérivant des xénogreffes sous-cutanées chez la souris, présentent une augmentation significative du niveau du transcrit de N-Myc. Cette augmentation du messager du gène N-Myc a été décrite comme associée à la dissémination métastatique (Ferrandis et al., 1994). Ces résultats suggèrent que l’augmentation de l’expression de N-Myc entraîne l'activation des gènes impliqués la prolifération et la dissémination métastasique.

98 D’autres altérations ont également été identifiées dans la lignée IGR-N-91, notamment dans la signalisation apoptotique. En effet, il a été démontré que cette lignée exprime une forme mutée de p53 (duplication des exons 7,8,9), probablement inactive et incapable de transloquer en dehors du noyau (Goldschneider et al., 2003). La caspase-8 ainsi que la caspase-10, sont réprimées dans ces cellules et semblent être impliquées dans la résistance des cellules à l’apoptose induite par des agents cytotoxiques tel que TRAIL (Muhlethaler-Mottet et al., 2003; Muhlethaler-Mottet et al., 2004). Ces anomalies pourraient donc expliquer en partie la chimiorésistance de cette lignée agressive.

La lignée de neuroblastome métastatique IGR-N-91, a été utilisée dans ce projet car elle constitue un excellent modèle d’étude pour évaluer la contribution de la télomérase dans le phénotype agressif des neuroblastes malins et dans la résistance aux agents chimiothérapeutiques.

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Projet de recherche

Le rôle de la télomérase dans le développement des cancers et la progression tumorale commence à être mieux compris par les scientifiques Contrairement aux cellules saines, les cellules cancéreuses réactivent anormalement la télomérase pour échapper aux processus de sénescence et de mort cellulaire. La réactivation de la télomérase dans 90% des cancers permet aux cellules tumorales de proliférer indéfiniment en maintenant la longueur de leurs télomères. Ce rôle canonique de la télomérase largement documenté, n’est pas le seul rôle qu’on lui connaît. En effet, des travaux récents suggèrent que la télomérase pourrait avoir d'autres fonctions indépendantes de son rôle sur le maintien de la longueur des télomères, dans diverses voies de signalisation cellulaires tel que la différenciation (Choi et al., 2008; Sarin et al., 2005), la réponse aux dommages à l'ADN (Masutomi et al., 2005) la régulation de l'expression génique (Choi et al., 2008; Smith et al., 2003), mais également dans l’apoptose. En effet, aux cours de la dernière décennie, plusieurs équipes dont la nôtre ont proposé que cet enzyme puisse également posséder une fonction anti-apoptotique non canonique et télomère-indépendante, conférant aux cellules une protection contre la mort induite par certains agents cytotoxiques (Dudognon et al., 2004; Gorbunova et al., 2002; Lee et al., 2008; Santos et al., 2006).

Dans les neuroblastomes, l’augmentation du niveau d’activité télomérase est associée à un stade avancé de la maladie et à un mauvais pronostic. En effet, plusieurs études ont montré que les neuroblastomes agressifs ont un niveau élevé d’AT alors que les tumeurs de bon pronostic, ont peu ou pas d’AT (Hiyama et al., 1997; Hiyama et al., 1995; Reynolds et al., 1997). Ainsi de façon intéressante, un très faible niveau, voire une absence totale d'AT a été retrouvé dans un groupe particulier de neuroblastome métastatique, le stade 4S, caractérisé par un bon pronostic vital et des capacités de régression spontanée. Ces observations suggèrent que la télomérase peut jouer un rôle important dans le développement du neuroblastome et représenter un facteur pronostic dans cette pathologie. Au vu des ces observations, il nous est apparu important d’étudier si l’inactivation de la télomérase dans des cellules IGR-N-91 établies à partir de neuroblastomes chimiorésistants de stade 4, permettait d’induire une régression du phénotype malin comparable à celle observée des tumeurs de stade 4S télomérase négatives et/ou une sensibilisation aux agents thérapeutiques.

100 Ainsi la réactivation de la télomérase observée dans les neuroblastomes mais également dans une large variété de cancers en fait une cible de choix dans l’élaboration de chimiothérapie anticancéreuse. Dans ces conditions, l’utilisation d’une stratégie anti- télomérase permettrait d’entraîner une apoptose des cellules tumorales selon 2 mécanismes non mutuellements exclusif : soit par un raccourcissement des télomères (fonction télomère- dépendant de la télomérase) soit par une inhibition de la fonction anti-apoptotique non- canonique de la télomérase (mécanisme télomère-indépendante).

Le but de mon projet de thèse a donc été :

1. de caractériser comment des modulations de l'expression de hTERT ou de l'activité de la télomérase peuvent affecter le destin des cellules de neuroblastome et leur sensibilité à la chimiothérapie.

2. de déterminer les voies de signalisation par lesquelles hTERT exercerait ce rôle anti-apoptotique.

Les moyens utilisés au cours de cette thèse pour moduler l’activité télomérase dans les neuroblastomes furent: a) un traitement par l’acide rétinoïque tout trans ; b) l'expression de la forme sauvage de hTERT (WT-hTERT); c) l'expression d’une protéine hTERT dominant- négative (DN-hTERT). Ce mutant d'hTERT possède 2 mutations ponctuelles dans le domaine de transcriptase inverse générant une protéine dépourvue d'activité télomérase mais ayant des propriétés d'inhibition de l'activité télomérase endogène. Afin de mieux cerner le rôle de la télomérase dans la tumorigenèse et/ou la progression tumorale des neuroblastomes nous avons appliqué ces trois stratégies dans des lignées qui représentent un échantillon des trois catégories existantes de neuroblastomes. Pour la réalisation de ce projet nous avons utilisé, deux lignées de type Schwannien « S » (SH-EP, SK-NAS), une de type Neuroblastique « N » (IGR-N91) et une autre de type Intermédiaire « I » (SK-NBE2).

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Travaux de thèse

A.

Article: L’inhibition de la télomérase influence le destin des