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PU 7065 Relevé : I Saunier et S Goldin

4.5.  Le mobilier lithique

(Maxence Pieters)

Les fouilles de 2010 à 2012 ont livré cinq outils d’aiguisage Ce type de découverte est fréquent, aussi bien sur les sites d’habitat que dans les zones de production, mais il n’est pas toujours possible de relier ces outils à une activité précise On les retrouve en effet dans tous les domaines d’activité dans lesquels sont utilisés ou produits des outils, des instruments ou des armes munis d’un tranchant. Sauf cas particulier, il est difficile de les relier à une activité donnée sans s’appuyer sur leur contexte de découverte

La détermination de la fonction de ces outils s’appuie sur une analyse de la conception de l’objet : forme générale et forme des surfaces ac- tives, pour en déterminer le fonctionnement (pré- hension, geste), et sur les propriétés mécaniques de la roche, afin de déduire la qualité d’aiguisage obtenue La détermination de l’usage (comment et dans quel contexte a été utilisé l’objet) s’ap- puie pour sa part sur le croisement des informa- tions liées au contexte de découverte avec l’ana- lyse des traces d’utilisation

4.5.1. Fonction des outils d’aiguisage

Si les formes des outils d’aiguisage varient autant qu’il en existe d’exemplaires, elles ne sont que la déclinaison de quatre types d’outils qui se distin- guent par leur mode de fonctionnement La dis- tinction se fait d’abord à partir du mode de pré- hension et du geste de l’opérateur On distinguera donc les outils mobiles (tenus en main) des outils fixes, d’une part, et les outils actifs (qui sont mis en mouvement) des outils passifs (qui subissent le mouvement) d’autre part La catégorie des ou- tils fixes et passifs est représentée par la famille des meulets (pierre à huile), celle des outils mo- biles et passifs par celles des aiguisoirs et des af- filoirs et celle des outils mobiles et actifs par la catégorie des pierres à faux La distinction entre aiguisoir et affiloir s’effectue ensuite suivant le mode de préhension et la manière de travailler le tranchant sur l’outil. L’affiloir, de forme allon- gée, est tenu à une extrémité et la lame parcourt

la longueur du fût de l’extrémité distale à l’ex- trémité proximale La forme actuelle de cet outil est celle du fusil de boucher L’aiguisoir est tenu dans la main et la lame est déplacée d’avantage dans le milieu de la longueur de l’outil, ce qui lui donne une forme caractéristique en « sablier », resserré dans le milieu

Une seconde distinction doit ensuite être opérée suivant la qualité de la roche Plus le grain est fin, plus la qualité du tranchant sera importante. Il ne s’agit pas du grain tel que défini par le géo- logue, mais du grain de la roche tel que l’on peut le ressentir en passant le doigt sur la surface du matériau utilisé En effet, la qualité d’aiguisage obtenu à l’aide d’un grès à grain grossier mais fortement cimenté, proche d’un quartzite, sera proche de celui d’une roche à grain fin, car le grain pris dans la matrice de silice ne forme pas de relief à la surface

Les deux types d’outils d’aiguisage identifiés sur le site sont les aiguisoirs et les meulets, ce qui correspond aux formes les plus couramment mises en évidences (Fig. 134)

4.5.2. Les aiguisoirs - inv. 848

La forme irrégulière de cet aiguisoir suggère qu’il s’agit d’un outil opportuniste, c’est-à-dire non mis en forme Il est cependant possible que la pierre ait subi une abrasion pour éliminer les défauts de surface. Il s’agit d’un grès fin bleu- vert, bien cimenté, dont la forme en plaque sug- gère une légère schistosité Les traces d’utilisa- tion concernent les deux faces, sur chacun des deux bords, soit quatre surfaces actives : l’outil pouvait être tenu dans n’importe quelle position - inv. 1543

Cet aiguisoir est trop fragmentaire pour permettre une lecture d’éventuelles traces d’utilisation Toutefois, sa forme caractéristique en sablier à section carrée permet de l’identifier avec une bonne probabilité. Il s’agit d’un grès fin, bien cimenté, mais différent du précédent tant par la couleur (grise) que par l’absence de schistosité

4.5.3. Les meulets - inv. 1470

Ce fragment de meulet parallélépipédique est taillé dans un grès gris, fin et très cohérent ayant subi une légère rubéfaction Il semble s’agir d’une roche différente de celles de deux aigui- soirs présentés précédemment Les traces d’uti- lisation caractéristiques des meulets (légèrement concaves) occupent les deux faces de l’outil En

outre, les deux tranches portent des traces d’usure torses que l’on retrouve habituellement sur les ai- guisoirs On peut donc en conclure que l’outil a été utilisé aussi bien comme meulet que comme aiguisoir, ce qui peut s’expliquer par les circons- tances d’utilisation : le meulet devant être posé, il a pu être utilisé sur la tranche faute de support disponible à un moment donné ou pour gagner du temps et simplement repasser une lame

1EP 7007 - US 7158 inv. 848 - grès 3EP 7007 - US 7325 inv. 1470 - grès 4 FO 7302 - US 7333 inv. 1748 - grès micacé 2EP 7007 - US 7325 inv. 1543 - grès 5 FO 7302 - US 7319 inv. 1561 - grès Echelle 1:2 5 cm

- inv. 1748

Cet exemplaire est celui qui a fait l’objet de la mise en forme la plus soignée, avec des bords soigneusement biseautés La roche est un grès gris avec quelques grains verdâtres, à grain fin et fortement cohérent Il pourrait s’agir de la même roche que pour l’exemplaire précédent Une seule face est conservée ; elle ne porte aucune trace d’utilisation, mais sont état fragmentaire ne permet pas d’en tirer des conclusions

- inv. 1561

Il s’agit du plus gros exemplaire du corpus Il est taillé dans un grès clair, mais la rubéfaction ne permet pas de déterminer sa couleur d’origine Le grain est fin et bien cimenté, mais parsemé de nombreuses inclusions de coquilles La surface active a fait l’objet d’une mise en forme soignée, mais aucune trace d’utilisation n’est perceptible Les formes des outils d’aiguisage découverts au Cul de Breuil sont classiques et n’appellent pas de commentaire particulier Les dimensions restreintes des meulets inv1470 et inv1748 in- diquent toutefois qu’ils étaient probablement utilisés pour aiguiser des lames de petite taille, du gabarit des couteaux découverts en 2010 et 2011 La qualité de la roche indique que ces ou- tils étaient destinés à obtenir des tranchants de qualité, mais pas exceptionnels

4.5.4. Usage des outils d’aiguisage

Les outils d’aiguisage découverts au Cul de Breuil sont associés majoritairement au niveau d’épandage EP 7007 (inv 848, inv 1470 et inv 1543), caractérisé par une présence de rejets de boucherie abondants (34,5 kg) et celle de trois couteaux Il est donc parfaitement plausible de relier tous ces éléments entre eux et les associer à une même activité

La forte usure perceptible sur l’aiguisoir inv 848 et sur le meulet inv 1470 est également un in- dice d’une utilisation professionnelle des outils d’aiguisage, selon une fréquence nettement plus importante que dans un cadre domestique Tous ces indices convergent pour relier les aigui- soirs inv 848 et inv 1543 et le meulet inv 1470 à l’activité de boucherie mise en évidence par les ossements de faune

Les meulets inv. 1561 et inv. 1748 sont plus diffi- ciles à relier à un domaine d’activité quelconque Le fossé FO 7302, dans lequel ils ont été décou- verts, est difficile à interpréter au niveau fonction- nel La présence de faune relativement abondante (7 kg) pourrait permettre d’associer également ces outils à une activité de boucherie, mais ils ne portent aucune trace d’usure, ce qui permet de supposer qu’ils n’ont jamais été utilisés

4.5.5. Conclusion

La majorité des outils d’aiguisage découverts au Cul de Breuil peut donc être reliée aux activités de boucherie identifiées sur le site, grâce au re- jet massif dans l’épandage EP 7007 Si les struc- tures dans lesquelles a eu lieu cette activité nous échappent encore, nous avons toutefois un as- semblage de mobilier cohérent (déchets de faune, couteaux et outils d’aiguisage) qui nous permet de reconstituer en partie les gestes des bouchers qui officiaient à proximité.

Un élément intéressant à souligner est l’utilisa- tion de roches variées, au moins quatre diffé- rentes pour cinq outils, d’après les observations visuelles. Nous n’avons pas encore pu identifier les provenances de ces grès, mais il s’agit d’une piste de recherche intéressante pour tenter d’iden- tifier les réseaux d’approvisionnement en maté- riau, correspondant probablement à des axes du réseau économique dans lequel s’inscrit le site

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