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PU 7065 Relevé : I Saunier et S Goldin

5.1.  Bilan des fouilles (2010-2012)

Au terme de ces trois campagnes, la surface to- tale fouillée atteint environ 1250 m² Bien que son extension soit contrainte dans plusieurs di- rections (vers l’ouest par le canal, et vers l’est par le bois), les possibilités offertes par ce ter- rain autorisent encore plusieurs campagnes Pour l’heure, ce sont 87 structures qui ont été mises au jour, dont 42 trous de poteau, 15 fosses, 16 fossés ou segments de fossé, trois puits, une voie et deux fours Ces aménagements dessinent une occupa- tion de versant structurée autour de trois grands ensembles : la voie VO 7096, au nord ; l’en- semble 1, au centre ; la terrasse et les fossés de l’ensemble 3, à l’ouest La limite du site semble avoir été atteinte à l’est : elle n’est marquée par aucun aménagement particulier, et se caractérise uniquement par l’absence de vestiges Une autre limite pourrait avoir été atteinte à l’ouest, et serait marquée par la présence de la terrasse doublée de plusieurs fossés parallèles Bien que la présence de trous de poteau et d’une fosse en aval de cet aménagement permette d’envisager un prolonge- ment de l’occupation à l’ouest, il paraît clair que cet ensemble terrasse-fossés marque une rupture dans l’organisation du site En intégrant à cet aménagement les alignements de trous de poteau en amont (ensemble 2) qui pourraient former les restes d’une palissade surplombant les fossés, cette impression est encore renforcée

L’absence de vestiges au sud de l’emprise ne doit pas être surinterprétée : seule l’extension de la fouille permettra de savoir si l’occupation se prolonge dans cette direction, ce que laisse en- visager la poursuite du fossé FO 7358 Au nord, la situation est plus ambigüe : bien que la voie soit perforée par plusieurs aménagements, ceux- ci livrent peu de mobilier et semblent marquer une baisse d’intensité des activités Au-delà de la voie, la présence d’un remblai de pierres mas- sif (RE 7155) rend délicate la formulation d’une quelconque hypothèse quant au prolongement du site : d’une part, ce remblai n’est connu pour l’es- sentiel que par les prospections géophysiques ;

d’autre part, sa position stratigraphique sous la voie soulève des questions quant à la chronologie d’une éventuelle occupation dans ce secteur Quoi qu’il en soit, la structuration générale du site commence à se dessiner, avec une organisa- tion parfaitement orthogonale dans laquelle des modules réguliers peuvent être distingués (Fig.

149) L’apport essentiel de la fouille de cette an-

née réside dans la mise au jour de la terrasse et des fossés qui semblent marquer une limite du site Le rôle défensif de cette limite reste toute- fois à démontrer, même si la possible association d’une terrasse (naturelle ?), de fossés et d’une palissade semble accréditer une telle idée L’ab- sence d’aménagements équivalents à l’est du site pose la question de la délimitation exacte de cette occupation, d’autant qu’elle montre un site ou- vert vers l’oppidum, mais fermé vers la vallée Ce constat, mis en perspective avec les faciès de mo- bilier, pose la question de la fonction exacte de ce site : mis en place progressivement à La Tène D2, il se développe surtout au début de la période augustéenne, au moment où est abandonné l’op- pidum La présence de militaria et d’un abondant mobilier d’importation indique la présence de l’armée romaine sur les lieux – même si l’impor- tance de cette présence reste encore à démontrer –, mais également d’activités de production Rares sont les sites récemment fouillés offrant des comparaisons satisfaisantes aux vestiges mis au jour au Cul de Breuil Deux occurrences peuvent toutefois être citées : l’oppidum de Gondole, dont un faubourg artisanal a été fouillé par Y Deberge (Deberge et alii 2008 ; Deberge et alii 2009), et l’oppidum de Bibracte, où une petite occupation a également été fouillée extra-muros par J-L Flouest à la Croix du Rebout (inédit ; Pernet et alii 2008) Plusieurs points communs unissent les trois gisements : l’installation le long d’une voie d’accès à l’oppidum, une chronologie tardive (La Tène D2 pour Gondole, la période augustéenne pour la Croix du Rebout), une occupation courte, la présence de fours culinaires et d’activités de production (notamment à Gondole : métallurgie, tabletterie, poterie…), et pour finir l’installation

de militaires romains ou d’auxiliaires gaulois en- gagés dans l’armée romaine À La Croix du Re- bout, la présence d’un rempart en terre pourrait faire écho au système de palissade et fossés mis au jour au Cul de Breuil Par ailleurs, le fait qu’il s’installe sur les lieux d’une ancienne nécropole de l’oppidum souligne la rupture nette entre les deux occupations

À Nasium, le déroulement des évènements pour- rait, à titre d’hypothèse de travail, s’exprimer ain- si : l’oppidum gaulois, essentiellement occupé au Ier siècle avant J-C, s’étend au-delà de l’espace délimité par les remparts avec l’existence d’un

petit faubourg Vers 20 avant J-C, l’oppidum est abandonné (Bonaventure, Dechezleprêtre 2012) tandis que se développe au Cul de Breuil une occupation d’une autre nature, avec la présence conjointe de militaires romains et d’artisans (gau- lois ?) Cette occupation est rapidement délais- sée (vers le changement d’ère), alors qu’un peu plus loin dans la vallée, la parure monumentale de l’agglomération de Nasium se met en place Selon cette approche, les liens entre l’occupation de l’oppidum et celle du Cul de Breuil paraissent évidents, si bien que l’on peut s’interroger sur les raisons de l’abandon de l’oppidum : déplacement progressif de population ou, au contraire, décision

Saint-Amand-sur-Ornain

Le Cul de Breuil

Plan masse

DAO : B. Bonaventure et G. Encelot

2408720 825230 825235 825240 825245 825250 825255 825260 825265 825270 825275 825230 825235 825240 825250 825255 825260 825265 2408730 2408725 2408720 2408735 2408745 2408755 2408765 2408740 2408750 2408760 2408770 2408770 2408765 2408755 2408745 2408735 2408725 2408760 2408750 2408740 2408730 825245 825270 825275 10 m Echelle 1:400 Puits Fosses Fossés Poteaux 8,40 m 7,30 m 8,40 m 8,40 m 7,70 m 7,70 m 7,70 m

unique entraînant un déplacement massif ? L’ins- tallation du Cul de Breuil semble barrer l’accès à l’oppidum récemment abandonné, si bien que l’on peut se demander si cet abandon n’est pas le fait d’une volonté de la nouvelle administration romaine qui, pour s’assurer le respect de cette décision, aurait fait installer quelques militaires et artisans sur les lieux de l’ancien faubourg Si la présence de l’armée romaine à l’intérieur des enceintes gauloises en vue du contrôle du terri- toire, hypothèse proposée par J Metzler en 1995, est aujourd’hui bien documentée, l’existence de petits camps bouclant l’accès aux oppida pour- rait également faire partie des dispositifs mili- taires mis en place au lendemain de la conquête Sur cette question, on signalera le cas de l’op- pidum de la Chaussée-Tirancourt (Somme), où la fortification gauloise est réoccupée après la conquête par une troupe d’auxiliaires originaires, d’après le mobilier numismatique, du sud de la Gaule (Fichtl 1995 ; Reddé 2006, p 249) À Liercourt (Somme), c’est au pied d’un oppidum que s’installe un hypothétique camp militaire (Reddé 2006, p 314) Le cas de l’oppidum de Bâle-Münsterhügel pourrait également s’inscrire dans un schéma comparable : tandis que l’en- semble de l’éperon est densément occupé à La Tène D2, il semble en grande partie délaissé au début de la période augustéenne tandis que s’ins- talle, en avant du rempart, une population forte- ment romanisée (Deschler-Erb 2011b). Enfin, si l’exemple d’Arras La Corette (Pas-de-Calais) paraît sensiblement différent, puisqu’il n’est pas lié à un oppidum gaulois, il présente quelques si- milarités avec l’occupation du Cul de Breuil : une surface réduite, des constructions uniquement sur poteaux, la présence de puits et de militaria (Jacques, Prilaux 2003 ; Reddé 2006, p 202)… Toutefois, la fortification y est beaucoup plus im- posante que celle supposée au Cul de Breuil En effet, l’occupation du Cul de Breuil n’a rien de comparable avec un véritable camp, que ce soit en termes d’ampleur ou de nature des struc- tures Par ailleurs, l’intensité des activités de pro- duction doit une nouvelle fois être soulignée : si la boucherie et la métallurige offrent les indices les plus nombreux, certains éléments suggèrent également la présence d’autres types d’activi- tés, en particulier la tabletterie Ces indices sont omniprésents, et doivent être mis en perspective

avec l’absence, au moins apparente, de struc- tures d’habitat : bien que plusieurs alignements de trous de poteau aient été distingués, aucun ne forme clairement un bâtiment qui puisse être attribué à de l’habitat Au contraire, ces aména- gement offrent l’image d’un site ouvert, dont les seules constructions se résument à des palis- sades légères qui structurent l’espace L’absence d’aménagements domestiques caractéristiques, notamment de caves, va également dans ce sens et fixe la limite de comparaison avec le site de Gondole, où ce type d’aménagement rythme ré- gulièrement l’espace

Quoi qu’il en soit, la présence de militaires, peut- être des auxiliaires, est indéniable au Cul de Breuil Elles est marquée à la fois par un nombre non négligeable de militaria, mais aussi par un faciès général du mobilier très romanisé L’hypo- thèse d’un petit retranchement destiné à fermer l’accès à l’oppidum, si elle venait à être confir- mée, entraînerait un certain nombre de consé- quences sur les modalités du développement ur- bain à Nasium, la principale d’entre elles étant le déplacement massif et rapide d’une population entre l’oppidum et la vallée, entraînant dans cette dernière un soudain développement de l’archi- tecture civile dès le début de la période augus- téenne Malheureusement, de ce point de vue, les données sont bien trop lacunaires pour envisager l’existence d’un programme de développement urbain dès cette période à Nasium De même, l’occupation du Cul de Breuil doit être encore mieux appréhendée pour tester ces hypothèses

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