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Le fonctionnement du décret du 21 novembre 2013

A.- L E DÉCRET DU 21 NOVEMBRE 2013 RELATIF AUX C ENTRES CULTURELS

3) Le fonctionnement du décret du 21 novembre 2013

L’article 4 du décret du 21 novembre 2013 définit les Centres culturels de la façon suivante : « Un centre culturel est un lieu de réflexion, de mobilisation et d’action culturelle par, pour et avec les populations, les acteurs institutionnels et les acteurs associatifs d’un territoire. ».

Le Centre culturel a pour but d’améliorer la démocratie par l’exercice du « droit à la cul- ture »311. C’est le Centre lui-même qui détermine son action, de façon indépendante312. Il doit

toutefois tenir compte prioritairement du territoire sur lequel il interviendra et des populations visées313. Pour organiser l’action culturelle, le Centre doit procéder à une « analyse parta-

gée », c’est-à-dire un document réalisé en collaboration avec les pouvoirs publics et les insti- tutions culturelles314. De nombreuses « fonctions culturelles » encadrent l’action des Centres

culturels : création, participation, information, formation, pédagogie, diffusion315, etc.

Depuis 2013, les Centres culturels ne sont plus reconnus en tant que tels par la Communauté française. C’est leur « action culturelle » qui peut fait l’objet d’une reconnaissance donnant droit à l’octroi de subsides. Il n’y a donc plus de missions a priori fixées par le décret (diffu- sion, création, etc.)316. Un contrat-programme doit alors être conclu avec la Communauté

française et les collectivités publiques engagées317 pour déterminer l’action culturelle à me-

ner318. Les Centres doivent conduire une action culturelle générale pour être soutenus. Une

« action culturelle intensifiée » permet de recevoir des subsides supplémentaires, lorsque l’ampleur des projets est conséquente319. Un subside supplémentaire est aussi envisageable en

cas d’ « action culture spécialisée », c’est-à-dire lorsque le Centre culturel décide de mener une action dans un domaine artistique spécifique et sur un territoire étendu320.

L’action culturelle générale donne droit à une subvention annuelle de 100.000 euros, pouvant être augmentée de 25.000 euros par commune supplémentaire au projet321. L’action culturelle

intensifiée donne droit à une subvention annuelle complémentaire maximale de 400.000 eu- ros322. Une action culturelle spécialisée fait l’objet d’un examen du projet qui permet de dé-

terminer le montant de subvention nécessaire323. Toutes les provinces et communes associées

à la gestion d’un Centre culturel doivent contribuer de façon au moins équivalente à la contri-

311 Projet de décret relatif aux Centres culturels, exposé des motifs, Doc., Parl. Comm. fr., 2013-2014, n° 553/1, p. 18.

312 Ibidem, pp. 18-19. 313 Ibidem, pp. 19-20. 314 Ibidem, p. 20. 315 Ibidem, p. 21.

316 O.VAN HEE, Culture et démocratie, Analyse partagée du territoire : cette fois, le législateur a fait fort !, n° 40, décembre 2015, p. 10.

317 Projet de décret relatif aux Centres culturels, exposé des motifs, Doc., Parl. Comm. fr., 2013-2014, n° 553/1, p. 21. 318 Ibidem, p. 25. 319 Ibidem, pp. 21-22 320 Ibidem, p. 22. 321 Ibidem, p. 23. 322 Ibidem, p. 24. 323 Ibidem, p. 24.

bution de la Communauté française324, il s’agit du principe de parité de financement des

Centres culturels325. En cas de non-respect de cette règle par les collectivités décentralisées, la

Communauté française réduit le montant de ses subventions pour arriver au niveau effectif des collectivités locales326. En ce qui concerne l’action culturelle spécialisée que ce principe

ne sera pas appliqué327.

Le décret a également consacré à l’article 1er, 5° une définition de la culture issue de la décla-

ration de Fribourg relative aux droits culturels et sans portée juridique328 :

« Culture : les valeurs, les croyances, les convictions, les langues, les savoirs et les arts, les traditions, institutions et modes de vie par lesquels une personne ou un groupe exprime son humanité ainsi que les significations qu’il donne à son existence et à son développement ».

Cette définition est particulièrement large. En réalité, il ne s’agit plus de la « culture » au sens des beaux-arts et des œuvres artistiques en général. La conception utilisée de la culture appar- tient au domaine des droits culturels, catégorie assez floue et restant indéfinie329. Les travaux

parlementaires se sont également référés à l’article 27 de la DUDH, l’article 15 PIDESC, ainsi qu’à l’article 23 de la Constitution, sans développements particuliers quant à ces normes330.

La grande nouveauté de 2013 est essentiellement la suppression de missions bien définies données aux Centres culturels331. Le législateur s’est contenté d’encadrer l’organisation des

activités culturelles, dont le contenu est entièrement laissé à l’appréciation des Centres cultu- rels332. L’« analyse partagée » est ce cadre déterminé par le décret. Il s’agit d’établir toute une

série de données, de statistiques (emploi, âge, croissance, niveau éducatif, etc.). Ces informa- tions doivent ensuite être soumises aux différents intervenants locaux qui en proposent une interprétation et une analyse333. Enfin, cette analyse partagée doit être adaptée au territoire

d’intervention du Centre culturel et aux populations qui y vivent334.

Le décret de 2013 a donc consacré les droits culturels et la démocratie culturelle. Il a mis ces concepts à la base de l’action des Centres, mettant l’accent sur la participation des citoyens dans les activités culturelles plutôt que sur l’accès aux œuvres d’art. Dans cette logique, le législateur a supprimé le système de reconnaissance des Centres culturels en tant qu’institutions à part entière prenant la forme d’ASBL : la Communauté française reconnaît désormais une action culturelle effectuée par une ASBL plutôt que l’institution de l’ASBL en elle-même. La reconnaissance de l’action culturelle ouvre alors le droit aux subventions. Ce 324 Ibidem, p. 25. 325 Ibidem, p. 25. 326 Ibidem, p. 25. 327 Ibidem, p. 25. 328 Ibidem, p. 25.

329 C.ROMAINVILLE, Les droits culturels : un nouveau référentiel pour les Centres culturels ?, Bruxelles, OPC, pp. 1-2.

330 Projet de décret relatif aux Centres culturels, exposé des motifs, Doc., Parl. Comm. fr., 2013-2014, n° 553/1, pp. 14-15.

331 O.VAN HEE, op. cit., p. 10. 332 O.VAN HEE, ibidem, p. 10. 333 O.VAN HEE, ibidem, p. 10. 334 O.VAN HEE, ibidem, p. 10.

changement est destiné à mettre l’accent sur les activités culturelles menées par les Centres, tout en laissant ces derniers libres de déterminer leur contenu. Le législateur a voulu que l’analyse du projet culturel prime sur l’analyse de l’institution, afin que les subsides corres- pondent à la mise en œuvre du projet proposé.

A l’heure actuelle, 117 Centres culturels ont conclu un contrat-programme avec la Commu- nauté française de Belgique.