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CHAPITRE II Les éléments du cadre théorique

2.3 Le diagnostic cognitif des connaissances dans les STI

Les STI effectuent un diagnostic cognitif (DC) qui est exploité pour offrir une assistance hautement personnalisée à l’apprenant dans un domaine d’apprentissage donné. Ceci justifie la nécessité d’une réflexion sur les aspects fondamentaux du DC ainsi que d’une approche holistique et formelle de son exploitation pour offrir les services tutoriels. Cette formalisation impose de clarifier les fondements, les processus et la dynamique interne des constituants et des étapes du DC.

Par son étymologie, le terme "diagnostic" signifie "connaissance à travers les signes". Ainsi, dans un STI, la forme la plus primitive du diagnostic cognitif consiste selon (Wenger 1987), à reconnaître, caractériser, classer et juger les actions observables de l’apprenant. Le diagnostic cognitif peut donc être interprété comme la connaissance de l’état cognitif/affectif de l’apprenant à travers les signes (actions, réponses aux questions, réactions lors d’une activité d’apprentissage, etc.) qu’il présente. Wenger propose trois perspectives de DC:

1- Le diagnostic épistémique : traite de la connaissance des apprenants dans le

domaine d'étude ainsi que leurs compétences stratégiques et métacognitives. Il consiste à inférer l’état des connaissances de l’apprenant qui pourrait expliquer sa performance lors de la résolution d’une question ou d’un problème. En prenant comme exemple le diagnostic médical qui fait l'association entre les symptômes et les causes; dans le

contexte d’apprentissage, il fait associer le comportement observable de l’apprenant lors de la résolution d’une question ou d’un problème à l’état cognitif qui expliquerait le mieux ce résultat.

2 - Le diagnostic comportemental : se réfère au comportement des apprenants lors

d'une activité de résolution de problème.

3 - Le diagnostic individuel : porte sur des questions telles que la personnalité, les

préférences de l’apprenant, les attitudes d'apprentissage et ainsi de suite.

Sur la base de ces perspectives du DC, nous déduisons que dans un STI le DC doit permettre de faire des inférences sur l’état cognitif de l’apprenant, l’interprétation de ses erreurs, la catégorisation de son comportement et la reconnaissance de ces spécificités. Pour d’atteindre ces objectifs dans un STI, (Tchetagni, 2005) propose un processus générique en quatre étapes pouvant être exécutées de façon cyclique:

▪ Étape 1: L'acquisition des indices. Cette acquisition doit être contrôlée par les prémisses qui ont été préalablement fixées sur le genre d’inférence voulu. Ceci permettra de recueillir les données qui sont pertinentes selon les objectifs visés. ▪ Étape 2: La génération d'hypothèses par inférence et interprétation des indices acquis à l’étape 1. Elle consiste à faire une analyse des indices permettant de soutenir les éventuelles hypothèses qui expliqueraient des observations cohérentes considérées comme des indices.

▪ Étape 3: Le diagnostic proprement dit est effectué à cette étape. Il consiste à établir par le biais de tests adéquats quelles sont les hypothèses de l’étape 2 qui sont valides. Cela permet de déterminer les hypothèses qui seront effectivement confirmées comme résultat final du diagnostic.

▪ Étape 4: L’ajustement des résultats du diagnostic afin d’être utilisé pour orienter les stratégies des prochaines acquisitions d’indices.

La dimension procédurale de DC est une exécution des quatre étapes présentées comprenant l'observation, l'interprétation, l'inférence d'hypothèses relatives à l'état cognitif de l'apprenant. Le processus se termine par les ajustements/validation dont les extrants permettent de recommencer le processus.

Nous présentons dans la figure 5 le mécanisme d’implémentation du processus de DC dans un STI. Il débute par une observation et évaluation de l'apprenant dans une situation de résolution de problèmes. Dans un deuxième temps, en fonction des résultats de l'évaluation, le STI déclenche le processus d'inférence qui va générer des hypothèses de diagnostic. Deux principales sources de données sont utilisées pour faire l’inférence à savoir un modèle de l'apprenant et un modèle de tâche qui est une structure qui définit la relation entre le problème et les éléments du domaine de connaissance. La forme et le contenu de ces modèles doivent dépendre de la nature conceptuelle du processus de DC qui peut être épistémique, comportemental ou individuel. Après chaque inférence, le STI peut orienter ses interactions avec l'apprenant pour déclencher la réflexion sur les éléments de connaissance ou les compétences correspondant à l’hypothèse diagnostiquée (la réflexion de l'apprenant). Le STI peut alors utiliser le résultat de la réflexion de l'apprenant afin de confirmer, infirmer ou affiner les hypothèses diagnostiquées.

Figure 5 : Intégration de la réflexion dans un cadre de base pour un diagnostic cognitif adapté de (Tchétagni, Nkambou et al. 2006)

Les recherches sur le DC ont été dans un premier temps principalement axées sur la perspective fonctionnelle du DC avec l'application des techniques d'IA qui permettent

Observation & Évaluation

Génération d’hypothèses

Inférence sur les hypothèses

Réflexion de l’apprenant

Rétroaction au système ou à l’apprenant Réflexion du système Comportemental Épistémique Individuel ▪ Auto-explication ▪ Historique d’apprentissage ▪ Visualisation de son modèle ▪ Modification personnelle du modèle de l’apprenant ▪ Modification négociée du modèle de l’apprenant ▪ Observation passive du système durant la résolution du problème + Rétroaction après activités de remédiation

au système de déduire avec précision le niveau des connaissances actuel de l'apprenant (Anderson, Corbett, Koedinger, & Pelletier, 1995). Par la suite, les recherches ont pris en considération l'aspect pédagogique du DC dans la conception et l’implémentation des STI (Tchétagni, Nkambou et al. 2006). Cette perspective propédagogique du DC met l'accent sur la façon d'ajuster en permanence les hypothèses du STI en ce qui concerne l'état cognitif de l'apprenant afin d'obtenir des représentations plus précises des besoins de l'apprenant. Cet objectif est tout à fait pertinent dans le contexte des STI. Il faudrait toutefois trouver le chaînon manquant pour établir de manière objective la connexion entre les actions/réactions d’un apprenant pendant un dialogue tutoriel qui témoignent d’une occurrence d’un phénomène recherché. Sans nécessairement expliquer ce phénomène, il faudrait tout au moins le décrire, le caractériser qualitativement en référence à une théorie établie.

Une des théories proposées est celle de la pensée réflexive selon (Dewey 1933). En considérant la réflexion comme un moyen fiable pour l'apprentissage effectif, cette théorie constitue une référence pour établir les fondements visant à promouvoir de manière objective une réflexion dans le dialogue tutoriel. Il ne s’agit pas ici de considérer implicitement que le dialogue tutoriel provoque une réflexion chez l’apprenant, mais de mettre en place un cadre fondé qui s’appuie sur le caractère interactif d’un tel dialogue en favorisant une réflexion explicite avec des résultats observables.