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Comme les cellules satellites sont incapables de se diviser normalement, nous pouvons alors nous demander quel est le destin de ces cellules dans le muscle malade. En accord avec l’observation que les cellules satellites des souris mdx présentent une capacité réduite à s’engager dans le programme myogénique (Dumont et al. 2015), deux autres études récentes prouvent que les cellules satellites de souris mdx possèdent un potentiel myogénique diminué et peuvent s’engager dans un programme fibrogénique (Biressi et al. 2014, Pessina et al. 2015).

50 Ces observations sont aussi valables pour les cellules satellites de patients DMD et cette plasticité fibrogénique dépendrait de l’augmentation de la signalisation TGFβ observée dans les muscles dystrophiques (Pessina et al. 2015). Il est alors concevable que le dysfonctionnement des cellules satellites dans les muscles DMD pourrait contribuer à l’apparition de certains aspects pathologiques de la maladie tels que la réduction de la capacité régénérative musculaire et l’augmentation de la fibrose intramusculaire.

Cependant, le nombre élevé de cellules satellites trouvées dans les muscles DMD suggérerait que ces cellules satellites non fonctionnelles persistent mais ne peuvent pas participer au processus de réparation musculaire. Au vue de l’amplification des centrosomes dans les cellules satellites mdx (Dumont et al. 2015), il est possible d’émettre l’hypothèse que ces cellules subissent une déficience mitotique les conduisant à leur sénescence, état irréversible de la cellule où le cycle cellulaire est arrêté (Chang, Chevalier, and Rudnicki 2016). Notamment, une étude récente montre que les cellules satellites, pour lesquelles l’assemblage du fuseau mitotique est impossible, sont arrêtées en phase G1 du cycle cellulaire ce qui empêche leur différenciation (Kollu et al. 2015).

Il est admis que les cellules sénescentes qui s’accumulent au cours du vieillissement sécrètent des protéases, des facteurs de croissance et des cytokines pro-inflammatoires compromettant la fonction des cellules voisines (Jenkins 2002). Plusieurs études montrent que les ROS contribuent à la progression physiopathologique des dystrophies musculaires. Effectivement, une oxydation des protéines musculaires par les ROS (Haycock et al. 1996) ainsi qu’une peroxydation des lipides (Grosso et al. 2008) sont observées dans les biopsies musculaires de patients DMD. Les ROS induisent l’activation de la voie NF-κB (nuclear factor- kappa B) entraînant une augmentation de l’expression de cytokines pro-inflammatoires, telles que TNFα et IL-1β qui sont fortement exprimées dans les muscles de souris mdx avant le développement de la maladie (Kumar and Boriek 2003). Les myotubes de souris mdx cultivés

in vitro sont plus sensibles à la mort cellulaire induite par les ROS que les myotubes de souris saines (Rando et al. 1998). Néanmoins, les myoblastes indifférenciés provenant de muscles de souris mdx et saines ont une sensibilité équivalente au stress oxydatif induit par les ROS (Rando et al. 1998). Comme la dystrophine est fortement exprimée dans les cellules satellites, nous pouvons supposer que l’absence de la dystrophine dans les cellules satellites des patients DMD pourrait entraîner une accumulation du stress oxydatif dans le muscle dystrophique et, par conséquent, contribuer à la mort par apoptose des myofibres hypersensibles aux ROS (Chang, Chevalier, and Rudnicki 2016).

51 Il a été démontré que la voie de l’autophagie est compromise dans certaines pathologies neurodégénératives (Menzies, Fleming, and Rubinsztein 2015) dont la DMD (De Palma et al. 2012), ainsi que dans les muscles TA des souris mdx (Spitali et al. 2013). Ces résultats suggèrent que le dysfonctionnement précoce de la voie de l’autophagie dans les cellules satellites déficientes pour la dystrophine favoriserait leur entrée dans un état quiescent et fournirait une explication supplémentaire au nombre élevé de cellules satellites ne participant pas à la régénération musculaire bien que contribuant à la progression de la maladie.

La dystrophie musculaire et la sarcopénie présentent des caractéristiques physiopathologiques communes telles qu’une atrophie du muscle, une faiblesse musculaire, des infiltrations intramusculaires de tissus non myogéniques et une dénervation (Rudolf et al. 2014). Dans ces deux types de pathologie, le lignage myogénique est touché puisque l’auto- renouvellement et le potentiel de différenciation des cellules satellites sont compromis ce qui a pour conséquence d’altérer la régénération du tissu musculaire. Bien que la balance entre les divisions symétriques et asymétriques des cellules satellites soit dérégulée de manière différente dans la sarcopénie et la DMD, les cellules satellites subissent des modifications intrinsèques communes aux deux pathologies telles qu’une inhibition de la voie de l’autophagie qui aboutit à la sénescence cellulaire. Les modifications du microenvironnement sont aussi des facteurs qui affectent la fonction des cellules satellites âgées et dystrophiques. Par exemple, une production persistante de facteurs pro-fibrotiques dans les muscles pathologiques est observée, ce qui favorise la formation de tissus fibrotiques intramusculaires (Shin et al. 2013).

Malgré les recherches cliniques qui se multiplient, aucun traitement n’existe pour soigner les patients atteints de la DMD. Une des stratégies thérapeutiques prometteuse est la thérapie cellulaire qui vise à corriger le dysfonctionnement des cellules satellites malades en les remplaçant par des cellules saines à potentiel myogénique capables de régénérer le muscle dystrophique.

3. Les thérapies cellulaires pour traiter les patients DMD

Les thérapies cellulaires pourraient être un traitement idéal pour soigner les patients atteints de dystrophie musculaire. D’un point de vue clinique, les cellules satellites transplantées survivraient, proliféreraient et migreraient dans les muscles du patient malade où elles se

52 différencieraient en fibres musculaires pour réparer les myofibres endommagées ou remplacer celles qui ont disparu ; et enfin elles pourraient reconstituer le pool de cellules satellites avec des cellules souches fonctionnelles non mutées (Meng, Muntoni, and Morgan 2011).

Dans cette partie, nous examinerons comment certaines populations de cellules souches à potentiel myogénique pourraient améliorer les phénotypes pathologiques de la DMD, ainsi que les études précliniques et cliniques en cours ou terminées.