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1.4 Nombre d’atomes piégés

1.4.3 Le blocage collisionnel

Pour interpréter les résultats précédents, considérons un piège dipolaire optique contenant N atomes. Ce nombre N va varier en fonction :

- du taux de chargement R. Comme expliqué précédemment, il est proportionnel à densité du PMO, et donc ajustable.

- du taux de pertes à un corps −γN . Il est essentiellement dû à des collisions avec les atomes rapides du gaz résiduel. Sa valeur dépend du vide qui règne dans l’enceinte (quelques 10−10 mbar) et n’est donc pas facilement ajustable. On l’évalue à partir de la valeur du vide et de la durée de vie du PMO : γ ∼ 0, 2 s−1.

- du taux de pertes à deux corps −2βN (N − 1)/2. Il est dû à divers mécanismes de collisions inélastiques, analysés en détail dans la référence [90]. Il est proportionnel au nombre de paires d’atomes N (N − 1)/2, et la collision expulse les deux atomes, d’où la présence du 2 devant l’expression. Comme on s’intéresse au nombre d’atomes dans le potentiel, et pas à la densité, β est inversement proportionnel au volume du piège. La valeur de β est tirée de la référence [90], qui mène à β ∼ 1000 atomes−1s−1 pour notre volume de piégeage. Remarquons que cette valeur très élevée est propre à notre expérience. β chute très rapidement avec la taille du piège (son volume est proportionnel à w40), si bien que pour un col de faisceau plus « standard », w0∼ 10 µm, β = 0, 016 atomes−1s−1.

On obtient finalement l’équation différentielle :

dN

dt = R − γN − βN (N − 1)

On peut alors identifier deux régimes stationnaires (dN/dt = 0) différents :

• Le régime de faible chargement : si R est petit, N est petit, et βN (N − 1) est négligeable

devant γN . Dans ces conditions :

hN i = R γ

• Le régime de fort chargement : si R est grand, N devient également grand, et le terme de

collisions à deux corps devient prépondérant. Dans ces conditions :

hN i =

s

R β

Le passage du régime de faible chargement à fort chargement est défini par un nombre d’atomes critique Nc= γ/β, associé au taux de chargement critique Rc= γ2/β, à partir duquel le terme

de collisions à deux corps devient dominant. Pour les pièges dipolaires standards [90], NcÀ 1, et

les collisions à deux corps ne jouent un rôle que lorsque hN i est grand. Du fait de notre très petit volume de piégeage, β est très important, et Nc¿ 1. Ceci signifie que, pour notre piège dipolaire, le terme de collisions à deux corps devient prépondérant dès que deux atomes se trouvent dans le piège. n o m b re m o y en d ’a to m es 〈Ν 〉 0,01 0,1 1 10 10-3 10-2 10-1 100 101 102 103 104 105

taux de chargement R (atomes/s)

0,1 0,01 1 10 R = γ /2 R = β /4 〈Ν〉 = 0,5 R γ R β

Fig. 1.11 – Résultat d’une simulation Monte Carlo donnant le nombre moyen d’atomes en fonc-

tion du taux de chargement. On distingue trois régimes : le régime de faible chargement en R/γ, le régime de blocage collisionnel où le nombre moyen d’atomes est bloqué à 0,5, et le régime de fort chargement en pR/β.

Une façon d’analyser le problème est d’utiliser une simulation Monte-Carlo, avec une arrivée aléatoire d’atomes gouvernée par le taux de chargement R, et des départs gouvernés par les taux de collisions à 1 et 2 corps [19, 81]. Cette simulation permet d’obtenir la distribution statistique du nombre d’atomes dans le piège dipolaire. Le nombre moyen d’atomes piégés en fonction de R est représenté en échelles logarithmiques sur la figure 1.11. On y retrouve pour les faible et fort taux de chargement les droites de pente 1 (hN i = R/γ) et 1/2 (hN i =pR/β). De plus, apparaît

sur trois ordres de grandeur pour R, un plateau sur lequel hN i est bloquée à 0,5. Il s’agit du régime de blocage collisionnel. Dans ce régime et dans le régime de faible chargement, le nombre d’atomes piégés est soit 0, soit 1 (sur les distributions statistiques du nombre d’atomes piégés, obtenues par simulation Monte-Carlo, les probabilités d’avoir 2 atomes et plus sont négligeables). Dès qu’un deuxième atome entre dans le piège, les deux sont éjectés sur un temps beaucoup plus court que la durée caractéristique de piégeage d’un atome unique (celle des plateaux de la figure 1.10). Lorsque l’on atteint le plateau, le taux de chargement est suffisamment important pour que les pertes ne soient pas limitées par les collisions avec le gaz résiduel, mais par l’arrivée d’un autre atome. Ainsi, l’arrivée d’un atome dans le piège est responsable à la fois du chargement et des pertes. La probabilité de passer de 0 à 1 est la même que celle de passer de 1 à 0. Le nombre moyen d’atomes est donc de 0,5. L’extension du plateau de blocage collisionnel est donné par

γ/2 < R < β/4, correspondant à un taux de chargement supérieur au taux de collision à 1 corps

mais inférieur à celui à 2 corps, pour hN i = 0, 5.

La simulation numérique reproduit donc bien l’ensemble des observations expérimentales. Soulignons que le régime de blocage collisionnel est intimement lié au fait que notre volume de piégeage soit petit. En effet, si l’on reprend l’étude avec un faisceau piège dont le col est de 4 µm et en adaptant la valeur de β au volume du potentiel, ce régime de blocage collisionnel n’existe déjà plus.

Les simulations Monte-Carlo fournissent aussi les durées de piégeage des atomes. Celles-ci diminuent avec le taux de chargement, en accord avec l’expérience. Au point de passage des régimes de blocage collisionnel et de fort chargement, la durée de vie de l’atome unique est de l’ordre de 1 ms. À ces échelles de temps, le bruit de photon est trop important pour pouvoir observer en temps réel les plateaux et les creux caractéristiques du régime d’atome unique. C’est également pour cette raison que l’on n’a pu observer de deuxième marche correspondant à la présence de deux atomes dans le piège.