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Représentations à travers les stéréotypes

2.1 Genèse et conception du passé

2.3.1 La langue de l’Autre

La nécessité de l’enseignement de la langue s’impose puisqu’il s’agissait d’une politique scolaire ayant pour but l’assimilation prochaine des populations.

Le duc de Rovigo « je regarde la propagation de l’instruction et de notre langue comme le moyen le plus efficace de faire faire des progrès à notre domination dans ce pays » « le vrai prodige à opérer serait de remplacer peu à peu l’arabe par le français qui ne peut manquer de s’étendre parmi les indigènes, surtout si la génération nouvelle vient en foule s’instruire dans nos écoles ». La connaissance de la langue a une valeur utilitaire, mais elle est bien plus encore, à son insu, la voie qui mène sur « nos traces et nos exemples ». Elle est la clé d’un monde dont il est impossible qu’il n’éveille pas attirance et curiosité87

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Dans le contexte particulier de l’écriture africaine s’exprimant dans la langue de l’Autre pour rendre compte d’un vécu différent, ces modifications sont essentielles. Perpétuant dans un premier temps un ordre social strictement codifié, une soumission apparente pour faire triompher son ambition, cet ordre se libère très vite pour devenir une contestation, une revendication exprimant une mutation. La langue utilisée révèle la structure psychique du sujet parlant et son hétérogénéité.

Julia Kristeva établissait ainsi les rapports entre le sujet et la langue employée. Les pratiques de structuration et de déstructuration constituent le procès de la signifiance.

L’éclatement du sujet et de ses limites idéologiques provoque donc un triple effet : modification du statut du sujet, intégration du procès en tant que tel et enfin, apparition de phénomènes fragmentaires qui, en soulignant les limites du discours socialement utile (manifestations

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81 culturelle rituelles), porte témoignage d’un fait important : le procès excédant le sujet.

L’érogénéité du sujet va nous conduire à un sujet en procès. Il y a-t-il toujours un décalage entre le signifiant et le signifié ? La fonction référentielle est elle fortement altérée ? Peut-on parler de conventions d’écriture historique ou de la nécessité d’un statut de l’écriture en question ?

Dans le document (9), la totalité du texte n’est constituée que d’énonciation rapportée (écrit épistolaire). Après avoir été informé par le chapeau comme avertissement liminaire du procédé employé dans ce texte, le lecteur n’aura plus affaire à l’auteur de cette correspondance qui se veut un intermédiaire transitoire. Un phénomène d’enchâssement explicite dont la représentation de l’acte énonciatif peut influer le statut des textes et leur fonctionnement.

Ainsi, dans ce même document qui n’indique aucune mention relative à la langue de la lettre, il convient de d’analyser de près un autre phénomène qui confronte deux systèmes langagiers différents ; l’arabe et le français.

Concernant l’équivalence sémantique assurée par les anaphores lexicales « l’homme à la cagoule », « l’homme au sac » et « bouch’kara », la typologie peut expliciter que ce sont des formules qui n’appartiennent pas au narrateur. Il sous-tend que leur usage est usurpé, c’est-à-dire qu’il y a un écart entre ce qu’elles signifient et leur référence.

On peut se demander pourquoi employer cette occurrence en mention et pas en usage. Témoigner de l’énonciation, c’est-à-dire exprimer le degré d’adhésion de l’énonciateur au propos énoncé. Ce qui

82 est commun entre ces énoncés est le sème ajouté relatif au contexte « qui fait peur ».

Il s’agit d’une connotation autonymique qui aboutit à une coréférence puis à une récurrence significative d’une terreur permanente. Sur le plan axiologique, « à la cagoule », « au sac », en tant que complément du même nom, établissent une relation de complémentarité, puisqu’il s’agit d’ « un sac en guise de cagoule ». Ce qui ne se traduit littéralement que par l’association de « cagoule » à « sac » constituant deux sème d’un même signifiant (montrer les limites de la langue de l’autre d’un point de vue sémantique).

Une coréférence mise en évidence par un autre procédé d’emprunt à la langue maternelle « bouch’kara » constitue une introduction très significative sur le plan sémiotique d’une communication culturelle. L’énonciateur cherche à postuler des compatibilités et des incompatibilités en empruntant à la langue maternelle un terme associé à des formes signifiantes d’une densité sémique relativement élevée.

Par ailleurs, par ce phénomène de conversion on peut considérer la guerre d’Algérie par exemple comme un fait stable. C’est l’aspect dynamique des transformations situées à l’intérieur de cet état, qui ne se confondent pas avec les transformations diachroniques, qui doivent nous intéresser.

Ce concept se trouve intimement lié au discours saisi et défini comme une superposition de niveaux en profondeur. Par l’interprétation sémantique on découvre les niveaux de représentation sémantique plus abstraits. Dans notre cas de figure, la langue française elle-même en tant que moyen d’expression est le plus profond de ces niveaux qui doivent nous intéresser.

83 En faisant une projection sémantique sur l’ensemble de notre corpus, nous pouvons percevoir comment la nécessité de travailler sur une documentation authentique s’impose. Les règles de conversion ne peuvent être conçues que sur un fond d’équivalence en admettant que deux ou plusieurs formes syntaxiques (deux ou plusieurs formulations sémantiques) peuvent être référées à un topique constant.

Au final, toute conversion doit être considérée à la fois comme une équivalence et un surplus de signification.