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1.3 Récit opérationnel de la mission

1.3.3 Lancement et appropriation de l’outil

Au départ, cette mission me permet principalement d’occuper mon temps en inter-contrat, je sens qu’elle est utile, pour autant, elle ne semble pas très valorisée. Le lancement et l’appropriation de l’outil me permettent de mesurer à quel point la mission est valorisée ou non.

Le projet de capitalisation est présenté en plénière au mois de février, toute l’équipe le connaît donc dès ce moment. Je ne suis pas présente à cette plénière mais Christophe me restitue les éléments principaux.

Lors de cette restitution, Christophe me dit qu’il n’y a pas eu d’engouement général, ce qui ne me surprend pas réellement. Je suis bien plus interpellée par l’attitude de Martin, alors présent à la réunion, qui ne semble pas du tout d’accord avec le projet. Il avance des raisons valables mais que je ne considère pas être les vraies raisons de son opposition. Il affirme que nous n’arriverons pas à faire fonctionner l’outil, que l’outil n’est pas ergonomique et qu’il vaudrait mieux utiliser un répertoire partagé.

Ensuite, au moment de la phase de test, j’ai eu très peu de retours, malgré les relances, de la part des personnes à qui j’avais demandé de tester l’outil.

Le lancement de l’outil est finalement annoncé lors de la plénière de juin, Christophe me demande en amont de préparer une vidéo de lancement ainsi qu’une affiche qui auront pour objectif de donner envie aux participants de la plénière de s’investir dans le chantier. Deux consultantes proposent de participer au chantier de capitalisation. Je ne suis pas présente à la plénière et demande donc à certains participants de me faire un retour sur la façon dont a été perçue l’annonce du lancement qui me répondent qu’il y a eu assez peu de réactions car une nouvelle importante venait d’être annoncée avec cela.

32 Le lundi, j’envoie un mail pour inviter l’ensemble de l’équipe T&O au lancement qui a lieu le lendemain via une conférence avec partage d’écran et j’envoie un lien d’accès l’outil à chacun d’eux. Le lendemain, une dizaine de personnes assiste à la réunion, mon micro fonctionne assez mal et les gens ont peu ou pas de questions.

Dans les jours qui suivent, une consultante me demande de l’aide pour mettre des documents sur le SharePoint, elle a des difficultés, ce que j pourrais percevoir comme un point négatif, mais le fait qu’une première personne me demande de l’aide est une indication positive qui prouve que l’outil est utilisé.

En juillet, Christophe relance l’ensemble de l’équipe pour que chacun mette à jour son CV, assez peu de gens le font puisque fin juillet, seule la moitié des CV de l’équipe sont présents, sachant que j’en ai moi-même téléchargé une quinzaine.

Si l’outil a finalement été lancé, cela ne s’est pas fait sans difficulté et l’implication des collaborateurs de l’équipe ne laisse pas penser que le projet est efficace puisqu’une grande partie de l’équipe n’a pas mis à jour son CV qui est pourtant un document que les consultants mettent à jour régulièrement.

Le blocage du lancement du SharePoint n’est, selon moi, pas seulement lié au refus de validation de l’associé. En effet, si les collaborateurs souhaitaient réellement capitaliser, ils trouveraient des moyens de le faire et m’aideraient sûrement plus dans la mise en place de l’outil. Lorsque je parle de mon projet, on me dit que c’est une réelle nécessité et que la capitalisation fait partie des projets stratégiques dans le milieu du conseil. Pourtant, rares sont ceux qui souhaitent réellement capitaliser sur l’ensemble des documents de l’équipe, d’abord parce que cela demande du temps, ensuite parce que cela implique de partager ses propres documents. La capitalisation est annoncée comme un besoin, pourtant, le fait de ne pas en faire n’empêche pas de travailler. Quand je demande aux consultants ou managers pourquoi nous ne capitalisons pas, la raison qui est le plus mise en avant est le temps que cela demande. Paradoxalement, parmi les objectifs de la capitalisation, l’un des plus énoncés est le fait de gagner du temps. Grâce à mes différentes observations, je me suis rendue compte qu’on m’a demandé de conduire une mission qui nécessitait finalement plus que seulement configurer et lancer un outil. Si un outil doit être approprié par ses utilisateurs

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pour fonctionner, il doit aussi être adapté à la demande ; encore faut-il comprendre le besoin réel et les enjeux cachés de la demande en question.

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2 - La capitalisation dans le conseil

La partie précédente a permis de comprendre la mission e capitalisation dans son ensemble, de son cadrage à la façon dont elle s’est déroulée. Cette analyse et cette description ont également permis de saisir des prémices d’enjeux cachés, non affichés au départ de la mission. Par ailleurs, cette mission m’a été annoncée comme primordiale dans le conseil. Nous allons donc dans la partie qui vient, tenter de comprendre les enjeux liés à la capitalisation et dans le conseil en général et dans l’équipe Talents & Organisation de Four Consulting. Nous commencerons par définir les notions importantes adjacentes à la capitalisation puis essaierons de comprendre les enjeux qui émanent de la capitalisation, enfin, nous tenterons de comprendre pourquoi, malgré ses enjeux réels, la capitalisation doit faire face à de nombreuses difficultés.

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La mission SharePoint m’a été annoncée comme de la capitalisation. Si la définition de ce mot était au départ pour moi assez vague, elle a vite été cadrée par mon projet qui consistait à regrouper la plupart des documents de l’équipe sur un seul et même outil. Pourtant, j’ai pu constater dans mes entretiens et au cours de plusieurs conversations que la notion de capitalisation est plus large. En effet, le fait de capitaliser implique les notions d’amélioration continue grâce au temps et de valorisation de ce sur quoi on capitalise.

La question s’est également posée de savoir sur quoi je capitalisais. Le but de ma mission était-il de capitaliser sur de simples documents ou plus largement sur les connaissances contenues dans ces documents ? La définition que donne Grundstein de la capitalisation et que j’ai déjà mentionnée en introduction reprend l’idée d’augmenter la valeur du produit sur lequel on capitalise : « Capitaliser sur les connaissances de l’entreprise, c’est considérer les

connaissances utilisées et produites par l’entreprise comme un ensemble de richesses constituant un capital, et en tirer des intérêts contribuant à augmenter la valeur de ce capital. »23 Ainsi, je considère que l’on ne peut pas capitaliser sur des documents mais que c’est bien sur les connaissances contenues dans ces documents que l’on capitalise. En effet,

23Michel GRUNDSTEIN, « De la capitalisation des connaissances au renforcement des compétences dans

l’entreprise étendue », Actes du Colloque Vers l’articulation entre Compétences et Connaissances, décembre 2002, Nantes.

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au fur et à mesure de sa carrière, un consultant apprend de ses missions et peut ainsi améliorer, augmenter, faire évoluer les connaissances et les compétences de son équipe.