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Les RCMs et GCMs modélisent les grandeurs atmosphériques sur un nombre discret de mailles. Sur chacune de ces mailles, les grandeurs physiques sont moyen- nées, contrairement à l’atmosphère réelle. Les modèles utilisent aussi un nombre d’approximations de la physique et de la dynamique de l’atmosphère, celles qui sont à leur tour impactées par le choix de la résolution spatiale et temporelle. Quand la résolution d’un modèle est améliorée, nous faisons l’hypothèse que l’augmentation du nombre de mailles permettra une meilleure résolution des phénomènes petite échelle, des améliorations qui peuvent se répercuter sur les grande échelles du mo- dèle. Le modèle est aussi impacté par le choix du domaine et l’application ou non du pilotage spectral qui contraint le développement des grandes échelles dans la modé- lisation régionale. La valeur ajoutée d’un modèle est l’amélioration des simulations suite à l’augmentation de la résolution, à un changement de domaine ou à l’appli- cation du pilotage spectral. La référence pour mesurer cette amélioration sont les observations (souvent un produit interpolé sur une grille) ou la version globale du RCM dans le cas des expériences Big Brother qui seront décrites par la suite. Dans le cas d’une étude de valeur ajoutée sur un modèle régional, le RCM en question peut être comparé :

,→ aux champs du GCM utilisé en forçage ,→ aux champs de l’analyse utilisée en forçage ,→ au même RCM à une résolution plus basse

,→ au même RCM sur un domaine avec une différente étendue spatiale ,→ au même RCM contraint par le pilotage spectral

,→ aux champs d’une version globale du même RCM avec les petites échelles

filtrées (Big Brother)

Le RCM, qui reçoit ses conditions limites d’un modèle global ou d’un modèle régional à un domaine plus grand, a une connaissance imparfaite des conditions aux frontières. Les expériences Big Brother utilisent une version globale du modèle régional, ce qui permet d’estimer l’erreur associée à la régionalisation (Colin et al., 2010). La méthodologie Big Brother peut également être utilisée dans le cadre d’une étude de la valeur ajoutée de la régionalisation (Diaconescu et Laprise, 2013).

Une des questions clefs dans les études de valeur ajoutée est l’échelle à laquelle on peut attendre des améliorations. La littérature confirment que les RCMs ap- portent une amélioration des champs atmosphériques à l’échelle locale, surtout aux régions côtières et aux reliefs accidentés (voir Feser et al. (2011) pour une revue plus complète des études de valeur ajoutée). L’apport des RCMs pour la reproduc- tion des grandes échelles atmosphériques varie selon l’étude en question. Sur la Mer Méditerranéenne, Herrmann et al. (2011) ont démontré que l’augmentation de la résolution d’ALADIN(Bubnova et al., 1993) de 125 km à 50 km apporte une va- leur considérable pour la simulation du vent horizontal, à la fois localement et en moyenne sur tout le bassin méditerranéen. Pour l’Amérique du Nord, Diaconescu et Laprise (2013) confirment que les modèles régionaux réduisent l’erreur présente dans les conditions aux frontières pour l’humidité spécifique, le vent zonal et la précipita- tion. Sur l’Europe, ALADIN est associé à un biais chaud au centre du domaine qui impacte que les grandes échelles (Radu et al., 2008).Ce biais peut être contraint par

l’application du pilotage spectral, mais au prix d’une augmentation artificielle des extrêmes de précipitation hivernale. Dans une version plus récente du même modèle, Colin et al. (2010) montre que le pilotage spectral ne nuit pas à la représentation des précipitations extrêmes sur la France et l’Europe. Sur les Carpates, Csima et Horányi (2008) ont montré que la cohérence physique et dynamique entre le modèle global en entrée (ie une version globale du RCM) et le RCM permet d’améliorer les résultats par rapport aux simulations pilotées par une analyse.

La précipitation en particulier présente des difficultés uniques pour les modèles climatiques. C’est un processus non-linéaire et multi-phase qui dépend à la fois de la dynamique et la physique du modèle ainsi que la topographie locale. La conver- gence de l’humidité et le soulèvement orographique jouent un rôle essentiel dans la formation des précipitations et ne sont que grossièrement représentées dans les modèles globaux. Les modèles régionaux contribuent significativement à l’amélio- ration des précipitations simulées avec toutefois quelques complications dues à la représentation des pluies convectives qui ne sont explicitement résolues que dans très peu de modèles régionaux en raison d’un coût de calcul élevé associé aux ré- solutions nécessaires pour représenter la convection (l’ordre de quelques kilomètres) Kendon et al. (2012). Pour l’orographie complexe des Alpes, les modèles régionaux permettent de résoudre les principales structures méso-échelle du champ de préci- pitation (Frei et al., 2003, 2006). Il est aussi observé que les précipitations estivales sont plus biaisées que l’hiver et que la différence inter-modèle est plus importante pendant cette période, probablement du aux processus convectifs présents pendant la saison chaude (Frei et al., 2006). Pour les simulations ALADIN sur la France, une valeur ajoutée marquée est observée pendant l’été quand la résolution est aug- mentée de 50 km à 12 km, ce qui suggère que une meilleur résolution permet de diminuer certaines incertitudes associées aux processus convectifs (Déqué et Somot, 2008). Sur les Etats-Unis, l’augmentation de la résolution du modèle CCM3 permet de simuler mieux les structures spatiales des précipitations observées en automne et en hiver, tandis que peu d’amélioration est observée au printemps et en été (Iorio et al., 2004). Pour la même région, les simulations du projet NARCCAP forcées par une analyse atmosphérique reproduisent bien les structures associées à la pré- cipitation et la variabilité de cette dernière (Gutowski Jr et al., 2010). Cette étude observe aussi une variation spatiale dans la qualité des résultats, avec une meilleure reproduction des précipitations en Californie où la pluie est principalement orogra- phique que dans le bassin versant du Mississippi où la précipitation de la saison froide dépend plus des forçages synoptiques. Dans le contexte de CORDEX-Africa, où la climatologie de précipitation est déterminée principalement par l’évaporation terrestre et donc la convection, un biais systématique est présent dans le déclenche- ment des précipitations journalières prévues par les RCMs (Nikulin et al., 2012). Les premiers résultats de la régionalisation sur le continent africain restent néanmoins très prometteurs (Endris et al., 2013; Nikulin et al., 2012). De toutes ces études nous pouvons en tirer quelques conclusions générales : (1) la modélisation de la précipi- tation est généralement améliorée par une augmentation de la résolution et (2) les RCMs reproduisent moins bien les observations de précipitation quand les processus convectifs jouent un rôle déterminant.

Une solution possible pour mieux simuler les précipitations convectives est d’aug- menter la résolution jusqu’à ce que la convection soit résolue explicitement. L’utilisa-

tion d’un modèle non-hydrostatique est nécessaire dans ce type d’expérience afin de représenter correctement les processus convectifs. Les modèles hydrostatiques, qui représentent la quasi-totalité des GCMs et une bonne partie des RCMs, traitent la vi- tesse verticale comme une variable diagnostique à calculer à partir de l’équilibre entre la flottabilité d’une masse d’air et la pression atmosphérique. Ce traitement de la vitesse verticale ne permet pas de représenter correctement la convection. Quelques études existent aujourd’hui qui montrent l’apport des modèles non-hydrostatiques à très haute résolution. Prein et al. (2013) montre qu’entre deux simulations de très haute résolution (à 10 km sans la résolution explicite de la convection et à 3 km avec la résolution explicite de la convection) centrées sur les Alpes Autrichiennes le cycle diurne et les précipitations extrêmes sont mieux représentées dans les simu- lations à 3 km. Ces résultats qui sont fondés sur la simulation d’une période très courte (été 2007 et hiver 2008) avec trois RCMs méritent d’être creusés par la réali- sation des simulations plus étendues. Le projet CONVEX (CONVective EXtremes, http://research.ncl.ac.uk/convex/), une collaboration entre le Met Office, Newcastle University et l’University of Exeter, a récemment réalisé plusieurs simulations à très haute résolution (12 km sur l’Europe et 1.5 km sur le sud du Royaume Uni) avec les modèles du Met Office pour des périodes allant de 16 à 20 ans, ce qui permet de confirmer les résultats de Prein et al. (2013) dans un autre contexte climatique. Les extrêmes de précipitation du modèle à 1.5 km sont plus réalistes que ceux à 12 km pour les précipitations en dessous d’un pas de temps journalier (Chan et al., 2014b; Kendon et al., 2014, 2012). Cette amélioration est importante principalement en été quand les extrêmes sont de nature convective (Chan et al., 2014b) et elle devient négligeable aux échelles journalières et plus (Chan et al., 2013, 2014b). Pour l’ins- tant, le coût de calcul de ces simulations à très haute résolution est prohibitif pour l’adoption généralisé de ce type de simulation dans les grands projets internationaux comme CORDEX. Avec l’évolution des moyens informatiques, il est possible que les modèles à très haute résolution seront généralisés à des périodes plus longues et des régions plus étendues, comme le continent africain où le cycle diurne joue un rôle très important dans la formation des précipitations. Une autre possibilité pour l’amélio- ration des simulations climatiques est la réalisation des simulations globales à haute résolution (50 km ou moins) afin de réduire l’incertitude associée aux conditions aux limites.

Dans cette thèse nous avons sélectionné les simulations du modèle ALADIN- Climat réalisées dans le contexte du projet Med-CORDEX pour la réalisation de notre étude sur les précipitations extrêmes au Sud-est de la France. Deux résolutions sont disponibles pour ces simulations : 12 et 50 km. Ces deux résolutions sont loin de la limite de la résolution explicite de la convection, donc l’utilisation d’un modèle hydrostatique comme ALADIN ne devrait pas impacter la qualité des résultats. Les événements seront étudiés à un pas de temps journalier ce qui limite l’impact des précipitations convectives paramétrisées. L’utilisation des données journalières pour l’étude d’impact hydrologique est possible grâce à une méthode de correction de biais appliquée aux précipitations futures qui sera décrite dans la suite de cette section. Dans la continuité des études de Colin et al. (2010); Déqué et Somot (2008), nous espérons caractériser la valeur ajoutée de la haute résolution pour la modélisation des précipitations extrêmes et ses sources dans la dynamique et la physique du modèle. Par la suite, il est espéré que ces résultats permettront de mieux guider les choix

des modélisateurs et les utilisateurs de leurs données.