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La tendance à la diversification des activités économiques

Chapitre I. La dispersion des ressources et des lieux

Chapitre 4. La division spatiale des activités économiques

4.6 La tendance à la diversification des activités économiques

Cette nouvelle logique de localisation des activités n’influence pas les cinq régions périphériques sous étude de la même manière. Des critères de différenciation pourraient être utilisés. En fonction de leur degré initial d’industrialisation à titre d’exemple, elles subissent différemment les effets de la nouvelle division spatiale. A cet effet, l’analyse des entreprises manufacturières effectuée au chapitre 3 nous a permis de positionner chaque région périphérique sous l’angle des activités traditionnelles et non traditionnelles. Tel que représenté à la figure 4.2, nous avons ainsi constaté que le Bas-Saint-Laurent et le Saguenay - Lac-Saint-Jean étaient des régions beaucoup plus avancées sur la voie de la diversification industrielle que les trois autres régions. Ces régions sont aussi plus avancées sur la voie de l’industrialisation dans les activités traditionnelles. On peut ainsi présumer que les facteurs qui favorisent les activités traditionnelles influencent aussi les nouvelles activités manufacturières. Pour l’une et l’autre de ces deux régions plus performantes à cet effet, la moindre distance qui les sépare des grands marchés tels que Montréal, les Etats-Unis et l’Ontario représente à l’évidence un facteur explicatif pertinent à retenir. Nul doute aussi que la présence historique de fabriques et de petites manufactures que nous avons constatée au chapitre 2 influence positivement aussi la diversification industrielle, notamment en matière des savoir-faire cumulés et d’entrepreneuriat. Cependant le coût moindre du travail dans le Bas-Saint-Laurent ne semble pas jouer beaucoup en comparaison avec le Saguenay-Lac-Saint-Jean.

L’interprétation des données nous fait saisir rapidement l’évidence d’une industrialisation dans les activités traditionnelles qui est largement reliée aux ressources naturelles. Ainsi on transforme le poisson et le bois sur la Côte-Nord et la Gaspésie–Iles-de-la-Madeleine, le bois dans le Bas-Saint-Laurent, au Saguenay-Lac- Saint-Jean et en Abitibi-Témiscamingue et les produits agricoles dans le Bas-Saint- Laurent et au Saguenay–Lac-Saint-Jean. En réalité, la présence de ces ressources naturelles attire les unités d’extraction et rend profitables les activités de première transformation, à l’exception bien sûr des mines sur la Côte-Nord et en Abitibi-

Témiscamingue dont la matière demeure encore très peu transformée, si ce n’est deux usines d’affinage des métaux, l’une à Gaspé et l’autre à Rouyn-Noranda. Notons aussi que la première transformation des métaux représente une activité traditionnelle du Saguenay-Lac-Saint-Jean bien doté en énergie hydroélectrique.

Figure 4.2 Nombre de firmes dans les industries manufacturières

On constate par ailleurs que les entreprises non traditionnelles localisées en régions périphériques s’avèrent éclatées dans une trentaine de sous-secteurs d’activités. Néanmoins on note la présence de certaines grappes d’activités plus ou moins importantes. C’est le cas notamment de l’impression de journaux et périodiques ainsi que du matériel de transport dans le Bas-Saint-Laurent. C’est le cas aussi au Saguenay–Lac-Saint-Jean pour les ateliers d’usinage, d’emboutissage et de matriçage, la machinerie pour le bois ainsi que le textile dans une moindre mesure.

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90 Notons finalement la présence d’une grappe dans la construction et la réparation de navires en Gaspésie–Iles-de-la-Madeleine.

Il est intéressant de préciser en outre que ces activités non traditionnelles qui participent à la diversification industrielle des régions périphériques se localisent d’une manière dispersée sur les divers territoires qui composent les régions. Il y a bien sûr quelques petites polarisations positionnées généralement dans les importants centres de consommation en régions, mais la majorité des activités non traditionnelles se dispersent naturellement ici et là permettant ainsi d’alimenter des centres d’extraction. Précisons qu’en général les activités manufacturières de la Côte-Nord s’avèrent relativement concentrées, sauf dans l’agro-alimentaire alors qu’elles sont hautement dispersées en Gaspésie–Iles-de-la-Madeleine et au Bas- Saint-Laurent. L’Abitibi–Témiscamingue et le Saguenay–Lac-Saint-Jean sont des régions aux activités manufacturières qualifiables de semi-dispersées, sauf l’agro- alimentaire qui demeure un secteur relativement plus dispersé dans ses unités de production.

Conclusion

Les changements structurels vécus depuis trois décennies par les activités économiques localisées dans les cinq régions périphériques québécoises étudiées, ont eu des impacts importants sur les divers territoires. Il y a bien sûr des territoires agricoles, forestiers, maritimes et miniers qui furent disqualifiés, entièrement ou en partie, puisque devenus insuffisamment rentables pour justifier l’intensification du capital. La plupart des rues principales qui structurent les centres urbains furent largement désertées par les traditionnels commerces et services. L’étalement urbain représente aussi un impact territorial relié indirectement aux transformations structurelles en cours. Ces effets sont largement connus grâce aux nombreuses monographies effectuées récemment. D’autres impacts apparaissent évidents à notre analyse, soit la dévitalisation de plusieurs centres d’extraction en perte d’emplois et en fuite de la consommation, la forte concentration spatiale de la consommation (distribution), et l’accentuation de la concentration spatiale des activités de production (transformation). Tous ces impacts semblent s’intensifier actuellement sous l’égide du mouvement d’intégration sectorielle soutenu par une

plus forte mobilité des facteurs, notamment les marchandises, les travailleurs et les consommateurs.

Au modèle Centre – Périphérie qui explique les relations de domination, se greffe désormais à l’évidence empirique un modèle triangulaire sur lequel trois grandes catégories distinctes de centres petits et grands prennent place par l’entremise d’une nouvelle division spatiale des activités économiques. Ce modèle trilogique pour expliquer la répartition des activités économiques dans la périphérie du Québec n’inclut certes pas la totalité des composantes territoriales qui structurent cette vaste portion de l’espace du Québec. La métropole Montréal et la capitale Québec ne sont évidemment que très peu considérées. Se positionnent en outre une catégorie de petits centres ruraux de services. Aussi, des résidus non intégrables sont bien visibles, notamment quelques petites agglomérations qui ne sont ni des centres de consommation, ni des petits centres ruraux et ni des centres d’extraction.

Cependant, le caractère général du modèle formulé ci-dessus s’avère suffisamment résistant aux faits. Nous le proposons à l’analyse de la réalité spatiale contemporaine au Québec et au Canada. Ce modèle nous permet de mieux expliquer certains phénomènes et aussi de mieux anticiper la future répartition spatiale des activités économiques. Son utilité potentielle pour asseoir la politique publique nous apparaît sans équivoque.

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