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Chapitre VI : Discussion générale

VI. Discussion générale

VI.1. La résolution spatiale (verticale et horizontale)

Pour le modèle OPS-ST, le terme résolution spatiale n’est pas bien adapté, mais le choix de l’utiliser dans notre travail permet de simplifier la compréhension car elle représente la distance entre deux points récepteurs. Les résultats présentés dans les chapitres IV et V mettent en évidence l’effet de la résolution spatiale (verticale et horizontale) sur les dépôts secs de NH3 simulés par les deux modèles. Une très grande variabilité spatiale des dépôts secs a été observée en fonction de la résolution spatiale des modèles. Cette différence peut s’expliquer par les différences dans le formalisme des modèles (i.e. gaussien ou eulérien), la complexité des modèles (i.e. les processus intégrés dans le modèle), la taille du domaine étudié, ou encore la disponibilité des données d’entrée. Par ailleurs, les simulations sur de très grands domaines spatiaux ont des limites imposées par les ressources informatiques qui ne permettent pas de traiter de gros volumes de données d’entrée, ni de générer des données de sortie à de fortes résolutions spatiales dans des temps de simulation raisonnables.

Le formalisme des modèles ainsi que la résolution spatiale peuvent avoir un fort impact sur les prédictions des dépôts selon deux manières différentes :

 La manière d’intégrer les processus dans les modèles peut varier en fonction de la résolution spatiale. Par exemple, à une faible résolution spatiale (verticale et horizontale), les mélanges verticaux instantanés des gaz tels que l’ammoniac sont plus importants qu’à forte résolution. Ceci peut conduire à des concentrations plus faibles pour le volume de la maille et donc une sous-estimation des dépôts. Ce résultat a été montré dans le chapitre IV,

149 dans lequel les deux profils verticaux de concentration sont comparés. Le modèle OPS-ST prédit une concentration plus élevée à la hauteur du récepteur, ce qui explique un dépôt moyen plus élevé en comparaison au dépôt moyen simulé par CHIMERE.

 Le calcul des moyennes spatiales des valeurs des données d'entrée, ainsi que celui des concentrations atmosphériques modélisées et des dépôts secs, peut avoir un effet non négligeable sur les prédictions des dépôts. La concentration en NH3 dans l'air peut varier sensiblement à l'échelle de quelques dizaines de mètres à proximité d'une source de forte intensité (e.g. bâtiments d’élevage). Généralement, les modèles d’évaluation des impacts environnementaux utilisent des résolutions spatiales pouvant descendre jusqu’à quelques km² pour les modèles fonctionnant aux échelles les plus fines (Hallsworth et al., 2010). L’augmentation de la résolution spatiale peut permettre aux modèles de moyenner les valeurs des données d’entrée et des données simulées sur des zones plus petites et d’être plus efficaces pour prendre en compte les « hot-spots » d’émissions, ce qui peut conduire à des résultats différents pour l'évaluation des dépassements des charges et des seuils critiques (Hallsworth et al., 2010).

Théoriquement, pour les modèles eulériens, l’augmentation de la résolution spatiale s’accompagne d’une augmentation des dépôts secs de NH3 (cf. section IV.3.1). Ce résultat est toujours vérifié pour CHIMERE quelle que soit la résolution spatiale (cf. sections IV.3.1 et V.3.1). Il peut être expliqué par des phénomènes géométriques (volume de la boite eulérienne), mais aussi par la position des mailles émettrices, qui peuvent être déplacées et ainsi favoriser l’advection en dehors du domaine. En revanche, pour OPS-ST, cette variation est loin d’être linéaire. La figure VI.1 montre que pour OPS-ST, le dépôt peut varier d’une manière aléatoire pour des faibles résolutions spatiales. En réalité, OPS-ST calcule les dépôts secs au niveau de chaque récepteur en fonction de la distance entre la source et le récepteur ; la position du récepteur par rapport à la source est donc cruciale.

150 Figure VI.1. Fraction de NH3 déposée sur le domaine (issu des données d’émission du chapitre V) calculée avec OPS-ST pour différentes valeurs du nombre de récepteurs. L’écart-type est calculé pour 5 positions de sources émettrices et pour chaque nombre de récepteurs.

Effet de la distance entre sources et récepteurs avec OPS-ST VI.1.1.

La position des récepteurs par rapport aux sources ainsi que leur nombre pourrait avoir un impact sur la fraction de NH3 qui est déposée sur le domaine. Le modèle OPS-ST n’est pas spatialisé, de sorte que la position des récepteurs par rapport à la position de la source est déterminante. La figure VI.I montre que, avec OPS-ST, la variation des dépôts secs de NH3 en fonction du nombre de récepteurs n'est pas linéaire par rapport au nombre de récepteurs utilisés dans le domaine et pour une répartition spatiale des sources d'émissions donnée. La valeur la plus élevée de dépôt sec a été simulée lorsque les sources étaient très proches des récepteurs (entre 104 et 105 récepteurs sur le domaine). Pour créer des cartes de dépôt, le modèle OPS-ST a besoin de moyenner le dépôt calculé au niveau d’un récepteur sur la surface des mailles aux dimensions fixées par l’utilisateur, ce qui explique en partie la forte variabilité des dépôts simulés en fonction du nombre de récepteurs. La figure VI.1 montre également l'effet de la position des sources par rapport à la carte des émissions. L'écart-type a été calculé pour cinq positions d'émission différentes pour le même nombre de récepteurs sur le domaine. L'écart-type le plus faible (~ 0.5) a été simulé pour le nombre de récepteurs le plus élevé (1 récepteur tous les 25 m), ce qui pourrait être expliqué par une distance quasi-constante entre les sources et les récepteurs. Une plus grande distance entre les récepteurs (i.e. un moins grand nombre de récepteurs sur le domaine) pourrait accroître la variabilité des dépôts secs, avec une variabilité non linéaire. Cette forte variabilité dépend aussi du nombre de sources, de la distance entre les sources et les récepteurs, et aussi d’autres paramètres d’entrée du modèle (e.g. vitesse du vent, hauteur d'émission). Les résultats montrent que la distance entre deux récepteurs ne doit pas dépasser 100 m pour obtenir des résultats avec des

0 5 10 15 20 25 30 10 100 1000 10000 100000 1000000 Fr (%) Nombre de récepteurs

151 barres d'erreur proches de celui simulé dans la situation de référence (i.e. distance de 25 m entre les récepteurs). Pour des distances entre récepteurs plus grandes (e.g. 200 m), les dépôts secs peuvent varier d’un facteur 2. Ces résultats montrent combien il est important d'utiliser un nombre de récepteurs suffisant pour un modèle comme OPS-ST. Ainsi, une distance de 25 m ou de 50 m entre deux récepteurs apparaît la plus appropriée. D’autres travaux confirment nos résultats : van Pul et al. (2008) et Theobald et al. (2012) ont utilisé le modèle OPS-ST avec une distance de 25 m entre les récepteurs ; Jonges et al. (2015) l’ont utilisé avec une distance de 10 m entre les récepteurs.

Pour les cas d’étude présentés dans les chapitres IV et V, le modèle OPS-ST a été utilisé avec un nombre des récepteurs et une distance entre sources et récepteurs constante (50 m pour le chapitre IV et 25 m pour le chapitre V). Les résultats ont ensuite été moyennés sur des mailles de différentes tailles (pseudo-résolution), ce qui explique les dépôts secs moyens constants simulés avec OPS-ST pour les différentes tailles de mailles. Ce choix a été motivé par les fortes différences du dépôt moyen en fonction du nombre de récepteurs, de la distance entre les récepteurs, des limites d’utilisation des modèles du type OPS-ST.

Effet de la hauteur de la source VI.1.2.

Il apparaît clairement qu’une comparaison directe entre les deux modèles pour quantifier leur sensibilité à la hauteur de la source ne peut pas être objective car, dans les modèles eulériens, l’épaisseur de la couche de surface dépend de la pression atmosphérique. Il est toutefois nécessaire de mentionner la nécessité de bien représenter la hauteur de la source en se basant sur d’autres travaux (Sutton et al., 1998 ; Fowler et al., 1998) qui montrent que les dépôts secs à proximité des sources sont d’autant plus élevés que la hauteur de la source est faible. Ces dépôts élevés peuvent aussi s’expliquer par l’augmentation de la concentration de surface en NH3 à proximité des sources d’émissions situées à faible hauteur (Janssen et Asman, 1988). Les fortes diminutions des dépôts secs de NH3 avec l’augmentation de la hauteur de la source montrent la nécessité d'utiliser des hauteurs de source précises pour les modèles de transport atmosphérique, quel que soit le formalisme du modèle. La variation de hauteur de la source peut aussi influer sur le transport, une source située en position haute pouvant déposer faiblement dans les premiers mètres à proximité immédiate de la source. Cette tendance peut s’expliquer par la forme et la hauteur du panache qui n’atteint pas rapidement le sol ; les dépôts secs ont alors lieu dans des zones situées en aval et éloignées de la source. Pour les modèles à panache gaussien, la hauteur mesurée directement sur le terrain est déterminante, alors que pour les modèles eulériens, c’est la résolution verticale qui est déterminante. L’effet majeur de la hauteur de la source dans les modèles eulériens nous renvoie

152 directement à l’effet majeur de la résolution verticale, avec un formalisme différent entre les deux approches de modélisation (Loubet et al., 2009). Néanmoins, nous avons pu montrer qu’en diminuant la hauteur de la première couche à une hauteur double de la hauteur d’émission, les fractions déposées devenaient similaires entre les deux modèles.