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La réglementation sur les infrastructures

Dans le document Communes et villes (Page 12-15)

III. Les villes et les agglomérations

2. La réglementation sur les infrastructures

L’ancien article 86 alinéa 3, litt. bbisCst., en vigueur dix ans, du 1erjanvier 2008 au 31 janvier 2017, prévoyait le financement de mesures liées à la circulation routière « destinées à amé-liorer les infrastructures de transport dans les villes et les agglomérations ». Cette mesure s’insérait dans la politique des agglomérations débutée en 2001 par la Confédération. Sur cette base, le législateur fédéral avait modifié la LF concernant l’utilisation de l’impôt sur les huiles minérales à affectation obligatoire et de la redevance autoroutière (LUMin)69pour introduire à son titre 2 un nouveau chapitre 4 intitulé « Contributions destinées aux infra-structures de transport dans les villes et dans les agglomérations » et entré en vigueur éga-lement le 1erjanvier 2008.70L’ancien article 17b al. 2 LUMin prévoyait que le Conseil fédéral désignait les villes et les agglomérations ayant droit à des contributions après avoir entendu les cantons. Cette disposition lui imposait de s’appuyer « pour ce faire sur la définition de l’Office fédéral de la statistique ». La liste des villes identifiées comme ayants droit devait en-suite figurer à l’annexe 4 de l’OCF de ladite loi.71

Les travaux préparatoires de ce projet sont révélateurs de l’absence préalable de toute défi-nition des agglomérations. La consultation a montré des divergences d’opinion, certains ne voulant reconnaître qu’un nombre limité d’agglomérations, d’autres voulant assimiler les chefs-lieux des cantons aux agglomérations. Finalement, le consensus a porté sur la défini-tion utilisée par l’Office fédéral de la statistique, selon laquelle la Suisse comptait alors 50 agglomérations et 5 villes isolées.72C’est cette définition qui a été alors reprise dans la légis-lation, puisque le Conseil fédéral avait l’obligation de l’utiliser selon l’ancienne teneur de l’ ar-ticle 17b al. 2 LUMin.

Lorsque cette disposition a été adoptée, l’Office fédéral de la statistique qualifiait une

‹commune›de ville lorsqu’elle comptait 10 000 habitants ou plus.73La Suisse comptait ainsi en 2010, 135 villes de plus de dix mille habitants, réparties en cinq villes de plus de 100 000 habitants (Bâle, Berne, Genève, Lausanne et Zurich), cinq villes de 50 000 à 99 999 habitants (Bienne, Lugano, Lucerne, Saint-Gall et Winterthur), 26 villes de 20 000 à 49 999 habitants

69 LF du 22.3.1985 concernant lutilisation de limpôt sur les huiles minérales à affectation obligatoire et des autres moyens affectés à la circulation routière et au trafic aérien (LUMin ; RS 725.116.2) (état au 1.1.2018).

70 RO 2007 5779, 5800 s.

71 Art. 19 OCF du 7.11.2007 concernant l’utilisation de l’impôt sur les huiles minérales à affectation obli-gatoire et des autres moyens affectés à la circulation routière (OUMin ; RS 725.116.21) (état au 1.1.2018).

72 Message sur la législation dexécution concernant la réforme de la péréquation financière et de la ré-partition des tâches entre la Confédération et les cantons (RPT) (Message Législation d’exécution RPT), FF 2005 5641 ss, 5777.

73 Martin Schuler/Pierre Dessemonter/Dominique Joye, Office fédéral de la statistique, Recensement fédéral de la population 2000, Les niveaux géographiques de la suisse, Neuchâtel 2005, p. 149.

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et 99 villes de 10 000 à 19 999 habitants.74Ce chiffre de 135 villes correspondait à 5 % des 2636 communes politiques qui existaient encore à ce moment.

Toujours selon l’Office fédéral de la statistique, une agglomération répondait aux deux cri-tères cumulatifs suivants :75d’une part, la présence d’un ensemble d’au moins 20 000 habi-tants, formé par la réunion des territoires de communes adjacentes ; d’autre part, l’existence d’une zone centrale formée d’une commune-noyau ou de‹ville-centre›76et, suivant le cas, d’autres communes qui comptent 2000 emplois ou plus et ont une densité de 85 emplois pour 100 personnes actives résidentes. De plus, ces communes, dites‹périphériques›, de-vaient soit former une zone bâtie continue avec la commune-noyau, soit avoir une frontière commune avec elle, soit encore y envoyer travailler au minimum un sixième de leur popula-tion active occupée.77Si une commune n’appartient pas à la zone centrale, elle pouvait néan-moins être rattachée à l’agglomération si au minimum un sixième de sa population active occupée résidante travaillait dans la zone centrale et si certaines conditions étaient rem-plies.78Il y avait ainsi 50 agglomérations.79

Pendant cette période, grâce à la législation sur les infrastructures, il était possible de faire le lien entre l’article 50 al. 3 Cst. et les villes et agglomérations identifiées par l’Office fédéral de la statistique. Cette situation a changé le 1erjanvier 2018.

Dans sa nouvelle teneur en vigueur depuis le 1erjanvier 2018, l’article 86 al. 1 Cst. prévoit que « [l]e financement des routes nationales et des contributions aux mesures visant à amé-liorer les infrastructures de transport dans les villes et les agglomérations, en lien avec la cir-culation routière, est assuré par un fonds ». Cette disposition a été élaborée dans le cadre de la mise en place d’un fond pour les routes nationales et le trafic d’agglomération.80Dans le

74 Union des villes suisses, Statistiques des villes suisses 2012, Annuaire statistique de l’Union des villes suis-ses, Berne 2012, p. 30 ss.

75 Cette définition a été admise dans la jurisprudence dans un cas concernant les prétentions d’un fonc-tionnaire qui estimait avoir droit à une rémunération supplémentaire car il vivait dans une agglomé-ration où le coût de la vie était plus élevé (JAAC 65.81 consid. 5.bb.).

76 Sur la notion deville-centre:Schuler/Dessemonter/Joye(note 73), p. 151 s.

77 Schuler/Dessemonter/Joye(note 73), p. 149.

78 Au minimum trois des cinq conditions suivantes devaient être réalisées : (1) il devait exister un lien de continuité de la zone bâtie entre une telle commune et la commune-noyau de lagglomération. Ce lien existait en l’absence de zone non bâtie (terres agricoles ou forêts) dépassant 200 mètres ; (2) la densité combinée habitants/emplois par hectare de surface d’habitat et d’agriculture devait être élevée, soit su-périeure à 10 ; (3) l’évolution démographique devait être susu-périeure à la moyenne, ce qui était notam-ment le cas si la population pouvait s’accroître de plus de dix points par rapport à la moyenne nationale sur dix ans ; (4) il existait une interdépendance marquée de pendulaires avec la ville-centre ou dautres communes du centre. Ce qui aurait été notamment le cas si au moins un tiers de la population active occupée résidante travaillait dans la zone centrale ; ou finalement, (5) le secteur primaire était peu dé-veloppé.

79 Schuler/Dessemonter/Joye(note 73), p. 113.

80 Voir la LF du 30.9.2016 sur le fonds pour les routes nationales et le trafic d’agglomération (LFORTA ; RS 725.13.) (état au 1.1.2018).

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cadre de cette réforme, la LUMin a également été modifiée. En particulier, l’article 17b al. 2 LUMin a subi un changement important : désormais, au lieu de devoir s’appuyer sur la dé-finition de l’Office fédéral de la statistique, le Conseil fédéral doit seulement en tenir compte.

La volonté de détacher la notion légale de‹ville›et d’‹agglomération›selon la LUMin de la définition de l’Office fédéral de la statistique était motivée par la reconnaissance du caractère

‹statistique›de cette définition suite à sa modification en 2014 et la volonté de garder une marge de manœuvre politique dans la recherche de solutions pour le trafic d’ aggloméra-tion.81

La modification de la méthode de l’Office fédéral de la statistique a été annoncée le 18 dé-cembre 2014.82L’Office a souhaité revoir sa définition de l’espace à caractère urbain afin de mieux coller à la réalité des villes et agglomérations. Il a développé un processus de clas-sification en deux étapes.83La première consiste à déterminer la densité de la population, des emplois et des nuitées hôtelières dans des cellules avec une trame régulière de 300 mètres de côté, placées sur le territoire suisse, pour identifier des centres d’agglomération potentiels.84 Cette trame sert à limiter l’influence des frontières institutionnelles historiques. Dans une seconde étape, l’analyse détaillée de l’intensité des flux pendulaires vers les centres permet de déterminer les couronnes d’agglomération potentielles. Si un nombre minimal de 20 000 personnes habite dans les centres identifiés et leurs couronnes, l’espace en question est qualifié d’agglomération. D’autres catégories urbaines ont aussi été définies hors des ag-glomérations. En font partie, d’une part, les‹communes multi-orientées›, qui sont fonc-tionnellement orientées vers plusieurs centres d’agglomération85et, d’autre part les‹centres hors agglomération›, dont l’importance est plutôt régionale86. Selon cette nouvelle

appro-81 Message relatif à la création d’un fonds pour les routes nationales et le trafic d’agglomération, au comblement du déficit et à la mise enœuvre du programme de développement stratégique des routes nationales (FORTA) (Message « FORTA »), FF 2015 1899 ss, 2002.

82 Office fédéral de la statistique, Actualités OFS, L’espace à caractère urbain en Suisse 2012, Une nouvelle définition des agglomérations et dautres catégories despace urbain, Neuchâtel 2014, p. 2 ss.

83 Pour une description détaillée de ces deux étapes :Viktor Goebel/Florian Kohler, Office fédéral de la sta-tistique, Lespace à caractère urbain 2012, Rapport explicatif, p. 9 ss.

84 La formule complète est : « [u]ne agglomération se compose en général d’un centre d’agglomération et d’une couronne d’agglomération. Chaque centre d’agglomération comprend une zone centrale d’un seul tenant composée de cellules de 300 × 300 m et présentant une densité d’au moins 500 habitants et emplois par km2[habitants + emplois + nuitées dans l’hôtellerie converties = HEN]. La zone centrale doit compter au moins 15 000 HEN en termes absolus. Elle doit en outre comprendre un noyau à den-sité élevée, comptant plus de 2500 HEN par km2et d’une taille minimale de 5000 HEN. Les communes dont plus de 50 % des HEN se trouvent dans une zone centrale sont qualifiées de communes-centre d’agglomération. Les différentes communes d’une zone centrale forment ensemble le centre de l’agglo-mération. » ;Goebel/Kohler(note 83), p. 14.

85 Goebel/Kohler(note 83), p. 12.

86 Goebel/Kohler(note 83), p. 13.

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che, il existe en Suisse 49 agglomérations, soit une de moins que selon la méthode précé-dente87.

Dans la perspective d’une interprétation systématique du droit fédéral, il semblerait juste de continuer à utiliser la liste des communes contenues à l’annexe 4 de l’OUMin pour identifier les villes et agglomérations au sens de l’article 50 al. 3 Cst. Toutefois, depuis la modification de l’article 17b LUMin, cette liste ne revêt plus une portée générale dès lors qu’elle peut s’ é-carter des données de l’Office fédéral des statistiques ; elle est désormais conçue comme un outil de la politique en matière de trafic d’agglomération88et risque donc d’évoluer de ma-nière à permettre une gestion optimale de ce trafic avec un décalage entre l’existence réelle d’une ville ou d’une agglomération et ladite liste. Partant, celle-ci peut servir d’indice, mais non de définition légale. Au-delà de cette limitation, il faut retirer de cette règlementation fédérale le lien avec la définition statistique des villes et agglomérations. La Confédération, dans son devoir de tenir compte de la situation particulière des villes et des agglomérations urbaines, doit utiliser la définition de ces villes et agglomérations établie par l’Office fédéral de la statistique.

Un autre apport de la LUMin a été l’introduction de la notion de plan d’‹agglomération›en son article 17d afin de permettre un financement fédéral de dépenses d’infrastructures. Pour avoir un tel projet, la condition posée par le droit fédéral est l’existence d’un organisme res-ponsable, pouvant être constitué d’un ou de plusieurs cantons, d’agglomérations, de parties d’agglomérations ou de villes figurant à l’annexe 4 de l’OUMin, organisé selon le droit can-tonal et apte conclure des accords valables avec la Confédération.89Ces projets sont devenus un instrument important tant de la politique des transports que de l’aménagement du terri-toire en permettant un développement coordonné de l’urbanisation et des transports dans les centres urbains.90Ils contribuent à la reconnaissance de l’importance de villes et des ag-glomérations dans la politique fédérale.

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