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Partie II – Reconnaissance du sous-sol, état de l’art

1. Les moyens de reconnaissance des sols

1.2. Reconnaissance géophysique

1.2.2. La prospection électrique

Les travaux consistant à injecter un courant électrique dans le sol pour des fins de prospection

géologique ont commencé il y a plus d’un siècle (Peterson 1907, Bergstrom 1913, Schlumberger

1920). Au départ, la méthode consistait à déplacer un couple d’électrodes de mesure (électrodes de

potentiel MN) par rapport à un dipôle d’injection fixe (électrode de courant AB) pour localiser

qualitativement des anomalies conductrices. En France, Schlumberger démarra son travail pionnier sur

la prospection électrique en 1912 (Schlumberger 1920), largement cité comme les premiers

balbutiements de la méthode électrique, suivi de près par Wenner aux Etats-Unis (Kunetz 1966).

Les principes du sondage électrique vertical (SEV), consistant à mesurer les variations de résistivité du

sous-sol sur une verticale en écartant progressivement le dispositif d’électrodes autour d’un point

central, ont été établis dans les années 1920 (Gish et al 1925). La méthode du traîné (ou profilage),

enregistrant les variations horizontales de résistivité à l’aide d’un dispositif de taille fixe (donc à

profondeur constante) a vu le jour à cette même période. Au début, l’interprétation des courbes

verticales de résistivité restait qualitative, puis à partir des années 1930, le développement d’abaques a

permis l’interprétation du milieu en séquences de couches de résistivités (Stefanescu et al 1930,

Slichter 1933). Dans les années 1970, le développement des outils numériques a conduit à l’apparition

de modèles de simulation, d’abord 1D (Ghosh 1971, Johansen 1977), puis 2D ou 3D (Dey et al 1979).

Au début des années 1980, la mise au point de câbles multi-électrodes avec système d’acquisition

d’abord manuel (Barker 1981, 1992), puis automatique assisté par ordinateur (Dahlin 1989, 2001), a

permis d’augmenter significativement la vitesse d’acquisition et dans le même temps de diminuer le

nombre d’opérateurs sur le terrain. Toutefois les mesures restaient encore unidimensionnelles. Ce n’est

que dans les années 1990 que les systèmes de câble multi-électrodes ont été mis à profit pour

l’acquisition 2D ou 3D à haute résolution spatiale, par combinaison de sondages et traînés (Griffiths et

al 1990, Griffiths et al 1993, Dahlin et al 1997). Conjointement, les techniques d’inversion

automatique 2D ou 3D (modélisation numérique inverse), basées sur les méthodes des différences

fines (FD) ou des éléments finis (FE) pour la résolution du problème direct, ont été développées en

réponse au nouveau besoin (Li 1992c, Oldenburg et al 1994, Tsourlos 1995, Zhang et al 1995, Loke et

al 1995, 1996a, 1996b) : on parle depuis lors d’imagerie de résistivité électrique ou Tomographie de

Résistivité Electrique (TRE).

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b) Principe.

Le principe de la prospection électrique est d’injecter dans le sol un courant électrique d’intensité I

entre deux électrodes d’injection AB et de mesurer la différence de potentiel ∆V induite dans un autre

couple d’électrodes MN. A partir de la valeur du courant injecté I, de la mesure de la différence de

potentiel ∆U et de l’écartement entre les différentes électrodes, on peut déterminer la résistivité

électrique apparente du sous-sol à partir de l’Équation 1.6 :

Équation 1.6

GH I ∗∆KL

avec : MN00 : résistivité apparente O : facteur géométrique du dispositif

La résistivité apparente d’un terrain hétérogène correspond à la résistivité d’un terrain homogène qui,

pour une configuration identique des électrodes et un même courant injecté, donnerait la même mesure

∆U. Elle est fonction de la résistivité, de la géométrie des diverses couches et de la disposition des

électrodes. Bien que toutes les configurations d’électrodes soient possibles, il existe plusieurs

dispositifs d’électrodes classiques (Loke et al 1996b, Chapellier 2000, Rentier 2002) utilisés en

pratique : Schlumberger, Wenner, pôle-pôle, dipôle-dipôle, etc.

La première étape dans l’interprétation des données en tomographie électrique consiste à construire

une pseudo-section. Celle-ci est obtenue en reportant la valeur de la résistivité apparente mesurée au

centre du dispositif et à une profondeur dépendant de l’écartement entre les électrodes. Cette

représentation conduit à une image pour laquelle les valeurs de résistivité et celles de profondeur ne

sont pas « correctes » ; car l’image électrique initialement obtenue n’est qu’une représentation sur une

pseudo-section de différentes résistivités apparentes. Il convient donc d’inverser ces valeurs pour

obtenir la section vraie accompagnée des résistivités vraies. La Figure 1.13 illustre la disposition des

électrodes et la construction d’une pseudo-section avec un dispositif dipôle-dipôle.

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c) Configuration des électrodes.

Pour déterminer la valeur de résistivité apparente du sous-sol on applique un facteur (k) dit

géométrique (Chapellier 2000, Rentier 2002) à la mesure de potentiel. Ce facteur géométrique prend

en compte la géométrie du dispositif d’implantation des électrodes (organisation et distance entre les

électrodes). On utilise couramment diverses configurations qui présentent différentes aptitudes en

fonction des profondeurs d’investigation et de la variabilité supposée (Tableau 1.10). Dans le cadre de

cette thèse, la configuration Dipôle-dipôle est celle retenue selon les critères suivants :

• dispositif de mesure comparable aux mesures du dispositif TREC (Chapitre IV).

• des paramètres techniques externes liés au temps de mesure.

• l’absence d’électrodes à l’infini, difficile à implanter en site urbain.

Wenner

Wenner –

Schlumberger

Dipôle-dipôle Pôle-pôle

Pôle-

dipôle

Sensibilité aux structures horizontales ++++ ++ + ++ ++

Sensibilité aux structures verticales + ++ ++++ ++ +

Profondeur d’investigation + ++ +++ ++++ +++

Couverture horizontale + ++ +++ ++++ +++

Intensité du signal ++++ +++ + ++++ ++

Tableau 1.10 : Caractéristiques des différents dispositifs (d'après : Samouëlian et al 2005).

Les caractéristiques sont classifiées de (+) à (++++), équivalents d’une mauvaise à une haute

sensibilité pour les différentes configurations considérées.

d) De la résistivité apparente à la résistivité vraie, le problème inverse.

La mesure de résistivité électrique intègre un volume d’investigation auquel on attribue une résistivité

apparente. Cette résistivité apparente est en fait une composition des différentes géométries et

résistivités dans le volume d’investigation. C’est une valeur résultante de ces facteurs, globalisant

l’ensemble des propriétés du sous-sol comprises dans le volume d’investigation. On représente la

distribution des mesures (valeurs de la résistivité apparente) sur une pseudo-section, qui est une

représentation ordonnée avec des dimensions (positon des mesures en profondeur) arbitraires.

De cette cartographie, on peut déduire un modèle de distribution des résistivités vraies des structures

du sous-sol en 2D. L’inversion des données suit un processus itératif qui minimise l’écart entre la

pseudo-section mesurée et une pseudo-section recalculée à partir du modèle de résistivité électrique

déduit des mesures de résistivité apparente, jusqu’à ce que les données mesurées et calculées

atteignent une concordance acceptable ou jusqu’à ce qu’aucune nouvelle amélioration ne soit possible,

selon un processus décrit à la Figure 1.14. Le paramètre rendant compte de la concordance entre la

pseudo-section mesurée et calculée est le Root Mean Square Error (RMSE), calculé pour chaque

itération du processus d’inversion. Plus le RMSE est faible, plus les pseudo-sections mesurées et

calculées sont concordantes, rendant compte d’une inversion de qualité (ici admis pour RMSE < 10%).

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Figure 1.14 : Algorithme d'inversion d'une TRE (Comte 2008).

Les prospections par tomographie électrique ne présentent le sous-sol qu’à un instant t, les variations

de teneur en eau ou de température des sols influençant les valeurs de résistivité apparente. On

soulignera donc que sur une même section, les mesures de la résistivité apparente peuvent subir des

variations même au sein d’une journée. Le suivi dans le temps d’un site devra donc prendre en compte

ces variations ; et des corrections devront être appliquées sur les données pour harmoniser le suivi

(Peter-Borie et al 2007). Soulignons également que l’injection du courant au niveau des électrodes AB

se fait dans l’ensemble du sous-sol à proximité de ces dernières (3D), tandis qu’une pseudo-section

limite la représentation de ce phénomène à une coupe 2D.

1.2.3. La prospection électromagnétique.