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La question de la gestion des métaux est centrale de par leur utilisation dans de très nombreux domaines, due notamment à leurs bonnes conductivités électrique et thermique, ou pour leurs propriétés mécaniques. L’évaluation du cycle et de la gestion des métaux représente donc un enjeu important, qui a conduit à de nombreuses études visant à “cartographier” les flux de métaux à travers différents pays.

Parmi elles, on peut notamment citer les travaux précurseurs de Zeltner et al. (1999) qui ont proposé une stratégie de gestion durable des métaux, basée sur le cas du cuivre aux États-Unis. Ces auteurs ont montré qu’une im- portante quantité de cuivre se trouve stockée dans la technosphère, c’est-à-dire dans tous les produits et biens construits par l’homme, et qu’une gestion du- rable de la ressource devra nécessairement passer par la prise en compte de ce stock qui doit être traité comme une source future de matière et non comme de futurs déchets. Une autre étude particulièrement complète des flux de res- sources est présentée dans la série d’articles de l’équipe de Graedel (2002) : cette équipe de l’université de Yale a initialisé un projet appelé STAF (STocks And Flows), qui visait à caractériser le cycle du cuivre en Europe, avec notam- ment un article complet consacré au sous-système de gestion des déchets et des flux recyclés. Cette démarche de caractérisation des flux a ensuite été reprise pour l’élaboration de nombreuses études d’évaluation des flux de métaux à différentes échelles à travers le monde, et notamment nationales.

Ces différents travaux mettent en évidence la question centrale du traite- ment des déchets : la plupart des métaux se recyclent très bien lorsqu’ils sont purs, et l’intérêt de les recycler paraît évident. Cependant, ils sont tous cen- trés sur l’unique problème de la caractérisation du cycle de la ressource et de l’évaluation des pertes. Il en ressort que le recyclage permet bien évidemment de diminuer les pertes et donc la consommation de ressources primaires. Néan- moins, à notre connaissance, ces études n’évaluent pas de façon quantitative les coûts et impacts liés au cycle actuel ni à un cycle pour lequel le recyclage des déchets serait plus important.

Par ailleurs, un certain nombre de travaux consacrés spécifiquement à la problématique du recyclage ont été menés, visant à comparer, évaluer et amé- liorer les technologies existantes. En effet, le recyclage des métaux n’est pas une

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nouveauté : les débris produits au cours des procédés de fabrication des pro- duits (appelés nouveaux débris) ont depuis toujours été recyclés. Cependant le recyclage des “vieux débris” (nom donné aux débris issus de produits en fin de vie) est plus complexe que celui des nouveaux débris, car les impuretés ne sont pas les mêmes et les mécanismes réactionnels mis en œuvre dans les procédés de recyclage peuvent donc être différents. Ainsi, si certains métaux comme le cuivre ou le plomb peuvent être recyclés en étant mélangés au cuivre primaire (issu de l’extraction minière), d’autres comme l’aluminium sont systématique- ment recyclés dans des circuits spécifiques (Bever,1976). De nombreuses études ont ainsi été menées déchet par déchet pour étudier les meilleurs solutions de recyclage possible. Par exemple Ruhrberg (2006) a évalué l’efficacité du recy- clage des produits en fin de vie en Europe,Bigum et al.(2011) ont réalisé une analyse du cycle de vie du recyclage des déchets électroniques à haute teneur en cuivre tandis queZhang and Forssberg(1998) proposent une méthode pour optimiser la récupération des métaux contenus dans tous les déchets électro- niques. De leur côté, Skutan and Brunner (2012) ont étudié le recyclage des métaux contenus dans les ordures ménagères. D’autres études, plus globales dans le sens où elles ne s’attachent pas qu’à une catégorie de déchets, ont été conduites : Giurco et al. (2001) ont comparé deux procédés de recyclage du cuivre par une approche de type analyse du cycle de vie.

Enfin, une synthèse très complète est actuellement réalisée par le groupe de travail sur les flux des métaux de l’UNEP (Programme des Nations Unies pour l’Environnement) : quatre premiers rapports ont déjà été publiés sur six prévus. L’objectif est de mettre en évidence les métaux critiques (d’un point de vue de l’approvisionnement, de l’environnement, etc.) et de proposer des options pour une meilleure gestion de ces métaux. Ainsi un premier rapport traite de la caractérisation des stocks dans la société (Graedel et al.,2010) : les différentes études sur le sujet sont analysées et comparées afin de répertorier les informations disponibles et de savoir à quel point la distribution spatiale des stocks de métaux dans la société peut être déterminée. Le deuxième rap- port traite de la problématique de l’évaluation des taux de recyclage (Graedel et al., 2011) : le taux de recyclage global des produits en fin de vie, le taux de débris utilisé pour la production de nouveaux produits et le taux de vieux débris dans le flux total de débris sont estimés afin de déterminer si l’efficacité du recyclage pourrait être améliorée, et le cas échéant comment. Le troisième

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rapport traite de l’évaluation des impacts environnementaux des métaux, de l’extraction minière au raffinage, et pour les éventuelles étapes de recyclage (van der Voet et al., 2013). Le quatrième rapport se concentre à nouveau sur le recyclage des métaux (Reuter et al.,2013), mais afin d’étudier les différents procédés existants. L’objectif des deux derniers rapports à venir est de compa- rer différents scénarios de besoins en métaux afin d’aboutir à l’objectif final : identifier les métaux critiques et proposer des politiques de gestion. Tous ces travaux permettent donc d’avoir une vision globale à l’échelle du monde de la situation des métaux. Cependant, la mise en place de politiques de gestion et la prise de décisions se font encore majoritairement à des échelles nationales, et la modélisation de l’évaluation des politiques n’y est pas abordée.

Le travail de recherche présenté ici s’intègre dans cette logique de vision globale en vue de contribuer à établir un modèle capable de mettre en rela- tion le système économique avec la consommation de ressources, la fabrication des produits, la génération de déchets et de pollutions. Il vise ainsi à établir des stratégies de gestion des ressources naturelles dans le développement des activités industrielles à l’échelle d’un État.

Cette étude se situe donc au cœur des problématiques du génie des procédés et du génie industriel, par un travail de recherche systémique d’amélioration des procédés et flux industriels à une échelle macroscopique. Elle s’intègre de plus parfaitement dans la vision inter-sectorielle de l’industrie des procédés, en cherchant des solutions pour répondre au troisième enjeu de la stratégie des “5R” (figure1.3) :

– Réduire – Réutiliser

– Recycler (ou réparer) – Remplacer

– Réinventer