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Le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux sont les principaux acteurs de la politique de l’emploi au Canada. Si le premier est essentiellement responsable du système d’assurance-chômage, il intervient également dans le financement des « mesures actives d’emploi », co-gérées avec les provinces. De plus, la structure particulière du système d’assurance-chômage canadien, qui va bien au-delà du remplacement de salaire en cas de perte involontaire d’emploi, place le gouvernement fédéral en position dominante dans l’univers des discours concernant le hors-travail.

La réforme du système d’assurance-chômage, débutée en 1994, apparaît ainsi incontournable pour qui veut appréhender la construction politique du hors-travail au Québec. La première section de ce chapitre présente l’analyse des discours politiques produits tout au long de ce processus de réforme alors que la seconde se penche sur le cas de la province du Québec, avec la réforme du système d’assistance-sociale de 1997. La section finale dresse le tableau de l’univers des discours politiques au Québec à propos du hors-travail.

Nous verrons au cours de ce chapitre comment le hors-travail se construit au Québec par un triple mouvement. D’une part, l’emploi légitime se transforme pour

inclure une vaste gamme «d’activités » rémunérées offrant une protection sociale de plus en plus différenciée. Parallèlement, l’inactivité devient une catégorie illégitime dans le discours politique dominant, faisant en sorte que c’est « l’activité de tous » qui est valorisée. Enfin, les gouvernements tendent à modifier leur action envers les personnes en situation de hors-travail en proposant un traitement davantage individualisé et basé sur la responsabilité individuelle110.

L’espace du hors-travail, analysé à partir des discours des principaux acteurs, s’avère un terrain politique hautement conflictuel. Bien que les discours d’opposition existent et qu’ils soient souvent virulents, les discours dominants des gouvernements apparaissent relativement hermétiques au dialogue social.

2.1 - La réforme du système d’assurance-chômage et le discours dominant du gouvernement fédéral

Discours et pratiques sont difficilement séparables, si ce n’est de manière artificielle. Afin de situer les discours politiques produits au moment de la réforme de l’assurance-chômage, il est nécessaire de retracer succinctement l’histoire et les enjeux du système d’assurance-chômage. Ces « clefs-historiques » nous permettent de comprendre le processus politique débuté en 1994 et de mettre en perspective le discours fédéral produit à cette occasion.

Les analyses politiques de la réforme du système d’assurance-chômage montrent que le gouvernement fédéral a occupé une position dominante dans le processus, malgré l’opposition forte d’une partie des provinces. Ainsi, la loi adoptée remet en cause, au moins partiellement, le principe de redistribution régionale qui faisait partie des fonctions du système depuis 1971. Cependant, au-delà des évènements, nous verrons que le discours fédéral dominant véhicule des représentations nouvelles du

travail et du chômage, participant de fait à la construction d’un espace du hors-travail de plus en plus segmenté.

2.1.1 - L’historique de la réforme

Ce n’est qu’en 1940 que le Canada se dote d’un système d’assurance-chômage offrant une protection identique aux chômeurs sur tout le territoire canadien. Limité aux emplois des industries et du commerce, le système couvre seulement la moitié de la population active. Peu à peu, il sera élargi à l’ensemble des salariés. En 1989, 89% des chômeurs perçoivent des prestations d’assurance-chômage111.

Outre cette généralisation de la couverture, le système canadien d’assurance- chômage va progressivement remplir d’autres objectifs. En 1971, La loi sur l’assurance- chômage inclut la maladie, la maternité et la retraite dans les conditions donnant droit aux prestations et introduit la dimension régionale dans le calcul des prestations, les conditions et la durée de l’admissibilité. Les régions à taux de chômage élevé bénéficient alors de périodes d’admissibilité réduites et de prestations prolongées. De plus, des prestations spéciales sont introduites pour les pêcheurs autonomes.

Ces fonctions multiples ont contribué à faire du système d’assurance-chômage canadien un enjeu politique qui va bien au-delà du remplacement du revenu pour les chômeurs. La dimension de redistribution régionale, notamment, a eu un impact considérable sur les économies des régions de l’est du pays112 .

À partir de 1971, les coûts du système s’accroissent considérablement113 et les effets

de la redistribution régionale sur la configuration de l’économie canadienne sont peu à peu montrés du doigt. Au début des années 1980, le gouvernement fédéral cherche à

111Canada. Développement des ressources humaines Canada, Analyse de la couverture assurée par le

Régime d’assurance-emploi (Ottawa : Division de la recherche appliquée, octobre 1998), faits saillants.

112Canada. Commission royale sur l’union économique et les perspectives de développement du Canada,

Rapport, vol.3 (Ottawa : Ministère des Affaires publiques, 1985), 665.

113Entre 1970 et 1975 le coût des prestations a quintuplé (730 millions de dollars à 3,3 milliards de dollars).

Geoffrey E. Hale, « Reforming Employment Insurance : Transcending the Politics of the Status Quo », Canadian Public Policy – Analyse de politiques 24, 4 (décembre 1998), 429-452.

contrôler les dépenses du système. Malgré les recommandations des commissions d’étude et des groupes de travail114, la dimension de redistribution régionale ne sera pas

remise en cause avant la réforme récente instaurant « l’assurance-emploi ». En revanche, plusieurs mesures ont été prises pour réduire l’accès aux prestations et la durée de celles-ci.

En 1990, par exemple, est adopté le projet de loi C-21 qui introduit des changements dans les normes d’admissibilité et réduit la durée de la prestation en fonction du taux de chômage régional. En outre, le gouvernement fédéral se retire du financement du régime, mettant fin à une contribution de presque 50 ans à ce programme115. En 1993 une nouvelle diminution des coûts du régime entre en vigueur

avec la réduction du taux de prestation de 60% à 57% et l’exclusion complète du bénéfice des prestations des personnes ayant quitté leur emploi sans motif valable ou qui ont été renvoyées pour inconduite.

Outre cette diminution du nombre de chômeurs admissibles et de la générosité des prestations, il faut noter qu’une part de moins en moins importante du budget de l’assurance-chômage a été consacrée aux financements des prestations ordinaires. Ainsi, à partir de 1977 une partie du fonds d’assurance-chômage est affectée à la formation des prestataires et aux autres mesures actives (travail partagé, création d’emplois, aide au travail indépendant). En 1995, 12,3% de l’ensemble des prestations est ainsi utilisés à des fins productives (contre 3,6% au début de la période)116. Enfin, une hausse sensible des

dépenses pour le soutien au revenu des familles a eu lieu dans le même temps, diminuant d’autant la part des prestations attribuée au remplacement du revenu des chômeurs.

114Mentionnons notamment la Commission Royale sur l’union économique et les perspectives de

développement pour le Canada, dirigée par Donald Macdonald qui a déposé son rapport en 1985 puis la Commission d’enquête sur l’assurance-chômage, connue sous le nom de Commission Forget (le rapport date de 1986).

115David P. Ross, “La sécurité du revenu en 1990”, Perception 15, 2 (1991), 10-17.

116Nicole F. Bernier, Le processus de désengagement de l’État providence : étude de la « nouvelle politique » de sécurité du revenu au Canada (Thèse de science politique, Université de Montréal : 1998), chap.4.

L’historique des réformes de 1979 à 1993 fait ressortir trois «dysfonctionnements » principaux du système qui vont largement influencer les débats au moment de la réforme de 1994. Premièrement, et selon les travaux des Commissions du milieu des années 1980, la dimension de redistribution régionale entraîne une concentration d’emplois instables et de courte durée dans les régions où le taux de chômage est élevé et où les industries saisonnières sont nombreuses117. De ce point de vue,

« le système apparaît comme un moyen peu coûteux pour les entreprises de s’adapter aux fluctuations de la demande en facilitant la mise à pieds de travailleurs et leur « réembauche » éventuelle »118.

Deuxièmement, l’assurance-chômage ressemble de plus en plus à un mécanisme de redistribution du revenu, s’éloignant de son objectif premier d’assurance-sociale. Enfin, plusieurs acteurs (dont les syndicats) ont mis en doute l’efficacité des mesures actives d’emploi et questionné la légitimité d’utiliser les cotisations salariales et patronales à d’autres fins que le remplacement du revenu d’emploi.

Le processus de réforme débuté en 1994 se situe à la fois en continuité et en rupture avec le passé. L’objectif affiché de diminution des coûts du régime s’inscrit dans la lignée des réformes précédentes alors que la mise en place d’une règle d’intensité, créant deux catégories de prestataires (occasionnels et fréquents), attaque de front le principe de la redistribution régionale.

Si les propositions fédérales répondent aux préoccupations antérieures concernant le système d’assurance-chômage, leur adoption et leur mise en application n’a pas été sans mal.

117Canada, Commission royale sur l’union économique et les perspectives de développement du Canada,

Rapport, vol.3, 665.

2.1.2 - L’adoption de l’assurance-emploi : un processus politique alambiqué

La séquence des événements

Le processus politique canadien se caractérise par des ajustements politiques négociés à travers un réseau dense d’arrangements fédéraux-provinciaux, plutôt que directement par le système des partis ou via la médiation corporatiste. Dans le domaine des politiques sociales notamment, deux arènes politiques sont à prendre en compte: les intérêts organisés qui animent le débat social (incluant les groupes sociaux bénéficiant d’une représentation politique) et la dynamique fédérale-provinciale119. Lors de la

réforme du système d’assurance-chômage, officiellement débutée en 1994, ce sont les provinces qui vont constituer l’opposition la plus virulente au projet. Les autres acteurs sociaux, pour ou contre le projet, vont avoir une influence moindre sur le processus politique.

Selon l’analyse de Geoffrey E. Hale, l’adoption de la loi sur l’assurance-emploi s’est faite en trois temps120. Le premier temps correspond à l’annonce de la réforme qui fut

suivie du processus de consultation publique. Vient ensuite le dépôt du projet de loi C- 111 (décembre 1995) et, enfin, l’adoption de la loi C-12 en mai 1996.

Le nouveau gouvernement fédéral est entré en fonction à la fin de l’année 1993. Bien que les libéraux aient fait campagne autour du thème central de la création d’emplois121, les premiers mois de leur mandat électoral ont orienté le débat politique

vers la nécessité d’une réforme globale des programmes sociaux122. Celle-ci devait tenir

compte de la volonté parallèle du gouvernement de réduire le déficit de manière

119Selon les termes de Keith G. Banting, Charles M. Beach et Gordon Betcherman, « Polarization and Social

Policy Reform and Issues », dans Keith G. Banting et Charles M. Beach, dir., Labour Market Polarization and Social Policy Reform (Kingston : School of Policy Studies, 1995), 12.

120Geoffrey E. Hale, « Reforming Employment Insurance : Transcending the Politics of the Status Quo », Canadian Public Policy – Analyse de politiques 24, 4 (décembre 1998) : 429-452.

121Parti Libéral, Pour la création d’emplois – pour la relance économique (Ottawa : Parti Libéral, 1993).

122Ken Battle et Sherri Torjman, « Lest We Forget : Why Canada Needs Stong Social Programs », Caledon Commentary (Ottawa : The Caledon Institute of Social Policy, novembre 1995) 1-7.

drastique sur trois ans, qui conduira, entre autres, à la réforme des transferts fédéraux aux provinces dans le domaine des politiques sociales123.

La réforme de l’assurance-chômage est intégrée à un ensemble plus vaste visant la “ réforme du système de sécurité sociale ». En janvier 1994, le Comité permanent du développement des ressources humaines, nouvellement créé, est chargé d’organiser des audiences publiques afin de présenter des recommandations au gouvernement. En octobre 1994, le ministre du Développement des ressources humaines, Lloyd Axworthy, présente le document d’orientation de la réforme: La sécurité sociale dans le Canada de demain. Le Livre Vert prévoit la restructuration du système d’assurance-chômage, du programme d’éducation post-secondaire et des possibilités de changements du programme canadien d’assistance sociale.

En ce qui concerne la réforme du système d’assurance-chômage, deux possibilités sont évoquées. La première crée un double système garantissant une protection identique aux chômeurs ayant un passé d’emploi long (les chômeurs occasionnels) et des prestations qui pourraient devenir conditionnelles pour les chômeurs fréquents. La deuxième option de réforme prévoit une réduction drastique du montant et de la durée des prestations ainsi qu’un resserrement des critères d’admission. Dans tous les cas, on note une volonté claire d’orienter le système vers une « politique active du marché du travail ». Les provinces accueillent froidement ces premières propositions fédérales. L’est du pays s’y oppose radicalement alors que l’ouest trouve que les dispositions du Livre vert ne sont pas assez sévères124. Le Québec, pour sa part, réitère sa volonté de

récupérer la totalité des budgets concernant les mesures actives et la formation professionnelle. L’opposition des provinces, à ce stade du processus, va essentiellement retarder l’adoption de la réforme en demandant une consultation publique d’envergure.

123Daniel Drache et Andrew Ranachan, dir., Warm Heart, Cold Country. Fiscal and Social Policy Reform in Canada (Ottawa et North York : Caledon Institute of Social Policy and Robarts Center for Canadian Studies, 1995), 1.

124Voir notamment l’étude détaillée de Nicole F. Bernier, Le processus de désengagement de l’État providence,

En novembre 1994, le Comité se déplace sur l’ensemble du territoire canadien en vue de la consultation de la population sur les options du Livre Vert, environ 100 000 personnes ont été entendues. En février 1995, il dépose son rapport final. Celui-ci s’avère très critique à l’égard du Livre Vert, traduisant les dissensions internes du Parti Libéral. Le Parti Réformiste et le Bloc Québécois s’opposent formellement aux recommandations du Comité en déposant une « annexe » au rapport.

En même temps que les Canadiens étaient consultés sur la réforme des programmes sociaux125, se mettait en place un système de financement de ces

programmes très controversé : le Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux (TCSPS) (projet de loi C-76). Déposé le 27 février 1995 et adopté le 6 juin de la même année, il introduit des changements majeurs au sein de la fédération canadienne, tant du point de vue des relations entre les deux paliers de gouvernement que du point de vue de l’architecture globale des politiques sociales126. Au-delà des

évènements, deux problèmes de fond sont soulevés. Non seulement le programme de TCSPS ne prévoit aucune nouvelle source de financement pour permettre la « restructuration des programmes sociaux » annoncée par Axworthy, mais il prévoit une forte réduction des budgets fédéraux sur trois ans, ce qui pose la question de la nature des réformes entreprises. D’autre part, les tensions existantes entre le ministère des Finances et le ministère du Développement des ressources humaines, ainsi que la séquence des évènements nuisent à l’image du gouvernement fédéral du point de vue de sa volonté d’entreprendre « une vaste consultation publique ». Selon la presse de l’époque, il est clair que le ministre Axworthy a perdu l’initiative politique de la réforme au profit du ministère des Finances.

125Alain-G. Gagnon, « Du piétinement constitutionnel au recul social », Possibles 20, 3 (été 1996), 19-36. 126Pour le détail du processus voir Douglas M. Brown et Jonathan W. Rose, dir., Canada: the State of the Federation 1995 (Ottawa: The Institute of Intergovernmental Relations, 1995); Alain G. Gagnon, « Du piétinement constitutionnel au recul social », 19-36.

Le premier projet de loi concernant l’assurance-chômage est déposé en décembre 1995127. Par rapport aux propositions initiales du Livre Vert, il s’avère beaucoup moins

ambitieux en ce qui concerne les mesures actives d’emploi, mais il retient l’idée de la création de deux catégories de chômeurs en instaurant la règle d’intensité128. D’autre

part, un nouveau système de calcul est proposé pour l’admissibilité aux prestations, basé sur le nombre d’heures travaillées. Cette méthode est censée favoriser la couverture des travailleurs à temps partiel. La loi C-111 engendre de vives réactions de la part des syndicats des provinces atlantiques (industries forestières et de la pêche) qui y voient une attaque envers les travailleurs saisonniers de ces régions. Néanmoins, le projet de loi tient compte, pour partie, des revendications initiales des provinces atlantiques et des critiques émises par le Comité à l’endroit du Livre Vert. Ainsi, la règle d’intensité est une version atténuée du système initialement prévu (ses effets ne seront que pleinement effectifs en 2002), un fonds transitoire (trois ans) pour la création d’emploi dans les régions à fort taux de chômage est proposé et une partie des fonds économisés grâce à la réforme sont réinjectés de façon à ce que les réductions ne dépassent pas 7% dans chacune des provinces. À la fin de janvier 1996, le ministre Axworthy est remplacé par Doug Young qui présentera la version finalement adoptée du programme d’assurance- emploi.

La Loi C-12, instaurant la nouvelle “ assurance-emploi ”, entre en vigueur le 1er juillet 1996129. Au total, les amendements apportés par rapport au projet C-111 s’avèrent

relativement mineurs130, ils sont surtout d’ordre technique. En revanche, le processus

concernant le transfert de juridictions aux provinces sur les questions de formation professionnelle a connu une forte accélération durant le passage de Young au ministère.

127Le processus référendaire au Québec à l’automne 1995 a également retardé le dépôt du projet de loi. 128Règle selon laquelle un chômeur fréquent est pénalisé dans le montant et la durée de ses prestations par

rapport à un chômeur occasionnel.

129Une deuxième phase d’introduction des changements a eu lieu en juillet 1997. Voir Jane Pulkingham,

« Remaking the Social Divisions of Welfare : Gender, Dependency and UI Reform », Studies in Political Economy 56 (été 1998), 7-48.

130Geoffrey E. Hale, « Reforming Employment Insurance : Transcending the Politics of the Status Quo »,

Ce mouvement se poursuivra avec Pierre Pettigrew, son successeur, en octobre 1996. Fin 1998, le nouveau système est en place dans presque toutes les provinces, à l’exception de l’Ontario.

Le dispositif institutionnel

La loi sur l’assurance-emploi se caractérise par quatre traits principaux131 : le

resserrement des critères d’admission et de gestion du régime, l’introduction d’un traitement différencié selon la nature du chômage considéré, la mise en place d’un programme de soutien du revenu aux plus démunis et l’affirmation de la volonté “d’activer” les prestations.

Outre les coupures traditionnelles (réduction de 10% dans le nombre maximum de semaines d’allocations de chômage –de 50 à 45 semaines–, resserrement des conditions d’admissibilité pour les nouveaux venus ou ceux qui retournent sur le marché du travail, diminution du revenu maximum assurable, pénalité accrue en cas de fraude), le changement le plus marquant concerne la norme de calcul ouvrant les droits à l’assurance-chômage. Dans le nouveau régime, ce n’est plus le nombre de semaines travaillées qui compte mais le nombre d’heures de travail effectuées au cours des 16 à 20 semaines précédentes (selon le taux de chômage régional).

Cet aspect de la réforme a suscité et suscite aujourd’hui de nombreuses critiques. Les syndicats et les groupes de femmes132 dénoncent la faible couverture du régime et le

fait que les travailleurs à temps partiel (majoritairement des femmes) soient les premières victimes du système de la comptabilisation par heure travaillée. Ainsi les personnes qui travaillent moins que la semaine standard doivent travailler plus longtemps pour se qualifier à l’admission et touchent moins de prestations. De plus, une

131Nous reprenons ici une manière classique de comparer les systèmes de protection sociale entre eux:

sévérité ou générosité du régime, universalisation du traitement ou différenciation; principe redistributif ou compensatoire; mesures passives ou actives de soutien de revenu. Voir Gérard Boismenu et Pascale Dufour, « Nouveaux principes de références et différenciation des arbitrages politiques: le cas des politiques à l’égard des sans-emploi », Revue canadienne de science politique 31,1 (mars 1998), 113-142.

portion significative des personnes nouvellement assurées par l’assurance-emploi (18%) paient des cotisations mais ne pourront jamais toucher de prestations en travaillant moins de 15 heures semaines133. Il est clair, en revanche, que la sévérité accrue du

système a permis l’accumulation, depuis deux ans, d’excédents financiers considérables134. Enfin, selon certaines sources, le resserrement des critères d’admission

aurait entraîné une diminution considérable du nombre de prestataires. Jane Pulkingham, par exemple, montre qu’en 1996 seuls 30,8% des chômeurs étaient couverts

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