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3.2 D´ecomposition des in´egalit´es de recours aux soins : la m´ethodologie standard

3.2.5 L’interpr´etation des C k

La pr´esence dans les formules (3.4), (3.5) et (3.10) d’indices de concentration de chacun des facteurs impose que cet indice ait effectivement un sens. Des indicateurs d’´etat de sant´e sont en effet pr´esents dans le mod`ele explicatif de recours aux soins (3.3 ou 3.9). Les d´ecompositions standard n´ecessitent donc de calculer et d’interpr´eter les indices de concentration de ces indicateurs d’´etat de sant´e.

Prenons l’exemple d’une mesure d’´etat de sant´e comme le HUI (Health Utility Index). Cette mesure poss`ede des propri´et´es qui permettent d’interpr´eter son indice de concentration : cet indice rend bien compte de la r´epartition du ”stock” de sant´e dans la population. Le HUI est en effet construit pour chaque individu comme un score d’utilit´e correspondant `a son ´etat de sant´e, correspondant `a une valeur situ´ee entre 0 (mort) et 1 (pleine sant´e), un score pouvant exceptionnellement ˆetre n´egatif si l’´etat de sant´e corres- pondant est jug´e pire que la mort. Lors d’une enquˆete en population g´en´erale, on demande aux individus enquˆet´es leur pr´ef´erence relative pour un ´etat de sant´e particulier, par rap- port `a la pleine sant´e. Cet ´etat de sant´e est caract´eris´e par un certain nombre d’attributs

(Ak)k=1..K cod´es de mani`ere cat´egorielle (niveau de douleur, degr´e de mobilit´e ...). L’en-

quˆete permet d’´evaluer au niveau de l’´echantillon le score d’utilit´e associ´e `a chaque degr´e Ai,k de chacun de ces attributs Ak. Une fonction d’utilit´e multi-attribut est ensuite utilis´ee

pour associer un score d’utilit´e `a tout ´etat de sant´e E caract´eris´e par ces mˆemes attributs. Une telle fonction est par exemple pour HUI 2 (1996)13 :

U (E) = U (A1, A2, ..., AK) = 1, 06∗ K

Y

k=1

Ak− 0, 06. (3.11)

L’hypoth`ese est que tout ´etat de sant´e E peut ˆetre convenablement d´ecrit par un vecteur (A1 ... AK) et r´esum´e par le score U (E). Pour HUI 2, le nombre de combinaisons

possibles est de 24 000 ´etats de sant´e diff´erents. Soulignons que les scores li´es `a chaque degr´e de chaque attribut sont ´evalu´es grˆace `a une enquˆete unique r´ealis´ee sur population canadienne. Selon ses auteurs, ces scores sont applicables `a l’´evaluation de l’´etat de sant´e

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3.2 D´ecomposition des in´egalit´es de recours aux soins : la m´ethodologie standard et ses

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de n’importe quel individu de la plan`ete.

Outre le fait que l’universalit´e du HUI peut ˆetre source de d´ebat, les questions n´ecessaires `a son calcul ne sont pas syst´ematiquement pr´esentes dans toutes les enquˆetes. Celle dont nous disposons (l’Appariement de l’Irdes) ne les propose pas. L’Appariement propose en revanche des indicateurs d’´etat de sant´e par pathologie (pr´esence ou absence de pathologies identifi´ees, telle le diab`ete par exemple), ainsi que des indicateurs d’´etat de sant´e synth´etiques cat´egoriels, c’est-`a-dire prenant leurs valeurs dans N . Par exemple, l’indice de risque vital varie de 0 `a 5, et l’indice d’invalidit´e varie de 0 `a 6 (voir annexe B.1.3). Utiliser la d´ecomposition (3.4) en employant des variables explicatives cat´egorielles m`ene `a devoir interpr´eter leur Ck. Or l’indice de concentration d’une mesure d’´etat de

sant´e cat´egorielle comme le degr´e d’invalidit´e est difficilement interpr´etable. Si l’indice de concentration est calcul´e sur la variable brute, cela suppose que les degr´es d’invalidit´e peuvent s’additionner (un individu avec un degr´e d’invalidit´e de 2 serait 2 fois plus invalide qu’un individu ayant un degr´e d’invalidit´e de 1). Pour ´eviter une telle hypoth`ese, on peut calculer un indice de concentration pour chacune des six modalit´es du degr´e d’invalidit´e (cod´ees en 0 ou 1). Quoique informatifs, ces indices (qui seraient aussi nombreux que le nombre de modalit´es de chaque variable cat´egorielle) rend l’´evaluation de la r´epartition de la sant´e difficilement interpr´etable, et en aucun cas synth´etique. C’est cette option qui est utilis´ee par le groupe Ecuity. Une derni`ere solution fait appel `a une transformation afin d’analyser non pas le degr´e d’invalidit´e tel quel mais plutˆot un ”score de sant´e” ayant de bonnes propri´et´es. Par exemple, Perronnin, Rochaix, et Tubeuf (2006) proposent la construction d’un indicateur de sant´e synth´etique unidimensionnel agr´egeant degr´e d’inva- lidit´e et degr´e de risque vital. La question des indicateurs de sant´e synth´etiques constitue un champ de recherche `a part enti`ere, situ´e en amont des travaux sur les in´egalit´es de consommation de soins, et n´ecessaires `a l’interpr´etation de l’expression (3.4) utilis´ee dans l’approche standard. La m´ethode que nous proposons plus loin permet d’´eviter la d´efini- tion d’un indicateur de sant´e synth´etique et d’´eviter le calcul d’indices de concentration sur des variables dichotomiques.

Par ailleurs, le fait que le degr´e d’in´egalit´e s’exprime en fonction des indices de concentration de chaque variable implique donc de manipuler l’indice de concentration du log du revenu lorsque cette variable est introduite dans l’analyse (van Doorslaer, Koolman, et Jones 2004). Introduire le log du revenu dans l’estimation permet d’obtenir des r´esidus ayant de bonnes propri´et´es. La transformation log conserve l’ordre de classement des in- dividus dans la distribution des revenus mais l’indice de concentration de cette variable sera plus faible que si l’on utilisait le revenu non transform´e. L’interpr´etation de l’indice de concentration du log du revenu n’est d’ailleurs pas imm´ediate.