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CHAPITRE 1 La conception collaborative multidisciplinaire de systèmes intégrés

1.1 Contexte

1.1.3 Cadres généraux traitant de la conception collaborative

1.1.3.2 L’ingénierie système

L’ingénierie système est une discipline apparue il y a plus de 40 ans. Pour certains, son

avènement date du lancement des principaux programmes spatiaux (Grieves, 2012).

Malgré cet historique, Grieves note que l’ancrage de cette discipline dans les milieux

universitaires est bien moins important que dans l’industrie (Grieves, 2012). L'explication

avancée est que l’ingénierie système, par son caractère pluridisciplinaire, n'est pas bien

adaptée à l’organisation très mono disciplinaire et spécialisée du monde universitaire. Des

ouvrages de synthèse sont néanmoins apparus (Blanchard, 2008; Kossiakoff et al., 2011)

mais les principaux acteurs de ce domaines restent industriels, fédérés par différentes

associations comme l’International Council on Systems Engineering (INCOSE) ou

l’AFIS, proposant des manuels de référence et des livres blancs. Ces manuels s’accordent

à définir l’ingénierie système comme une « methodical, disciplined approach for the

design, realization, technical management, operations, and retirement of the

system » (NASA, 2007) ou encore comme « une démarche méthodologique générale qui

englobe l’ensemble des activités adéquates pour concevoir, faire évoluer et vérifier un

système apportant une solution économique et performante aux besoins d’un client tout

en satisfaisant l’ensemble des parties prenantes » (AFIS, 2011).

Plus précisément, l’AFIS définit l’ingénierie système comme :

- « un processus coopératif et interdisciplinaire de résolution de problème ;

- s’appuyant sur les connaissances, méthodes et techniques issues de la science et de

l’expérience ;

- mis en œuvre pour définir, faire évoluer et vérifier la définition d’un système

(ensemble organisé de matériels, logiciels, compétences humaines et processus en

interaction) ;

- apportant une solution à un besoin opérationnel identifié conformément à des critères

d’efficacité mesurables ;

- qui satisfasse aux attentes et contraintes de l’ensemble de ses parties prenantes et soit

acceptable pour l’environnement ;

- en cherchant à équilibrer et optimiser sous tous les aspects l’économie globale de la

solution sur l'ensemble du cycle de vie du système » (AFIS, 2011).

Ingénierie Système vs. PLM : différences, complémentarité et tendances

futures ?

L’ingénierie système et le PLM s’accordent sur l'idée même qu’un système n’est pas un

objet monolithique, mais un ensemble d'éléments interagissant et ayant pour rôle de

produire des résultats plus importants que ce qu’ils auraient pu faire individuellement.

Mis à part ce point, les approches sont assez différentes, malgré des revendications très

similaires.

Une première de ces revendications partagées concerne le fait de s’intéresser à l’ensemble

du cycle de vie du système. Dans la réalité, l’ingénierie système se concentre

principalement sur la phase de développement du système. L'hypothèse implicite est alors

que si les travaux d'ingénierie système sont suffisamment bien réalisés, le système conçu

répondra aux exigences attendues. Les autres phases du cycle de vie sont alors de simples

exercices d'exécution qui incombent à quelqu'un d'autre (Grieves, 2011).

L’ingénierie système revendique également le fait de favoriser la collaboration. Durant

les phases amont, typiquement les phases de « Product Definition » et « Conceptual

Design » (Figure 1.6), cette collaboration est effectivement facilitée par l’usage d’un

référentiel commun, souvent basé sur un langage de modélisation tel que

SysML (Friendenthal et al., 2008; OMG Group, 2007; Willard, 2007). Le principe

sous-jacent à l'ingénierie système, notamment au Model Based Systems Engineering

(MBSE) (Chhaniyara et al., 2011; Sellgren et al., 2009), est qu'un système peut être

décomposé en sous composants et que ces composants doivent interagir de manière à

satisfaire les exigences requises. Ainsi, l'ensemble du système est décomposé en unités

toujours plus petites jusqu'à arriver à une granularité satisfaisante. Ce processus de

raffinement du système est également complété par la création d’un certain nombre de

représentations différentes reflétant le comportement du système (Grieves, 2011). Ces

différents modèles sont structurés en diagrammes normalisés, permettant de conserver le

lien entre chacun d’eux. La collaboration correspond alors à la prise en considération des

points de vue des concepteurs issus de différents domaines par les architectes systèmes. À

l’issue de ces travaux, le modèle devient alors une référence permettant à chaque domaine

de débuter la conception détaillée du système. La collaboration est alors organisée de

façon descendante (top-down). Le PLM, par opposition, structure l’information et les

données autour de nombreux modèles métier en tentant de conserver la cohérence entre

ces modèles. L’approche peut alors, sous cet angle, être plutôt considérée comme

ascendante (bottom-up).

D’autres différences existent entre ces approches, classées par (Grieves, 2012) selon deux

critères qui sont le comportement dynamique (statique vs. dynamique) et le caractère

spatial de l’information (2D vs. 3D). Mais il semble surtout intéressant de détailler la

complémentarité de ces approches. Comme décrit ci-avant, l’ingénierie système apporte

des avantages indéniables lors des phases amont de la conception pour définir et

structurer les exigences, lancer des premières simulations (généralement 0D ou

1D) (Sinha et al., 2001), définir des architectures système candidates et les

évaluer (Graignic et al., 2013), etc. Les exigences peuvent alors servir d’élément de

traçabilité tout au long du cycle de conception, et ce grâce aux modules dédiés dans les

solutions PDM. L’architecture sélectionnée peut également servir à initier le travail des

différentes disciplines.

développés par les ingénieurs système sous la forme de standards de collaboration ou de

patrons (pattern) directement dans les PDM permettrait à l’ingénierie système d’avoir un

impact plus important sur le cycle de développement et sur un plus grand nombre de

concepteurs. Une seconde piste serait la prise en compte plus systématique de l’ensemble

des phases du cycle de vie lors de l’élaboration du modèle issu du travail de consolidation

des ingénieurs systèmes. Enfin, une dernière piste serait l’adoption plus systématique des

méthodes de vérification issues de l’ingénierie système lors des intégrations successives

des conceptions en provenance des différentes disciplines.

Dans cette section, une définition sommaire de l’ingénierie système et un positionnement

de cette démarche par rapport à l’approche PLM ont été proposés. Dans la section

suivante, la cybernétique et les Cyber–Physical Systems seront également présentés par

comparaison à l’approche PLM. Ces positionnements ont pour but de montrer les

similitudes entre les finalités recherchées et les complémentarités de ces approches.