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L’agriculture est un secteur fondamental dans l’économie du pays. En 2016, il représentait 12% du PIB total du pays et employait 10% de la population active57. Malgré les conditions des infrastructures parfois désuètes, il reste un secteur prisé, notamment par le marché européen qui développe des stratégies d’assujettissement afin de s’en approprier et la production et le contrôle. Sous le joug de partenariats prétendument établis au profit du progrès et du développement, la Tunisie se voit dans l’exigence d’intensifier, entre autres, son secteur agricole dans le but de présenter des produits plus compétitifs sur le marché européen. Les premiers accords économiques signés en ce sens (Accord

d’Association58 en 1995 et Partenariat Privilégié59 en 2012) ont libéralisé les échanges entre la Tunisie

et l’Union Européenne, induisant un manque à gagner colossal pour la Tunisie60. Des méfiances se font donc ressentir en octobre 2015 quant à l’ouverture des négociations sur l’Accord de Libre-Echange

Complet et Approfondi (ALECA) qui devrait déboucher sur une signature en mai 201861. Cet accord

55 Entretien Roland Vidal, 12/04/2017 - voir présentation Annexes 56 Espaces libres protégé de toute urbanisation

57 La Nation Rédaction, [en ligne] 20/01/2017, ALECA, danger ou aubaine pour la Tunisie?

58 Un accord d’association (AA) est un accord entre l’Union européenne et un pays tiers créant un cadre de

coopération entre eux. Les domaines couverts par ces accords concernent notamment le développement de liens politiques, commerciaux, sociaux, culturels et sécuritaires. La base légale de la conclusion de l’accord d’association se trouve à l’article 217 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (anciens articles 310 et 238 TCE), Wikipédia

59 Le « partenariat privilégié » est l’idée d’une troisième voie pour les relations entre l’Union européenne (UE)

et un pays non-membre de l’Union. Originalement, cette idée fut lancée par Angela Merkel de l›Union chrétienne-démocrate d’Allemagne (CDU) au printemps 2004. En dehors des autorités allemandes, cette proposition est soutenue par Valéry Giscard d’Estaing, Nicolas Sarkozy, et Hans-Gert Pöttering, ancien Pré- sident du Parlement européen. Karl Theodor Zu Guttenberg, ancien ministre de l’économie allemand, a été le premier à définir concrètement l’idée du « partenariat privilégié » : une union douanière dans certains secteurs (comme l›agriculture ou les services) ainsi que la participation du pays bénéficiaire dans la politique étrangère et de sécurité de l›Union européenne, Wikipédia

60 Pour plus d’informations se référer aux sites suivant : ALECA, disponible sur : http://www.aleca.tn/ 61 Selon le négociateur en chef de l’UE pour cet accord Ignacio Garcia Bercero. La presse, [en ligne],

II– L’agriculture urbaine : un enjeu décisif dans le développement de Sfax

impose notamment à la Tunisie les conditionnalités et contraintes suivantes : - augmentation de la productivité annuelle de 5% ;

- augmentation du total de la superficie des terres arables cultivées (de 19% à 25%) ; - diminution des droits de douanes (de 14,22% à 12%).

L’Institut Arabe des Chefs d’Entreprises (IACE) a dénoncé l’ALECA en démontrant que 68% des agriculteurs tunisiens craignaient les impacts négatifs de cet accord62. Des associations tunisiennes et internationales comme ATTAC et le CADTM63 se sont mobilisées afin d’en dénoncer les termes et les mécanismes pervers, révélant les infractions d’une telle politique sur les droits humains fondamentaux.

« Il est tout aussi urgent que l’Union européenne suspende les négociations de l’ALECA, qui ne va que renforcer le déséquilibre des échanges commerciaux entre la Tunisie et l’UE, et risque d’entraver plus encore la souveraineté alimentaire de la Tunisie.» (LEGRAND, 2016)

Cette entrave aux droits humains est renforcée par la faible marge de manœuvre du gouvernement tunisien sur ces échanges commerciaux. Comme l’explique le journal La Nation, « 70 % du volume du commerce extérieur de la Tunisie se réalise avec l’UE, alors que la Tunisie représente moins de 1 % du commerce extérieur de l’UE64.» Farid Benhammou de résumer ainsi :

« L’Europe, grâce aux aides versées à ses agriculteurs, parvient à exporter

des denrées agricoles à des prix inférieurs aux coûts locaux de production de la plupart des pays africains. À cela, J.-P. Charvet répond que l’UE est le premier importateur de produits agricoles des pays en développement. Mais que cela implique-t-il ? Il s’agit la plupart du temps de cultures d’exportation de denrées exotiques non produites en Europe, qui ne concurrencent pas les producteurs européens. Ces productions émanent de monocultures, installées sur des terres précédemment dédiées aux cultures vivrières ou commerciales locale et elles s’inscrivent dans un modèle d’agrobusiness aux conséquences catastrophiques sur le plan social et environnemental. Par ailleurs, l’UE exerce des pressions fortes afin d’ouvrir ces pays du Sud au libre-échange, ce qui revient à sacrifier les agricultures locales trop faibles pour lutter contre la concurrence agressive des produits européens et américains.» (BENHAMMOU, 2017)

62 Abou Sarra, [en ligne] 08/06/2016, ALECA : Une menace pour l’agriculture tunisienne ? 63 Comité pour l’Abolition des Dettes Illégitimes

II– L’agriculture urbaine : un enjeu décisif dans le développement de Sfax

Tout comme pour l’ensemble de la planète, dans la mesure où les enjeux environnementaux deviennent cruciaux pour la Tunisie, n’est-il pas contradictoire de favoriser le marché international de l’agro- business aux dépends d’une économie locale ? Le paysage agricole revêt de multiples facettes en Tunisie, allant des grandes exploitations quasi industrielles destinées à l’exportation aux petites parcelles de jardins satisfaisant une consommation locale, voire familiale.