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L’IMPORTANCE AVEREE DES FONCTIONS RELATIVES AUX INITIATIVES CONSTITUTIONNELLES ET EXECUTIVES

Le Sénat exerce plusieurs compétences dans les Etats d’Afrique noire francophone qui ont opté pour le bicamérisme. Cette pluralité des compétences rend de plus en plus l’institution importante. Ainsi, en dehors de sa fonction de contrôle et de sa fonction de représentation, la seconde chambre du parlement exerce aussi des fonctions constitutionnelles (1) et exécutives (2) aussi prestigieuses.

1. La participation à la réalisation de la justice constitutionnelle

Le Sénat participe activement à la réalisation de la justice constitutionnelle. Il exerce des fonctions en matière de contrôle de constitutionnalité. Pour ce qui est de ces fonctions, on peut d’emblée dire avec le Doyen Maurice Hauriou que « la souveraineté incontrôlable ne réside que dans la nation et n’est point déléguée : toute souveraineté déléguée est contrôlable »98. Ainsi, le contrôle de constitutionnalité des lois est la conséquence logique ou du moins la condition de la suprématie de la constitution nationale autant vis-à-vis du parlement dont l’omnipotence n’est plus d’ordre public99.

Le contrôle de constitutionnalité évite donc les violations et favorise le respect par chacun des pouvoirs de la délimitation fixée par la Constitution100. Il s’est imposé à travers l’histoire politique et constitutionnelle101 et le Sénat contribue à travers ce dernier au respect de la Constitution102. En matière constitutionnelle, le Sénat participe à la nomination des membres due la juridiction constitutionnelle et bien plus à la saisine du juge constitutionnel.

Relativement au premier aspect et pour ce qui est du cas du Cameroun, le conseil constitutionnel comprend onze (11) membres, désignés pour un mandat de six (6) ans éventuellement renouvelables103. Bien plus, les membres du conseil constitutionnel sont nommés par le Président République et désignés de la manière suivante : trois, dont le

97 PACTET (P.), Institutions politiques et Droit constitutionnel, 22e éd, Paris, Armand Colin, p. 264.

98 HAURIOU (M.) Précis de droit constitutionnel, éd du CNRS, 1965, p. 266.

99 NGUELE ABADA (M.) « Le contrôle de la constitutionnalité des lois au Cameroun », Op.cit., p.45.

100 Ibid. p. 46.

101 Idem.

102 EKO’O EKOUAFANE (J.-C.), Le Sénat au Cameroun et en Afrique. Op.cit., p. 88

103 Voir l’article 51 alinéa 1 de la loi constitutionnelle du 18 janvier 1996.

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président du conseil, par le Président de la République ; trois par le président de l’Assemblée Nationale après avis du bureau ; trois par le président du Sénat après avis du bureau, deux par le conseil supérieur de la magistrature104.

Pour ce qui est du cas gabonais, la cour constitutionnelle comprend neuf (09) membres105, désignés comme suit : trois par le Président de la République, trois par le Président du Sénat et trois par le Président de l’Assemblée nationale106. Il apparait donc ici que le Sénat de par son président participe à la nomination des membres du conseil constitutionnel. Outre cette compétence le Sénat peut également saisir le juge constitutionnel.

En effet, dans le domaine constitutionnel, l’initiative sénatoriale consiste également à saisir la juridiction constitutionnelle dans les matières qui lui sont reconnues par les différents constituants. Ainsi, à la lecture de l’article 47 alinéa 2 de la constitution du Cameroun, « le conseil constitutionnel est saisi par le Président de la République, le président de l’Assemblée Nationale, le président du Sénat, un tiers des députés ou un tiers des sénateurs… ». Le constituant camerounais reconnaît donc à un tiers (1/3) des sénateurs en plus de la saisine individuelle de son président le droit de saisine du juge constitutionnel. En revanche, le constituant gabonais reconnait plutôt ce droit à un dixième (1/10e) de sénateurs en plus du président107.

Si cette saisine se veut ouverte au Gabon en ce sens que même les particuliers peuvent saisir le juge constitutionnel, au Cameroun, le constat qui se dégage est que cette dernière réservée aux autorités politiques. Ne sont donc autorisés à saisir le juge constitutionnel dans le cadre du contrôle général de constitutionnalité des lois et des traités, lequel vise le contentieux de la normativité encore appelé contentieux « objectif » 108 que, le Président de la République, le président de l’Assemblée Nationale, le Président du Sénat, un tiers des députés, un tiers des sénateurs, les présidents des exécutifs régionaux lorsque les intérêts de leur régions ont en cause109.

En outre, le Sénat peut également intervenir en matière constitutionnelle dans le cadre de la révision de la constitution. En effet, le pouvoir constituant institué est généralement confié aux organes mis en place par la constitution pour exercer des fonctions permanentes

104 Lire l’article 51 aliéna 2 de la même loi.

105 Voir article 89 alinéa 1 de la constitution gabonaise.

106 Ibid. Article 89 alinéa 4

107 Voir article 85 à 88 de la constitution gabonaise.

108 OLINGA (A-D.), La constitution de la République du Cameroun, op.cit., p. 434.

109 Voir l’article 47 alinéa 2 de la loi constitutionnelle du 18 janvier 1996.

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dans la direction des affaires de l’Etat110. De sorte que, en plus de leurs fonctions législatives ordinaires, les chambres parlementaires par exemple, auront pouvoir pour réviser la constitution si besoin est111. Ainsi, en période normale, le Sénat peut participer à l’exercice du pouvoir constituant112 en ceci que ses membres peuvent être à l’origine d’une initiative de révision constitutionnelle et l’auteur de l’adoption d’un projet ou d’une proposition de révision constitutionnelle. Au-delà de ces fonctions constitutionnelles, le Sénat dispose aussi des fonctions exécutives.

2. La contribution à l’exercice de la fonction exécutive

La fonction exécutive du Sénat peut être perçue au travers de ses rapports avec le pouvoir exécutif. Il s’agit particulièrement de la contribution du Sénat dans l’exercice de la fonction exécutive. Ainsi, le Sénat suivant les cas peut contribuer non seulement à garantir la continuité de la fonction présidentielle, mais aussi à donner son avis sur certaines questions ou décisions devant être prises par l’exécutif.

Relativement au premier aspect, le Sénat peut contribuer à garantir la continuité de la fonction présidentielle en assurant d’une part, l’intérim en cas de vacance de la présidence de la république, et d’autre part en organisant l’élection du nouveau président. C’est ce qui ressort de la lecture des dispositions de l’article 6 alinéa 4 de la constitution du Cameroun et article 13 de la constitution gabonaise. A côté de ces prérogatives du Sénat, il jouit également d’une fonction consultative auprès de l’Exécutif.

Ainsi, le sénat peut être consulté par l’Exécutif en matière référendaire, de conflit entre l’exécutif et l’assemblée nationale ou en cas de crise grave. Relativement à ce dernier aspect, le constituant gabonais précise en l’article 49 que « la déclaration de guerre est autorisée par le Parlement ». À l’article 50 il ajoute que, « la prorogation de l’Etat d’urgence ou de l’état de siège au-delà de 15 jours est autorisée par le Parlement ». Le sénat gabonais peut donc donner son avis en cas de déclaration de guerre ou de prorogation des délais de l’Etat d’urgence ou de l’état de siège au-delà de 15 jours113. Le contexte camerounais n’offre pas cette grille de lecture. Ces mesures sont laissées à la diligence du président de la république.

Pour ce qui est des deux premiers cas dans le contexte camerounais, selon l’article 8 alinéa 12 de la loi constitutionnelle du 18 janvier 1996, « le Président de la République peut,

110 CHANTEBOUT (B.), Droit constitutionnel, Armand Colin, 19e édition, 2002, p.32.

111 Idem.

112 AVRIL (P.) et GICQUEL (J.), Droit parlementaire, Op.cit., p. 228

113 Le constituant gabonais a aussi prévu de cas de consultation du Sénat en matière référendum (voir article 18)

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en cas de nécessité et après consultation du gouvernement, des bureaux de l’Assemblée Nationale et du Sénat, prononcer la dissolution de l’Assemblée Nationale… ». Bien plus, en cas de crise grave ou lorsque les circonstances l’exigent, le Président de la République peut, après consultation du Président du conseil constitutionnel et des bureaux de l’Assemblée Nationale et du Sénat, demander à l’Assemblée Nationale de décider, par une loi, de proroger ou d’abréger son mandat. Dans ce cas, l’élection d’une nouvelle Assemblée a lieu quarante (40) jours au moins et cent vingt (120) jours au plus après l’expiration du délai de prorogation au d’abrégement de mandat114.

La possibilité reconnue au Président de la République d’initier une prorogation ou un abrègement du mandat de l’Assemblée Nationale apparait dans l’histoire constitutionnelle camerounaise avec la constitution du 02 juin 1972, les textes de 1960 et 1961 ne connaissent pas une telle hypothèse. L’article 12 paragraphe 2 de la révision inaugurale de la constitution du 02 juin 1972 est ainsi libellé : « l’Assemblée Nationale peut, sur l’initiative du Président de la République, décider par une loi, de proroger ou d’abroger son mandat ».

De même, le Président de la République, après consultation du Président du conseil constitutionnel, du Président de l’Assemblée Nationale et du Sénat, peut soumettre au référendum tout projet de réforme qui, bien que relevant du domaine de la loi, serait susceptible d’avoir des répercussions profondes sur l’avenir de la nation et les institutions nationales115. Tout état de chose témoigne de l’importance du Sénat dans le jeu démocratique des Etats africains en particulier du Cameroun et du Gabon.

Somme toute, les développements qui précèdent ont permis de répondre à la question de la réalité des fonctions autres que celles législatives de l’institution sénatoriale dans les Etats d’Afrique noire francophone. On peut donc affirmer sans ambages au terme de cette étude que le rôle du Sénat au sein du parlement ne se réduit pas à l’activité législative. De ce fait, à travers les textes et l’interprétation de la pratique parlementaire au Cameroun et au Gabon, on a pu effectuer une analyse duale des fonctions extra législatives du Sénat. Celle-ci nous a permis de constater une certaine fragilité de la fonction de contrôle.

Cependant, la fragilité de la fonction de contrôle peut être couverte par la significative portée des fonctions de représentation d’une part et celles constitutionnelles et exécutives

114 Voir l’article 15 alinéa 4 de la constitution.

115 Ibid. article 36 alinéa 1

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d’autre part. Car, comme précédemment relevé, ces dernières au-delà de leur caractère prestigieux sont la preuve que le Sénat participe activement au développement de la démocratie et la consolidation de l’Etat de droit. Le droit de saisine constitutionnel qui lui est reconnu en matière de justice constitutionnelle, constitue l’un des éléments centraux autour desquels on devrait reposer son utilité compte tenu de la place attribuée à la justice constitutionnelle dans les démocraties modernes. L’idéal serait donc d’individualiser se droit et le reconnaitre à chaque sénateur et non aux portions comme c’est le cas au Bénin.

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