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L’immobilier : une question éminemment socio-spatiale

« Lorsqu’on étudie le capital historiquement, dans ses origines, on le voit partout se poser en face de la propriété foncière sous forme d’argent ».

Marx K., 1867. Le capital, livre 1, tome 2, p. 17.

Si le terme « immobilier » fait partie du langage courant, son emploi évoque une pluralité d’approches scientifiques. Avant de nous intéresser aux dynamiques immobilières à Phnom Penh, il paraît nécessaire d’inscrire notre démarche scientifique au sein des recherches portant sur l’évolution de la production immobilière dans les espaces urbains.

Les recherches qui s’intéressent aux marchés immobiliers appartiennent avant tout à la science économique. Pourtant, ces approches ont été largement remises en cause par un nombre important de productions scientifiques, qui substituent notamment aux approches rationalistes une étude des dynamiques sociales de l’organisation et de l’évolution des marchés immobiliers. Par ailleurs, les marchés immobiliers semblent encore peu abordés du point de vue de leurs dynamiques socio-spatiales. Pourtant, les recherches en sciences sociales focalisées sur un bien immobilier ou un type de bien particulier, ou sur un marché spécifique, sont nombreuses, particulièrement en sociologie et en économie spatiale. Ces études considèrent cependant rarement l’évolution d’un marché immobilier en croisant des échelles d’analyses à la fois globales et locales, et s’attachent rarement à comprendre les liens tissés entre les pratiques spatiales et le développement d’un marché particulier.

De même, si la géographie s’intéresse aux pratiques immobilières, c’est bien souvent dans le cadre de l’étude des stratégies résidentielles et des pratiques citadines en général. Ces recherches mettent finalement peu en perspective les comportements des acteurs avec l’organisation même d’une économie immobilière locale spécifique.

Au sein de ce chapitre, nous inscrirons notre démarche dans le cadre plus général des études précédemment réalisées portant sur l’évolution des marchés immobiliers. Nous montrerons notamment l’intérêt de convoquer, pour l’étude de ces processus, une approche socio-spatiale. Il sera ainsi possible de mieux définir le bien immobilier en tant qu’objet de

recherche, et de souligner les multiples rapports que ce dernier entretient avec l’espace. Nous verrons finalement que la financiarisation des modes de production des espaces urbains, qui déterritorialise en apparence les marchés immobiliers, est loin de déposséder les biens immobiliers de leurs dimensions spatiales.

1) Les recherches sur l’immobilier : entre enjeux économiques,

problèmes de localisation et jeux d’acteurs

L’économie immobilière se situe au croisement de deux principales approches de la science économique : elle est à la fois issue de l’économie industrielle34 et de l’économie urbaine. La définition qu’en donne J.-J. Granelle (1998) apparaît en ce sens assez large : l’économie immobilière serait selon lui l’application des concepts et méthodes de l’économie aux biens immobiliers. Il existerait donc en économie immobilière autant d’approches qu’en économie. Cependant, ce domaine d’étude particulier a longtemps été dominé par les présupposés rationalistes des approches néo-classiques, et ce malgré de nombreuses critiques, qui ont émergé à partir de la fin des années 1960.

a. L’économie immobilière ou l’importance des paradigmes néo-classiques

La transformation des espaces urbains et l’échec des politiques publiques visant à encadrer la croissance urbaine ont poussé à partir des années 1930 un certain nombre de chercheurs à s’intéresser aux nouvelles dynamiques de la formation des prix immobiliers dans l’espace urbain, à la financiarisation croissante de ce secteur économique et à la professionnalisation et à la diversification des acteurs de la filière.

C’est avec la multiplication des recherches dans ce domaine au cours des années 1950-1960 que cette sous-discipline émerge en tant que telle au sein des productions scientifiques. La parution du premier numéro de la revue Real Estate and Urban Economics Association Journal en 1973 illustre cette dynamique. La multiplication des recherches centrées sur l’étude du secteur immobilier accompagne alors la prolifération des productions scientifiques en économie urbaine.

Au cours des années 1970-1980, l’économie immobilière se constitue en discipline aux États-Unis : «this period saw the creation of a new major association (American Real Estate Society), new major journal (Journal of Real Estate Research in 1986 and the Journal of Real Estate Finance and Economics in 1988), and even a change in the name of

34 L’économie industrielle cherche à rendre compte des aspects économiques (coûts, prix et marchés) de la

production d’un bien industriel. Les « approches filières » en économie se généralisent au début du XXe siècle avec la complexification croissante des processus de production et de commercialisation des biens.

a leading journal (The AREUEA Journal to Real Estate Economics) 35 » (Dombrow et Turnbull, 2004 : 47). Ces deux auteurs distinguent dans l’économie immobilière les recherches portant sur les prix, le courtage, le logement, les institutions, l’investissement, l’emprunt, le bâti non résidentiel et les politiques publiques. De manière générale, l’approche empirique36

domine largement les modèles théoriques. Les approches micro- économiques sont privilégiées, bien que l’approche macro-économique soit aussi utilisée.

Au sein de ces recherches, le cadre bâti est rarement étudié en soi : sa production est intégrée aux modèles économiques comme une des externalités qui participent de l’économie des villes. Nous pouvons noter la publication en 1991 du premier Economics of Housing, qui regroupe les recherches ayant pour objet l’habitat, et réunit à la fois des approches micro-économiques, macro-économiques et de l’économie spatiale.

Du côté des travaux scientifiques nord-américains, les recherches canadiennes présentent une approche originale, proches des recherches françaises, et donc des travaux portant sur la rente foncière. Le secteur immobilier y est abordé comme une nouvelle manière de produire du capital à partir des espaces urbains.

L’article de P. Coulomb (1973) illustre bien cette tendance. Partant de la propriété privée des sols urbains et de la formation de la rente foncière, il considère que la promotion immobilière et les nouveaux modes de construction du cadre bâti représentent une transformation en profondeur et sans précédent des modes de production capitaliste.

Dans la même veine, l’article d’A. Roy (1981) interroge les liens entre la formation de la plus-value foncière et l’apparition de nouveaux acteurs de l’aménagement dans la ville de Québec. Il montre que les stratégies des détenteurs de ce qu’il appelle le « capital immobilier » se construisent en fonction des acteurs « occupants » et des acteurs « non occupants ». Pour lui, ces rapports indiquent différentes approches de l’espace par le triptyque aménageurs-propriétaires-occupants. Derrière une approche centrée sur l’étude des mécanismes immobiliers, qui conduisent à la formation d’une plus-value entre le propriétaire et l’occupant, c’est bien l’approche par la théorie de la rente foncière qui est privilégiée (Guigou, 1980, 1982). La critique de l’acteur « aménageur », rôle assuré par l’État, qui cautionne et organise ces nouveaux modes de formation de capital, est caractéristique de l’approche néo-marxiste.

35 « Cette période a connu l’émergence d’une éminente association (American Real Estate Society), de

journaux importants (Journal of Real Estate Research en 1986 et le Journal of Real Estate Finance and Economics en 1988) et a été le témoin du changement de nom d’un journal moteur (The AREUEA Journal to Real Estate Economics). »

En France, les recherches ayant pour principal objet l’immobilier se développent plus tardivement que les recherches étasuniennes. Bénéficiant d’une conjoncture politique favorable37, un certain nombre d’auteurs français va s’intéresser, à partir de la fin des années 1960, aux nouveaux modes de production du cadre bâti. De nombreux thèmes vont être abordés et l’approche filière sera largement favorisée.

La question de l’évolution des mécanismes de formation de prix sera notamment étudiée par J.-J. Granelle (1970) et J. Carassus (1983, 1987). L’accélération de la séparation des tâches au sein de la filière amènera les chercheurs à se concentrer sur tels ou tels types d’activités. La promotion immobilière, par exemple, sera étudiée par J. Ion (1970), P. Lancereau (1971), J.-F. Dhuys (1975). La transformation de l’organisation industrielle du secteur des bâtiments et travaux publics fera de même l’objet de nombreuses recherches (Asher et Lacoste, 1972 ; Lafont et Leborgne, 1974 ; Duclos, 1978). Enfin, l’évolution des mécanismes de formation des prix sur les marchés sera étudiée notamment par J.-F. Goux (1978b) et A. Boublil (1980).

L’approche macro-économique n’est pas en reste. Les nombreuses tentatives de régulation des marchés immobiliers par l’État, et notamment la régulation institutionnelle et juridique des marchés immobiliers, sont ainsi étudiées (Renard, 1975 ; Belliot, 1982 ; Boyer et Mistral, 1983 ; Lefebvre et Mouillart, 1986 ; Comby et Renard, 1985 ; Guerrand, 1987).

Enfin, dans la continuité des travaux anglo-saxons en économie urbaine, certains chercheurs s’intéressent à la modélisation économique des comportements des ménages et de leurs incidences sur la formation des prix sur les marchés (Lisle et André, 1968 ; André, 1971).

Au sein d’un numéro spécial sur l’économie immobilière paru dans la Revue d’Économie Régionale et Urbaine, J. P. Levy note que « le fait que le marché du logement soit imparfait est acquis, la manière d’appréhender au mieux cette imperfection reste posée » (Levy, 1995 : 502). Pour une majorité d’économistes urbains qui s’intéresse aux marchés immobiliers, l’imperfection des marchés et la spécificité des biens immobiliers doivent être intégrées en tant que nouvelles externalités aux modèles économiques.

37 À partir des années 1950, la croissance des prix immobiliers et fonciers ainsi que la raréfaction des terrains

disponibles dans les grandes villes ont poussé l’État français à appliquer différentes politiques foncières afin d’assurer un meilleur contrôle sur les prix fonciers et immobiliers. Les promulgations de la loi Pisani en 1967 et de la loi Galley en 1975 en témoignent. La recherche française en économie urbaine au cours des années 1970-1980 bénéficie donc d’un contexte politique favorable à la production de travaux de recherche portant sur de nouvelles approches économiques de la construction des espaces urbains.

En effet, l’émulation des recherches immobilières des années 1970-1980 ne semble pas aboutir à la construction de modèles efficaces capables d’anticiper l’évolution des marchés fonciers et immobiliers, qui semblent de plus en plus volatils. Par ailleurs, l’étude de la consommation de tels biens se heurte à la grande difficulté de modéliser les comportements des agents économiques : les biens immobiliers ne semblent pas être des biens de consommation comme les autres.

À ce titre, leur particularité de non-fongibilité tentera d’être corrigée par le modèle des prix implicites (ou hédoniques) : « la notion de prix hédoniques (hedonic prices en anglais), s’appuie, comme son nom l’indique, sur l’idée que l’utilité d’un bien ou d’un service résulte de la jouissance que celui-ci procure » (Aveline, 2005). Le modèle des prix hédoniques développe ainsi une analyse plus approfondie de la formation des prix, notamment par une distinction plus fine des différents marchés et par une élaboration complexe des caractéristiques propres aux biens logements, qui participent de la détermination des prix (environnement sonore et visuel, proximité des infrastructures, niveau de confort du logement, etc.). L’utilisation croissante du modèle des prix hédoniques dans les études immobilières témoigne de la recherche d’une plus grande exhaustivité des modèles économiques.

Cependant, l’effectivité de tels modèles d’explication de la formation des prix, et donc des comportements des consommateurs envers les biens logements, est encore loin de faire consensus. Comme V. Renard le conclut, « les principales hypothèses habituellement admises sur le fonctionnement du marché foncier sont donc beaucoup trop restrictives et irréalistes pour que les modèles correspondants aient une grande valeur explicative, et a fortiori pour qu'ils permettent de dégager des règles de conduite optimales. Cette remarque est particulièrement importante en ce qui concerne les comportements des agents, dont la diversité est telle qu'il paraît illusoire de vouloir les formaliser, et la circulation de l'information sur le marché foncier, qui est très mal connue » (Renard, 1975 : 107). Ici, le « comportement des agents » et la « circulation de l’information » font référence à l’imperfection des marchés fonciers et immobiliers et à la difficulté, voire à l’impossibilité, de quantifier et de rationaliser de manière précise les comportements des agents économiques engagés dans le commerce du sol et du bâti urbain.

Pour l’économie urbaine, le sol et le bâti sont des facteurs de production dont l’utilité sera maximisée par les agents économiques aux comportements rationnels. Le foncier et les constructions se confondent ainsi bien souvent. L’analyse de la demande de

logement est assimilée à la demande d’espace en général, et le marché du logement est principalement réduit à la relation « prix-décisions des agents ».

L’analyse en économie spatiale est cependant capable de fournir un cadre d’analyse précis de certains facteurs de localisation de l’habitat vis-à-vis de l’armature urbaine, des marchés de l’emploi ou des relations interurbaines par exemple. Néanmoins, l’intégration des facteurs de production du bâti au sein des modèles micro-économiques se fait par l’insertion souvent complexe d’une multitude d’externalités censées produire un modèle d’équilibre. Ces difficultés d’ordre mathématique s’éloignent des réalités des marchés immobiliers de plus en plus conditionnés par l’offre, très peu transparents et dont la consommation s’explique difficilement par la rationalité des agents économiques.

Afin de prendre en compte toutes les spécificités des biens et des marchés immobiliers, certains économistes s’ouvrent à d’autres sciences sociales : la sociologie principalement, mais aussi l’anthropologie et l’ethnologie sont ainsi sollicitées.

b. Les critiques portées aux approches rationalistes : la question des jeux d’acteurs Les différentes études sur les promoteurs immobiliers 38 sont très révélatrices des préoccupations nouvelles de l’économie urbaine néo-marxiste de la fin des années 1960 aux années 1970. Elles sont fortement influencées par le travail fondateur de M. Halbwachs (1909), qui insiste sur les dimensions culturelle, sociologique et psychologique des processus d’allocation des sols urbains et des stratégies de localisation des ménages à Paris. À la différence de l’approche marxiste, qui accorde le primat à la production et, par conséquent, à l’offre, l’approche néo-marxiste privilégie la demande, et rompt ainsi avec la notion d’optimum décrite par V. Pareto39, qui structure largement les présupposés scientifiques en économie spatiale.

Les recherches d’A. Lipietz (1974) se situent dans la continuité des recherches marxistes ayant trait à la rente foncière urbaine. Cet auteur introduit cependant l’étude du cadre bâti au sein de ses modèles économiques. Il interroge principalement l’évolution des prix du foncier urbain (qu’il nomme « le tribut foncier ») comme conséquence de la « division économique sociale de l’espace (DESE) ». La formation des prix immobiliers s’explique plus par l’organisation des rapports sociaux au sein des espaces urbains que par

38 Une des premières recherches approfondies sur les promoteurs en France sera réalisée par G. de Crécy

(1960).

39 Notion centrale de l’économie néo-classique, l’optimum est atteint lorsque l’on ne peut améliorer le bien-

être d’un individu sans en dégrader celui d’un autre. L’optimum comme notion est à comprendre dans le cadre de l’équilibre général en situation de concurrence pure et parfaite. Elle accorde en théorie autant d’importance à l’offre qu’à la demande.

le jeu de l’offre et de la demande. Le bien logement serait à la fois un produit, un besoin social et une marchandise, et aurait l’extrême particularité d’exprimer la reproduction des rapports de classe dans l’espace : « le logement [...] se voit stratégiquement investi de la fonction de pôle structurant de la consommation dirigée dans le cadre de la colonisation de la vie quotidienne » (Lipietz, 1974 : 45).

Pour cet auteur, ce n’est pas seulement les modes de construction et d’échanges des biens mobiliers qui se sont transformés : l’habitat n’a plus la même fonction sociale qu’auparavant. Le fait que le logement soit un bien si particulier, défini par une dimension sociale forte, explique pour A. Lipietz l’impossibilité pour l’économie urbaine de déterminer une loi économique de portée générale de formation des prix fonciers et immobiliers au sein des espaces urbains.

L’approche néo-marxiste en économie urbaine est particulièrement prolifique à partir des années 1970. Pour ces auteurs, les facteurs explicatifs des processus d’évolution des espaces urbains doivent se trouver du côté des transformations des modes de production et d’échange du cadre bâti.

Par exemple, J.-F. Goux (1978c) veut souligner l’évolution des modes de production du logement en apportant une dimension critique aux nouvelles dynamiques de production des espaces urbains. Ses recherches donnent une place centrale à l’étude du promoteur immobilier, qui « [...] de personnage accessoire dans la première moitié de ce siècle est devenu l’acteur principal de l’acte de construction dans la deuxième moitié » (Goux, 1978a : 55). Pour lui, l’économie immobilière doit analyser l’organisation des acteurs immobiliers dans l’espace, compris comme étant à la fois « une distance, une surface et un lieu » (Goux, 1978a : 7).

L’approche de J.-F. Goux est originale, car elle engage une réflexion sur les externalités négatives des nouveaux modes de production de la ville. « En effet, la ville n’existe que par la simultanéité, alors qu’on est en train de la vendre en morceaux autonomes. L’origine de la crise urbaine actuelle n’est pas ailleurs. Tout le monde "vend" la simultanéité, mais plus personne ne la produit » (Goux, 1978a : 15). Cette remarque fait directement référence aux recherches conceptuelles néo-marxistes de F. Choay (1965), H. Lefebvre (1968) et P. Dockès (1969).

La redéfinition de l’espace public, la privatisation des modes de production de la ville, la fragmentation des espaces urbains, la ségrégation sociale et le délitement socio- spatial des franges urbaines sont les principaux thèmes des réflexions théoriques au sein

néo-classiques : « l’homogénéité du sol urbain est la négation de toute théorie spatiale fondée justement sur le caractère unique et particulier de chaque emplacement » (Aydalot, Decoster et Henrad, 1979 : 261).

Les recherches évoquées précédemment se concentrent principalement sur trois aspects des marchés immobiliers : la portée symbolique, en matière de comportements des consommateurs, de l’évolution de la production et de l’échange de biens immobiliers ; les coûts liés à la fabrication des biens eux-mêmes (tout ce qui concerne la construction en général) ; les coûts liés à la localisation des biens fonciers. Si le rôle de la transformation des modes de consommation, comme conséquence directe du changement de la production, est abordé, l’étude de la place des agents socio-économiques dans la restructuration des rapports de production des biens immobiliers est loin d’être systématique.

Dans la continuité des analyses économiques néo-marxistes évoquées plus haut, la sociologie marxiste et néo-marxiste produira à partir des années 1960 un grand nombre de recherches portant sur l’évolution du secteur immobilier, principalement autour du Centre de sociologie urbaine (CSU)40.

P.-H. Chombart de Lauwe, un des fondateurs du CSU, s’intéresse depuis les années 1950 aux transformations récentes des modes de production des espaces urbains. Dans la continuité des travaux de M. Halbwachs sur Paris, P.-H. Chombart de Lauwe s’intéresse lui aussi à la classe ouvrière, et considère que « l’habitation ne peut pas être séparée du cadre matériel de vie d’une société dans l’espace. [...] Étudier les transformations de l’habitat et du logement, c’est étudier les transformations de la société et la transformation de la famille » (Chombart de Lauwe, 1959, cité par Bonvalet, 1997 : 26).

Les recherches de P.-H. Chombart de Lauwe au cours des années 1950-1960 sont fortement imprégnées des approches socio-spatiales développées par l’école de Chicago, et particulièrement celles de E.W. Burgess, tout en utilisant diverses disciplines des sciences sociales comme la géographie et l’histoire. Pour P.-H. Chombart de Lauwe, « c’est dans sa relation évolutive et multidimensionnelle à l’espace que l’individu parvient à construire de façon plus ou moins heureuse son rapport au monde » (Stébé et Marchal, 2010).

P. H. Chombart de Lauwe met en valeur ce qu’il nomme les « milieux humains » et s’intéresse de près à l’habitat des individus urbains. L’habitat en tant qu’objet de recherche est pour lui une manière de comprendre comment se construisent les individus et les

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groupes, et la manière dont se construit leur espace social. Son travail va ouvrir la voie à de

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