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L’Imagerie par Résonance Magnétique (IRM)

Cette technique, non intrusive, permet d’imager des champs de vitesse dans les fluides complexes cisaillés. Elle a été utilisée par Callaghan pour étudier l’écoulement de micelles géantes [12, 26, 35]. Ces expériences ont montré pour la première fois l’existence de bandes de cisaillement dans des systèmes semi-dilués de micelles géantes. Cette technique a aussi été utilisée par Coussot pour étudier la transition pâte-fluide dans les systèmes concentrés [19].

Nous avons réalisé les expériences d’IRM au Laboratoire des Matériaux et Structures du Génie Civil (LMSGC), à l’université de Marne la vallée, en collaboration avec Guillaume Ovarlez et Stéphane Rodts.

2.2.1 Principe général

L’IRM permet de mesurer différentes propriétés internes du matériau utilisé. La mé-thode est basé sur la RMN (Résonance Magnétique Nucléaire) du proton : le noyau d’hy-drogène est doté d’un moment cinétique ou « spin » ~S auquel est associé un moment magnétique ~m. En l’absence de champ magnétique externe, les moments magnétiques sont

orientés aléatoirement du fait de l’agitation thermique, de sorte que l’aimantation macro-scopique résultante est nulle.

La présence d’un champ magnétique externe ~B0, colinéaire à l’axe z (cf. figure 2.9), entraîne la polarisation du système des spins et l’alignement d’une proportion de moments magnétiques avec le champ appliqué. Dans cette situation, l’aimantation du système n’a pas de composante transverse.

Si on superpose à ~B0 un champ électromagnétique tournant ~B1, le moment magnétique a alors une composante transverse qui va faire apparaître un signal de radiofréquence. Ce dernier va être recueilli par une antenne et observé au cours du temps.

Fig. 2.9 – Schéma du rhéomètre Couette insérable dans l’IRM. La zone en pointillés indique la zone sélectionnée pour la mesure du champ de vitesse.

Les grandeurs de base que l’on mesure sont les temps de relaxation des spins, c’est à dire le temps que va mettre un spin pour retrouver sa position initiale. On distingue deux temps de relaxation :

– partant de l’état d’équilibre où les spins sont désorientés, on applique un champs ma-gnétique externe −B

0 suivant z. On relâche ce champ et on mesure le temps nécessaire pour que les spins relaxent vers une valeur équivalente à 63% de la valeur de l’ai-mantation dans l’état d’équilibre. Ce temps de relaxation libre induit par précession libre du spin du proton est appelé T 1.

– partant de l’état d’équilibre, on applique aux spins un champ magnétique −B

0 selon z mais également un champ magnétique −B

1 ayant des composantes dans les directions x et y. On est alors dans le cas de la procession forcée avec une mise en phase des spins. Le temps de relaxation ainsi mesuré est appelé T 2. Il correspond au temps mis pour que l’aimantation transversale atteigne 37% de sa valeur initiale.

2.2.1.1 Mesure de vitesse

Les mesures de vélocimétrie par l’IRM à l’intérieur de la géométrie de Couette sont obtenues à partir de la méthode développée par Hanlon et collaborateurs [32] et modifiée par la suite par Raynaud et collaborateurs. La séquence RMN utilisée est représentée sur la figure 2.10.

Fig.2.10 – Séquence RMN pour la mesure de la vitesse.

Elle est basée sur la méthode PFG (Pulsed Field Gradient) ou gradient de champ pulsé. Deux émissions successives de radiofréquence, couplées avec des gradients de champs notés (a) et (b), sélectionnent respectivement dans les directions x et z un barreau virtuel le long d’un diamètre de la cellule de Couette (figure 2.9). La paire de gradients « de codage » d’amplitude G, de durée δ et séparés de ∆ dans la direction y (en noirs) introduit, dans le signal RMN local, un fort changement de phase proportionnel à la vitesse ortho-radiale à l’intérieur de l’écoulement (équation 2.26). Les champs de gradients, appliqués dans la direction x (c), permettent de récupérer les informations spatiales précises sur le signal RMN à l’intérieur du barreau au temps de mesure du signal (d).

φ(r) = γGδ∆Vθ(r), (2.26)

où γ est le rapport gyromagnétique du noyau étudié.

Le signal RMN provenant des spins évolue durant le temps ∆ entre deux gradients de champ et cela proportionnellement au déplacement du gradient appliqué dans la zone de mesure. Pour obtenir un profil de vitesse simple, seulement deux images doivent être acquises, chacune ayant des phases différentes. Les deux phases issues des images sont alors soustraites pour permettre de calculer les vitesses dans la zone de mesure et donc de construire le profil de vitesse du matériau étudié.

Les réglages RMN permettent de modifier le nombre d’accumulation de signal (i.e. le nombre d’images) pris pour mesurer les vitesses. Plus ce dernier va être grand, plus le rapport signal sur bruit sera bon. Le profil de vitesse est moyenné sur le nombre d’accu-mulation de signal. Les résolutions spatiales et temporelles dépendent des réglages RMN.

Les détails de la séquence et l’application à la rhéologie sont détaillés dans les références [58, 51].

2.2.1.2 Mesure de densité

La difficulté des mesures de densité dans le cas des émulsions se situe dans la similarité de fréquences de résonance des deux phases. Les fréquences de résonance sont représentées en pic d’intensité de signal en fonction de la fréquence de déplacement chimique des divers éléments constituant le matériau par rapport à la fréquence de résonance du proton qui est de 20 MHz (spectre RMN), qui est la transformée de Fourrier du signal temporel (figure 2.11).

PHASE AQUEUSE

Fig. 2.11 –Spectre RMN de la phase aqueuse et de l’huile.

Une nouvelle technique a été mise au point pour discriminer les deux espèces. Elle est basée sur la mesure des temps de relaxation T 1 de la phase aqueuse et de l’huile à différents moments de leurs courbes de relaxation respectives.

Le signal peut s’écrire sous la forme :

Slocal = (1 − eTw−t)Sw + (1 − e−tTo)So, (2.27) où To et Tw sont les temps de relaxation respectifs de l’huile et de la phase aqueuse, So et Sw sont respectivement le signal local de l’huile et de la phase aqueuse. Le but est d’annuler une composante du signal pour n’avoir le signal que d’une seule espèce. Ceci est réalisé en prenant des valeurs de So et Sw à trois temps différents. On remonte alors à l’intensité des deux phases dans la zone de mesure à partir de la densité de protons de l’huile et de l’eau. Pour déterminer la concentration respective de chacune des espèces, on se base sur une mesure de référence du matériau homogène et de la formulation étudiée. A partir de mesures simples, nous sommes alors capables de déterminer des profils locaux de densité en huile et en phase aqueuse dans l’entrefer.

2.2.2 Dispositif expérimental

L’échantillon est inséré dans une cellule de Couette (figure 2.9). L’entrefer est relative-ment large : 1, 8 cm (Ri = 4, 2 cm, Re = 6 cm, H = 11 cm). Du papier de verre est collé sur les parois pour éviter le glissement. La géométrie est insérée dans un spectromètre IRM vertical de 0, 5 T, soit 21 MHz en proton (24/80 DBX, Brücker).

Les mesures IRM nous permettent d’avoir la vitesse locale orthoradiale et la concen-tration locale en huile en tout point du gap, avec une résolution de 0, 5 mm. La zone de mesure est prise au centre de l’échantillon (figure 2.9), ce qui permet de minimiser les effets perturbateurs dus au cylindre interne en rotation : effet de bords, creusement ou hétéro-généités verticales au niveau de la surface libre et au fond de la cuve. La zone de mesure correspond à un barreau de 5 cm de haut, 1 cm de large et 17 cm de long.

2.2.3 Analyse des données

Nous avons vu dans le paragraphe précédent comment obtenir un profil de vitesse pour une vitesse de rotation du cylindre interne donnée.

La contrainte tangentielle locale dans l’entrefer est calculée à partir de l’équation de Navier-Stokes en régime stationnaire. Son expression en coordonnées cylindriques est :

σr,θ = Γ

2πr2H, (2.28)

où Γ est le couple, H la hauteur de la cellule de Couette, r la distance par rapport à l’axe de rotation.

Le cisaillement est la dérivée locale du profil de vitesse du fluide en coordonnées cylin-driques :

˙γ = −r∂r vr. (2.29)

Nous obtenons ainsi les profils de vitesse et la courbe de rhéologie locale du matériau étudié.

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