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L’image de soi, qu’est-ce que c’est ?

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Chapitre 3 – Image de soi/estime de soi : approche cognitive

1. L’image de soi, qu’est-ce que c’est ?

L’image de soi a de multiples facettes et de multiples fonctions.

Tout d’abord, elle donne à chacun une identité qu’il essaye de faire comprendre et accepter par les autres. Ce qui veut dire qu’au cours des interactions sociales, chacun utilise une variété de stratégies et de tactiques pour communiquer aux autres une certaine image de lui-même. Mais pas la même : nous essayons de montrer différentes identités dans des situations différentes – vis-à-vis de la famille, des camarades de sport, dans les relations avec ses subordonnés, les contacts avec ses collègues, etc. Cette diversité du self-concept est

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plus ou moins forte selon les individus ; certains possèdent un registre étendu ; d’autres, une identité plus rigide. Et les résultats des recherches suggèrent que plus la structure du self-concept est riche et complexe, plus l’individu dispose de registres d’identités dispo-nibles, plus il est protégé contre les chocs affectifs et plus il est équili-bré – à condition que les différents aspects de son identité soient bien intégrés entre eux. Il faut donc retenir que les individus diffèrent dans leur capacité à élaborer une image de leurs compétences non seulement précise, mais également bien différenciée et correctement intégrée à la diversité des situations – et que le rôle du bilan peut être aussi de les aider à mieux différencier les compétences entre elles, et à bien intégrer les divers aspects de leur self-concept.

Par ailleurs, et cela n’est pas contradictoire avec ce qui vient d’être dit, l’image de soi apporte à l’individu lui-même le sens de sa continuité, c’est-à-dire qu’elle lui permet de se percevoir comme ayant des com-portements, des attitudes, des goûts… qui se manifestent de manière cohérente à travers la multitude des situations qu’il rencontre. De fait, chacun d’entre nous « se » construit un récit autobiographique qui réa-lise une synthèse aussi harmonieuse que possible de l’ensemble varié de ses expériences antérieures. Et cette autobiographie est fréquem-ment « révisée » de manière à intégrer les nouvelles informations apportées par l’expérience ou par les évaluations faites par d’autres.

L’image de soi est donc dynamique et relativement malléable. Elle est aussi très complexe : il existe un self-concept accessible, nommé par les auteurs anglo-saxons « working self-concept » parce que c’est la part de notre perception de nous-mêmes qui est immédiatement accessible à la réflexion et qui détermine nos comportements.

Un exemple curieux le fera mieux comprendre : des sujets ont répondu à des questions concernant l’extraversion, ce trait psy-chologique caractérisé par l’ouverture au monde et aux autres ; ils se décrivent ensuite comme plus extravertis qu’un autre groupe de sujets qui ont répondu à un questionnaire sur l’introversion (propension à se tourner vers l’intérieur de soi-même, et à s’isoler du monde extérieur).

Comment expliquer que le simple fait d’être questionné modifie l’image de soi ? Parce que nous avons tous une image de nous-mêmes comme extravertis et, également, une image de nous-nous-mêmes comme introvertis. Le fait de répondre à un questionnaire active les représentations de soi comme extraverti. De tels changements

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poraires modifient constamment l’image de soi accessible. Mais il faut les distinguer de changements plus profonds qui affectent la structure même de la représentation de soi, ou qui sont susceptibles de modifier la valeur attribuée par l’individu à son image.

L’image de soi est variée, en ce sens qu’elle est composée d’une variété de représentations qui sont de natures différentes : cognitives ou affectives, concernant le moi passé, le moi actuel et le (ou plutôt les) moi futurs, et jugés possibles, et qu’elle est faite d’image visuelles ou de données verbales, voire sensori-motrices. À tout moment, un de ces aspects est activé et influence nos comportements et nos motivations. De ce point de vue, les informations apportées par un bilan de compétences peuvent avoir un rôle activateur et mettre en relief un aspect existant, mais négligé, de l’image de soi.

La dimension affective et évaluative de la représentation de soi constitue le fondement de cet aspect important qu’est l’estime de soi. Une estime de soi élevée entraîne la satisfaction et le bien-être psycho-logique, ainsi qu’un sentiment général de compétence qui fait anticiper des succès à venir ; une estime de soi faible entraîne une insatisfaction générale et un manque de confiance en soi qui peut être démotivant.

En outre, et qu’il s’agisse de ses aspects strictement cognitifs, ou affectifs et évaluatifs, l’image de soi est une donnée relative, parce que chacun s’apprécie par comparaison avec d’autres, ou encore par rap-port à ce qu’il espérait être et réaliser. L’échelle de valeurs qui sert à apprécier l’importance relative des succès ou des difficultés rencon-trés est également fortement liée à la culture et aux normes sociales, voire familiales. L’estime de soi est aussi le fruit des attentes et des soutiens sociaux et familiaux.

On a pu observer, par exemple, que les enfants qui dévelop-pent une estime de soi élevée ont des parents tolérants, qui définissent clairement leurs exigences de comportement et qui apportent un soutien important à l’acquisition de compétences utiles pour atteindre les objectifs qu’ils valorisent.

Du fait de la complexité des facteurs déterminant l’estime de soi, il existe différents modes de dévalorisation de soi qui appellent des inter-ventions adaptées :

– s’il s’agit d’incompétences spécifiques et identifiables, on peut y remédier à la fois par l’amélioration des compétences faibles et par le choix d’objectifs réalistes ;

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– s’il s’agit de dévalorisation étroitement dépendante des valeurs particulières à un groupe social donné, il faut multiplier les expé-riences sociales de manière à faire entrer l’individu en contact avec d’autres systèmes de valeurs.

Concrètement, et du point de vue du bilan de compétences, on ne doit donc pas s’attendre à modifier l’estime de soi si les compétences sur lesquelles l’attention est attirée ne sont pas valorisées dans le contexte social et professionnel où vit et travaille la personne qui a demandé un bilan.

Enfin, il faut garder en mémoire une distinction importante entre une self-estime générale, et relativement chronique, qui constitue une satisfac-tion de soi à travers les situasatisfac-tions, et des self-estimes spécifiques, relatives à certaines aptitudes, voire à des activités précises requérant un ensemble de qualités différentes. La première peut être assimilée à un trait de per-sonnalité et entraîne la confiance en soi dans toutes les situations. La seconde est étroitement fondée sur l’expérience des résultats atteints auparavant dans des situations semblables.

La manière dont s’articulent la self-estime globale et les auto-évaluations d’efficacités spécifiques représente évidemment un point important. Par exemple, dans une situation d’évaluation ou de sélection, un échec ou une information négative peuvent être attribués par celui qui les reçoit à l’inadéquation de l’évaluation ou du processus de sélection de l’organisa-tion – et ne pas entamer la self-estime. Ou bien, au contraire, cette même information peut être interprétée comme le témoin d’un manque d’efficacité et diminuer d’autant l’estime de soi. L’une ou l’autre de ces attitudes est liée à des traits de personnalité, et notamment au « locus de contrôle » : ceux qui ont un « locus de contrôle interne », c’est-à-dire qui ont tendance, de manière générale, à s’attribuer la responsabilité de leurs échecs et de leurs succès, vont mal défendre leur estime de soi ; alors que ceux qui ont un « locus de contrôle externe », c’est-à-dire qui ont tendance à attribuer à des causes extérieures les difficultés qu’ils ont rencontrées ont une image de soi mieux protégée.

Un dernier point permettra de compléter cette exploration théorique des phénomènes de l’image de soi : le fait que la capacité à conceptuali-ser les différentes expériences vécues et leurs résultats, et à prendre suf-fisamment de distance pour en développer une image cohérente, varie selon les individus, en particulier en fonction de leur âge, de leur niveau

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d’intelligence, et probablement de leur niveau socio-professionnel. En effet, les informations sur nous-mêmes que nous apporte l’expérience quotidienne se composent d’éléments relativement discontinus. La capa-cité à les associer en « dimensions » signifiantes, et le nombre de dimen-sions indépendantes que chacun arrive à conceptualiser pour se décrire, devraient représenter un point de départ du bilan de compétences.

L’auto-évaluation de ses compétences passe, en effet, par une capacité à se jauger sur des dimensions multiples et définies avec précision, à arti-culer ces dimensions entre elles, et surtout à savoir dans quelles circons-tances chacune de ces compétences est utile et utilisable. En d’autres termes, il ne suffit pas de posséder des compétences, encore faut-il les identifier correctement, avoir construit une image claire de son effica-cité, et enfin savoir quand et comment les mettre en œuvre. Le bilan de compétences devrait, aussi, et peut-être avant tout, avoir l’objectif de rendre les individus conscients de leur potentiel personnel et les organi-sations conscientes du potentiel de leur personnel – ceci, en dévelop-pant les outils cognitifs qui servent à se décrire et à s’évaluer.

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