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L’histone méthyl-transférase MLL et développement normal

1. INTRODUCTION

1.2. Facteurs nucléaires et régulation des CSH

1.2.2. Modifi cateurs de la chromatine

1.2.2.4 L’histone méthyl-transférase MLL et développement normal

En tant que modifi cateur de la chromatine, MLL1occupe effectivement un rôle central dans la régulation de l’hématopoïèse normale et leucémique. L’étude de translocations leucémiques récurrentes impliquant la région chromosomique 11q23 a permis l’identi- fi cation du gène Mll1 chez l’humain en 1991 [99]. De taille considérable, le gène Mll1 humain (~89 kb) contient 37 exons codant pour une protéine de 3969 acides aminés, ou 500kD. Deux sous-unités liées de façon non-covalente composent la protéine mature (MLLN320/C180), résultant d’un clivage par l’action de la taspase 1 au niveau de sites de re-

connaissance enzymatique (cleavage site 1 and 2; CS1, CS2, Fig1.12) [15]. Cette protéine est constituée de plusieurs domaines, dont certains conservés depuis l’orthologue Trx de la drosophile. La topographie de MLL1 est schématisée à la Fig1.12, incluant quelques domaines clés défi nis pour cette protéine. En bref, on retrouve depuis la portion N-ter- minale et en aval, trois domaines AT-hook (ATH1-3) pouvant lier l’ADN, deux signaux de localisation nucléaire (SNL1,2), et un domaine de répression transcriptionelle (TRD) contenant entre autre un motif doigt de zinc (CxxC), homologue à DNMT1. On retrouve ensuite des domaines PHD (plant homology domain, PHD1-3), pouvant médier des in- téractions protéine-chromatine ou protéine-protéine, un domaine d’activation transcrip- tionnelle (TA) et la portion SET (Su(var)3-9, enhancer of zeste, trithorax) en C-terminale, contenant l’activité H3K4me3 méthyl-transférase de MLL1. Les protéines SET, initiale-

20 ment caractérisées chez la drosophile et la levure, arborent plusieurs attributs, dont celui d’évoluer au sein d’un complexe dont la composition fi nale dictera la résultante transcrip- tionnelle. On retrouve chez les cellules de mammifères au moins six H3K4 méthyl-trans- férases, SET1A, SET1B, MLL1-4, oeuvrant au sein de complexes COMPASS.

Réarrangement MLL-PTD MLL

ATH1-3 SNL1-2 TRD PHD1-3 TA SET

Fusion MLL

Gène partenaire de fusion

CS1 CS2

BCR

Figure 1.12 Structure du gène Mll (Mixed Lineage Leukemia) et des translocations dé- rivées. Panneau du haut : domaines du gène Mll. Depuis la portion N-terminale, à gau- che : domaines AT-hook (ATH1-3) de liaison à l’ADN; signaux de localisation nucléaire (SNL1,2); domaine de répression de la transcription (TRD); domaines PHD 1-3 (Plant HomeoDomain); sites de clivage de la taspase 1 (CS1, CS2 : cleavage site 1 et 2); do- maine de transactivation (TA); et le domaine catalytique SET (Su(var)3-9, enhancer of zeste, trithorax) en C-terminale. Le point de cassure (BCR : breakpoint cluster region) des réarrangements chromosomiques impliquant Mll est indiqué en noir. Panneau du centre : modèle de translocation chromosomique fusionnant la portion N-terminale de Mll à plus de 60 gènes partenaires différents. Panneau du bas : schéma du réarrangement chromoso- mique de type duplication en tandem (PTD : Partial Tandem Duplication).

Concernant Mll1, une étude de souris mutantes a permis de cerner l’importance fonction- nelle de ce gène, quelques années suivant son identifi cation. On y rapporte notamment un retard de croissance, des cytopénies, une altération de l’expression des gènes Hox (dont Hoxa7 et Hoxc9) et des anomalies homéotiques du squelette, anomalies décelées dans un contexte hétérozygote [100]. Une abolition homozygote de Mll1 résulte en une létalité embryonnaire entre le jour E9.0 et E12.5, et une absence d’expression des gènes Hox.

Plus récemment, des modèles inductibles de délétion de Mll1ont permis de mettre en évi- dence un rôle essentiel de MLL1 dans l’auto-renouvellement des CSH. La perte de Mll1 entraîne une aplasie médulllaire dans les 3 semaines suivant l’excision des allèles par l’enzyme Mx1-cre, par déplétion du contingent hématopoïétique primitif, les CSH étant recrutées hors de la phase de quiescence du cycle cellulaire et rapidement épuisées [101]. On note aussi une diminution de l’expression des gènes Hoxa7, Hoxa9 et Hoxa10 dans une population KLS, enrichie en CSH. Dans ce contexte, les cellules progénitrices quant à elles perdent leur potentiel prolifératif. MLL1 semble donc essentiel à la survie des cel- lules souches/progénitrices et à l’homéostasie du tissu hématopoïétique adulte. Différents modèles de disruption génique ont permis d’obtenir des embryons Mll-/- survivant au-delà du jour E14.5 (E12.5-E16.5) et de démontrer de façon similaire le rôle crucial de ce gène dans l’hématopoïèse fétale [102, 103]. De façon intéressante, l’abolition isolée la portion codant pour le domaine SET du gène de Mll1 ne résulte pas en une létalité chez les souris mutantes homozygotes, mais en un phénotype léger, incluant des transformations homéo- tiques et une réduction de l’expression des gènes Hox [104].

L’activité de MLL1 se déploie donc à l’intérieur d’un complexe pouvant moduler la confi - guration de la chromatine par la méthylation (H3K4me3), l’acétylation (H3K27Ac) ainsi

qu’une propriété de remodelage. WDR5 et ASH2L appartiennent à ce complexe, in-

teragissant avec la portion C-terminale du domaine SET, et contribuant à l’activité mé- thyl-transférase de MLL1 [105, 106]. MENIN par ailleurs lie la portion N-terminale de MLL1 et assure un pont avec la machinerie transcriptionnelle [107]. L’association de MLL1 avec plusieurs régions promotrices du génome, ainsi que sa co-localisation avec la RNA polymérase II et la marque épigénitique activatrice H3K4me3, lui suggère une in- fl uence globale sur la transcription [108, 109]. Cependant, une régulation spécifi que d’un sous-groupe de gènes cibles, comme les gènes Hox, est aussi attribuée à MLL1 [110]. Un pattern de liaison des régions promotrices beaucoup plus étendu de MLL1 sur le territoire 5’ des gènes Hoxa est d’ailleurs décrit, de Hoxa7 à Hoxa13, et sur Hoxa1, dans des cellules monocytaires U937 [108]. Ces mêmes régions liées pas MLL1 sont denses en tri-méthylation de la H3K4, suggérant une confi guration active de la chromatine pour ce domaine de gènes cibles. MLL1 s’associe aussi à des régions génomiques codant pour des miRNA, comme le locus de mIR-17-92, impliqué dans l’hématopoïèse normale et leucémique [108, 111, 112]. Plus récemment, outre la transcription, on attribue à MLL1 des fonctions régulatrices en lien avec le cycle cellulaire, la sénescence, le dommage à l’ADN et même la signalisation (voir revue [98]).

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