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L'estimation des paramètres cinétiques

2.5 La modélisation cinétique

2.5.2 L'estimation des paramètres cinétiques

Une des difficultés majeures de la modélisation cinétique est l'estimation du meilleur seul jeu de paramètres cinétiques (c.-à-d. , et αi) qui permette de

reproduire les courants expérimentaux dans l'ensemble des conditions expérimentales, c.-à- d. à différents Vm et différentes concentrations de substrats. Ainsi, chaque transition rajoute

4 variables à l'équation. Le modèle proposé à la Figure 2-8 aura donc 24 variables. L'estimation des variables ce modèle cinétique devient alors un problème de minimisation dans un espace à 24 dimensions.

2.5.2.1 Méthode standard d’estimation des paramètres cinétiques

L'approche la plus répandue jusqu'à présent pour la détermination des paramètres cinétiques d'un modèle est la suivante. On commence par caractériser les courants expérimentaux par le courant stationnaire en fonction du potentiel membranaire, la charge transférée lors de sauts de potentiel et les constantes de temps des courants transitoires en fonction du potentiel membranaire (I(Vm), Q(Vm) et τ(Vm) respectivement). Ceci réduit de

façon significative la quantité d'information à reproduire. Il est alors possible de tenter de trouver les paramètres appropriés par essais et erreurs réfléchis (educated trials-and-errors). Bien que ce modus operandi a été utilisé par de nombreux groupes au cours des 20 dernières années (82, 84, 98-101), la qualité des modèles produits demeure mitigée et pour chacun de ces modèles la possibilité qu’un meilleur jeu de paramètres puisse exister demeure.

2.5.2.2 Approche du lissage direct des courbes expérimentales par recuit simulé Dans le cadre de ce travail, nous avons développé une nouvelle façon d'estimer les paramètres d'un modèle cinétique (83). Cette technique est en fait un algorithme

informatique automatisé, basé sur le recuit simulé (102), qui tire parti de la puissance de calcul des grappes de calcul pour déterminer les paramètres cinétiques optimaux permettant de reproduire directement les courants expérimentaux.

Le premier changement se situe donc au niveau des données à reproduire. Notre approche implique tout simplement de tenter de reproduire les courants expérimentaux eux- mêmes, et non pas une caractérisation de ceux-ci. Cette approche est conceptuellement simple, ne nécessite donc pas d’hypothèse a priori de la part de l’utilisateur, et conserve par définition l’entièreté de l’information contenue dans les courants expérimentaux. Ainsi, les courants expérimentaux (I(t)) sont recueillis sous différentes conditions. Par exemple, dans notre cas les sauts de potentiel membranaire ont été imposés suivant la technique du voltage imposé à deux électrodes en faisant varier les concentrations des substrats dans la solution extracellulaire.

Le deuxième changement se situe au niveau de la technique d’optimisation des paramètres. Le recuit simulé (102) est en fait une extension logique de l’algorithme de Metropolis (103), qui lui-même est une extension de la méthode Monte-Carlo. Je pense donc que la manière la plus simple d’expliquer le recuit simulé tel qu’appliqué à notre système est en commençant par la base, c.-à-d. la méthode Monte-Carlo, puis en ajoutant successivement la complexité associée à l’algorithme Metropolis puis au recuit simulé.

Ainsi, le modèle cinétique tel que présenté à la figure Figure 2-8 implique 6 transitions, qui dépendent chacune de 4 paramètres cinétiques. À cela on rajoute un paramètre représentant le nombre de transporteurs à la membrane. Donc, suivant l’algorithme de Monte-Carlo, à chaque étape un de ces 25 paramètres sera choisi et modifié aléatoirement. Les nouveaux courants théoriques résultant de ce nouveau jeu de paramètres seront comparés aux courants expérimentaux que l’on tente de reproduire. L’erreur calculée, selon la méthode des moindres carrés, devient donc notre « fonction objectif » (cost function). Si l’erreur calculée a été réduite par rapport au jeu de paramètres précèdent, le nouveau jeu de paramètre sera accepté. Si l’erreur calculée a été augmentée par rapport

au jeu de paramètres précèdent, le nouveau jeu de paramètre sera refusé. Le problème avec la méthode Monte-Carlo est qu’elle permet de trouver le minimum local en fonction du jeu de paramètre initial, mais a une très faible probabilité d’explorer d’autres minimums locaux.

Afin de remédier à cette lacune, l’algorithme introduit un terme analogue au facteur de Boltzmann à la fois au niveau de sa forme et de sa signification : ⁄ , où ΔE est la différence entre l’énergie du nouveau jeu de paramètres moins l’énergie de l’ancien jeu de paramètre, et T est la « température » du système. Dans notre cas, cette température est en fait relié à la qualité de notre modèle, c.-à-d. dire l’erreur calculée, et n’a donc pas d’unités. Par contre, prendre en compte que l’algorithme que Metropolis a initialement été conçu pour simuler les conditions à l’équilibre d’un groupe d’atome à une « vraie » température T donnée permet de comprendre le sens conceptuel de cette variable. Ce nouveau facteur est donc pris en compte lorsque vient le temps de choisir de garder ou de rejeter un nouveau jeu de paramètres : si l’erreur calculée a été réduite par rapport au jeu de paramètres précèdent, le nouveau jeu de paramètre sera accepté. Par contre, si l’erreur calculée a été augmentée par rapport au jeu de paramètres précèdent, le nouveau jeu de paramètre ne sera pas automatiquement refusé : il aura une probabilité ⁄ d’être accepté. Ceci est illustré à

la Figure 2-9.A. Ainsi, l’algorithme de Metropolis est un outil efficace pour explorer les différents minimums locaux et permet de générer, moyennant un temps de simulation suffisamment long, la population des configurations d’un système donné à une température donnée (102). Ceci est évidemment intéressant quand le but est d’étudier la thermodynamique d’un groupe d’atome, mais ne permet pas d’identifier le minimum global, c.-à-d. le jeu de paramètres cinétiques optimal dans notre cas.

L’idée du recuit simulé est donc d’abaisser progressivement la température de l’algorithme de Metropolis pour ainsi « congeler » le système dans un état qui se veut le minimum global (102). Ainsi, lors du recuit simulé la température initiale est élevée. Les différents jeux de paramètres possibles sont explorés suivant l’algorithme de Metropolis,

jusqu’à ce que le système atteigne l’équilibre thermique. Dans notre cas, l’équilibre thermique est atteint lorsqu’il y a autant de nouveaux jeux de paramètres acceptés qui diminuent l’erreur que de nouveaux jeux acceptés qui augmentent l’erreur (83). La température T est alors diminuée, et le système est équilibré jusqu’à atteindre un nouvel équilibre thermique. L’évolution de la température est illustrée à la Figure 2-9.B. Cette procédure peut donc être répétée jusqu’à la convergence du système dans ce qui se veut le minimum global.

Figure 2-9 Recuit simulé

A. L’algorithme de Metropolis. B. Évolution typique de la température en fonction du nombre d’essais. C. Évolution typique de l’erreur en fonction du nombre d’essais.