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L’ ELEVAGE DU L ANGUEDOC -R OUSSILLON

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Le dispositif de recherche

4.2. L’ ELEVAGE DU L ANGUEDOC -R OUSSILLON

Contrairement à d’autres régions, le Languedoc-Roussillon est marquée par une diversité de productions agricoles. Sur les exploitations « moyennes et grandes », si la viticulture arrive en tête des OTEX présentes (58% des exploitations régionales), elle est suivie par le trio maraichage / arboriculture / autres herbivores (en majorité des ovins et des caprins), chacun représentant 7% des exploitations (Figure 4-1). Les petites exploitations sont nombreuses : 47%, au lieu des 36% au niveau national (Agreste Languedoc-Roussillon 2013).

Les exploitations d’élevage ovin sont surtout localisées sur le pourtour régional : contreforts sud du Massif Central, au sens large, de la Montagne Noire à l’ouest des monts d’Ardèche, Pyrénées – Orientales (Figure 4-1). Le département de la Lozère domine, avec le plus grands nombres d’exploitations d’élevage et la moitié du cheptel ovin (Agreste Languedoc-Roussillon, 2007). La taille moyenne des exploitations et leur degré de spécialisation varient selon les petits territoires régionaux. Par exemple, les Cévennes méridionales sont plutôt caractérisées par des exploitations d’élevage de petite taille (par rapport à la moyenne nationale) et diversifiées

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(Aubron, 2011 et 2014). Les orientations technico-économique dominantes varient aussi selon les territoires. Ainsi les exploitations d’élevage de grandes tailles dominent quasi exclusivement sur les Causses, au contraire des Cévennes, qui présentent une dominante d’exploitations d’élevage, maillée d’autres types de productions (châtaignes…) Agreste Languedoc-Roussillon 2013b.

Figure 4-1 : Orientations technico-économiques par commune, des exploitations du Languedoc-Roussillon

En 2009, les 4000 exploitations d’élevage (23% des exploitations professionnelles) de la région valorisaient 56% de la SAU (LRE et OIER-SUAMME, 2010). Elles exploitent quasiment toutes des surfaces de parcours, landes et bois, dites « surfaces non productives » et non comptés dans la SAU. Cet état de fait donne à l’élevage une emprise sur le territoire incommensurable. De ce fait, une des caractéristiques essentielles de la production ovine allaitante de cette région est son importance pour le développement des territoires tant du point de vue économique et social, que du point de vue environnemental (maintien de paysages ouverts, préservation de la biodiversité commune et patrimoniale) (Lasseur et Garde, 2005 ; Lasseur et al., 2010).

La région Languedoc-Roussillon regroupe des milieux pédoclimatiques très variés. Elle présente une grande amplitude d’altitude, une diversité de substrats géologiques, un climat qui va de méditerranéen à montagnard. Néanmoins, tous ces territoires relèvent de milieux difficiles (sécheresse estivale et excès de pluie automnale pour certains, rudesse de l’hiver et incertitude du printemps pour d’autres) (Hanus, 1984, Aubron, 2011 et 2014). Les ressources pastorales y sont variées, souvent rares et aléatoires. De ce fait, les systèmes d’élevage utilisent de grandes surfaces pour le pâturage de troupeaux, gardés par un berger. Tous pratiquent la transhumance, soit de proximité, soit plus lointaine, pour suivre la pousse de végétation (Brisebarre, 1979 ; Maison de la Transhumance, 2002 ; Laffont, 2006). Ce caractère pastoral des élevages de la région conduit à une production de types d’agneaux, à la fois spécifique et variée (Tchakérian et al., 2008 ; Aubron et al., 2014).

Source: RGA 2010 in Agreste, 2013

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L’élevage ovin allaitant du Languedoc-Roussillon, comme celui de l’ensemble des régions méditerranéennes françaises, a un caractère extensif Tchakérian et al., (2008). Les brebis rustiques (Blanc du Massif Central, Mérinos…), sont moins bien conformées, et de poids inférieur aux brebis des régions du nord de la France (Prache et al., 2013a). En lien avec le milieu à forte contrainte, les éleveurs de ces régions méditerranéennes privilégient la production d’un agneau par an et par brebis, avec peu ou pas d’accélération des mises-bas, une prolificité limitée et une mise à la reproduction des agnelles à 18 mois (Tchakérian et al., 2008). L’anoestrus saisonnier peu marqué, permet une reproduction naturelle à toutes les périodes de l’année et une production d’agneaux également toute l’année. Néanmoins, la pratique assez généralisée de la transhumance entraîne une raréfaction des mises-bas à partir du 15 juin, et un creux des ventes d’agneaux à l’automne.

La diversité des agneaux est marquée (Tchakérian et al., 2008 ; Nozières et al., 2012). En effet, les agneaux ont, au moment de la première mise en marché, des caractéristiques variées, selon leur âge à l’abattage, selon leur sexe ou leur type génétique (diversité des races rustiques utilisées, donnant des agneaux de type génétique pur ou issu de croisement avec une race bouchère). On retrouve les catégories allant de l’agneau lourd à un agneau léger, souvent vendu maigre pour les bergeries d’engraissement du Rayon de Roquefort (Bonnet, 2013), parfois fini et partant à l’exportation vers l’Espagne, voir commercialisé comme agnelet. Néanmoins, en moyenne, les agneaux « lourds finis » produits dans ces régions pèsent plutôt autour de 15-16 kg de carcasse, (Tchakérian et al., 2008). Ils sont donc plus légers que la moyenne nationale et moins bien conformé que l’agneau lourd de race herbagère (Prache et al., 2013a).

Si le cheptel du Languedoc-Roussillon a finalement assez bien résisté sur la période 1990-2010 (Encadré 1-2), la diminution observée entre 2009 et 2013 est de même ordre de grandeur que la dépécoration nationale, c’est-à-dire de l’ordre de 5% (GEB, 2010 et GEB, 2014 ; Encadré 4-1). Il représente aujourd’hui environ 5% du cheptel national (Encadrés 1-2 et 4-1).

Les systèmes d’élevage se rapportent au « système pastoral français » décrit par Topliff et al., 2009 (cf. aussi Encadré 4-1). Ils présentent des coûts de production ramenés à la brebis relativement peu élevés par rapport à d’autres systèmes français (Figure 4-2 ; Topliff et al., 2009). En revanche, exprimés par kilogramme produit, ces coûts de production sont parmi les plus élevés (Figure 1-5). Un des enjeux de ces élevages pastoraux, est de limiter les coûts, tout en maintenant leur niveau de production dans la mesure où les conditions de milieu le permettent.

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Figure 4-2 : Résultats financiers de différents types d’exploitations ovines en 2007

Si l’élevage ovin allaitant du Languedoc-Roussillon présente des caractéristiques similaires à celles de l’élevage des autres régions françaises (dépendance aux intrants…), il présente aussi des faiblesses plus marquées (niveau de production plus faible…) et des atouts spécifiques (importance pour la mise en valeur du territoire, diversité des fonctionnements d’élevage, diversité des produits). Cette diversité de produits est, pour Tchakérian et al., 2008, une réponse à une pluralité de la demande. Pour ces auteurs, elle illustre en outre la difficulté qu’ont les élevages à s’en tenir à un type de production trop rigidement normé et homogène. Elle témoigne surtout de l’existence de marges de manœuvre dans le type de productions à mettre sur le marché et dans les possibilités de différencier les circuits de commercialisation.

L’élevage ovin allaitant possède des fragilités marquées, mais également des atouts essentiels pour son maintien et le développement des territoires dans lesquels il s’insère, et en particulier une diversité de situation et de produits. Ceci en fait un cas d’étude pertinent pour traiter de la question du rôle de la commercialisation pour la flexibilité des systèmes d’élevage.

L’organisation de la filière viande ovine de cette région offre également des caractères propres que nous détaillons dans la section suivante.

Source: Institut de l’Elevage, AHDB Meat Services, Teagasc in Topliff et al., 2009

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Encadré 4-1 : L’élevage ovin allaitant français, une diversité de situations fragiles Entre 2009 et 2013, le cheptel national continue de s’éroder, 10 000 exploitations disparaissent

En 2010 (source RGA, in GEB, 2013) la taille moyenne des troupeaux français est légèrement supérieure à 80 brebis. Seules 41% des exploitations possèdent plus de 50 brebis, ce qui montre que la présence de petites troupes ovines reste une des caractéristiques du cheptel français. 59% des éleveurs ovins ont plus de 50 ans. L’installation de jeunes constitue un enjeu majeur pour la filière.

Sur la période 1989-2010, le nombre d’exploitation détenant des ovins diminue de 66% (GEB, 2013). La taille du troupeau moyen double sur cette période, d’environ 50 mères à plus de 100. Le nombre des petites troupes régresse encore, mais demeure important, puisqu’en 2007, 48% des exploitations étaient qualifiées de « très petits élevages », avec, en moyenne 13 brebis par structure (cf. tableau).

Une diversité de façon de produire de l’agneau, dans des élevages assez diversifiés

Deux éléments sont caractéristiques de la production ovine française. D’une part, la spécialisation des élevages est finalement relativement faible, encore aujourd’hui, puisqu’en 2007, seulement 18% des élevages sont considérés comme spécialisés (cf. tableau en infra). D’autre part, la production brute par unité de main d’œuvre reste la plus faible des productions agricoles. Et même si les charges restent relativement faibles, comparées aux autres productions, elles n’ont cessé d’augmenter, en particulier les charges opérationnelles (alimentation), en lien avec l’effort d’intensification (Rieutort, 1995). Tchakérian et al. (2010) notent le très grand éventail de niveau de consommation de concentrés par kilogramme d’agneaux produits. Ce niveau varie selon des critères de localisation, de structure (présence d’autres productions), de système technique (type génétique, système fourrager, nombre de périodes de reproduction et répartition dans l’année) et de types d’agneaux produits (lourds, d’herbe et de bergerie).

Répartition du cheptel dans les exploitations détenant des ovins en 2007

Le faible revenu des éleveurs ovins allaitants

Malgré le rééquilibrage des aides directes en 2009 (Chapitre 1), et le fait que ces exploitations, souvent en zone défavorisée, touchent beaucoup d’aides du second pilier de la PAC (Chatellier et al., 2010), le revenu des exploitations ovines (et caprines), lait et viande confondus, est un des plus bas du monde agricole français. En 2012, un actif ovin touche en moyenne 16 500 euros/an/UTA (RCAI), alors que la même

Cheptel ovin national

Au 1er janvier 2009 2010 2011 2012 2013

Cheptel reproducteur (milliers de têtes) 5 888 5 769 6 087 5 835 5 714 dont brebis allaitantes et agnelles saillies nc 4 146 4 440 4 239 4 134 dont brebis laitières et agnelles saillies nc 1623 1647 1596 1580

Source: Eurostat in GEB, 2010 ; GEB, 2011 ; GEB 2012 ; GEB, 2013 ; GEB, 2014

Exploitations ovines françaises

Au 1er janvier 2009 2010 2011 2012 2013

Nombre d’exploitations ayant des ovins nc 56 505 52 726 50 328 46 000 dont celles avec des brebis allaitantes nc 50 451 46 905 44 508 40 333

Source: SSP (enquêtes cheptel et RGA) in GEB, 2010 ; GEB, 2011 ; GEB 2012 ; GEB, 2013 ; GEB, 2014

2007 Nombre d’exploitations

détenant des ovins Soit Nombre moyen de brebis allaitantes

Très petits élevages 28 600 48% 13

Elevages à dominante NON ovine 14 500 24% 30

Elevages mixtes 5 700 10% 196

Elevages ovins spécialisés 10 500 18% 243

Total 59 200 100% 75

Source: GEB, Institut de l’Elevage

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année, le RCAI moyen est de 38 300 euros (MAAF, 2013). Maintenir le revenu des éleveurs ovins allaitants constitue aussi un enjeu important pour la filière (Simon, 2007).

Des brebis allaitantes sur l’ensemble du territoire français

Prache et al., 2013a notent la grande diversité de races et de systèmes de production qui caractérisent toujours la production ovine allaitante. Elle est liée à la localisation de cet élevage sur l’ensemble du territoire national (cf. graphe en infra) et surtout dans des zones aux contraintes pédoclimatiques fortes.

L’Institut de l’Elevage (2008) distingue 6 types de systèmes spécialisés : « avec cultures », « herbe intensif de l’Ouest », « herbe Centre et Est », « pastoral Causses et Sud-Est », « montagnes humides » et « hautes montagnes », et 3 types de systèmes mixtes : « ovins/cultures », « ovins/bovins viande », « ovins/bovins lait ». Tous ces types d’exploitations exploitent des parcours, mais seuls les systèmes « pastoral Causses et Sud-Est » et « hautes montagnes » présentent une organisation spécifique (en particulier dans les choix de périodes de reproduction) liée à l’importance des parcours dans leur système d’alimentation (Prache et al., 2013a). Ces 9 types de systèmes se distinguent certes par la taille et le degré de spécialisation, mais aussi par les modalités d’organisation de la reproduction (en saison vs en contresaison ; une mise-bas/an/brebis vs des mises-bas accélérées (3 agnelages en 2 ans) ; des mises-bas plus ou moins étalées ; plusieurs périodes de mises-bas par an), le système fourrager (types de ressources ; niveau de chargement ; degré d’autonomie fourragère…) (Jousseins et al., 2012). La plupart des troupeaux sont naisseurs-engraisseurs, mais certaines régions, comme le Rayon de Roquefort, centralisent les structures d’engraissement (Bonnet, 2013).

Pour les espaces en déprise, l’élevage ovin représente souvent une des dernières activités humaines marquant le territoire. Son maintien est perçu comme d’une grande importance sociale et environnementale, puisqu’il joue un rôle essentiel pour l’ouverture des paysages et la préservation de la biodiversité (Lasseur, 2005 ; Tchakérian et al., 2008 ; Lasseur et al., 2010). Les atouts et faiblesses de cette production sont multiples : faible immobilisation des capitaux, richesse du patrimoine génétique, mais aussi importante charge de travail, sensibilité au risque de prédation, au risque sanitaire, difficultés d’accès au foncier… (Simon, 2007 ; Bailly et Fortassin, 2008 ; Porry et al., 2008 ). La diversité des produits issus de l’élevage ovin allaitant français et les caractéristiques du marché national de la viande ovine ont fait l’objet d’un développement particulier dans le chapitre 1.

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