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CHAPITRE 2: LES CONDITIONS FAVORISANT LA PARTICIPATION CITOYENNE À

2.2. Les approches théoriques

2.2.3. L'approche institutionnelle

L'approche institutionnelle réfère à la culture politique présente dans les entités de gouvernance au sein desquelles évoluent les citoyens. L'étude de cette approche repose entre autres sur l'ouvrage de Berry, Portney et Thompson (1993) qui démontre que chaque ville a sa culture politique spécifique qui influence la participation. Le renouvellement de la démocratie locale repose sur la présence d'un environnement institutionnel propice à créer une forme de démocratie participative (Fung 2004). À ce sujet, Van Eijk (2014) fait la démonstration que les possibilités participatives varient entre les territoires et que cette différenciation est intimement liée à la propension à l’innovation participative des administrations locales9. D’autres auteurs soutiennent que l’adoption croissante de mécanismes participatifs par les instances politiques repose sur une recherche de légitimité et d’acceptabilité de leurs décisions : conséquemment, les acteurs institutionnels jouent un rôle central au sein de cette approche (Vivien Lowndes, Pratchett et Stoker 2001). L’approche institutionnelle permet une étude approfondie de la manière dont les pouvoirs publics parviennent à intégrer les mécanismes participatifs dans leur gouvernance. Notre recherche vise à cerner comment les retombées des réformes institutionnelles amènent les acteurs politiques à adopter des dispositifs participatifs originaux et à utiliser les nouveaux espaces politiques. Il faut saisir les dynamiques politiques et démocratiques locales « à travers l’usage de la démocratie par les autorités politiques, usage incarné par l’apparition de dispositifs participatifs» (Gourgues 2009a, 5). Tel que le soutient Held (2006, 234) : « democratic theory needs to think not just about the contexts in which people form views and test their opinions, but also about the kinds of mechanisms that are in operation in democracies ». Cette approche conduit à l’étude du lien entre les méthodes participatives et les

9 Le terme « administration locale » regroupe plusieurs catégories d’acteurs soit les élu-e-s, les gestionnaires, les

systèmes d’action publique. Les champs de la science politique et de l'administration publique se sont peu penchés d’une part, sur les stratégies décisionnelles des responsables locaux à concevoir des possibilités institutionnelles de participation et, d’autre part, sur les objectifs qui sous-tendent la mise en oeuvre des dispositifs participatifs (Tavares et Rodrigues 2013). Puisque la participation citoyenne est définie comme « l'ensemble des actions initiées par les autorités qui permettent aux citoyens d’exprimer leur opinion et d’influencer la décision publique » (Breux et al. 2004), il faut plutôt s'intéresser aux éléments propres aux contextes institutionnels infra-locaux et aux structures au sein desquelles la participation prend place. Les contextes institutionnels comportent des éléments d’analyse tels que les opportunités participatives, le profil et les pratiques politiques de l'administration infra-locale. Ces opportunités participatives sont illustrées par les modalités organisationnelles des forums participatifs implantés par les gouvernements de quartier. Ces opportunités font écho au concept de design participatif, soit les dispositifs et modalités participatifs qui offrent aux citoyens un rôle formel dans la prise de décision publique (G. Smith 2009). Ces opportunités sont parfois accompagnées d’innovation participative de la part des autorités infra-locales. L’innovation participative est illustrée par une volonté des élus d’expérimenter et de mettre en place des instances originales (Van Eijk 2014). L’innovation participative doit être comprise comme un risque - majoritairement calculé - des administrations locales à mettre en oeuvre des mécanismes inédits et qui sont complémentaires à leur gouvernance10. L’innovation participative met en lumière l’existence de différences entre les administrations quant aux attentes et objectifs de la participation, ainsi que dans la forme des instruments utilisés pour promouvoir la participation citoyenne.

Le profil politique est caractérisé, à titre d’exemple, par le spectre politique des équipes au pouvoir : s’agit-il de coalitions, d’une diversité de partis ou d’un parti unique? Il s’agit aussi du statut légal du gouvernement local11. Le profil politique des administrations infra-locales repose fortement sur les caractéristiques des gouvernements de quartier qui sont issues du type de décentralisation adopté, de l’autonomie et du pouvoir décisionnel accordés aux entités infra- locales. Le profil politique détermine les dynamiques institutionnelles qui influencent l’ouverture à la démocratie participative (Burby 2003; Gourgues 2009a).

10 À ce sujet, Smith (2005) a élaboré un cadre analytique des innovations participatives institutionnelles. 11 Nous pensons notamment au statut de "créatures du gouvernement" des municipalités canadiennes.

Les pratiques politiques 12 intègrent les traditions ou les approches participatives des gouvernements locaux. À titre d’exemple, les administrations locales peuvent avoir recours à la participation citoyenne afin de minimiser les risques d’opposition (Burby 2003). Dans la même veine, la mise en place de dispositifs participatifs par les autorités locales peut reposer sur une démarche pragmatique qui vise à contrôler le message véhiculé ou obtenir une légitimité de leurs décisions (Tolbert et Zucker 1983; Abelson et al. 2003; Combe 2010; Van Eijk 2014). Ces facteurs exercent un effet direct sur la visée de l'utilisation de la participation et sur les arguments justifiant le recours aux instruments participatifs (Van Eijk 2014). À la lumière de cette recension des écrits, l'approche institutionnelle renvoie aux facteurs contextuels et aux dynamiques internes des gouvernements de quartier; ce qui nous permet d’étudier les conditions favorisant la participation dans un contexte décentralisé. La section suivante présente de manière plus détaillée certains facteurs significatifs de l’approche institutionnelle en contexte décentralisé. Ces facteurs sont la longévité politique, les traditions participatives, le type de gouvernance et le rôle des élus. Ces derniers sont sujets à débat quant à leur influence sur la participation citoyenne et les hypothèses de recherche présentées s’appuient sur ces éléments de débat.

2.3. Les traditions participatives, la longévité politique, le type de