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L’APPORT DU TSSL

Dans le document Enfants victimes et témoins (Page 141-144)

ENFANTS SOLDATS : VICTIMES,

I- L’APPORT DU TSSL

Le fait de procéder à la conscription ou à l’enrôlement d’enfants de moins de 15 ans dans les forces armées ou des groupes armés ou de les faire participer activement à des hostilités constitue un crime relevant de la compétence du TSSL (Statut, art. 4(c)).

Le Statut exclut également la responsabilité pénale des personnes âgées de moins de 15 ans au moment de la commission des crimes (art. 7(1)). Il prévoit également l’application de peines spéciales pour les personnes de moins de 18 ans qui seraient reconnues coupables de crimes (art. 7(2)). Il est regrettable que cette limite de la responsabilité pénale n’ait pas été placée à 18 ans, mais la compétence du TSSL à l’égard des 15-18 ans était exigée par le gouvernement Sierra Léonais. Fort heureusement, l’article 7 est demeuré lettre morte et aucune poursuite n’a été engagée à l’encontre de moins de 18 ans. L’article 1er du Statut prévoit en effet la responsabilité du TSSL pour poursuivre les seuls « principaux responsables » des

crimes commis en Sierra Leone : il était fort improbable que de tels « principaux responsables » soient trouvés dans la tranche d’âge des 15-18 ans.

Comme indiqué précédemment, la Chambre d’appel du TSSL a reconnu la valeur coutumière de l’interdiction de recruter les enfants de moins de 15 ans dans les forces armées ou des groupes armés et de l’interdiction de leur participation aux hostilités. Dans la même décision du 31 mai 2004 dans l’affaire CDF, la Chambre d’appel du TSSL a également reconnu la valeur coutumière de la responsabilité pénale individuelle à raison de ces actes. Par son premier jugement rendu le 20 juin 2007 dans l’affaire Armed Forces Revolutionnary Council (Brima et autres) (ci- après « l’affaire AFRC »), la Chambre de première instance du TSSL a rendu les premières condamnations à raison du recrutement des enfants soldats. Le jugement clarifie également la notion de « participation directe aux hostilités ».

Plusieurs enfants ont également été entendus devant le TSSL en qualité de témoins. Le Règlement de procédure et de preuve (ci-après « RPP ») du TSSL admet la recevabilité du témoignage d’un enfant sans limite d’âge, dès lors que la Chambre considère (i) que l’enfant est suffisamment mûr pour rapporter les faits, (ii) qu’il comprend l’obligation de dire la vérité et (iii) qu’il ne subit pas d’influence illicite (Règle 90(C)). Des mesures spéciales ont été appliquées afin de faciliter la comparution des enfants témoins et de limiter leur victimisation secondaire due au stress. Dans une décision du 8 juin 2004 rendue dans l’affaire CDF, la Chambre de première instance ordonne la comparution des enfants témoins au moyen d’un circuit fermé de télévision, avec distorsion d’images afin de cacher leur identité, et le maintien de la confidentialité de leur identité à l’égard du public. La Chambre autorise également la présence d’un psychologue accompagnateur aux côtés de l’enfant lors de son témoignage.

Ces évolutions jurisprudentielles constituent une première en droit international et marquent une profonde évolution de la situation des enfants victimes et témoins.

II- L’APPORT DE LA CPI

Le fait de procéder à la conscription ou à l’enrôlement d’enfants de moins de 15 ans dans les forces armées nationales ou de les faire participer activement à des hostilités constitue un crime de guerre en vertu des articles 8(2) (b)(xxvi), pour les conflits armés internationaux, et 8(2)(e)(vii) du Statut pour les conflits armés non internationaux. Le Statut de la CPI exclut également la compétence de la Cour à l’égard des personnes qui étaient âgées de moins de 18 ans au moment de la commission prétendue d’un crime (art. 26).

Dans sa décision du 29 janvier 2007 sur la confirmation des charges dans l’affaire Thomas Lubanga Dyilo (ci-après « l’affaire Lubanga »), la Chambre préliminaire a précisé la différence entre « enrôlement » et « recrutement » et la notion de « participation directe aux hostilités », étendu la notion de « forces armées nationales » aux groupes armés non étatiques et identifié la connaissance de l’âge de l’enfant comme élément moral de l’infraction.

Le Statut de la Cour prévoit également le droit des victimes de crimes relevant de la compétence de la Cour, y compris les enfants quel que soit leur âge, de présenter leurs vues et préoccupations et de participer à la procédure (art. 68(3)) et de demander réparation de leur préjudice (art. 75). Dans le cas d’un enfant, le RPP de la CPI prévoit aussi la possibilité de faire déposer la demande de participation à la procédure par un représentant (Règle 89(3)). La Chambre préliminaire a jugé dans une décision du 17 janvier 2006 dans l’affaire Lubanga qu’un tel représentant pouvait être une personne physique (parent, etc.) ou morale (organisation non gouvernementale, association, etc). Par une autre décision du 20 octobre 2006 dans l’affaire Lubanga, la Chambre préliminaire a également admis les souffrances physiques et morales consécutives à l’enrôlement en qualité d’enfant soldat comme préjudice indemnisable devant la Cour.

En ce qui concerne la comparution des enfants témoins, le Statut de la CPI prévoit de faire une exception à la publicité des débats lorsque cela est justifié par la nécessité de protéger les enfants victimes ou témoins (art. 68(2)). Diverses mesures d’assistance et d’accompagnement des enfants témoins sont également prévues dans le RPP : mise à disposition d’un accompagnateur pour assister l’enfant pendant sa comparution (Règle 17(3)), assistance d’un psychologue ou d’un parent (Règle 88(2)), témoignage par voie d’enregistrement audio ou vidéo (Règle 112(4)), etc. Dans sa décision du 29 janvier 2007 sur la confirmation des charges dans l’affaire Lubanga, la Chambre préliminaire a décidé d’appliquer au témoignage d’un enfant les mêmes règles de corroboration de la preuve que celles applicables au témoignage d’un adulte.

La CPI profite à n’en pas douter ici de l’expérience pionnière du TSSL pour promouvoir encore davantage la protection des enfants victimes ou témoins.

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