• Aucun résultat trouvé

ÉVOLUTION HISTORIQUE

Dans le document Enfants victimes et témoins (Page 65-68)

Jetons d‟abord un regard sur l‟évolution historique.

Au début du XIXe siècle, on convient que l‟enfant était pris en charge essentiellement par la famille qui était l‟institution servant de lieu de socialisation, d‟éducation et de consommation. Avec l‟industrialisation du début de ce siècle et

1

la migration vers les villes, les responsabilités de la famille vont se transformer et un nouveau mode de vie familiale verra le jour2.

Par la même occasion, sous l‟influence des groupes de pression, l‟État se fera plus présent, tant dans son intervention au sein de la famille qu‟à la mise en place de ressources plus adéquates pour assurer la protection des enfants.

Dès 1889, à Chicago une cour de justice pour mineurs3 voit le jour et

décriminalise la conduite délinquante des mineurs. Elle oriente son action sur les besoins spécifiques du mineur et non en fonction de l‟infraction commise. À cette époque, l‟enfant délinquant est considéré non pas comme responsable de ses actes mais plutôt comme une victime des circonstances et du caractère inadéquat de son milieu. Il doit donc être protégé contre ces facteurs qui lui sont extérieurs4. Cette

approche sera largement répandue tant en Amérique du nord qu‟en Europe et ce, jusqu‟à la fin des années 70.

Il faut se rappeler que dans les années 605 et début des années 706, la Cour

Suprême des États-Unis jugea que les mineurs devaient bénéficier de la protection des règles de procédures et du « due process of law ».

Suite à ces décisions et à l‟avènement des chartes des droits dans les années 707 et les années 808 le modèle de justice pour les mineurs aura droit de cité. Une

redéfinition du traitement judiciaire du mineur délinquant et du mineur en danger s‟imposera. Pour le mineur délinquant, l‟accent ne devra plus porter uniquement sur ses besoins spécifiques mais on devra prendre en considération la nature de son acte délictuel tout en lui assurant les protections procédurales.

La situation du mineur en danger sera appréciée à la lumière des nouvelles données scientifiques et des progrès des sciences du comportement tout en lui garantissant les protections procédurales.

Parallèlement à la modification de l‟approche judiciaire, le droit de l‟enfant se précise. L‟État s‟arroge le droit d‟intervenir au sein de la famille en redéfinissant les droits des parents tout en précisant que ces droits doivent être exercés dans

2 D’AMOURS Oscar, La complémentarité des institutions dans le domaine de la protection, Revue de Droit,

Université de Sherbrooke [1993], vol. 23, numéro 2, pp. 293-296; voir Young c. Young [1993], R.C.S. 3; voir

Motifs de Mme la juge Claire L’Heureux concernant l’évolution de la famille, pp. 33 et ss.

3 TRÉPANIER Jean, Le développement historique de la justice des mineurs, 100 ans de justice juvénile, 5e

Séminaire de l’IDE [1999], Institut universitaire Kurt Bösch, Sion (Suisse), [2000], pp. 21-41

4

D’AMOURS Oscar, Les grands systèmes : modèle de protection, modèle de justice, 100 ans de justice juvénile, 5e Séminaire de l’IDE, [1999], Institut universitaire Kurt Bösch, Sion (Suisse), [2000], pp. 98-100

5 Kent vs United States, 383 US 541, [1966]; in re Gault, 387 US.1, [1967] 6 In re : Winship, 397 US 358, [1970]

7 La Charte de droits et libertés de la personne (Québec), L.R.Q., c. C-12 8

l‟intérêt de l‟enfant9, concept que les tribunaux ont dû définir au hasard des

situations particulières10.

Il fut une époque où les droits de l‟enfant étaient établis en fonction du statut marital de ses père et mère11. Actuellement, il bénéficie de droits qui lui sont

attribués comme personne; il bénéficie d‟une protection de plus en plus grande tant au niveau du droit général que dans l‟application des règles pour les enfants en situation précaire.

Dans des situations particulières, les tribunaux ont restreint l‟absolutisme12 de

la puissance paternelle en utilisant le concept modérateur de Commun Law de l‟intérêt de l‟enfant. Par la suite, la puissance paternelle cède le pas à l‟autorité parentale qui doit être exercée dans l‟intérêt de l‟enfant. De plus, on prévoit qu‟un parent peut être déchu de ce droit pour des motifs graves et dans l‟intérêt de l‟enfant13.

Dans des situations déterminées, si les parents mettent en danger la sécurité ou le développement de leur enfant, les lois sur la protection des enfants trouvent application14.

Ainsi, selon la législation nationale, l‟enfant doit désormais passer du statut d‟objet de droits à celui de sujet de droits qui lui sont personnels15.

9 En 1977, l’Assemblée nationale substitue au concept de la puissance paternelle celui de l’autorité parentale

(projet de loi 65). C’était la fin de la puissance paternelle, laquelle était constituée de droits et aménagée pour répondre aux besoins de son titulaire. (Réf. : ULYSSE, Jacques et MARTIN, Yveline, Prix Charles-Coderre 1984, L’autorité parentale, un droit ou un devoir pour qui ?, Ed. Yvon Blais, pp. 18-19)

Pour sa part, l’autorité parentale est constituée de droits pour permettre aux parents d’assumer leurs obligations. L’autorité parentale devient non pas un droit personnel mais un droit de fonction. En d’autres mots, l’autorité parentale et les droits qui y sont attachés n’ont de valeur qu’en fonction des obligations que les parents assument à l’égard de leur enfant.

10 Stevenson vs Florant, [1925], R.C.S. 532; Dugal c. Lefebvre, [1934], R.C.S. 510; Young c. Young, [1993], 4

R.C.S. 27; Racine c. Woods, [1983], 2 R.C.S. 173; Thomson c. Thomson, [1994], 3 R.C.S. 551; Benson c. Director of Child Welfare (T.N.), [1982], 2 R.C.S. 716; B. (R.) c. Children’s Aid Society of Metropolitan Toronto, [1995], 1 R.C.S. 315; Francis c. Baker, [1999], 3 R.C.S. 250

11 Le Code civil du Bas-Canada, rédigé en 1866, est inspiré de la Coutume de Paris et du Code Napoléon de 1804.

Jusque dans les années 70, il ne subira pas de changements significatifs, notamment en regard du droit des enfants et des règles relatives à la puissance paternelle. Ainsi, il accordait aux enfants des droits en fonction du statut marital des parents. (L.R.Q. c. C-12)

12 Stevenson vs Florant, [1925], R.C.S. 532; Stevenson vs Florant, [1926], A.C. (Privy Council), pp. 21; DugaL vs

Lefebvre, [1934], R.C.S. 510

13

Par le projet de loi 65 en 1977, le Québec prévoit au Code civil la possibilité pour un parent d’être déchu de son autorité parentale à l’égard de son enfant pour des motifs graves et dans l’intérêt de l’enfant.

14 Loi sur la protection de la jeunesse, L.R.Q., c. P-34.1; voir les articles 38, 38.1 et 38.2

15 L.R.Q. c. P-34.1; voir chapitre II, Principes généraux et droits des enfants notamment l’article 3; voir aussi Code

civil du Québec, articles 32, 33, 34; voir aussi CLAPROOD, Sonia, DUTILLY, Carine et al: Protection de l’enfant : évolution, Prix Charles-Coderre pour l’avancement du droit social, [1998], éd. Yvon Blais Inc. [1999]

Dans le document Enfants victimes et témoins (Page 65-68)