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L’AN I DU CENTRE NATIONAL DE LA MUSIQUE

Dans le document AVIS SÉNAT N° 145 (Page 36-40)

Il n’appartient pas à votre Rapporteure pour avis de se prononcer sur ce débat complexe qui agite l’industrie musicale, sauf pour rappeler les deux objectifs essentiels du système de répartition des droits :

- faire vivre la diversité culturelle. Cette dernière est à la fois menacée par la concentration des écoutes sur les plateformes, mais également mieux valorisée par la diffusion mondiale des productions nationales. Les artistes d’expression francophone peuvent aujourd’hui être écoutés très simplement dans le monde entier. Un système qui permettrait de limiter la concentration des revenus sur quelques artistes paraît en première analyse de nature à favoriser une répartition plus équitable des revenus ;

- assurer un niveau correct de rémunération des artistes, dans un marché qui a failli disparaitre. Compte tenu de la place majeure prise par les plateformes de streaming, les modalités de rémunération décidées entre acteurs privés doivent être a minima connues du Parlement.

Premier constat : la révolution numérique est à peine surmontée.

La musique est le premier secteur parmi les industries culturelles à avoir été frappé par la crise due à l’arrivée d’innovations numériques révolutionnant la consommation de produits culturels. Le chiffre d’affaires de la musique enregistrée a été divisé par trois entre 2002 et 2015.

Elle est cependant parvenue à renouveler son modèle économique et ses modes de production pour renouer avec la croissance (voir supra).

De son côté, et à la différence du marché du phonogramme, le spectacle vivant connaît depuis plusieurs années un dynamisme particulièrement fort.

À l’image de l’édition musicale, il connaît par ailleurs un bouleversement de son modèle économique, avec la généralisation des

« contrats à 360° » ou contrats à droits multiples, qui suppriment les intermédiaires entre le producteur et l’artiste.

Second constat : un secteur trop éclaté qui doit faire face à des enjeux considérables.

La révolution numérique a remis en question un équilibre qui reposait sur la suprématie de la musique enregistrée.

Les différents acteurs n’ont jusqu’à présent pas su construire une culture commune et présenter un front uni pour défendre des intérêts communs et valoriser le secteur.

Or, les enjeux du futur appellent à une unité de la profession dans son ensemble, et notamment pour :

• la défense de la conception européenne du droit d’auteur, régulièrement attaquée pour lui substituer la notion anglo-saxonne de copyright ;

• la recherche d’une répartition plus équitable de la valeur entre l’ensemble des acteurs de la filière musicale face à la position désormais incontournable prise par les plateformes de musique par abonnement ;

• l’impact sur la diversité culturelle des algorithmes mis en œuvre par les services de streaming.

La loi du 30 octobre 2019 institue un établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC) placé sous la tutelle du ministère de la culture, qui rassemble cinq structures existantes.

En plus de disposer d’un budget de 40 millions d’euros, le Centre national de la musique gèrera les crédits d’impôt pour la production d’œuvres phonographiques (CIPP) et pour les dépenses de production de spectacles vivants (CIV).

Au moment des débats au Sénat le 9 juillet 2019, le Rapporteur Jean-Raymond Hugonet avait soulevé deux questions non résolues.

La première est celle de la gouvernance de l’établissement :

« Or, monsieur le ministre, il y a dans ce texte deux silences et, comme souvent avec les silences, ils concentrent toute l’attention. Un premier silence concerne la gouvernance du nouvel établissement. La composition du conseil d’administration d’un ÉPIC relève du pouvoir réglementaire. Le Parlement n’a donc pas véritablement la main sur les modalités de sa gouvernance. Or nous avons précisément constaté que ces questions de gouvernance font partie de celles qui agitent particulièrement la filière musicale, pour ne pas dire qu’elles la divisent ! »

À ce jour, le décret prévu à l’article 2 de la loi, qui doit fixer la composition du Conseil d’administration et du conseil professionnel, n’est pas encore paru mais suscite, comme votre Rapporteure pour avis a pu le constater lors de ses auditions, des inquiétudes très réelles.

La seconde est celle des moyens :

« La question des moyens du CNM est en effet au cœur de toutes les préoccupations. En l’état actuel, le CNM devrait percevoir la taxe fiscale sur les spectacles de variétés, des subventions de l’État et des fonds accordés volontairement par les organismes de gestion collective. Il devrait également gérer deux crédits d’impôt, soit un budget total de 78 millions d’euros. Le chiffre de 20 millions d’euros est avancé et étayé dans le rapport Bois-Cariou : tel serait le complément nécessaire pour que le CNM ne soit pas qu’un simple regroupement, mais s’impose bien comme un acteur majeur et structurant pour la filière. »

Le présent projet de loi de finances attribue au CNM 7,5 millions d’euros de crédits supplémentaires. Ils viennent en complément des 7 millions d’euros encore affectés aux organismes qui ont vocation à rejoindre le CNM.

Si ce chiffre est inférieur à l’objectif cible de 20 millions d’euros, il traduit cependant, dans un contexte budgétaire contraint, la volonté de l’État de marquer son engagement. Il devrait donc constituer selon votre Rapporteure pour avis un premier pas suffisant pour inciter les autres financeurs à « jouer le jeu » du CNM, mais sous réserve qu’il soit poursuivi dans les années à venir pour parvenir rapidement à la somme évoquée.

Quelques inquiétudes demeurent cependant, avec un contentieux en cours entre deux organismes de gestion collective qui pourrait retarder leur engagement dans le CNM.

IV.DE LA BANDE DESSINÉE À LA SITUATION DES ARTISTES, UN SECTEUR DE L’ÉDITION À CONFORTER

Dans le document AVIS SÉNAT N° 145 (Page 36-40)