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L’évaluation par compétences dans le champ scolaire

I. CADRE THEORIQUE ET CONCEPTUEL

3. L’évaluation par compétences dans le champ scolaire

Nous avons pu voir qu’il se dégage des éléments caractéristiques de la compétence. Elle est intégratrice : plusieurs ressources orchestrées forment une globalité, elle ne peut pas être partitionnée. Elle est complexe : les ressources en jeu ne sont pas additionnées et juxtaposées, leur utilisation est conditionnée par des choix. Elle est finalisée et contextualisée : elle aboutit à une réalisation en contexte et se rapporte à des situations. Elle est évolutive : son acquisition est progressive et il existe plusieurs niveaux d’acquisition.

Nous avons pu également appréhender l’évaluation qui consiste en la mise en œuvre d’un processus complexe : les intentions, les modalités du recueil de d’informations (critères, indicateurs), les outils, le jugement, les décisions.

Mais comment se construisent ces compétences ? Sont-elles observables ? Sont-elles évaluables ? Comment les évaluer ?

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3.1. L’approche par compétences en milieu scolaire

3.1.1. Faire acquérir des compétences : comment ?

a. Construire des situations complexes

Les situations d’apprentissage construites doivent permettre à l’élève de mobiliser des ressources en adoptant une attitude adaptée et réfléchie en fonction d’une situation donnée. L’élève est confronté à une tâche complexe dans une situation parfois inédite, et doit pour la résoudre mettre en réseau et transférer des connaissances, capacités et attitudes apprises antérieurement dans un autre contexte. Il met en œuvre plusieurs opérations cognitives, opère des choix stratégiques pour finaliser la tâche et se concentre sur les processus mis en jeu dans sa démarche. Scallon (2004) précise que cette situation doit être assez complexe pour exiger l’utilisation, par l’élève, de plusieurs ressources.

Il précise par ailleurs, qu’elle doit être réaliste et traitée avec autonomie. La situation doit donc être « authentique » et s’inspirer du réel.

Du côté de l’enseignant, cela suppose une anticipation pour concevoir des supports adaptés à chacun et aux compétences mises en jeu, pour définir des consignes explicites, pour accompagner les élèves selon leurs besoins.

b. Prendre en compte la progressivité

La plupart des définitions de la compétence nous ont conduits à relever le caractère évolutif et dynamique de l’acquisition de la compétence. Legendre (2008) confirme que la compétence doit être envisagée « comme un processus dynamique en constante évolution » et que cette « évolution [est] fortement liée au contexte […] ». Cette caractéristique suppose que les situations soient pensées et conçues en augmentant progressivement la complexité (le nombre de ressources à mobiliser, contexte inédit) ou encore le degré d’autonomie et en définissant des degrés d’acquisition.

c. Favoriser l’implication des élèves, dimension métacognitive

Certaines caractérisations de la compétence intègrent la notion de réflexivité (Jonnaert, 2002). La dimension métacognitive de l’acquisition d’une compétence a été explorée par Allal (2002) pour expliquer les processus d’implication active de l’élève dans ses apprentissages, mais aussi dans son évaluation. Pour elle (Allal, 2002:89), « […] la métacognition se développe dans le cadre de la construction de diverses compétences et, de ce fait, a tendance à prendre des formes variées liées aux spécificités des familles de situations concernées. ». Relevant cette dimension métacognitive de la compétence qu’elle relie à son caractère évolutif et constructif, Legendre (2008 :37) définit ainsi deux pôles de compétence supposant une « double compréhension [pour

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l’apprenant], celle de la situation et celle de la façon dont on s’y prend pour agir dans cette situation ».

Dans une telle situation, l’élève est acteur de sa démarche et donne du sens à son apprentissage. Il est en mesure d’expliquer ses stratégies et ses choix et de poser un regard critique.

Du côté de l’enseignant cela suppose une communication permettant des interactions enseignant-élève.

L’acquisition et l’évaluation des compétences sont imbriquées et indissociables. D’abord, parce que certaines définitions, comme nous l’avons vu intègrent les notions d’efficacité et de réussite qui renvoient à l’évaluation. Ensuite, parce que le caractère évolutif qui participe également à la définition de la compétence impose un continuum entre développement, acquisition et évaluation de cette compétence. Mais la compétence reste un objet dont l’évaluation est complexe et parfois controversée.

3.2. Evaluer des compétences : un défi ?

3.2.1. La question de la situation

Il est admis dans l’approche par compétence que la situation d’évaluation doit être inédite. Elle doit permettre de constater la réalisation d’une tâche complexe appartenant à une famille de situations dans laquelle la compétence se développe.

Le caractère inédit de la situation a été critiqué quant à sa pertinence par Crahay (2006) qui s’interroge : « pourquoi faire de l’exceptionnel la norme de la vraie compétence ? ». Il dénonce une contextualisation trop poussée dans des situations inédites (tâches complexes) qui peut être génératrice de difficulté pour l’élève.

Caractérisant les familles de situations, Jonnaert (2014 :47), reprenant son propos (Jonnaert, 2004), affirme que « les situations d’une même famille partagent des caractéristiques et des propriétés. La compétence développée dans l’une de ces situations, peut le plus souvent être adaptée aux autres situations de la même famille. ». Cela permet l’adaptation d’une compétence construite dans une situation à une autre situation de la même famille. Une difficulté semble résider dans la diversité de la détermination des contours d’une famille de situation. C’est ce que souligne Rey (2014) en remarquant, d’une part, que l’élément commun entre deux tâches appartenant à la même famille n’est pas toujours clair et, d’autre part, que certains élèves peuvent ne pas identifier une tâche comme appartenant à une famille de tâches dont ils saisissent pourtant l’élément commun.

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3.2.2. La question de la collecte d’informations

Une compétence n’est pas observable à la différence d’une performance. Une compétence ne s’observe qu’à travers la répétition d’une performance. La difficulté d’évaluer une compétence vient de sa caractéristique inobservable. Comme l’affirment Cros et Raisky (2010), elle est inobservable. Et pour l’évaluer on se réfère à une performance qui n’est pas la compétence. La performance est influencée par le contexte et n’est à ce titre qu’une expression de la compétence.

3.2.3. La question du jugement

Cette question amène la question des critères qui doivent être fiables pertinents valides comme le précise De Ketele (2010). Le jugement renvoie aux problèmes liés à la subjectivité qui dans le cadre de l’évaluation par compétences peut influencer le jugement. L’usage de grilles d’échelles (Scallon, 2004) permet de préciser le niveau d’acquisition des compétences.

3.2.4. La question de la décision

La décision qui découle de ce processus dépend de l’intention initiale : visée formative ou visée certificative.

Mais alors, compte tenu de la complexité de la notion de compétence, de celle de son acquisition et de celle de son évaluation quelles pratiques sont mises en œuvre dans les classes face aux changements institutionnels en matière évaluation? Comment les enseignants peuvent-ils s’en emparer? Quels bénéfices peuvent en tirer les élèves ?

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