• Aucun résultat trouvé

Économie de la Proximité & Sociologie de la Traduction

II.1 L’Économie de la Proximité

Pour l’École Française de la Proximité, la coordination des acteurs se fait par le truchement de la proximité. La proximité permet de discriminer les éléments en fonction d’un jugement relatif en tant qu’elle permet de définir ce qui est « près de » et ce qui est « loin de » (Rallet et Torre, 2004 ; Talbot, 2008). Afin de rendre compte des théories de cette école, nous présentons dans un premier temps l’objet de cette théorie. Ensuite nous définissons les

61 différentes proximités qui constituent les concepts phares de cette approche. Enfin, nous terminons en mettant en lumière l’intérêt d’une telle approche pour analyser les réseaux territoriaux d’organisations.

II.1.1 L’objet de l’Économie de la Proximité

Le courant de l’Économie de la Proximité s’est structuré au début des années 1990 sous l’impulsion du groupe « Dynamiques de proximité », groupe composé d’économistes, de sociologues et de géographes principalement. Le postulat de départ est de considérer l’espace géographique comme une variable endogène influençant les dynamiques productives. Ainsi, les systèmes productifs n’interagissent pas de la même manière suivant l’espace sur lequel ils sont présents, l’espace n’étant pas neutre. À travers le concept de proximité, positionné au carrefour de l’économie spatiale et de l’économie industrielle (Rallet et Torre, 1995 ; Pecqueur et Zimmerman, 2004), le groupe entend mettre en évidence les convergences et les cohérences existantes entre les diverses approches théoriques de l’espace, comme celles des districts industriels ou des clusters. Afin d’endogénéiser la variable spatiale, les auteurs invitent à s’intéresser à la question de la création des ressources et non pas à celle de leur allocation. Partir de ce point permet d’identifier les mécanismes spécifiques à l’œuvre au sein de chaque espace productif dans la constitution des ressources. Cette approche renvoie dès lors « au cadre contextuel du local compris comme celui d’une économie non pas fermée mais limitée dans son étendue et dans sa relation avec l’extérieur » (Pecqueur et Zimmermann, 2004, p.17).

Ce cadre contextuel comporte différentes dimensions de nature géographique, économique ou sociale qui impactent les relations économiques au sein des espaces productifs. Ainsi, les relations économiques s’appréhendent à travers l’ensemble des relations entretenues entre les différents éléments au-delà des relations de marché. L’espace apparaît dès lors comme un mésosystème abstrait (Pecqueur et Zimmermann, 2004) à partir duquel la production économique est envisagée à travers la dialectique local – global. L’organisation singulière que constitue le territoire apparaît en conséquence comme une modalité locale d’adaptation au global (Pecqueur, 2007). En d’autres termes, la prise en compte de la dimension territoriale n’implique pas un renfermement sur le local mais à l’inverse l’intégration des phénomènes globaux.

62 Après avoir présenté l’objet de l’Économie de la Proximité nous allons désormais définir les différentes proximités sur lesquelles cette théorie s’appuie.

II.1.2 Les différentes proximités

L’Économie de la Proximité identifie plusieurs formes de proximité. Cependant, il y a des différences dans la manière de les concevoir et de les articuler. Nous commençons par présenter les trois proximités « historiques » que sont les proximités géographique, organisée et institutionnelle. Ensuite nous présentons les effets du croisement des proximités géographique et organisée. Nous terminons en précisant la définition de la proximité organisée en identifiant les différentes proximités à l’œuvre en son sein.

II.1.2.1 La proximité géographique

La proximité géographique, aussi nommée proximité spatiale ou physique, est la forme la plus intuitive de proximité. C’est à partir de son recours que les conditions objectives de localisation sont abordées (Pecqueur et Zimmermann, 2004). Cette proximité « traduit la distance kilométrique entre deux entités (individus, organisations…) pondérée par le coût temporel et monétaire de son franchissement » (Rallet et Torre, 2004, p26). Elle exprime « la séparation dans l’espace et des liens évalués en termes de distance » (Gilly et Torre, 2000, p.12). Elle rend compte dès lors de deux aspects. L’un est physique, comme la nature topographique du terrain. Par exemple, le franchissement d’une même distance kilométrique n’a pas le même coût s’il est effectué en plaine ou en milieu montagneux. Le second aspect est d’ordre social. L’existence d’infrastructures de communication (train, route…) permet de modifier le coût de franchissement d’une distance kilométrique, permettant dès lors de rendre plus proche ce qui est en kilomètres plus loin. À ces deux aspects, s’ajoutent les capacités financières de l’individu. La proximité géographique est en effet fonction du coût financier relatif au franchissement d’une distance. Par exemple, le coût d’un billet de train sera plus ou moins facilement assumé, ce qui entraîne de fait une différence dans la représentation de la proximité. Il apparaît dès lors que la proximité géographique est empreinte de relativité (Torre, 2009).

Cette relativité de la proximité géographique pointe le fait qu’elle n’est pas fixe et donnée.

Au-delà, « ce sont les actions et les perceptions humaines qui lui confèrent une dimension plus moins positive ou négative, ainsi qu’une certaine utilité » (Torre, 2010). En conséquence,

63 la proximité géographique ne prend sens qu’à partir de sa représentation par les acteurs. En d’autres termes, pour qu’elle soit, il faut que les acteurs se la figurent et s’en emparent. En cas d’absence de sa mobilisation par les acteurs, nous ne sommes pas dans un cas de proximité géographique mais dans un cas de potentialité de la proximité géographique (Torre, 2010). De la sorte, le fait d’être proche n’implique pas obligatoirement la mise en relation. Il peut y avoir juxtaposition géographique de deux éléments sans pour autant qu’il y ait une coordination entre ces deux éléments. À l’inverse, en cas de mobilisation intentionnelle, la proximité géographique peut revêtir une dimension stratégique (Torre, 2009).

La proximité géographique n’est pas forcément considérée comme un avantage, comme porteuse d’effets positifs. A l’inverse, elle peut être source de tensions ou de conflits (Rallet et Torre, 2004 ; Boschma, 2005). C’est le cas par exemple, lorsque l’activité productive d’un acteur génère des externalités négatives, comme la pollution, qui ont un impact sur l’activité productive d’un autre acteur, ou encore quand la proximité géographique facilite les démarches d’espionnage économique. Ainsi, Rallet et Torre (2004) proposent de distinguer une proximité géographique recherchée d’une proximité géographique subie permettant de sortir d’une représentation apologétique de cette proximité.

Ainsi, pour Pecqueur et Zimmerman (2004) la proximité géographique est « susceptible de jouer un rôle de facilitateur de la coordination » mais ceci n’est généralement pas suffisant, elle doit être renforcée par une proximité organisée.

II.1.2.2 La proximité organisée

La notion de proximité organisée (Pecqueur et Zimmermann, 2004 ; Rallet et Torre, 2004), aussi appelée proximité organisationnelle (Gilly et Torre, 2000) ou proximité socio-économique (Bouba-Olga et Grossetti, 2008), constitue une proximité d’essence non-spatiale.

Elle est définie par Rallet et Torre (2004, p.27) comme « la capacité qu’offre une organisation de faire interagir ses membres. L’organisation facilite les interactions en son sein, en tout cas, les rend a priori plus faciles qu’avec des unités situées à l’extérieur de l’organisation ». Par organisation, ces auteurs désignent tous types de relations établies et structurées indépendamment de la forme qu’elles peuvent prendre, qu’elle soit formelle ou informelle d’un point de vue législatif. Pour Gilly et Torre (2000, p.13) cette proximité rend compte de la

« séparation économique dans l’espace et des liens en termes d’organisation de la production », elle est ainsi assimilable à un lien social (Rallet, 2002). La proximité organisée

64 est alors génératrice de coordination entre acteurs car elle donne lieu à la création en commun de moyens d’interaction. Pour Boschma (2004), il faut envisager la proximité organisée comme un continuum allant de sa faiblesse à sa force. Ces deux extrêmes comportent des avantages et des inconvénients, ainsi « une proximité organisationnelle excessive s'accompagne d'un manque de souplesse, tandis qu'une proximité organisationnelle insuffisante s'accompagne d'un manque de contrôle » (Boschma, 2004, p.14).

Ces moyens peuvent résulter d’une logique de similitude ou d’une logique d’appartenance (Rallet et Torre, 2004). La logique de similitude fait reposer l’interaction entre les acteurs sur la base d’un partage d’un même système de représentations, de croyances ou encore de savoirs, entraînant un partage d’une même vision du monde. La logique d’appartenance repose pour sa part sur le partage de règles ou de routines. Ces deux logiques sont à la fois complémentaires et substituables. Pour ces auteurs, elles sont complémentaires car l’interprétation des règles établies selon une logique d’appartenance est limitée par le partage de représentations communes. À l’inverse, elles sont substituables dans le cas des proximités socio-économiques ayant lieu en l’absence de structure formelle. Dans ce cas, la logique de similitude prime en l’absence de règles communes définies. Cette catégorisation des logiques permettant l’interaction laisse ainsi une place importante à la question des institutions au sein de la logique de similitude (Gilly et Torre, 2000).

Pecqueur et Zimmermann (2004) proposent une autre segmentation de la proximité organisée en distinguant la proximité organisationnelle de la proximité institutionnelle. La distinction repose pour partie sur la nature de l’interaction. Si elle est directe, alors la proximité est organisationnelle, tandis que si elle est indirecte, alors la proximité est institutionnelle. Pour ces auteurs, la proximité organisationnelle est tributaire de la proximité géographique car « il n’y a pas de proximité organisationnelle génératrice de coordination sans une certaine dose de proximité institutionnelle, indispensable à la coordination d’agents interdépendants mais dotés d’un degré plus ou moins élevé d’autonomie décisionnelle » (Pecqueur et Zimmermann, 2004, p.30). Cependant, il est nécessaire qu’il y ait une hybridation entre ces proximités afin de permettre à la coordination entre les acteurs de s’étendre dans le temps. Les proximités institutionnelle et organisationnelle s’appuient sur des dispositifs de coordination comme les règles ou encore les normes.

La distinction entre la segmentation opérée par Rallet et Torre (2004) et celle de Pecqueur et Zimmermann (2004) s’appuie en partie sur la différence dans la définition des institutions.

65 II.1.2.3 Les institutions dans la proximité organisée

Pour Gilly et Lung (2008), la distinction dans la manière de concevoir la segmentation s’appréhende à travers deux approches des institutions au sein des tenants de l’Économie de la Proximité : une approche institutionnaliste et une approche interactionniste. Cette distinction, simplificatrice, permet de mettre en exergue l’opposition entre ces deux approches sur la question de l’articulation de l’individuel et du collectif. Selon l’approche institutionnaliste, la dynamique territoriale est le fruit d’une interaction collective reliant des individus et des institutions, se situant ainsi dans une perspective hol-individualiste. À l’inverse, l’approche interactionniste voit les dynamiques territoriales comme le fruit des interactions inter-individuelles, privilégiant ainsi une perspective individualiste méthodologique. Ainsi, Pecqueur et Zimmermann (2004) se situent dans une approche institutionnelle en considérant les institutions comme les règles, formelles ou informelles, qui régissent le jeu des acteurs (North, 1990). Tandis que Rallet et Torre (2004) s’inscrivent dans une approche interactionniste.

Colletis-Whal (2008), partageant l’interprétation de Gilly et Lung (2008), considère que la première approche s’appuie sur l’existence de macro-institutions tandis que la seconde s’attache aux micro-institutions. Les macro-institutions sont présentes dans l’environnement institutionnel et correspondent à l’ensemble des règles économiques, sociales, politiques…

qui servent de support à l’activité transactionnelle (Ménard, 2003). Elles sont ainsi le fruit d’un long processus historique sur lequel les acteurs ne peuvent avoir d’impact à court terme.

Les micro-institutions, quant à elles, correspondent aux règles endogènes déterminées par les acteurs en interaction répétée. Ces règles deviennent des micro-institutions lorsqu’une masse critique d’acteurs les reconnaissent. Par conséquent, l’Économie de la Proximité fait face à la question de l’articulation des dimensions micro et macro.

Talbot (2008) propose de dépasser cette dichotomie entre micro-institution et macro-institution en réintroduisant le concept d’macro-institution au sein de l’approche interactionniste en affirmant « que le partage d’institutions entre des individus est une condition sine qua non à toute coordination » (p.7) c’est-à-dire une base permettant aux acteurs d’entrer en interaction.

Pour ce faire, il propose une définition des institutions comme « une idée commune en acte au service d’une finalité » (p.11). Cette définition invite à considérer les institutions à travers la dialectique irréductible de la règle et du comportement qui s’y rattache (en conformité ou non), reliant de fait la représentation et les pratiques. À travers cette conception, l’institution n’est dès lors plus bornée à la représentation, vision des macro-institutions, ou à l’action,

66 vision des micro-institutions, mais résulte de l’interaction des deux donnant, à l’usage, la capacité aux acteurs d’avoir un rôle dans l’évolution de l’institution.

Tableau n°4 : La vision des institutions selon deux approches Type

d’approche

Vision des

institutions Auteurs

Institutionnaliste Macro-institutions

Pecqueur et Zimmerman (2004) ; Colletis et Pecqueur

(2005) ; Boschma (2004)

Interactionniste Micro-institutions Rallet et Torre (2004) ; Rallet (2002)

Source : élaboré par l’auteur

II.1.2.4 Le croisement des proximités géographique et organisée

L’approche par les proximités invite à s’intéresser à l’articulation des proximités géographique et organisée pour analyser la coordination des acteurs au sein d’un processus de production géographiquement situé. Rallet et Torre (2004) proposent une grille de lecture croisant les deux types de proximité et leurs résultats en matière d’interactions (Cf. Tableau n°5). Cette grille de lecture permet de rendre compte de la diversité des situations productives.

Lorsque seule la proximité géographique est activable, alors nous sommes dans une situation d’agglomération, de co-localisation des acteurs mais sans pouvoir inférer qu’ils entretiennent des relations directes. La proximité géographique ne constitue pas un support suffisant à la coordination. A l’inverse, quand seule la proximité organisée est en présence, nous sommes dans le cas de figure des logiques résiliaires supra-locales, les supports de la coordination étant le partage de règles qui dépassent les frontières de l’espace local. Lorsque la proximité organisée et la proximité géographique s’entrecroisent sur une courte période, nous sommes dans des situations où la proximité organisée a besoin de la proximité géographique. La première, pour subsister à distance, a besoin de la seconde afin de créer des rencontres temporaires. Enfin, quand les proximités géographique et organisée s’entrecroisent sur la durée, nous sommes dans le cas des réseaux territoriaux d’organisations.

67 Tableau n°5 : Le croisement des deux proximités et ses résultats en matière d’interactions

Proximité géographique Proximité organisée

Proximité géographique Agglomération Réseaux territoriaux, dispositifs de négociation

Proximité organisée

Mobilité, interactions

temporaires Réseaux non territoriaux

Source : Rallet & Torre, 2004

Pour Pecqueur et Zimmermann (2004), afin de passer d’une situation de co-localisation à une situation correspondant à celle d’un réseau territorial d’organisations, c’est-à-dire d’une simple juxtaposition des acteurs à une coordination, il est nécessaire que les deux proximités aillent de pair. Au-delà, pour ces auteurs, la proximité géographique est subordonnée à la proximité organisée pour remplir son rôle de coordination. C’est à partir d’un partage d’institutions que la proximité géographique devient spécifique au territoire et joue « un rôle non seulement de facilitateur de la coordination, mais aussi de structuration de cette coordination » (Pecqueur et Zimmermann, 2004, p.32).

II.1.2.5 La segmentation de la proximité organisée

Bouba-Olga et Grossetti (2008) proposent d’approfondir le travail de segmentation des proximités en ajoutant deux niveaux supplémentaires au sein de la proximité organisée (Cf.

Schéma n°5 ci-dessous). Au sein de la proximité organisée, qu’ils préfèrent nommer socio-économique, ils distinguent les proximités de ressources et de coordination.

Les ressources5 sont assimilées comme telles si elles sont appropriées par les acteurs. Elles constituent également une contrainte car elles encadrent les possibles de l’action. Et elles sont le fruit d’enjeux entre les acteurs qui s’affrontent pour leur appropriation. Ces auteurs distinguent deux types de ressources, celles de nature matérielle et celles de nature cognitive, ce qui constitue un nouveau segment au sein de la typologie. La proximité cognitive renvoie

5 Pour une définition des ressources voir Chapitre 1, paragraphe « I.2.1.3. Le territoire espace de coordination et de ressources », p.37.

68

« à l’idée d’une similarité ou complémentarité des valeurs, des « allant de soi », des projets, des routines, des conventions, des référents,… » (p.317). Cette proximité va permettre la coordination en facilitant les échanges. Bouba-Olga et Grossetti lui donnent un statut de

« ressource individuelle, permettant à chacun de construire, ou non, une évaluation des similarités ou complémentarités qu’elles induisent entre individus » (p.317). La proximité matérielle correspond aux éléments permettant d’identifier s’il y a une similarité ou une complémentarité entre les acteurs.

Le pendant de la proximité de ressources est la proximité de la coordination. Celle-ci est segmentée en deux : la proximité relationnelle et la proximité de médiation. La proximité relationnelle considère les relations entretenues directement par les acteurs. Ces relations sont facilitées par une même appartenance à un groupe (famille, association, espace…) mais sont également trans-groupes. La participation à un même groupe n’implique pas que l’ensemble des membres entretienne des relations directes. La proximité de médiation concerne les

« dispositifs qui permettent d’échanger sans mobiliser des chaînes relationnelles » (p.319).

Ces dispositifs sont variés, pouvant prendre différentes formes, matérielles ou immatérielles.

Ils permettent de faire un pont entre les acteurs qui n’entretiennent pas de lien relationnel.

Bouba-Olga et Grossetti considèrent que les institutions telles que définies par Pecqueur et Zimmermann (2004) sont des dispositifs de médiation.

La distinction entre la proximité de ressources et la proximité de coordination se situe principalement dans le niveau des échanges. Tandis que la proximité de ressources met l’accent sur les individus, la proximité de coordination met l’accent sur les interactions.

Schéma n°5 : Typologie par segmentation des formes de proximité

Source : Bouba-Olga et Grossetti, 2008 Proximité

Géographique

Socio-économique

De ressources

De coordination

Relationnelle

De médiation Matérielle

Cognitive

69 Après avoir explicité le fonctionnement des différents concepts sur lesquels s’appuie l’Économie de la Proximité, nous allons désormais montrer la pertinence d’une telle théorie dans l’analyse des réseaux territoriaux d’organisations

II.1.3 L’Économie de la Proximité et les réseaux territoriaux d’organisations

L’Économie de la Proximité est faiblement présente dans la littérature en management sur les réseaux territoriaux d’organisations. Néanmoins, pour Gosse et Sprimont (2010), une telle approche est une clé d’entrée pertinente pour saisir les mécanismes générateurs d’innovation, d’externalités, d’agglomération, de rentes ou encore d’économie pour les organisations présentes au sein d’un même réseau territorial. Elle permet également de saisir les limites des effets de la proximité. Ces limites se situent notamment dans la création d’externalités négatives et de mécanismes d’enfermement, qui vont bloquer l’émergence de nouvelles idées, nuisant à la performance de l’organisation (Boschma, 2005). Ainsi l’Économie de la Proximité permet de comprendre le lien entre la proximité et la performance. Ces deux dimensions entretiennent une relation en « U inversé » (Boschma, 2005), c'est-à-dire que la proximité influe positivement la performance des organisations jusqu’à un certain seuil ; passé ce seuil, elle a un effet néfaste. Cette approche, en mettant la focale sur les liens inter-organisationnels, donne alors à voir la manière dont le collectif interagit pour créer des éléments que les organisations devront prendre en compte.

Defélix, Dégruel, Le Boulaire et Retour (2013) considèrent que l’approche par les proximités permet de comprendre comment des pratiques de gestion des ressources humaines renforcent les proximités au sein d’un réseau territorial d’organisations. Ainsi pour ces auteurs, la proximité géographique se trouve confortée par des pratiques visant à rendre compte des ressources présentes sur le territoire, comme des cartographies de compétences ; la proximité organisationnelle est renforcée par l’établissement de méthodes, de règles, d’outils…

nécessaires à la mise en place de pratiques de gestion des ressources humaines partagées, comme pour le recrutement de salariés au sein d’un groupement d’employeurs ; et la proximité institutionnelle se voit consolidée par le partage de valeurs. Les travaux de Bories-Azeau et Loubès (2013) arrivent aux mêmes résultats. Pour ces auteures, la mise en place d’une gestion territoriale des emplois et des compétences renforce les dynamiques collectives d’apprentissage de la coordination à travers le développement des proximités.