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1. Introduction

1.1 Une question personnelle

Le choix de rédiger un mémoire de fin d’études sur la théâtralité dans la formation fut aisément pris. Cette question est le fruit de mon parcours scolaire et de mon choix de travailler dans la formation.

Après une scolarité « normale » jusqu’à l’adolescence, ma période de révolte à l’égard de toutes les institutions et personnes représentant l’autorité se manifesta. J’éprouvais une

« aversion » des cours monotones, je ne les nommerai volontairement pas magistraux, dispensés par quelques enseignants de la vieille école. Ils étaient les personnes possédant le savoir et nous, élèves, étions juste présents afin d’avoir la chance de recevoir leurs connaissances. J’éprouvais un malin plaisir à provoquer ces enseignants afin de voir leurs véritables compétences !

Par contre, j’étais aussi capable de me passionner pour les enseignants qui nous dispensaient des cours vivants durant lesquels des interactions se créaient. Ces enseignants-là étaient capables de me faire aimer n’importe quelle matière tant ils la dispensaient avec passion, avec vie et en y insérant une touche de ce que j’appellerais « théâtralité ».

Tout au long des diverses formations que j’ai suivies, j’ai éprouvé beaucoup plus de plaisir et d’envie d’apprendre lorsque j’avais la chance d’avoir des formateurs « théâtraux ».

Il s’en suivit que j’ai voulu devenir enseignant ; le degré n’était pas défini mais j’avais la certitude que j’avais trouvé ma voie. Je souhaitais véritablement œuvrer dans ce milieu. Le résultat de ce choix pourra être considéré comme thérapeutique d’une part – afin de soigner mes plaies d’apprenant meurtri – mais surtout, à permettre à des personnes, qui n’ont pas eu la chance de bénéficier du soutien inconditionnel que j’avais de mes proches, de terminer et réussir une formation.

Lors de mes premiers cours dispensés, comme formateur d’adultes, j’ai constaté que ces derniers étaient très théoriques, voire ennuyeux pour les participants. J’ai réalisé que je reproduisais les cours fastidieux qui nous barbaient et, que les résultats sur les apprenants

n’étaient pas transcendants. Le niveau de satisfaction des apprenants ainsi que le mien n’atteignaient pas des sommets.

Je me suis donc rappelé les cours que j’appréciais et j’ai donc procédé aux changements qui s’imposaient. Ainsi, j’ai opté pour des cours beaucoup plus interactifs, beaucoup plus vivants et avec un bien plus grand investissement de ma part. Cet investissement se manifesta dans ma gestuelle, ma voix et mon corps.

Il s’en suivit un plaisir décuplé, de ma part, et aussi, à mon avis, de celui des apprenants.

Dès cet instant, et ce tout au long des formations que j’ai dispensées ou que j’ai suivies, je me suis interrogé sur les raisons qui font que cet aspect théâtral de l’enseignement produit un tel effet positif sur ma volonté d’apprendre.

Dans le même temps, j’ai pu constater que cet effet des cours plus théâtraux, plus vivants engendrait des réactions, des effets similaires sur une majorité d’apprenants. Plus j’avançais dans mon parcours professionnel et privé, plus je m’interrogeais sur les raisons de cet état de fait.

Je ne savais pas comment procéder afin de démontrer cet aspect qui me paraissait être une évidence mais ce mémoire de licence fut l’occasion d’aborder et d’essayer d’approfondir cette problématique.

Pour ces différentes raisons, j’ai choisi ce thème, la théâtralité dans la formation, afin de voir ce que j’avais nommé interactivité, vie, investissement, est aussi considéré comme des aspects constitutifs de la théâtralité et comment cette dernière était vécue, perçue par mes pairs.

1.2 Une question de recherche

La théâtralité dans la formation, l’enseignement est un aspect qui n’est que très peu abordé.

Les raisons de ce fait ne nous sont pas connues et nous laissent quelque peu songeur. Pour quelles raisons cette thématique n’est-elle pas traitée ? Est-ce un thème tabou, ou serait-ce l’incompatibilité des deux termes formation et théâtralité ou simplement un aspect inconscient à tous les enseignants (termes pris dans son acception la plus large) ?

Au travers de ce travail, nous tenterons de défricher quelque peu cette thématique de la théâtralité dans la formation. Lorsque nous abordons cette notion de théâtralité dans la formation, l’imaginaire collectif prend rapidement le dessus et la connotation de jeu et non de sérieux ressort très rapidement.

Nous allons voir, à travers ce travail, quelle est la part prise par la dimension de la théâtralité dans les enseignements de différents groupes d’enseignants (terme pris dans son acception la plus large), quelles sont les définitions qui ressortent pour décrire la théâtralité dans la formation, comment elle est ressentie et vécue et quels sont les effets attendus que cette théâtralité devrait provoquer (ce que les sujets interrogés imaginent).

Dans la première partie de notre travail, sous le terme générique de cadre conceptuel, nous aborderons les auteurs traitant le sujet de notre mémoire. Une petite remarque s’impose avant d’aller plus en détail quant à ces différents auteurs. En effet, à notre connaissance, cette thématique n’a jamais été explicitement traitée. De ce fait, nous avons opté pour le traitement de ces différents auteurs sous forme de cascade, c’est-à-dire prendre les auteurs qui traitent de ce thème dans un sens très large pour, au fur et à mesure, affiner notre recherche et nous approcher au plus près de notre thématique. Nous débuterons ainsi par les quatre principales théories de l’action, pour poursuivre avec l’article de Sensevy « Théories de l’action et action du professeur » pour terminer avec l’œuvre de Goffman « La mise en scène de la vie quotidienne ». Toute cette partie est basée sur des théories de l’action et permettra ainsi de quelque peu se familiariser avec ce thème de théâtralité.

La seconde partie de notre travail abordera la méthodologie ainsi que décrira le choix des différents sujets interrogés. Nous souhaitions confronter différents milieux « scolaires » afin de voir si des similitudes ou des différences pouvaient apparaître.

Dans la troisième partie de cette recherche, nous avons procédé à l’analyse des données des différents sujets, ce en relation avec leur groupe. Pour cela, nous avons procédé à un regroupement des données sous quatre sous-groupes qui sont la définition de la théâtralité, les fonctions de la théâtralité par rapport au triangle didactique, les objectifs qu’ils visaient au travers de leur théâtralité et les effets qu’ils souhaitaient, imaginaient obtenir à l’aide de leur théâtralité.

L’antépénultième partie comparera les différentes données obtenues. Nous avons essayé d’y trouver des points communs et des différences susceptibles de faire progresser notre recherche et donc de proposer une ébauche de réponse à notre question de recherche.

L’ultime partie de notre travail sera une conclusion avec des pistes de réflexions éventuelles afin d’aborder plus franchement cette problématique.