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Chapitre 2 : Caractérisation des aciers 32CrMoV13 nitrurés et 100Cr6 carbonitruré

2.1 Introduction

2.1.1 Présentation des matériaux

2.1.1.1. Introduction :

La piste, en contact avec les éléments roulants, subit de nombreuses agressions de la part des polluants présents dans l’huile de lubrification. En effet, ces polluants sont piégés dans le contact éléments roulants / piste et engendrent des indentations des pistes et des éléments roulants.

Dans le but d’éviter au maximum l’indentation des surfaces, c’est-à-dire une déformation plastique locale correspondant à un mouvement irréversible de dislocations, il semble indispensable d’avoir des matériaux les plus durs possibles. Néanmoins il est également indispensable d’assurer une bonne résistance à la rupture, ainsi qu’une bonne ténacité, afin d’assurer la tenue des bagues ou éléments roulants. Il faut donc faire un compromis entre ténacité et dureté. Une solution est de durcir uniquement la zone utile tout en gardant une bonne ténacité à cœur. Dans cette optique, un durcissement local des matériaux par traitement (mécanique, thermique, thermo-chimique, etc.) peut être opéré.

Les mécanismes de durcissement reposent sur le piégeage des dislocations par des discontinuités du réseau cristallin. Ce blocage peut être obtenu par plusieurs moyens qui sont :

• L’écrouissage qui consiste à introduire des dislocations supplémentaires venant gêner le mouvement des dislocations

• Les atomes étrangers en solution solide d’insertion ou de substitution • Les précipités

• Les joints de grains

La première idée est donc d’utiliser un acier trempé et très peu revenu afin d’obtenir un matériau le plus dur possible, mais ceci impliquerait une perte importante de ténacité. De plus ce traitement de trempe est un traitement dans la masse, ce qui ne répond pas à notre besoin de dureté dans les zones de contacts et de ténacité à cœur.

Une seconde idée est de créer des nano-précipités empêchant le déplacement des dislocations. Ces nano-précipités peuvent typiquement être obtenus par traitements thermochimiques de cémentation, nitruration ou bien carbonitruration. Cette solution est une solution intéressante du fait de la possibilité de maîtrise de la zone durcie ainsi que son épaisseur. Nous parlons ainsi de nitruration ou de cémentation locale, profonde ou peu profonde. Ce mode de durcissement est celui utilisé pour les matériaux de cette thèse.

2.1.1.2. L’acier 32CrMoV13

L’acier 32CrMoV13 (de composition mentionnée dans le Tableau 2-1) présente de bonnes propriétés mécaniques (ductilité / résilience) après trempe et revenu à haute température (température de revenu d’environ 650°C). Néanmoins, ce matériau ne présente pas une bonne dureté mais cet alliage est sensible au traitement de nitruration. Dans le cadre de notre étude, la nitruration sera une nitruration par voie gazeuse. Ainsi, une fois nitruré, cet acier présente :

• une haute résistance mécanique en surface couplée avec la bonne résilience de l’acier de base

• une stabilité structurale et mécanique à l’échauffement importante comme le traitement de nitruration est réalisé sur une structure stabilisée (revenu à 650°C et nitruration à 500-600°C)

• un profil de contraintes résiduelles de compression qui favorise la tenue en fatigue.

Tableau 2-1 : Composition chimique du 32CrMoV13 selon la norme AMS 6481

D’un point de vue microstructural, le traitement de nitruration implique systématiquement la création d’un gradient de microstructure caractérisé par :

• Une couche de combinaison, communément appelée phase blanche du fait de sa couleur après attaque chimique au nital. Cette couche, d’épaisseur comprise entre 0 et 50µm, est principalement composée de nitrures de Fer γ’-Fe4N1-x et/ou ε-Fe2-3N (Figure 2-1) et est très dure. Cette couche étant très sensible au criquage, elle est enlevée lors de l’étape de finition. En effet, le détachement d’un morceau de cette couche blanche, très dure, entraînerait la création d’indents dans la zone de contact. Ainsi, elle n'apparaît pas sur nos échantillons et nous n’en parlerons plus dans la suite de ces travaux.

• Une couche de diffusion, d’épaisseur pouvant aller jusqu’à 1mm, présente un gradient d’azote en solution solide d’insertion ou de l’azote combinée avec les éléments d’alliage sous forme de nitrures intra ou inter-granulaires (Figure 2-1). • Le métal de base.

L’azote va donc avoir un effet durcissant principalement par une précipitation fine de nitrures ou carbonitrures. Les études précédentes ont montré que la nitruration profonde du 32CrMoV13 permet d’avoir une teneur en azote constante sur une profondeur de 500-600µm [ELG99] et [JAC01].

Éléments C Cr Mo V Mn Si

Pourcentages

20 µm Couche de combinaison Couche de diffusion 20 µm 20 µm Couche de combinaison Couche de diffusion

Figure 2-1 : Couche de combinaison et début de la couche de diffusion dans le cas du 32CrMoV13 nitruré (attaque au nital concentré à 4% pendant 3s)

2.1.1.3. L’acier 100Cr6

Une seconde nuance d’acier, le 100Cr6 dont la composition est mentionnée dans le Tableau 2-2, est communément utilisée pour la réalisation des roulements. Pour cette raison, nous allons comparer les propriétés mécaniques (micro-plasticité, ouverture micro-plastique cyclique et résistance à l’amorçage de fissures) avec celles du 32CrMoV13 nitruré.

Cet acier présente une bonne trempabilité, une résilience limitée et, après trempe et revenu, il acquiert de bonnes propriétés mécaniques. Le traitement de carbonitruration permet encore d’augmenter la limite d’élasticité conventionnelle de la zone traitée. Dans le cas de la carbonitruration, le traitement est effectué en phase austénitique. L’azote est utilisé ici, comme dans le cadre de la nitruration, pour produire un durcissement en extrême surface (sur une profondeur voisine de 50 à 100µm, mais également pour modifier la cinétique de diffusion du carbone dans l’austénite. Ainsi, lors du traitement de carbonitruration le mécanisme de durcissement est dû à une précipitation en surface accompagnée d’un mécanisme de durcissement par diffusion du carbone (comme dans le cas de la cémentation) sur une profondeur plus importante. Plus la teneur en carbone est importante, plus la martensite formée sera dure. Rappelons que cet effet de durcissement par apport de carbone est d’autant plus vrai que la teneur initiale en carbone du métal de base est faible. Dans le cas du 100Cr6 carbonitruré, le taux en carbone de l’acier de base est élevé, ce qui n’entraîne qu’un faible durcissement additionnel par carbonitruration.

Le traitement thermochimique subi par le 100Cr6 carbonitruré a été réalisé par la succession des étapes suivantes :

• Carbonitruration sous atmosphère N2+CH3OH+NH3 + des gaz additionnels à 860°C pendant 4h

• Trempe à l’huile

• Passage au froid (-60°C) • Revenu à 170°C pendant 1h

La carbonitruration est donc, contrairement à la nitruration, réalisée en phase austénitique (860°C). Le passage au froid permet de réduire le taux d’austénite résiduelle. Malgré ce traitement, sa teneur reste de l’ordre de 15 à 20% dans la couche traitée. Compte tenue de la présence d’un revenu à 170°C, cet acier ne peut être utilisé à la place du 32CrMoV13 nitruré pour des applications en température telles que le guidage du palier IV du CFM56 produit par SNECMA Groupe SAFRAN. Néanmoins, l’analyse des propriétés mécaniques du 100Cr6 carbonitruré, matériau utilisé notamment pour la réalisation de roulements de boîtes de vitesse automobile permettra de réaliser une comparaison.

Éléments C Cr Mo V Mn Si Pourcentages

massiques (%) 0.98 - 1.10 1.45 <0.01 <0.01 0.36 0.24

Tableau 2-2 : Composition chimique du 100Cr6

2.1.2 Présentation de l’éprouvette

Étant donné que l’endommagement de surface se produit sur une faible épaisseur, typiquement inférieure à 300µm, l’objectif de cette partie est de caractériser la couche traitée thermo-chimiquement des deux matériaux (32CrMoV13 nitruré et 100Cr6 carbonitruré). Il est donc impératif de travailler sur des éprouvettes présentant une microstructure et des propriétés mécaniques identiques à celles des couches traitées thermo-chimiquement.

La solution retenue consiste à réaliser des éprouvettes tubulaires de faible épaisseur : 1mm afin d’être représentatif de la couche traité par nitruration « profonde » (environ 600µm) puisque le traitement thermochimique agit simultanément sur les faces intérieure et extérieure du tube. Des surépaisseurs initiales de 150µm seront supprimées par rectification après la réalisation du traitement, afin d’enlever la phase blanche, comme dans le cas des pièces réelles et d'obtenir des éprouvettes constituées d'un matériau identique à la piste de roulement.

La géométrie de ces éprouvettes est présentée sur la Figure 2-2.

7 mm 8 mm

5 mm

Figure 2-2 : Géométrie des éprouvettes de caractérisation mécanique

Elles serviront à évaluer, d’une part, les lois d’écrouissage dans le domaine des faibles déformations plastiques, appelé domaine de micro-plasticité et d’autre part, elles seront utilisées pour décrire l’évolution de l’ouverture micro-plastique cyclique des matériaux, essais présentés au paragraphe 2.3.2.