• Aucun résultat trouvé

Les interventions améliorant le pronostic dans l’insuffisance cardiaque On distingue en général deux types d’interventions modifiant le pronostic : les mesures

USA Barker

1.3. Les interventions améliorant le pronostic dans l’insuffisance cardiaque On distingue en général deux types d’interventions modifiant le pronostic : les mesures

individuelles (médicaments, dispositifs médicaux, interventions chirurgicales) d’une part, et les mesures collectives (éducatives et organisationnelles) d’autre part, ces dernières pouvant être plus ou moins complexes.

1.3.1. Les mesures individuelles

1.3.1.1. Les médicaments

Katz 5 a étudié le nombre de pages dévolues aux différents traitements médicamenteux de l’insuffisance cardiaque dans les différentes éditions des manuels de référence (The Heart de Hurst et le Braunwald’s Heart Disease). A partir de ce travail, et en faisant l’hypothèse que le nombre de pages dévolues à un traitement dans un manuel de référence modifiera les pratiques thérapeutiques en conséquence, on peut retracer l’évolution des tendances thérapeutiques. Dans les années 1960 et 1970, le repos était recommandé, et les principaux médicaments étaient les diurétiques et les digitaliques. Le repos n’occupe plus aucune place dans les manuels depuis la fin des années 1990. Si les diurétiques ont occupé une place à peu près constante depuis les années 1960 à nos jours dans les manuels de référence, en revanche, la place consacrée aux digitaliques a considérablement diminué parallèlement à l’intérêt croissant pour les inotropes et les vasodilatateurs. Les médicaments inotropes positifs ont fait leur apparition dans les manuels au milieu des années 1970, de manière presque anecdotique jusqu’à la fin des années 1980, où ils ont commencé à occuper une place importante. Depuis la fin des années 1990, une place croissante a été accordée aux bétabloquants et aux antagonistes neurohormonaux.

S’il est difficile de retrouver dans la littérature des essais cliniques démontrant l’efficacité des premiers médicaments utilisés, en particulier des diurétiques de l’anse, ce type d’étude a été

largement utilisé pour les autres molécules. En effet, on peut citer le DIG pour les digitaliques (Digoxin 212, 213), V-HeFTIII pour les vasodilatateurs (V-HeFT III 214) ; et CIBIS 215, MERIT- HF 216, COPERNICUS 217, ou COMET 218 pour les bétabloquants. Concernant les médicaments impliqués dans l’inhibition neurohormonale du système rénine angiotensine aldostérone, on peut aussi citer CONSENSUS I 219, SAVE 220, TRACE 221, et SOLVD 222 pour les inhibiteurs de l’enzyme de conversion, qui ont révolutionné la prise en charge de l’insuffisance cardiaque ; Val-HeFT 223, ELITE 224, ou CHARM pour les antagonistes des récepteurs de l’angiotensine II 220; ou encore RALES 225 et EPHESUS 226 pour les antialdostérones.

En résumé, l’évolution des prescriptions médicamenteuses dans l’insuffisance cardiaque s’est déroulée en 4 phases : la première des années 60 au milieu des années 80, où elles comprenaient des diurétiques et des digitaliques ; la deuxième à partir de 1987, où les IEC ont été prescrits en plus des diurétiques, avec une baisse d’intérêt pour les digitaliques qui restaient réservés aux insuffisance cardiaque avec arythmie par fibrillation auriculaire ; la troisième à partir de 1995, où ont été ajoutés aux prescriptions précédentes, des bétabloquants (c’est à cette époque qu’ont été mis en place les essais sur les sartans en comparaison aux IEC ou en complément des IEC) ; et la quatrième, à partir de 2000, où les prescriptions comprenaient également des antagonistes des récepteurs des minéralocorticoïdes, et ont connues un regain d’intérêt pour la digoxine à faible dose suite à la publication des résultats de l’essai DIG. Nous avons résumé les différentes possibilités thérapeutiques médicamenteuses dans l’insuffisance cardiaque dans notre revue de la littérature publiée en 2009 44.

Ainsi, de nos jours, les possibilités thérapeutiques médicamenteuses dans l’insuffisance cardiaque sont-elles abondantes, et ont-elles probablement joué un rôle majeur dans la diminution de la mortalité liée à ce syndrome, en particulier pour sa forme ICFER 140, 172, 198,

210, 211 .

Les dernières recommandations de l’ESC 51 préconisent pour le traitement médicamenteux de l’ICFER de prescrire, en première intention, des diurétiques comme traitement symptomatique des signes de congestion, associés à un IEC (ou à un antagoniste des récepteurs de l’angiotensine II en cas d’intolérance aux IEC) et à un bétabloquant. Si le patient reste à une classe NYHA comprise entre II et IV malgré ce traitement, les recommandations préconisent d’ajouter un antagoniste des récepteurs des minéralocoricoïdes. Si la classe NYHA reste comprise entre II et IV, malgré ce traitement, les recommandations préconisent de réaliser une mesure de la fraction d’éjection du ventricule gauche (FEVG) et un électrocardiogramme. Si la FEVG est inférieure ou égale à 35% et le rythme cardiaque sinusal avec une fréquence cardiaque supérieure ou égale à 70 battements par minute, alors il est recommandé d’ajouter de l’ivabradine au traitement. Si fréquence cardiaque est inférieur à 70 battements par minute et la FEVG inférieure à 35% malgré le traitement médical, alors le recours aux dispositifs implantables doit être envisagé.

Pour les patients avec une ICFEP, il n’y a pas à l’heure actuelle d’essai concluant à l’existence de thérapeutiques médicamenteuses efficaces. Les dernières recommandations de l’ESC préconisent d’utiliser des diurétiques et des médicaments antihypertenseurs en cas d’hypertension et une prise en charge de l’ischémie myocardique le cas échéant.

1.3.1.2. Les mesures non médicamenteuses

D’autres interventions thérapeutiques, non médicamenteuses, ont montré leur efficacité dans la prise en charge des patients en insuffisance cardiaque. Il s’agit de dispositifs médicaux implantables tels que les pacemakers, ou les défibrillateurs implantables, dont l’essai COMPANION a permis de montrer l’efficacité 227, permettant de juguler les troubles du rythme cardiaque, ou la désynchronisation des contractions des ventricules. Ces dernières

décennies ont vu l’émergence de l’assistance circulatoire mécanique, comme une thérapie de substitution jusqu’à la transplantation cardiaque, ou comme alternative à la transplantation cardiaque. La chirurgie valvulaire ou de transplantation cardiaque élargit encore les possibilités thérapeutiques dans les interventions non médicamenteuses.

1.3.2. Les mesures collectives

A côté d’interventions réalisées au niveau du patient (médicaments, DM), on trouve des interventions visant la population des insuffisants cardiaques. Il s’agit généralement d’interventions sur le système de santé, avec comme objectif de réorganiser la prise en charge du patient afin de l’optimiser.

Ce type d’interventions est qualifié d’intervention complexe c’est à dire comprenant de plusieurs composantes, pour lesquelles l’évaluation est souvent difficile à cause des problèmes rencontrés dans la mise en œuvre, l’identification de ce qui est réalisé, la documentation de ce qui est réalisé et la reproductibilité de ces interventions 228. Selon Craig, ce qui définit une intervention complexe est à la fois le nombre de composants interagissant entre le groupe recevant l’intervention et le groupe témoin, le nombre et les difficultés posées par le comportement des individus censés délivrer ou recevoir l’intervention, le nombre de groupes recevant l’intervention, le nombre et la variabilité des critères de jugement, et le degré de flexibilité ou de contrainte concédé par l’intervention 229. On peut citer par exemple l’éducation thérapeutique du patient, ou des programmes de disease ou de case management, impliquant des acteurs hospitaliers et extrahospitaliers du système de santé et d’une organisation de la prise en charge des patients en réseaux de soins. Leur point commun est d’avoir montré leur efficacité à l’aide d’études de haut niveau de preuve (essais ou des méta- analyses d’essais), les amenant à intégrer désormais les recommandations sur la prise en charge des patients insuffisants cardiaques 51. Néanmoins, l’évaluation de tels programmes

dans un contexte différent de celui de l’essai contrôlé randomisé (système de santé avec une offre de soins différente, attitude de consommation du soin par les patients différentes, et attentes par rapport au système de soins différentes), soulève la question de la reproductibilité de ces résultats, et donc le problème de la méthode d’évaluation de leur impact lorsque l’essai randomisé n’est plus éthiquement possible.

1.4. Problématique : la question du pronostic dans l’insuffisance cardiaque