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Chapitre 3 : Analyse du corpus

2 Interprétations des données

Au regard des tableaux que nous avons réalisés (voir annexe 5), les remarques liminaires que nous pouvons faire sont les suivantes. Les erreurs morphologiques telles que les erreurs lexicales et les erreurs grammaticales apparaissent comme la catégorie la plus conséquente d'erreurs, ce qui corrobore les remarques faites par Lyster (2007)22 et Laniel (2005 : 88, cité par Hamel et

Milićević, 2007 : 26) qui constate que « les difficultés que rencontrent les apprenants lorsqu’ils ont à faire des choix lexicaux et les fréquentes erreurs qu’ils commettent sont fondamentalement dues à leur méconnaissance du système lexical de la langue cible ».

Aussi pourrait-on supposer à juste titre, nous semble-t-il, que le niveau relativement peu élevé des élèves en termes d'années d'apprentissage de la L2 (ils débutent leur deuxième année d'apprentissage) pourrait en être la cause.

Les erreurs grammaticales et lexicales ont été elles-mêmes subdivisées en plusieurs autres catégories dans un souci de clarté. Ainsi, les emprunts ont été catégorisés dans les erreurs

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lexicales. Le recours aux emprunts apparaît très fréquent dans la mesure où sur les vingt-six copies que composent ce corpus, dix-huit élèves y ont eu recours. Il semblerait que les apprenants l'utilisent comme stratégie d'évitement et ce, d'autant plus aisément, qu'ils présupposent justement que l'enseignante et leurs camarades comprendront puisqu'ils partagent la même langue

maternelle.

Les erreurs syntaxiques sont également présentes en quantité non négligeable, notamment le calque effectué sur la langue anglaise. Nous pouvons émettre ici l’hypothèse que les élèves, par un souci de communication et en raison de la méconnaissance de la structure dans la cible différente de la langue source, utilisent ce qu’ils savent déjà et reproduisent les structures avec lesquelles ils sont familiers.

Les erreurs sémantiques apparaissent limitées, dues, peut-être au fait que le vocabulaire des enfants est encore assez restreint, d’une part, en raison du niveau d'études peu avancé des élèves, d’autre part, par l'utilisation de matériel pédagogique comme support pendant toute la réalisation de la tâche et enfin du fait que leur activité d'écriture était assez « encadrée » : les apprenants disposaient en effet de listes, de dictionnaires et de rubriques pouvant les aider ainsi que de l’accompagnement de l'enseignante tout au long de la réalisation de la tâche.

Quant aux erreurs phonologiques/orthographiques elles pourraient s'expliquer peut-être par le fait que, d’une part, les différents sons ne sont pas complètement maîtrisés car la priorité de la classe d'immersion est de s'attacher en premier lieu à savoir comprendre et parler avant de se focaliser sur l'écrit et que, d’autre part, les différents accents et prononciations en présence dans le milieu des apprenants ajoutent à la difficulté d'appréhender des sons.

Le classement qui en résulte n'est qu'une possibilité parmi d'autres puisque certaines erreurs peuvent appartenir à deux catégories voire plus. En effet, comme nous l’avons mentionné précédemment, nous sommes en présence d’un chevauchement puisque dans certains cas nous nous trouvons face à plusieurs types d’erreurs.

C’est ainsi qu’une erreur commise peut en engendrer d’autres, si l’élève garde une certaine logique : ce sera par exemple le cas dans les erreurs d’accords du groupe nominal. Une erreur d’accord entre le déterminant et le sujet entraîne souvent une erreur entre le sujet et l’adjectif; à titre d’exemple : « le bouche est gros et violet ». Ici l’erreur de genre du nom entraine une erreur de genre du déterminant et une erreur de genre des adjectifs qualificatifs. Un autre exemple d’erreur qui en entraine d’autres au niveau des accords pourra être comme le suivant : « ses

orteilest rose et violet » L’apprenant fait une erreur d’accord ‘déterminant + nom’ (ses orteil) qui va entrainer, en tout cas nous le supposons, une erreur d’accord des adjectifs et du verbe qui restent au singulier.

Dans d’autres cas, une erreur commise peut engendrer plusieurs hypothèses de notre part; nous serons souvent dans cette situation lors d’une erreur syntaxique ou sémantique; tel sera le cas dans l’exemple suivant : « mon monstre á porte une jupe rose et une ruban rouge (2c)23 ». Sans le questionnement de l’élève, nous ne pouvons émettre qu’une série d’hypothèses : l’apprenant a- t-il voulu dire « mon monstre a une jupe rose et un ruban rouge »? « mon monstre porte une jupe rose et un ruban rouge »?, « mon monstre a porté une jupe rose et un ruban rouge »? ou encore

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« mon monstre apporte une jupe rose et un ruban rouge »? Dans ce cas, nous trancherons pour la première hypothèse dans la mesure où, dans le reste de la production, il est fait usage du verbe avoir, certes de manière erronée puisque confondu avec son homophone ‘à’, dans les autres phrases. De la même façon, l'exemple suivant : «*est-ce que tu et peur de mon monstre metenant? (6d) présente les écarts suivants : 1) la confusion entre les homophones grammaticaux et/est; 2) la mauvaise désinence : t au lieu de s; 3) l'utilisation d' « être » au lieu d' « avoir ».

Par référence à l'expression erronée « être peur de » au lieu d' « avoir peur de »: nous pouvons avancer ici que cette erreur est à attribuer sans doute à l'influence de l'anglais avec un calque des expressions et structures. En effet, le locuteur anglophone utilisera l'expression « to be afraid of » ou « to be scared of » (en traduction littérale : *être peur de) alors que la structure française réclame l'emploi d'avoir.

Similairement, l'erreur suivante : *tu sont probablement peur de mon monstre (3b) peut être due à plusieurs facteurs : 1) écart phonologique déjà mentionné plus haut: l'élève ne distingue pas entre le son [ ] et le son [ ] dans l'hypothèse où l'élève veuille utiliser le verbe « sentir » par calque de l'expression anglaise « to feel scared » ; 2) erreur de conjugaison dans l'hypothèse où l'apprenant aurait employé 'tu sont' au lieu de 'tu es' et donc 3) erreur d'emploi du verbe avec, à nouveau, la confusion entre « être » et « avoir » dans l'expression calquée de l'anglais « to be scared » pour « avoir peur »

Par ailleurs il est important de noter que dans les erreurs morphologiques grammaticales nous avons distingué les erreurs dans le groupe verbal, les formes erronées du verbe et la confusion entre être et avoir dans un souci de clarté. En effet, nous avons uniquement considéré dans la catégorie ‘groupe verbal’ les erreurs liées aux désinences verbales des verbes conjugués. Dans la catégorie ‘forme erronée du verbe’, nous avons considéré les erreurs à la mauvaise forme du verbe : par exemple un infinitif au lieu d’un participe passé pour des modes non-conjugués ou bien un infinitif au lieu d’un verbe conjugué on encore la méconnaissance de l’irrégularité d’un verbe. Pour ce qui est de la confusion être/avoir, même si la dénomination parle d’elle-même outre la confusion entre les verbes, certains exemples montrent en sus une confusion entre les homophones est/et (et parfois aussi de désinences) et par là-même, un problème de discrimination auditive.

Ces remarques liminaires énoncées, nous allons étudier les erreurs plus en détail.